Synopsis :Deux âmes terrestres s’entretiennent de leur passé. En un long monologue, Eiros explique à Charmion comment fut détruite la Terre dans sa rencontre avec une comète ; comment celle-ci, d’abord considérée comme inoffensive par la science qui n’avait jamais rencontré dans l’histoire de l’humanité une comète aussi dangereuse, suscita l’admiration, avant de générer la panique.
Elle n’était ni plus grosse ni plus rapide qu’une autre, sa courte queue composée du gaz le plus rare ne pouvait causer de dommages. D’ailleurs les théologiens, se référant à l’Apocalypse, prétendaient que la Terre ne pouvait être détruite que par le feu. Mais son approche, par « son gigantesque manteau de flammes claires, toujours étendu à tous les horizons », créa une émotion « radicalement nouvelle ».
Enfin lorsque l’humanité apprit que le gaz cométaire allait vider l’atmosphère terrestre de son azote, elle exprima de la terreur en face « d’une combustion irrésistible, dévorante, toute-puissante, , immédiate : Je serai brève,- brève comme la catastrophe. Pendant un moment, ce fut seulement une lumière étrange, lugubre, qui visitait et pénétrait toutes choses. Puis, - prosternons-nous, Charmion, devant l’excessive majesté du Dieu grand !- puis ce fut un son, éclatant, pénétrant, comme si c’était LUI qui l’eût crié par sa bouche ; et toute la masse d’éther environnante, au sein de laquelle nous vivions, éclata d’un seul coup en une espèce de flamme intense, dont la merveilleuse clarté et la chaleur dévorante n’ont pas de nom, même parmi les Anges dans le haut Ciel de la science pure. Ainsi finirent toutes choses. »
Cette courte nouvelle, écrite en 1839 et sans doute inspirée à Poe par la chute de météorites de 1831, apporte les arguments scientifiques en faveur du danger cométaire, arguments que développeront plus tard Verniculus, Griffith, Rey-Dussueil ou Camille Flammarion. Baudelaire lui-même dut être impressionné par elle, puisqu’il conçut le projet d’une : « fin du monde – Un roman sur les derniers hommes- les mêmes vices qu’autrefois - Distances immenses… - les dernières palpitations du monde, luttes, rivalités » ainsi qu’un poème en prose sur ce thème qui ne vit jamais le jour. L’esthétique baudelairienne de la «nouveauté » ne pouvait qu’être sensible à l’ouverture de la palette émotionnelle proposée par « la modernité » de Poe.