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  • 711 livres

    1. Type: livre Thème: menaces idéologiques, la cité foudroyée, épidémies, guerres futures 1 Auteur: François LEONARD Parution: 1912
      Scrells et Villiers, deux biologistes, dont l’un spécialisé dans l’étude du " microbe de la  mort ", se dirigent vers Londres à bord du paquebot «l’Alexandria». La vision de la cité en ce 22ème siècle est terrifiante. D’abord apparaît:
      "L’ulcère de son agglomération. Partout, le carbone, le phosphore, l’acide sulfurique, vomis par ses cheminées, tuaient le rire enfantin des fleurs, couvraient les feuilles de poussières malades, de déchets corrosifs, et empoisonnaient, en un mot, l’âme divine du printemps."
      Puis, l’industrie humaine et la pollution:
      "Partout, la mécanique, la vapeur, l’électricité, les Forces se bousculaient; partout, on entendait gronder les meules, rouler le tonnerre des bielles, siffler les courroies, exploser la matière sous le choc sourd des lourds marteaux-pilons; partout, s’écrasant les unes contre les autres, les usines, comme d’horribles monstres accroupis, pendaient leur visage sinistre vers le bonheur fuyant de l’eau."
      Les quartiers riches établissent enfin un tel contraste avec les docks que le Londres de ce siècle futur ressemble comme deux gouttes d’eau à son frère de l’ère victorienne. Les mêmes crispations sociales se font jour, comme l’existence d’une masse prolétarienne écrasée sous le poids des trusts, notamment celui de Perkins,  roi du radium:
      "Ah! Combien significative de l’écrasement physique et moral subi, depuis des siècles, sous l’entassement prodigieux, magnifiques et cependant homicide des grandes forces sociales! Combien tragiquement révélatrice de l’exigence des trusts, mangeurs de chair humaine! Tout ce qui grouillait là, dans les repaires du vice et du crime, avait autrefois travaillé sur la rive droite, dans l’enfer des usines, s’y était usé, déformé, lassé, perverti."
      Pourtant le cours de l’histoire a plutôt été favorable à l’Angleterre. Une nouvelle guerre contre l’Allemagne est en passe de se terminer à l’avantage des Britanniques, grâce à des engins de mort hautement techniques:
      "Sous l’attaque des flottilles d’aéronefs armés de fantastiques projecteurs d’énergie, les centres industriels de l’Allemagne, un à un étaient incendiés, broyés en l’étau des forces émises par le vainqueur, ou déchiquetés à distance par l’infernale téléaction des appareils Wing."
      L’armée, démobilisée a pu prendre ses quartiers de repos à Gillingham, ville voisine et adversaire économique malheureuse de la grande capitale anglaise. La présence de soldats en ce lieu va s’avérer être une pièce essentielle dans les conflits sociaux émergeants. Entraînée par les leaders syndicaux, Samfery et Graven, soutenue par la CGT internationale, la foule des prolétaires , à l’occasion des élections proches, réclame une chambre plus libérale . Le message, ponctué par quelques défilés, n’a pas été entendu par le Président Dickinson, à la solde du magnat Perkins.  
      Lorsqu’échouent des tractations devant desserrer le carcan de la répression sociale, les défilés se font émeutes, les émeutes, révolution. Les hordes, sous la conduite de Samfery, envahissent les lieux d’argent. La grève est générale, les banques pillées, la Bourse mise à sac. Plusieurs charges de cavalerie se brisent sur la détermination des pauvres de WhiteChapel:
      "L’armée requise, impuissante à arrêter sans effusion de sang la marée montante de ces hordes, les regardait passer, apparemment paisibles, de rue en rue, de carrefour en carrefour, comme des masses d’encre et de boue, comme des alluvions gonflées de futurs cataclysmes, comme de sombres et tragiques caravanes rampant sous le poids formidable de leur destin. De tous côtés, les halls rougeoyants des fabriques, encore embués des brouillards malsains du travail, déversaient en silence leurs avalanches d’hommes."
      La bourgeoisie, sentant tourner le vent de l’histoire, coopère en un premier temps avec les prolétaires pour tirer son épingle du jeu. Le président Dickinson, avec  d’autres magnats, désertent la capitale pour se réfugier à Gillingham. Perkins, homme dur et sans scrupule, avait envisagé de faire tirer sur la foule au canon avec l’aide du croiseur formidable "Algoria". Ce plan échoua, les marins de l’Algoria fraternisant avec la foule (prémonition de l’auteur qui anticipe sur la véritable histoire du " Potemkine " ?) Devant cet échec, il parvient à canaliser une partie des émeutiers dans un quartier bas de la ville et, faisant ouvrir les vannes, les y noya comme des rats. La rage des prolétaires ne connut plus de limite, la révolution fédérant toutes les énergies - surtout à l’annonce de la mort de Samfery - ils renversèrent le gouvernement capitaliste pour y établir un Comité de Salut Public: Londres venait de tomber aux mains des insurgés:
      " Kensington, Bayswater et Camden-Town avaient été pillés et dévastés. Puis le feu avait été mis au Parlement. En ce moment même, au coeur de la Cité, la bourgeoisie, d’accord avec la plèbe, pillait les banques particulières et incendiait les locaux des journaux conservateurs "
      Parallèlement aux émeutes, se déroule une autre tragédie: celle des épidémies. Le laboratoire de Villiers, où il se livrait à l’étude du " microbe de la mort ", sorte de cocktail bactérien éminemment dangereux, a été la proie des flammes lors des émeutes. Les bactéries ne périrent pas dans le feu et se répandirent dans la population. De nature endémique au départ, l’épidémie n’inquiéta que Scrells et Villiers, les autres savants et médecins étant occupés par les émeutes. Mais avec les désordres et la malnutrition, elle devint explosive:
      "Déjà la nourriture se faisait rare; et autour des maigres victuailles arrachées à prix d’or à l’égoïsme des terriens, la férocité des appétits criminels se déchaînait. A Uxbridge, les Chinois armés de stylets avaient poignardé, la nuit une partie de la population indigène. Les habitants qui avaient pu échapper au massacre s’étaient sauvés vers les villages voisins et cachés dans les bois, en attendant l’arrivée des secours promis de Northampton."
      Les révolutionnaires, vainqueurs sur le terrain, eurent un tout autre ennemi à combattre, insidieux et terriblement présent, décimant les rangs des prolétaires, ce que n’avait réussi à faire les capitalistes. La Cité présente un visage sinistre:
      " Décembre vint... Dans les palais, parmi la gloire éteinte des siècles disparus, les fantômes de la douleur erraient comme des apparitions de légende. A Hyde Park, des corps squelettiques, pâles et grelottants, tordus en des spasmes hideux, s’écroulaient, tels des troupeaux de forces vaincues, dans la fraîcheur de l’herbe. Puis ce fut la neige... A gros flocons, elle recouvrit tout de son linceul.... Dans les rues, les cortèges de la mort se suivaient comme de longs chapelets noirs sur son blanc tapis silencieux. "
      Une aide internationale s’organise, impuissante à enrayer le fléau. Scrells, Villiers, Perkins ont été tués. De loin, Dickinson envisage, la mort dans l’âme, de cautériser les deux plaies - sociale et physiologique - à l’aide de l’armée basée à Dillingham, ce qui, entre autres avantages, permettra à la cité concurrente de Londres de rejouer un rôle de premier plan dans l’histoire de l’Angleterre. Il fut décidé d’éradiquer par le fer et le feu toute la racaille révolutionnaire:
      " Exactement sous eux, et à cinquante mètres à peine du sol, fuyait le vol ondulé des yarsques triangulaires, armées de glouses métalliques qui se soulevaient et s’abaissaient tout à tour d’un mouvement rythmique, et ressemblaient, vues ainsi, à d’affreuses pattes d’insectes géants. Derrière la flottille des yarsques, venaient, en groupe, les sphères Pooks, lourdes et lentement tournoyantes, avec leurs yeux superposés de lentilles violettes, les fuses à radium, verdâtres, anguleuses, allongées, telles des phasmes; les gyroscopes et les barques sinéliennes avec leurs projecteurs; les aéroplanes Wing et la foule sautillante, déjà toute hérissée d’étincelles bleues, des spirigraphes. "
      Le massacre s’arrêta lorsque Londres ressembla  à un champ de ruines abrasé sur lequel ne souffla désormais plus que le vent :
      " Au nord, du côté de Woodham Ferris, tout un campement de réfugiés, d’environ 50000 personnes, avait été à la fois brûlé et englouti en une crevasse de la terre; les cuirassés aériens, au moyen de leurs téléprojecteurs, y avaient utilisé une force telle que, en moins d’une minute, le sol avait fait place à l’abîme, et qu’en ce cataclysme, la vie humaine, telle une poussière insignifiante tourbillonnant en un incendie gigantesque, avait disparu à jamais. "
      Un récit étonnant où le pire côtoie le meilleur.  Le pire, un style qui se veut " épique " et qui souvent n’est qu’amphigourique, une volonté de démontrer que le bien ne peut sortir d’une justice populaire même si, par ailleurs, elle est justifiée. D’ailleurs, Dieu ne s’y trompe pas, qui envoie ses anges exterminateurs pour achever ce que les gens de bien n’ont pas réussi à accomplir. Le meilleur, la description de cette Londres du futur, impressionnante de puissance avec une imagination qui nous rend concrètes toutes les armes diaboliques et pas très éloignées de celles qui existent réellement, enfin cette prescience d’une révolution urbaine à venir qui part du désir de justice sociale jusqu’aux exactions ouvrières, telles qu’elles se développeront dans la véritable Russie tsariste de 1917.

