Sur l'auteur :
Préambule :
l’Autre ! la Dernière (à ceux de la Classe 25) par Robert Demarty, éd. Eugène Figuière éd., 1933, 1 vol. broché in-
1 ère parution : 1933
guerres futures 1
Synopsis :
André, le narrateur, nous convie à une visite programmée de l’enfer. Agriculteur en 1933, jeune homme amoureux d’Alberte sa femme, amoureux de la vie, pacifiste convaincu, probablement anarchiste, il est invité à participer à la grande boucherie anticipée de 1940. Elle s’accomplira, comme en 14-
La guerre future sera « vécue » de l’intérieur, décrite au jour le jour sur le mode intimiste, analysée et expliquée à l’usage de ceux qui ont la chance d’en être éloignée. Les amis qu’André se fait au front ne le restent pas longtemps. La mort fauchera les Max, les Antonin, les Cassou, les Gaulo, les Tellier. Ils mourront tous gazés, empoisonnés, brûlés, réduits en charpie, volatilisés, déchiquetés en une bouillie sanglante. Lui-
Mais, au moment de partir pour la ligne de front, il a encore la force de vitupérer les « pousse-
« Ne soyons pas trop pessimistes. Le fait n’est que la conséquence de ce que nous appelons l’esprit français : un coup de fouet qui cingle bien et tout le monde se croit piqué au vif. D’ailleurs… Si la guerre doit arriver nul ne l’empêchera. Pour ma part, je sais, que s’il y en avait une, tu comprends… L’armée a besoin d’imprimeurs. – Toi à l’abri, les autres peuvent se faire tuer. C’est ce que tu veux dire sans doute ?
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« Le silence se fit à nouveau. – Les coupables maintenant, dit la voix devenue dure. Les rangs se desserraient pour les laisser passer. La horde apparut : c’était quelques centaines d’hommes laids, vils, monstrueux. Une rumeur indescriptible salua leur apparition. Il fut exigé que chacun se confessât et, l’un après l’autre, ceux qui avaient été rois, présidents, ministres, consuls, généraux, tous, comme subjugués, s’accusaient de leurs forfaits.
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« Les gaz ! Des cris semblables à des râles s’élèvent. L’infamie de la bousculade commence. Des toux retentissent. Des gestes démesurés animent ce spectacle de fin du monde. On entend un bruit prodigieux d’affaissements et d’essoufflements, un halètement insensé de foule qu’on bâillone. Ensuite c’est la lutte entre ceux qui ont des masques et ceux qui n’en ont pas. »
Au front, dans les tranchées, se poursuit laborieusement une vie de cauchemar :
« Le sol est criblé. L’air est agité par toutes sortes de déflagrations. La terre s’élève en gerbes pâteuses qui retombent avec un bruit sourd qu’on croirait venir du sein de la terre. Au-
Il partage avec son ami Max, un jeune agrégé, les premières expériences du combat, et la mort. Lorsque Max lui fait signe de venir :
« Je cherche vainement Maréchal qui, d’habitude, même sous sa cagoule se fait reconnaître par ses vertes plaisanteries. –Viens ! fait Max les dents serrés. Ce disant il m’entraîne. Au bout de quelques pas, je heurte quelque chose de mou. –Voilà ! Effectivement Maréchal est mort. Un éclat d’obus lui a déchiré son masque et, par surcroît, brisé la mâchoire. L’action des gaz a été instantanée. La plaie est déjà toute bleue ainsi que le visage. »
La vie dans les tranchées, dans la crasse et la sanie, est ponctuée par des tueries sporadiques, des incursions sur le terrain, lorsqu’ils déboulent à l’arrière des chars, par la haine et la peur qui leur nouent les tripes. L’horreur s’amplifie :
« Un regard de côté me montre Max en fâcheuse posture. Je prends de flanc un de ses assaillants. L’autre glisse. Je lui tranche la gorge. Mes jambes tremblent. Mes tempes battent, horriblement. Je suis malgré tout Max qui court comme un diable. Dans une tranchée trois baïonnettes se dressent. J’hésite un instant en regardant dans les yeux ces hommes qui, eux aussi, me dévisagent. Ce contre temps suffit pour qu’un coup de crosse s’abatte de mon côté. Max est tout rouge. Il a l’air d’un boucher. Le ciel est rouge. La terre est rouge. (…) Mon pied est enfoncé profondément dans une fange sanguinolente. »
Ils ne comprennent pas pour quoi et pour qui ils s’ont amenés à se battre. Les profiteurs de tout acabit, les aggioteurs, la collusion intime entre les politiques et les religieux, coiffés par le grand capital, leur paraissent être les principaux responsables de la tuerie. Le vécu quotidien les rend pareils à des bêtes ou des monstres déshumanisés :
« Le tapis rouge lèche Tellier puis l’environne. Il environne aussi Goguet ! Ils s’agitent dans l’incendie comme les flammes elles-
Lui-
« Nous allons comme des aveugles en pleine attaque. Tous les éléments sont déchaînés. C’est une furie. Le terrain est si fréquemment remué, les sifflements et les bouleversements tellement orageux que le front a plutôt l’aspect d’une mer gigantesque où se heurteraient d’énormes unités.(…) Quelques fous que les gaz à grande concentration ont atteints courent sur le terrain embrasé. Leurs hurlements dépassent en horreur le spectacle de la bataille elle-
Par un miracle inespéré, il reste en vie, quoique blessé. Dégagé vers l’arrière en un hôpital militaire, il partage le sort des autres éclopés de la vie, infirmes, amputés de corps et de cœur, épaves que la guerre a éparpillées sur le bord du chemin. La terreur de la réinsertion s’installe en lui et ne le quittera plus jusqu’à sa décision finale d’abréger ses souffrances.
Un ouvrage d’une violence rare, dans la veine des grands romans de Méric (la « Der des der »), à poser au panthéon de la dénonciation de l’horreur guerrière. Là où le Colonel Driant ne voit que drapeaux et faits d ‘héroïsme, Demarty dénonce la bête en l’homme.
Bien que la projection dans le futur d’une guerre proche (celle de 39-