    2. Type: livre Thème: épidémies, savants fous et maîtres du monde Auteur: Bob SLAVY Parution: 1935
      Le docteur Athanase Tigraphos rencontre le jeune ingénieur Hugues Debent pour lui faire une mystérieuse révélation : dans quelques jours, pour différentes raisons, l’humanité entière sera réduite à néant par lui, Tigraphos :
      " Nous ne voulons retenir aujourd’hui que les (= causes) deux principales : Ce sont la surpopulation de l’Europe centrale et le partage défectueux des masses humaines sur la terre, car ce n’est pas la place qui manque sur notre globe, mais surtout l’esprit d’équité pour assigner à chacun la place et la possibilité de vivre confortablement. Le poison nationaliste, régnant en maître dans tous les Etats soi-disant civilisés, mettant obstacle au bon vouloir de ceux qui voudraient remédier à cette injustice, j’ai résolu, moi, d’opposer à ce même poison un contre-poison purificateur."
      Il confie à Hugues, jugé sur sa bonne mine et ses compétences, un antidote puissant qui devrait le prévenir, lui et les siens, contre le mal qui va s’abattre sur la terre. Bien que ne connaissant pas Tigraphos mais subjugué par son charisme, voire hypnotisé par le savant, Hugues accepte le médicament.
      Il n’est pas le seul à être sauvé puisque Tigraphos, dans un  souci de " purification " prévoit la survie d’une nouvelle société constituée par des êtres neufs choisis par lui et son contremaître, Haller, pour en faire le noyau d’une nouvelle civilisation dont il deviendrait le maître absolu.
      Le cataclysme a lieu : les êtres humains meurent en quelques heures,  frappés par une espèce de peste foudroyante qui a la délicatesse de réduire les cadavres en  poussière :
      " Et le fléau franchit les mers, s’infiltra dans les recoins les plus éloignés de la terre et sur toutes les îles, n’épargnant ni âge ni couleur de peau. Les immunisés virent, avec épouvante d’abord, avec tristesse ensuite leurs concitoyens tomber comme des mouches. Les corps, à peine tombés, se réduisaient rapidement à l’état de poussière, ce qui évitait aux survivants la peine de les inhumer (…)
      Les vêtements devenaient flasques, et, après une heure tout au plus, ne contenaient plus qu’une poussière fine et jaunâtre. Selon les constatations des médecins, en suite d’autopsie, la mort survenait par décomposition du sang, c’est-à-dire par étouffement intérieur, ainsi que cela a lieu dans les empoisonnements par oxyde de carbone. Aucune des victimes ne se doutait de sa fin imminente –le poison agissait trop vite. – Quant à la décomposition rapide des cadavres, on ne pouvait en expliquer la cause. "
      Hugues, par l’entremise de Haller, est chargé d’organiser la société survivante N°1, celle d’Algarve, au Portugal. Avec ses parents et sa fiancée, il s’attelle à la tâche. Incidemment, il apprend qu’un autre groupe s’est installé près de Los Angeles, en Californie et que le Maître a fondé sa capitale à Oahoa, dans les îles polynésiennes. Au bout d’un certain temps, Hugues est mandé par Tigraphos.
      Il se rend à Oahoa par le moyen d’un avion remis en exploitation. Il atterrit dans une île paradisiaque, aux bâtiments magnifiques, constructions réalisées autant en style byzantin que romain. L’influence musulmane et orientale s’y fait sentir puisque pièces d’eau, jardins intérieurs, puits de lumière, parcs ordonnés et piscines y abondent :
      " L’ensemble formait un amalgame de tous les styles régnant dans les pays maintenant déserts. L’entrée unique et monumentale, située sur le côté ouest, était accessible par un large pont de marbre blanc à balustrades finement sculptées. Elle était flanquée de deux minarets en pierre blanche reliés entre eux par une coupole de " Kouba " arabe, sous laquelle passait le chemin débouchant du pont.
      L’un des minarets devait abriter un corps de garde à son rez-de-chaussée, l’autre le logement du concierge. La porte d’entrée était constituée par une forte grille en fer forgé et sculpté. En franchissant cette porte on débouchait sur une grande esplanade carrée au fond de laquelle se dressait un bâtiment de style florentin, -le futur hôpital et laboratoire modèle.
      A gauche de l’entrée s’allongeaient les édifices d’un "Gymnase ", de style grec antique, avec ses dépendances pour la natation aboutissant au lac nord. A droite et séparé de l’esplanade par le canal transversal, s’élevait l’édifice massif du " Harem ", auquel on accédait par un pont semblable à celui de l’entrée. "
      Après une troublante entrevue avec le Maître, ancien médecin, celui-ci révèle à Hugues le caractère hermaphrodite de celui-ci: Hugues est en réalité une fille mal formée! Une petite opération corrigera cette bizarrerie de la nature. Hugues accepte de la subir. L’opération réussie, " Huguette " prendra place dans le harem océanien du Maître, composé de :
      " filles fort jolies, de bonne maison et, en partie même, de haute lignée. Il y avait là des demoiselles bien élevées provenant des familles de riches industriels et de financiers, des vedettes de l’écran et du théâtre, des "girls" de profession et des acrobates de renom. Choisies avec un soin méticuleux parmi les plus saines et les plus robustes, toutes étaient parfaites de corps et de visages et certaines avaient des charmes tout particulier. "
      Soumise à un rituel compliqué de type sado-masochiste, Huguette subit les assauts de la baguette de la " Kadine " Adidjé :
      " Sur un signe de la Kadine, les servantes, deux robustes femmes dayacks, saisirent la jeune fille et, malgré sa vive résistance, l’étendirent sur le socle à lavages, en lui fourrant une pile d’oreillers sous le ventre. Puis, tandis que l’une lui maintenait les bras et l’autre les jambes écartées, Adidjé, prenant une souple cravache de cuir pendant à sa ceinture, signe extérieur de son autorité, se mit à fouetter ses fesses saillantes et rebondies. "
      Elle l’initie à des cours de danse compliqués et pervers qui dévoilent tout de son intimité, aux sports équestres à cru sur le cheval, à la gymnastique dépouillée et vigoureuse des anciennes spartiates. Rien ne lui est épargné, ni les coups de brosse sur ses fesses nues, les coups de verge sur le sexe et la poitrine (remodelée artificiellement), ni les entraves compliquées qui crucifient encore davantage un corps déjà supplicié. Elle s’adonne aux joies du saphisme et de la pédophilie à la grande satisfaction du Maître qui célèbre en ce harem la création de son nouveau monde " purifié " :
      " Comme beaucoup de Turcs et pas mal de Grecs, Tigraphos était un adepte passionné des pratiques homosexuelles. On ne s’étonnera donc point qu’il eût entrepris de se faire dresser un certain nombre de " Sian Kon ", ainsi que les nomment les Chinois. Ce sont des jeunes gens qui, depuis leur âge tendre, sont soumis à certaines opérations et certaines pratiques qui les rendent aptes, plus tard, à jouer le rôle de femmes auprès de leurs adorateurs. "
      Les jours se succèdent en chants et danses érotiques, tout confits en sucreries et plaisirs raffinés avec, parfois, la joie de pouvoir servir le Maître plus concrètement.
      Huguette,  amoureuse de Tigraphos enchanté par de si louables dispositions,  devient la " première épouse " avec rang de commandement sur les quarante autres, ainsi que sur tous les esclaves, eunuques, femmes chinoises, éthiopiennes, océaniennes, arabes, etc. qui servent la race blanche " élue ".
      Le maître s’enferme dans ses jeux érotiques jusqu’à couper les ponts avec les autres groupes américains et portugais.
      Le père Debent, ancien colonel, resté en Algarve et mécontent d’avoir vu disparaître son fils en Océanie, sans nouvelles de lui et mis au courant de l’existence du harem, entreprend une expédition afin de libérer les " malheureuses esclaves " et d’établir la vraie démocratie. Mal lui en prend. Arrivé à bon port, se présentant devant Tigraphos, le colonel doit admettre sa défaite. Bien peu de jeunes femmes acceptent de le suivre et surtout pas Huguette, enchantée par sa nouvelle vie. Ce qui amènera sur les lèvres du Maître cette expression désabusée :
      " Voilà bien l’ingratitude humaine. Je les débarrasse de leur vermine et eux ils viennent m‘escamoter mes femmes. "
      Un roman-catastrophe alibi dont le seul but est de nourrir les fantasmes sado-masochistes de l’auteur (et du lecteur), charriant à l’arrière-plan l’idéologie habituelle à ce genre d’ouvrage : réactionnaire, raciste et xénophobe. La domination radicale du mâle sur la femme, la dénégation de la raison humaine, la dictature d’un tyran d’opérette, d’autant plus insensible à ses sujets qu’il prend plaisir à les torturer, rend ce livre pénible à lire. Celui-ci n’appartient au genre que par accident.

    3. Type: livre Thème: guerres futures 1 Auteur: le lieutenant-colonel R. de D. Parution: 1913
      Le « Partage de l’Allemagne » est une réponse au « Partage de la France », paru un an auparavant. Prédisant comment l’Etat français sera aboli, le pays dépecé et intégré au «Gross Deutschland ».  Le lieutenant – colonel R. de D., dont le sang ne fit qu’un tour  à cette lecture, s’est senti une âme vengeresse. « Finis Germaniae » sera son mot d’ordre. A travers une approche rigoureuse – dit-il - , il montre à son tour le processus de mise à mort de l’Allemagne par une guerre rapide, joyeuse et enthousiaste.
      Son récit ne comporte aucune scène de carnage, ni manœuvres politiques, ni croc-en-jambe diplomatiques,  ni revers bleu - horizon.  C’est par une alliance franche et cordiale entre les membres européens (en gros toutes les nations sauf celles de la Triple Entente) que, par la « Furia Francese », à l’aide de généraux remarquables s’appuyant sur des soldats prêts à mourir pour la patrie dans la joie, que les victoires s’accumulent sur terre et sur mer, conduisant tout droit vers Berlin. Partout des peuples heureux d’être débarrassés des Prussiens, en tous lieux des soulèvements populaires contre les oppresseurs teutons, partout des accueils chaleureux pour les libérateurs –même dans certaines régions autrichiennes. Des faits ?
      L’organisation déficiente de l’ennemi ajoutée à son orgueil qui, attaquant le long des frontières de l’Est sans préparation, sûr de remporter une victoire aisée sur des Français en décadence, rate d’emblée son entrée en guerre. A cette illusion répond notre appareil militaire, parfaitement ordonné, parfaitement réglé, qui achemine dans l’ordre nos soldats sur le front, avec des armes nouvelles :
      « Ces petites flèches étaient en fil d’acier écroui, d’une longueur de dix centimètres, d’une épaisseur de 1millimètre, très pointues d’un bout, aplaties de l’autre pour former deux petites ailettes hélicoïdales qui, en tombant, devaient faire tourner la flèche afin d’orienter sa pointe vers la terre. Les essais avaient démontré qu’une  de ces flèches, parfaitement droite, bien pointue, bien écrouie, tombant d’une hauteur de 800 mètres, était capable de traverser un homme de part en part. Enfin le poids de l’unité était de 1 gramme. Un avion de puissance moyenne pouvait donc emporter 150 000 de ces fléchettes dont le poids total était de 150 kilogs (sic). Quant au procédé de jet, il consistait à les laisser tomber régulièrement à l’aide d’un semoir tenu à la main. »
      Pendant que deux régiments français se font tailler en pièces pour contenir la ruée de l’ennemi, le reste de l’armée s’enfonce comme un coin en Lorraine et en Alsace, aidés par les sabotages des autochtones, qui n’ont jamais digéré la défaite de 1871 :
      « Ce fut pendant deux jours,  une lutte épique, où tous, depuis le chef placé au plus haut degré de la hiérarchie jusqu’au dernier troupier, se défendirent sans compter et firent preuve de l’abnégation la plus pure et de l’esprit de sacrifice le plus complet. (…)  Résolus à mourir plutôt que de manquer à la mission qui leur avait été confiée : donner au reste de l’armée le temps d’arriver, ils ne cédaient le terrain que sous l’effort des baïonnettes infiniment plus nombreuses et après avoir infligé à leurs ennemis des pertes qui leur faisaient chèrement payer les succès partiels obtenus. »
      Les Français culbutent l’ennemi et le poursuivent au-delà du Rhin, cavaliers et fantassins se montrant d’une redoutable efficacité.Les autres pays participent à l’assaut. La Russie, qui guigne vers Berlin, en espérant augmenter son glacis protecteur. L’Angleterre, dont le sens de l’équilibre est bien connu, qui pense développer sa domination économique en Atlantique. L’Espagne qui lorgne vers les colonies d’outre-mer. Les pays baltes qui ont maintes fois soufferts des exactions prussiennes et autrichiennes. Dans le Sud, l’Italie, qui n’arrive pas à se forcer un passage dans les Alpes, et dont la flotte, immédiatement anéantie, ne pourra acheminer les renforts de ses colonies d’Afrique du Nord. L’Autriche elle-même, embarrassée par la Hongrie, et dont les intérêts sont divergents de ceux de la Prusse :
      « Au bout de ce délai de 30 jours, non seulement les Allemands étaient battus à l’ouest ; mais sur la frontière de l’Est le danger devenait pressant, car trois armées russes étaient sur le point de déboucher de la région de Varsovie. Et ce n’était pas l’Autriche qui pouvait être d’un grand secours à la Prusse. Dès le début de la guerre, elle avait eu les plus graves désordres à réprimer dans l’intérieur. Tous les peuples divers qui la composent, toujours en bouillonnement, toujours bataillant pour la conquête de leur autonomie, avaient cru enfin l’heure venue, de la liberté.
      La Bohême s’était proclamée indépendante. Le drapeau tchèque avait été arboré à Prague. A Trieste, le préfet autrichien avait été massacré. Partout, dans les nations de races slaves : Ruthènes, Tchèques, Slovènes, Croates, on acclamait le nom de la Russie ; il n’est pas jusqu’à la Hongrie qui ne témoignât d’une tiédeur inquiétante… »
      La lenteur de la mobilisation russe qui aurait pu apparaître comme un avantage pour l’Allemagne, se retourne contre elle lorsque, harcelée d’un côté par les rapides troupes françaises, elles tombent dans la nasse russe enfin tendue du côté de Berlin.
      Si, sur terre, les victoires s’accumulent, sur mer, la confrontation tourne très vite en faveur de l’Alliance. Les Anglais, déjà maîtres en Atlantique, se faufilent en mer du Nord et en Baltique, pilonnent les villes hanséatiques. En Méditerranée, la partie est jouée : les Italiens, à genoux,  leur laissent toute la mer à courir :
      « Certes les adversaires s’étaient bien défendus ! Ce fut, durant des heures, une vision d’enfer dont nul peintre, plus tard, ne pourra rendre l’effroyable et tragique beauté. Ceux qui y assistèrent conserveront toute leur vie, la vision de ce spectacle fabuleux: des énormes tourelles crachant, vomissant le feu ; des canons énormes de 370 et de 420 dont les détonations étaient si monstrueuses qu’elles secouaient la mer et faisaient trembler les masses des navires ; des projectiles énormes arrivant en trombes dévastatrices et éventrant les cuirasses les plus épaisses ;Des gerbes d’eau fusant jusqu’à des hauteurs insensées et retombant en tornades parmi les marins excités. Puis, au milieu de tout cela, de ce cataclysme, des sous-marins surgissaient des gouffres, apparitions fantastiques et soudaines, pour replonger plus loin. Il en fut qui ne reparurent jamais ! »
      D’ailleurs la France, fille aînée de l’Eglise, sera aidée par la providence. Au début de la guerre, lors d’une audacieuse action aérienne, une bombe, lâchée au-dessus de la demeure du Kronprinz, tuera celui-ci, démoralisant  les Allemands dès l’ouverture des hostilités. Finalement, lorsque les belligérants entrent dans la capitale du Reich, il n’y plus d’armée, plus de chefs, plus d’Allemagne. Par le nouveau traité de Berlin, le pays sera démembré. Ne subsistera que la Thuringe en tant que pays autonome. Le Bade-Wurtemberg ira à la France, l’Angleterre s’octroie les anciennes colonies allemandes de l’Est Africain, le Danemark récupère le Schleswig-Holstein, la Belgique étend son territoire jusqu’au Rhin, l’Espagne acquiert l’Ouest africain, enfin les frontières de la Russie passeront au-delà de Berlin et de l’Elbe moyen.
      L’Italie sera bridée, avec interdiction de construire une flotte de guerre comportant plus de dix cuirassés. Les états balkaniques, pour leur aide précieuse, se partagent Bosnie, Herzégovine, Slovénie et Croatie. L’Autriche, réduite de moitié, portera en germe, grâce à la diplomatie française, de futures dissensions avec ce qui reste de l’empire déchu, qui empêchera à jamais une nouvelle union avec la Prusse.
      Ce texte constitue un témoignage intéressant, à travers une guerre conjecturée, de l’inconscient collectif français. Ce que la France aurait souhaité met davantage en relief la tragique distorsion d’avec la réalité de la guerre de 14-18, celle qui enverra mourir des millions de jeunes dans les culs de basse fosse que forment les tranchées de Verdun et d’ailleurs, sous le commandement d’incapables somptueux, tels que les Gamelin, purs produits d’une nomenklatura militaire « fin de race » semblables, dans leur criminelle insouciance,  aux officiers prussiens bouffis de morgue, dans leurs bottes et sous leur casque à pointe.

    4. Type: livre Thème: menaces technologiques, disette d’éléments Auteur: V. GAMMA (aucune référence) Parution: 1937
      La France du futur jouit d’un statu quo politique, la bourgeoisie au pouvoir s’accommodant à la fois de périodiques révoltes prolétariennes et de la modernité radioélectrique :
      « Mais, s’informeront non sans quelque timidité les psychologues de l’avenir, qu’était devenue dans tout ce hourvari la mentalité française, qu’étaient devenues ces qualités de bon sens, d’équilibre gai, d’intelligence, d’ardeur au bien, cet amour du beau travail qui caractérisaient autrefois les gens de notre pays ? Ces qualités, euh ! eh bien, avouons-le, le rouge au front, elles étaient quelque peu reléguées aux vieilles lunes sinon foncièrement reniées. La France maintenant était un pays sommaire . Quarante millions d’individus avaient un petit poste de T.S.F. à la place de la tête et du cœur et vivaient ainsi. »
      Les postes de T.S.F. qui crachottent leur bruit et  leurs messages débilitants ont trouvé un accueil dans tous les foyers et dans tous les domaines. Le bruit universel, le fléau musical, empêche dorénavant les gens de penser, de lire, de vivre :
      « Chaque restaurant, chaque gargote avait au moins son poste. Vous caressiez votre amie, l’été, au fond d’une tonnelle perdue dans la campagne, lorsque sévissaient, telle la plus imprévue des douches, les redoutables ondes. A 2.000 mètres, au sommet de l’Alpe, vous encaissiez de gré ou de force la boîte à musique. Très loin en mer, les chalutiers déversaient à la ronde les ritournelles infernales. Il y avait belle lurette que des âmes charitables en avaient doté les postes de police, les asiles de nuit, les cellules de prison. Les églises naturellement n’avaient pas été épargnées. »
      La réaction se mit en route en la personne de Léonidas Graphigny qui, excédé du bruit insupportable vécu dans son H.L.M., fédéra autour de lui quelques personnes de bonne volonté et deux  inventeurs dans le but de fonder « la Conspiration du silence. »  Les conspirateurs devront tout à Caprica l’ingénieur, et Trinitrol, l’inventeur de la « boîte à silence » qui contient « la poudre S. », laquelle, une fois enflammée, annihile pour quelques heures toute manifestation sonore des ondes radioélectriques.
      Caprica, de son côté, a découvert deux autres applications intéressantes : la Réversibilité Immédiate des ondes et leur Captation Systématique. La Réversibilité Immédiate permettrait aux mécontents de dire immédiatement son fait à l’émetteur d’un message et le forcer à admettre les conséquences désagréables de celui-ci. Par la « Captation Systématique », les ondes pourraient être « noyées », détournées ou annihilées de manière durable.
      Avec ces prodigieuses découvertes, les conjurés élaborèrent un plan d’action qui consista à détourner les messages envoyés par la T.S.F. Ils truffèrent  les discours politiques de pitreries, les contes pour enfants d’obscénités, les textes littéraires de jurons et les conseils publicitaires de fausses informations.  Au bout de peu de temps, un malaise social se fit jour, qui s’amplifia jusqu’à susciter des litiges que l’on demanda au Tribunal de Lahaye d’arbitrer :
      « On vivait dans un scandale perpétuel et grandissant. Les honnêtes gens ne portaient plus sans les plus vives appréhensions la main sur les boutons de leur poste de T.S.F., s’attendant au pire. Très vite – et on les comprendra - ils préférèrent y renoncer d’eux mêmes et plus d’un résolut la question et mit fin à ses angoisses en défonçant d’un coup de pied définitif la maléfique boîte à musique. (…) En une semaine, les six plus grosses fabriques d’instrument de T.S.F. firent des faillites retentissantes et leurs valeurs boursières tombèrent à rien. D’autres ne tardèrent pas à suivre cet exemple et ce fut un fiasco général. Les boutiques des brocanteurs s’encombrèrent de postes récepteurs – on ne les accepta plus bientôt que pour le bois des caisses à des fins de chauffage – et bientôt même personne n’en voulut plus. »
      L’on employa tous les arguments pour répondre à l’attaque envers les ondes sonores . L’on invoqua le salut de la patrie, le bien de l’humanité, la défense de l’esprit français, la disparition d’un patrimoine artistique. L’on alla même jusqu’à arrêter les présumés coupables sans que l’Etat ne put prouver nettement leur responsabilité dans la dégradation du bruit. En conséquence, les désordres sociaux s’amplifièrent inexorablement, provoquant la diminution de la vente des appareils de T.S.F. ou la mise en chômage de fabricants de postes émetteurs. On alla même jusqu’à piller des magasins de musique. Lorsque le gouvernement voulut réagir, il était trop tard. Ses ordres lancés à la police et à l’armée étaient gauchis, pervertis, détournés, déformés, annihilés. Alors des émeutes spontanées libérèrent les conjurés et les mirent au sommet de l’Etat. Tous les opposants au silence furent déportés dans des régions sans émetteurs, sans bruit, sans musique, dans des « zones de silence ».
      Léonidas Graphigny proclama la naissance de la « Dictature du silence » et entreprit de suite l’élaboration d’une réglementation contre le bruit, dont l’application prendra du temps, tellement profond fut le mal qu’avait provoqué le fléau radioélectrique.
      Une nouvelle sous forme de pamphlet, éditée à compte d’auteur, dans laquelle, tout en dénonçant les excès des médias (bien perceptibles aujourd’hui ), l’auteur prend une posture conservatrice égale à celle de Georges Duhamel dans les « Scènes de la vie future».

    5. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Marc GOUVIEUX Parution: 1914
      Les carnets de vol du lieutenant Saint-Bris et de son mécanicien l’Alsacien Kaufmann forment la trame de l’ouvrage ; notes prises au jour le jour par un pilote, chef d’escadrille, durant la première Guerre Mondiale, et qui relatent sa lutte contre les éléments, les impondérables techniques,  ou les Allemands envahissant la France. Sa mission consiste à récupérer des informations pour en informer les lignes arrière ou à bombarder des zones stratégiques, pour retarder la poussée des Prussiens.
      D’une audace folle, à l’instar de ses autres amis pilotes, le regard fixé sur la ligne bleue des Vosges, animé d’un patriotisme ardent, Saint-Bris construit à lui seul l’épopée moderne.Parti du territoire de Belfort, il survole l’Alsace occupée et ses villages chatoyants, il suit de là-haut les manœuvres des zeppelins teutons qui souillent notre beau ciel d’azur en y semant la mort et la destruction. Ses vols l’amènent, en un premier temps, avec ses mitrailleuses, à faire le coup de feu contre trois zeppelins. L’un sera immédiatement abattu et s’écrasera dans la plaine d’Alsace. Les deux autres prendront la fuite. Lors de sa poursuite, l’avion de Saint-Bris sera criblé de balles, lui imposant un atterrissage forcé dans une des clairières de la forêt de Boerenwald. Ce qui lui vaudra l’aide des autochtones, notamment celle de la belle Colette de Tichemont avec ses yeux bleus :
      « Soudain la porte du fond de la salle de billard s’ouvre, et dans l’encadrement une silhouette fine et élégante de jeune fille apparaît. Est-elle jolie ? je ne sais. Mais l’ensemble est séduisant, fait de grâce, de jeunesse, et de ligne aristocratique.
      -Colette, dit M. de Tichémont, qui regarde comme moi s’avancer la jeune fille, je te présente le lieutenant  Saint-Bris, officier aviateur, arrivé tout droit de France en descendant du ciel !
      -Monsieur, répond une voix charmante, à ce double titre soyez le bienvenu.
      Et la poignée de main est à la fois douce et énergique, tandis que les yeux bleus sont résolus et vaillants comme le sont les yeux d’Alsacienne…. »
      Ceci lui permettra d’aller au bout de sa mission, soit de faire exploser un  pont, privant les envahisseurs  d’une grande voie d’accès en territoire français. L’avion réparé, Saint-Bris reprendra l’air difficilement, se délestant de tout poids superflu :
      «L’avion semble monter péniblement. Les sapins se précisent. Ils émergent du brouillard. J’ai l’impression rapide que je ne passerai pas, que nous allons nous écraser dessus…. Brutalement, je pousse à droite et à fond la direction et le gauchissement. L’avion projeté sur l’aile fait presque un demi-tour sur lui-même. Mais devant moi, dans la nouvelle direction, j’ai vu une trouée entre deux sapinières moins hautes. Je pique dessus en cabrant désespérément. Nous passons juste. J’aperçois, en me penchant, le train d’atterrissage qui frôle la cime des sapins tandis que les roues continuant leur mouvement du départ, tournent dans le vide ! »
      Une deuxième mission l’incitera à poursuivre des zeppelins jusqu’en pays ennemi. Avec une folle témérité, il s’engage au-dessus de la gare aérienne de  Friederishafen sur laquelle il laisse tomber des bombes incendiaires :
      « Du côté des ateliers pour lesquels j’ai gardé ma dernière série d’explosifs, j’ai eu une agréable surprise. Le résultat a dépassé mes prévisions. Mes premiers projectiles sont tombés sur des toitures vitrées, faisant plus de bruit que de mal, semant plus d’épouvante que de mort, autour d’eux. Mais à ma profonde stupéfaction, j’ai vu tout à coup une fumée noire, épaisse, surgir des bâtiments bombardés. Puis de longues flammes ont apparu. Sans m’en douter, j’ai dû atteindre un des magasins de réserve d’essence et de matières inflammables. »
      Il s’ensuit un énorme incendie qui anéantit un grand nombre de zeppelins. Immédiatement pris en filature  par la chasse allemande, et quoique blessé, il s’en sortira vivant. Ramassé inconscient dans son biplan en morceaux, il sera soigné au lazaret de Mulhouse et chouchouté par de gentilles infirmières, avant de rejoindre son escadrille et son chef, le capitaine Beauchery qui déborde de joie à cette occasion. Son héroïsme et ses coups d’éclats lui valurent une grande renommée et une montée en grade. Le nouveau capitaine répondra à une autre mission de la plus haute importance au moment même où les divisions allemandes furent en passe d’être repoussées du territoire sous la formidable pesée des armées françaises qui reconquièrent l’Alsace et la Moselle. Du haut du ciel, son cœur bat à l’unisson avec celui des «pious-pious » :
      « A ce signal, une clameur formidable, plus formidable encore que la voix des canons, s’élève, clameur sortie de milliers de poitrines hurlantes, redisant à l’envi le mot de «Chargez ! » De tous côtés, ce ne sont que des lignes noires qui se dressent, qui, brusquement, surgissent du sol. Il en sort de partout… des bois de Bezange, de la forêt de Champenoux, des maisons de Moncel, baïonnette au canon, dévalant en une ruée irrésistible vers les bataillons allemands, vers la Seille, tandis que par-dessus la clameur des voix, par-dessus le refrain endiablé de la charge sonné par tous les clairons, monte par bouffées le chant de la Marseillaise, répété par toutes les musiques militaires de la 11 ème  division. »
      Quittant là ses amis, il se met en quête de l’endroit exact où serait installée la base du haut-Commandement allemand, dans laquelle se terrent et les généraux abhorrés, et le Kaiser lui-même. Une mission à haut risque puisqu’il s’agit de survoler à très basse altitude le territoire ennemi. Echappant souvent aux balles  avec son fidèle Kaufmann, qui colmate en plein vol les brèches faites au réservoir d’essence, il mitraille de-ci, de là des véhicules militaires engagés sur la route et s’astreint même à vérifier, en atterrissant, si ses balles ont touché leur objectif. Lors d’une de ces opérations, il constate, à sa grande surprise, qu’il vient de mitrailler et de blesser à mort le Kaiser lui-même :
      « Je cours vers la route où règne le silence. La première auto brûle encore, amas de ferrailles rougies et tordues… Et plus loin la deuxième auto est couchée, éventrée. C’est bien une des Mercédes impériales. Un des conducteurs à casquette ornée des aigles d’argent gît sur la route, l’autre est affalé sur son volant, mort… La mitraille destructrice a fait son œuvre. …Au pied d’un arbre un officier général que je n’avais pas encore vu, est étendu. La tête est très pâle, coiffé du casque à aigles et pointes d‘or. Sur la tunique bleue un filet de sang coule sur les décorations et l’écharpe. En entendant marcher sur la route sa tête s’est soulevée… un vertige passe en moi… Je le reconnais. C’est le Kaiser. »
      La poussée générale se poursuit, irrésistible, par Donaueschingen vers Mannheim, puis  jusqu’au Danube. Et l’empire militaire allemand s’écroule. C’est le jour de l’armistice, le 21 septembre, que l’on retrouvera le corps de Saint-Bris et de son mécanicien, dans leur avion reposant dans un champ avec, autour d’eux, les carnets de vol du pilote qui, plus tard,  fourniront la matière du présent ouvrage. Icare avait donné sa vie pour l’honneur de la France :
      « Or ce même 21 septembre, le jour même où la Victoire poussait de ses ailes l’armée française, la mort frappait brutalement le plus vaillants de nos pilotes militaires, le capitaine Saint-Bris, et son mécanicien Kaufmann. (…) Le capitaine Saint-Bris avait l’air de dormir, assis sur son siège, le volant entre les mains, frappé comme il l’avait rêvé, en pleine lutte, en plein ciel, là-haut, à son poste de combat.»
      «Haut les ailes» est un authentique témoignage des conditions de vie à bord des premiers avions de combat. Le texte clair, sans fioritures stylistiques est d’une lecture aisée. Les sentiments prêtés au héros sont évidemment d’une seule pièce : l’amour de la patrie et la haine de l’ennemi qui nous a volé l’Alsace et la Lorraine, « nos deux sœurs. ». Peu d’éléments dans le corps du récit signalent que nous sommes en présence d’un texte conjectural tant l’effet de vraisemblance s’impose. Quoique nous soyons en 1914, les carnets de vol ne sont pas datés. Le texte s’ouvre sur l’incipit suivant : « Carnets de route d’un Officier aviateur pendant la guerre de 19… » Et comme le héros tue le Kaiser durant un raid aérien, qu’il empêche nombre de zeppelins de bombarder Paris, qu’il détruit la plus grande usine de construction allemande, tous ces faits, étrangers à la vérité historique, nous obligent à classer l’ouvrage dans la thématique des « guerres futures » ou, plus précisément, des « guerres rêvées ».

    6. Type: livre Thème: menaces climatiques Auteur: Victor HUGO Parution: 1986
      " Mais un jour l’océan se mit à remuer ;
      Doucement, sans courroux, du côté de la ville
      Il rongea les rochers et les dunes, tranquille,
      Sans tumulte, sans chocs, sans efforts haletants,
      Comme un grave ouvrier qui sait qu’il a le temps ;
      Et lentement, ainsi qu’un mineur solitaire,
      L’eau jamais immobile avançait sur la terre (…)
      Et tout s’évanouit ; rien ne resta que l’onde.
      Maintenant on ne voit au loin que l’eau profonde
      Par les vents remuée et seule sous les cieux.
      Tel est l’ébranlement des flots mystérieux. "

    7. Type: livre Thème: sociétés post-cataclysmiques 1 Auteur: MORGIN - DE KEAN Parution: 1939
      Jean et Wilfried avancent dans une plaine où l’on devine encore l’influence de l’homme. La France, et plus généralement l’Europe, se trouve à présent dépeuplée en étant retournée à l’état sauvage. Les nations se sont entretuées en se livrant une guerre à outrance.
      Wilfrid, l’Allemand philosophe adepte de la " surhumanité " nitszchéenne, Jean, le Français, vieux et sage, représentent les seuls êtres vivants dans ce paysage hostile. Tout en pérégrinant, Wilfrid se rappelle un passé à jamais disparu :
      " Je ne me plains pas, Jean, je te suis ! Que m’importe d’être là ou ailleurs, maintenant que les buts sont perdus et que les dieux sont morts ! Mais je te le dis : tu te prépares une atroce déception, une souffrance que tu pouvais éviter. Au spectacle que tu verras bientôt, quand nous atteindrons les lieux que tu cherches, tu sentiras avec plus d’âpreté que jamais, la ruine définitive de la vie civilisée et la misère sans espoir de l’avenir… "
      Le paysage lunaire hérissé de fil de fer barbelé les incite à la prudence. Entrant dans un sous-bois, ils rencontrent un vieillard isolé qui les accueille fraternellement en sa retraite. Ancien garde-chasse, à l’écart des bandes errantes qui écument le terrain, il s’est constitué un asile où il subsiste environné des éléments du passé.  Wilfrid et Jean passent chez lui une nuit agréable avant de replonger en enfer :
      " Mais les ruines sont partout ! Mais l’Europe est vide d’habitants ! Tous ceux qui ont pu fuir, ont fui cette terre d’épouvante vouée à la malédiction ! Des émigrés, par millions, sont en Amérique ou au fond de l’Océan. Comme un gigantesque coup de rabot, la peste a passé sur les peuples derrière l’orgie des massacres ; la peste avec le choléra et toutes les hideurs épidémiques qu’on ne pouvait plus enrayer ni combattre. Même, l’horrible lèpre du moyen - âge est revenue ! Quand les groupes humains sont été réduits à d’infimes tribus, la faim les a achevés. Dans certaines contrées on avait perdu jusqu’à l’usage du feu. Et ceux qui se sont suicidés de désespoir ! Et ceux qui sont devenus fous ! Maintenant, partout, la brousse s’étend, les taillis et les hautes herbes gagnent les rues des villes abandonnées. Quelques nomades errent avec de maigres troupeaux, de ci de là, au hasard des pâturages, accueillant les errants à coup de fusil. C’est la loi du plus fort qui règne… Ultima ratio… hominis. "
      Le vieillard leur signale qu’en Bretagne il subsisterait un noyau de civilisation. Les deux compagnons décidant de s’y rendre, croisent d’autres groupes nomades en cours de route. Le paysage se modifie et les traces des violences perpétrées contre la nature se font de plus en plus nombreuses. Ils s’approchent d’une cité réduite à un champ de ruines: c’est Paris. Les décombres recèlent de nombreux dangers, les rues étant parcourues par des Parisiens dégénérés, troglodytes (ils vivent dans les tunnels du métro) et cannibales de surcroît. Leur cheval ayant été abattu par ces déchets humains, ils furent obligés de se réfugier en un endroit sûr pour y passer la nuit :
      " Un salon, enseveli sous la poussière, mais dans le bon ordre des intérieurs rangés, s’ouvrait à droite. Une pendule, aux délicates sculptures d’albâtre, posée sur la cheminée, marquait une heure d’antan. Dans la glace ternie, tous les objets prenaient des formes vagues et fantomatiques. Des peintures montraient des sous-bois dans des cadres dédorés. Un divan conservait parmi ses coussins froissés la trace nette d’un corps. Ils s’arrêtèrent au seuil d’une chambre luxueuse et douillette comme un nid d’amour. Dans le lit, dressé comme un autel, où l’on aurait attendu, parmi le désordre des draps, la vision d’une femme aux chairs blanches, deux espèces de pantins desséchés répétaient la bête grimace, propre aux crânes secs. "
      Le lendemain, ils traquent la faune de la cité en ruine pour venger la mort de leur cheval. A plusieurs indices laissés par les pseudo-primitifs, ils repèrent une tanière souterraine. Prenant place dans une barque, ils suivent les couloirs d’un métro ancien rempli d’eau, aboutissant dans une ancienne station où des reliefs humains témoignent de scènes de cannibalisme. Les troglodytes s’y trouvent avec leurs femmes, assis en rond chantant une espèce de mélopée. Wilfrid désire à tout prix s’emparer d’une de ces femmes. En regagnant leur refuge avec elle, ils constatent à quel point leur prisonnière est marquée et atteinte par la syphilis. Jean commente :
      " Leur déficience physique n’est complètement explicable que par l’influence d’une maladie que je n’identifie pas… Certes la promiscuité du milieu a facilité la contamination générale par l’assouvissement des désirs sexuels. S’agit-il d’une tuberculose à forme variée ou d’un de ces maux inconnus qu’engendra le cataclysme ? (…) - Qu’a –t-elle ? - La syphilis ! C’est le mal qui les courbe sous la même misère hideuse ! "
      Abandonnant la femme, ils poursuivent leur périple en direction de la Bretagne, d’abord par Auvray puis vers Belle-Ile. En longeant la côte, ils aperçoivent des voiliers sur la mer, signes indéniables en ces lieux d’une société organisée.  La vision de champs cultivés les conforte dans cette idée. Après une arrivée délicate et un examen d’entrée serré, ils sont admis au sein de cette société de pêcheurs dirigée par le " Commandant ", un homme obèse mais non dénué de culture. Convivial, il les invite à sa table chez lui où une soirée paradisiaque leur permet de savourer un véritable repas et de faire connaissance avec les deux enfants du Commandant, Romula et Réma.
      Il leur explique les principes qui ont présidé à la mise en place de sa communauté, comment, à force d’énergie, il est parvenu à rassembler des hommes épars pour les remettre  sur le chemin de la technologie. Son seul regret est de n’avoir eu autour de lui que des êtres frustes, incapables de comprendre la grandeur de ses idées. L’arrivée de Jean et de Wilfrid allait combler cette lacune. Peu à peu, les deux hommes se rendirent indispensables et il allait de soi que l’un bientôt s’unirait à Romula et l’autre à Rema. La recherche d’autres sociétés évoluées se poursuivait conjointement, à l’aide d’un récepteur radio sauvé du désastre, pour pouvoir enter en contact avec l’Amérique. Car les Américains, dès le début du conflit, avaient coupé les ponts avec l’Europe, le continent maudit, pour ne pas être entraîné dans sa chute. Les résultats de l’écoute furent décevants : de la musique de jazz, des futilités et des anecdotes leur parvinrent seuls aux oreilles :
      " Les paroles  étaient difficiles à comprendre : l’appareil déformait en nasillements la voix déjà nasillarde du yankee chanteur. Le Commandant inclina la tête vers l’embouchure du pavillon. Plus familier que ses compagnons de l’accentuation américaine, il traduisit par bribes et constata qu’il s’agissait d’une chanson nègre. - Le sentiment artistique des Yankees se satisfait-il encore des naïvetés musicales des barbares noirs, clama Wilfrid ! La sauvagerie est donc partout ? Et Wagner, Mozart, Haydn, Schumann ? Leurs œuvres sont-elles mortes avec la civilisation ? Il cria son mépris comme si le chanteur eut pu l’entendre :- Fourmis, termites, êtres asexués, bêtes moyennes, derniers hommes ! "
      Avec le temps, Jean devint un chef écouté et Wilfrid son adjoint indispensable lorsque , soudainement, un bateau à vapeur se profila le long des côtes bretonnes. Il s’agissait d’un navire commercial américain qui comptait exploiter les restes archéologiques européens. Haxton, le capitaine, et Butler le commercial qui l’accompagnait, eurent d’emblée un contact difficile avec les autochtones. Engoncés dans leur supériorité de gens aisés, ils prennent les indigènes bretons pour des sauvages primitifs et demeurés. Ils voyagent en compagnie de Dolorès, une pure perle des Antilles, épouse de Butler, (en dépit de ses conceptions racistes)  qui fit grosse impression sur Wilfrid :
      " - Je ne me trompe pas, n’est-ce-pas, souffla Jean à l’oreille d’Haxton, Mistress Butler is a coloured woman ? - Yes ! mais ne faites jamais allusion à cette particularité devant le mari ! Le pauvre garçon a assez souffert. Son mariage l’a rejeté de la bonne société, l’a dévoyé, l’a conduit à exercer la… le métier qu’il fait. Il aimait, elle était jolie. Mais n’importe, son grand-père était un nègre. Et vous savez que chez nous… -Les noirs sont donc toujours les parias et les réprouvés de votre société ? -Plus que jamais !"
      Espérant amadouer les Européens avec de la bimbeloterie, les Américains déclenchent leur colère. Le choc culturel en se prolongeant souleva de nombreuses autres questions :
      " La créole, bavarde et candide, se demandait comment les "gentlemen" pouvaient vivre ainsi, privés de tous les agréments de l’existence. Ils n’avaient pas d’appareils ménagers, pas d’eau courante, pas de magasins à vitrine, pas de cinémas. Dans les rues de la petite ville il manquait vraiment les silhouettes d’un tramway ! Comme il devait être triste de vivre dans un pays si arriéré et si inconfortable! "
      Peu à peu l’objet de la quête des Américains se fait plus précis. Il s’agit de rapporter de là-bas des trouvailles archéologiques et notamment la fameuse Vénus de Milo qui vaudrait son pesant d’or outre-Atlantique. Mais, pour cela, il leur faudrait gagner Paris. Ne se rendant pas compte de la difficulté de l’expédition, ils ne purent partir qu’avec l’aide des Bretons qui acceptèrent de les y conduire en échange de produits de première nécessité dont ceux-ci avaient un besoin urgent. Quant à Wilfrid, il prit avec Jean le commandement de l’expédition, le premier à cause de Dolorès qui ne lui était pas indifférente, le second par désir culturel. Le trajet vers Paris s’apparenta à un cauchemar. Les chars à bœufs s’enfonçaient dans les ornières :
      " Au pas lent des bœufs, la caravane avançait sur la grande route, confondue sous la montée des herbes avec l’étendue indécise et fauve de la brousse automnale. Si des fossés et, parfois, des rangées d’arbres, subsistant de chaque côté de la voie, n’avaient constitué un sûr repère, la colonne aurait plus d’une fois perdue sa route. Les bornes étaient sous l’herbe et, souvent, indéchiffrables. Au détour de la piste herbue, la troupe d’hommes, aux courts vêtements ajustés, aux gilets de peau de mouton et aux casaques de cuir, ces guerriers qui encadraient trois lourds chariots traînés par des couples de bœufs, rappelaient tout à coup un cortège de rois Mérovingiens, de ces rois fainéants, d’une même époque de misère et de régression, parcourant la voie romaine, ensevelie comme la civilisation du monde antique."
      Poursuivis par des rôdeurs de brousse qui déclenchèrent une attaque, quelques Bretons y laissèrent leur vie.
      Grâce à Wilfrid, l’expédition se tira du mauvais pas et parvint dans les ruines de la capitale. Dolorès, depuis un bon moment déjà,  était devenue la maîtresse de Wilfrid sans que Butler ne s’en rendît compte. A Paris, le spectacle de la décrépitude et de la mort impressionne fortement les âmes naïves des Américains :
      " La vision de la cité foudroyée troublait les civilisés. Ils avaient lu dans leurs journaux des récits retraçant le lugubre état des villes du continent, mais les descriptions d’imagination, bâties sur le témoignage d’Européens fugitifs ne pouvaient donner une idée de la tragique horreur d’une capitale en ruines. Ils pressentaient obscurément que leur sécurité, leur vie facile de chaque jour n’avaient peut-être pas des lendemains assurés et, pour la première fois, ils doutèrent de la solidité de leur civilisation dont ils étaient si fiers. "
      Ils aboutissent aux monuments tant convoités et campent dans les restes de Notre-Dame. Mais cet endroit, hanté entre tous, suscite les fantômes de l’esprit. Wilfrid, qui se moque des dieux qui ont décrété la chute de l’Occident, fait l’amour à Dolorès à même le sol de ce lieu saint.
      Le lendemain commence la chasse aux trésors. La médiocrité culturelle des Américains ne leur permet pas de distinguer une œuvre d’art authentique d’entre les fausses, au grand mépris de Wilfrid :  
      " - Est-ce aussi vieux que le roi sans tête ? -   Non, la frise provient du palais de Darius, le grand Roi !  - Patron, dit un Yankee, j’ai vu dans un bar de Broadway une céramique dans le goût de celle-ci, mais elle était beaucoup moins écornée et plus fraîche. Vous n’emporterez pas ces vieilles saletés ? Butler sourit, supérieur, de toute sa mâchoire dorée. - Taisez-vous. Vous n’y entendez rien, mon pauvre garçon : cette frise vient du château du grand Marius. "
      Arrive le grand moment, la rencontre avec la Vénus de Milo: Butler est dépité:
      "- Elle est bien abîmée, constata Butler, déçu. Mais il se souvint des dollars promis et songea qu’il n’était pas un amateur mais un homme d’affaires. Il convint, bonhomme : - Enfin, puisque c’est une pièce unique in the world ! Il pensait à part lui qu’il ne donnerait pas deux dollars de ce tronçon ruineux. Sans doute le richissime amateur ferait-il réparer cette bonne femme, à laquelle on poserait des bras, dont l’un, levé dans le geste de la statue de la Liberté, brandirait un lampadaire électrique. Ce serait supportable au bas d’un escalier. "
      Les chars à bœufs, remplis à ras bord de pièces archéologiques, prirent le chemin du retour qui s’avéra être encore plus périlleux que l’aller. Des attaques en provenance d’isolés se succédèrent constamment affaiblissant drastiquement le petit groupe.
      Butler reporta son irritation sur Wilfrid dont il commença à percevoir la complicité qui l’unissait à Dolorès. Arrivés aux abords du territoire breton, une catastrophe immense les attendit : la communauté qu’avait édifiée le Commandant n’existait plus ! Elle avait été totalement anéantie et rasée par des expéditions de pirates en provenance du sud, des Vendéens. Toute la cité, tous les êtres qui leur étaient cher, ainsi que le bateau américain, avaient disparu. Le petit groupe se désintégra à cette nouvelle. Les Bretons survivants en voulurent aux Américains de les avoir entraînés en cette aventure et ils  s’entretuèrent avec vivacité. Butler fut tué de la main de Wilfrid. Au bout du rouleau, les derniers survivants se servirent des trésors archéologiques pour se réchauffer :
      " Les matelots traînèrent les toiles empaquetées, les colis bourrés de paille, tout ce que Butler avait fait emballer, envelopper, avec une attention de collectionneur. Un premier paquet de peinture, que les jeunes barbares déplièrent pour qu’il prît feu avec plus de facilité, fut jeté dans le brasier. La flamme rouge lécha puis mordit la toile peinte qui s’embrasa et les personnages, visibles sur le fond sombre, animés soudain sous l’action du feu, semblèrent se tordre dans les flammes comme des damnés. (…) Les sauvages brutaux écrasaient sous leurs bottes les Tanagras délicates, chantaient et dansaient autour du feu de joie qui achevait de consumer la civilisation. Le feu éteint, ce serait la nuit profonde, la nuit des temps très anciens. "
      Devenus agressifs envers Wilfrid à qui ils pensaient prendre Dolorès à leur tour, les derniers Bretons furent mis en fuite. Jean, Wilfrid et Dolorès restèrent seuls, dénués de tout et sans but. Jean s’étant absenté afin de pourvoir à la nourriture du groupe, Dolorès et Wilfrid se donnent la mort. C’en est trop pour Jean qui  pense, lui aussi, à mourir :
      " La neige le recouvrait déjà et ensevelissait son corps sous le contour indécis d’un linceul ! Il était si bien pourtant, si bien, plongé sans une quiétude heureuse et douce, dans un engourdissement sensuel qu’il n’avait jamais ressenti. Comme il avait été médecin, il comprit que c’était la mort qui venait. "
      Roman intense et méconnu, le " Continent maudit " mérite une mention particulière dans le genre. Jamais puérile,  l’intrigue se centre sur  deux personnages principaux dont le contraste permet à l’auteur de dévoiler au lecteur ses idées fondamentales : pessimisme fondamental quant à la possibilité de survie de l’Europe (dans la réalité de l’immédiate avant-guerre) et tentation de la " surhumanité " selon les thèses de Nietzsche, anti-américanisme profond, xénophobie et haine des races dites inférieures. L’on regrettera que l’un des romans qui soient parmi les plus denses de notre domaine soit à l’instar de " Ravage " de Barjavel, l’une des œuvres les plus conservatrices qu’il nous ait été donnée de lire.

    8. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Jean-Charles HARVEY Parution: 1924
      En royaume d’Utopie, au XXVème siècle, la Terre est réunie  en une fédération de républiques. Vivant en paix, elle a confié son sort  à Jacques Pavie, président de la "fédération républicaine du monde." A son rival indien déçu, Diwan Gengli, l’on avait confié "le tiers de la police du monde", soit deux millions d’hommes armés répartis sur toute l’Asie. Les deux hommes s’estimaient. L’un comme l’autre,  pourtant intelligent et cultivé,  se laisse subjuguer par une femme, Hélène de Tarse, qui préfère Pavie  "non seulement pour sa qualité de blanc, mais aussi pour son irrésistible regard de Don Juan et son front dominateur. "
      Gengli en conçut une amertume, une jalousie, une rage qui le firent employer la force pour ravir la pure beauté à son adversaire, dût-il pour cela bouter le feu à un monde en paix:
      " Trois jours après, cinq cents avions et cinquante dirigeables couvraient la face de la France. D’un ciel d’horreur, strié de feux tragiques, tombaient de longs et tumultueux éclairs qui électrisaient et calcinaient des bourgs entiers. La ville parlementaire en était toute criblée. On eût dit de longues épées de flamme perçant le cœur du monde. La tour de l’hôtel d’Etat croula avec un fracas de tonnerre. Plus loin, une explosion fit sauter l’unique fabrique de munitions du monde. Un cratère se creusa soudain à trois cents pieds sous terre, et toute l’Europe en trembla.(…) Cinq millions de cadavres encore chauds et de blessés couvraient l’Europe "
      Est-il besoin de dire que Gengli ne l’emporta pas au paradis, que Hélène préféra s’immoler plutôt que de lui céder, et qu’il mourut son forfait accompli ? Même en pays de cataclysme les mêmes causes produisent souvent les mêmes effets…

    9. Type: livre Thème: menaces animales Auteur: Max André RAYJEAN Parution: 1960
      Le péril des hommes ce sont les femmes, c’est bien connu. Trois gynécologues décident de sauver l’espèce humaine. Celle-ci est condamnée, puisque, pour des raisons inconnues,  les femmes ne mettent plus au monde que des garçons. Or, sans femmes... Les années passent et nos gynécologues, pressés par l’échéance de la ménopause pour les rares femmes encore en état de concevoir, proposent un plan hardi. Il s’agit de les enlever à leurs maris respectifs, de les amener sur Cérès, un astéroïde, dans une cité parfaitement aménagée pour pratiquer sur elles des expériences de parthénogenèse, actions de la dernière chance. Celles-ci échouent également. Nos gynécologues, découragés, passent la main à leurs fils, gynécologues, eux aussi (C’est une vocation familiale !):
      " Clider, Nitosh et Horray avaient chacun un fils, John, Mac et François. Ces derniers, après de brillantes études dans les universités de Londres, de Washington et de Paris, suivaient les traces de leurs pères. Tous trois avaient déjà atteint la trentaine. Mac étant l’aîné, que déjà, ils étaient célèbres dans le monde. Il est vrai qu’ils avaient de qui tenir!  Un jour, se jugeant trop vieux, leurs parents décidèrent de passer le relais à leurs fils. Ceux-ci débarquèrent donc un beau matin sur Cérès. Les trois jeunes docteurs présentaient des visages énergiques et ils étaient décidés à tenter quelque chose. "
      Voilà où en sont les choses lorsque nos jeunes savants se font kidnapper par un vaisseau spatial qui les emmène sur une lointaine planète, Méphyr, dans le système de Procyon. Les Méphyriens sont des êtres protéiformes dont la passion est de se calquer au physique et au mental sur des êtres plus évolués  afin de pouvoir progresser eux-mêmes. Or, merveille troublante, les terriens représentent pour les Méphyriens le sommet de l’évolution. Composée d’une seule cellule, Naru,  l’un des chefs méphyriens est volontaire. Il se transforme physiquement en terrien.
      Nos amis vont-ils le laisser faire? Un plan extraordinaire jaillit dans leurs esprits. Si les Méphyriens sont capables de devenir terriens pourquoi ne soumettraient-ils pas Xys, leur gardien, à la métamorphose en le transformant en... femme nubile? L’expérience est ardue, mais ils n’hésitent pas un seul instant: estourbissant Xys, ils reprogramment la machine des Méphyriens:
      " Rook ne se lassait pas d’admirer Xyse sous tous ses angles. Il hochait sans cesse la tête, admiratif: - Une perfection! gloussa-t-il . Je n’aurais jamais cru qu’il fût possible de créer un être aussi ressemblant. Une vraie femme, et qui me ressemble! Nitosh tapota l’épaule du capitaine: -Il faut habiter Méphyr pour parvenir à un tel résultat! Quand je pense que les aïeux de Xyse étaient de vulgaires paquets de gélatine, et que maintenant... "
      Et Xys devint Xyse, une merveilleuse femelle humaine apte à procréer (cela se vérifiera très facilement) et de plus épousant le parti des Terriens. Elle les aide à fuir les Méphyriens: direction la Terre. Enceinte des oeuvres de l’un des gynécologues (le Français), Xyse fera l’admiration des habitants de la terre. Un bébé femelle naîtra d’elle parfaitement constitué. L’espérance est donc revenue, mais fragile, car cela ne suffira vraisemblablement pas à enrayer la disparition de l’espèce humaine. Or, oyez le nouveau miracle: l’arrivée d’un deuxième vaisseau méphyrien qui annonce que l’ensemble des habitants de Procyon, convaincus de l’excellence de l’enveloppe humaine, et encore plus de celle de la femme, sont prêts à se transformer en de sincères et loyales épouses pour les Terriens. Un triple ban pour nos trois gynécologues qui ont réussi à sortir le genre humain de l’impasse!
      Un récit de bric et de broc, à l’intrigue décousue, aux invraisemblances majeures, avec des marionnettes à la place des personnages, bref un florilège de tout ce qu’il faut réunir pour constituer un mauvais roman et discréditer le genre. Heureusement, il reste les couvertures de Brantonne...

    10. Type: livre Thème: épidémies Auteur: Floyd L. WALLACE Parution: 1957
      Le narrateur, le général Lindstrom, commandant en chef de la zone de quarantaine établie autour de Los Angeles, s’entretient avec Adams III, un commercial envoyé par la Cosmopolitan Life Insurance Company. Ce dernier tient à tout prix à obtenir une autorisation pour pénétrer en ville malgré la menace que ferait peser sur sa vie le " virus du Nevada ", un germe inconnu hautement infectieux, peut-être en provenance de l’espace, et qui éradique tous les êtres humains passés de quarante ans. Adams III dévoile certains secrets de ce virus, déjà connus par les médecins militaires et jalousement gardés jusqu’ici. Il sait que trois pour cent des individus survivent à l’infection et en sortent radicalement transformés, beaucoup plus jeunes et pleins de santé, c’est du moins ce qu’avait découvert un certain Fleming, statisticien de son état. Adams III tient absolument à vérifier ce fait.
      Linstrom accède à sa demande avec réticence, mais se rend vite compte qu’il a été joué. Adams III – en réalité Fleming lui-même qui a usurpé cette identité-  veut acquérir  une nouvelle jeunesse, prêt pour cela à mettre sa propre vie en jeu. Lorsque les soldats de Lindstrom le retrouvent, il est déjà trop tard : ils mettent la main sur un homme mourant, rongé par les abcès et couvert de moisissures. Et la pandémie poursuit tranquillement son petit bonhomme de chemin…
      Un traitement du thème faustien dans le cadre cataclysmique.

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