Sur l'auteur :
Préambule :
le Déluge futur, par Marcel Roland, in " Touche à Tout" N°4, (15 avril 1910), N°5 (15 mai 1910), N°6 (15 juin 1910), Arthème Fayard éd., roman paru en feuilleton et réédité par la suite.
1 ère parution : 1910
menaces climatiques
Synopsis :
La France au XXVème siècle. Le journaliste Pierre Delange rend visite à son oncle M. Luzette, à Blois, au moment où la pluie remplace une chaleur et une sécheresse exagérées. D’abord la bienvenue, celle-
« Il pleuvait sans arrêt, sans répit, un rideau brumeux masquant maisons, arbres, rebondissant aux angles des toits, sautant des balcons, dévalant par les ruisseaux des rues en pente jusqu’à la Loire, qui roulait les tourbillons d’une crue incessante. On vivait dans une lumière grisâtre, un demi-
« Un clapotis baignait les roues des wagons sur la voie ruisselante. A travers la crêpe de la pluie, j’entrevis à peine la campagne, mais je la devinais confusément noyée, le sol saturé comme une éponge, les cultures perdues, les vignes submergées, les blés couchés sur la terre molle, les arbres fléchissant sur leurs racines pourries, les ravins devenus torrents, les mares devenues lacs. »
Disposant d’un appartement solide il s’y réfugie, au 5ème étage, pour attendre la fin de l’inondation. Mais les rues noyées empêchant toute sortie, et pour ne pas s’ennuyer, il tient un journal minutieux des événements. A partir du 10 juillet, le métro ne fonctionne plus. Tous les occupants des immeubles seront évacués pendant qu’il en est encore temps.
Lui, doutant de l’efficacité d’un regroupement, reste obstinément isolé chez lui. Quelques jours après, un fidèle ami , le poète anarchiste Rambout, bravant les éléments, lui rend une dernière visite. Il prophétise la destruction du monde par un second déluge et lui rapporte des faits qui affecteraient la terre entière. Inquiet, Delange consulte revues et journaux scientifiques qui évoquent les causes du phénomène pluvieux par le déplacement de l’axe des pôles, la fonte des banquises, l’absence de taches solaires, la précession des équinoxes, ou le volcanisme intense :
« Sur des points nombreux, le noyau encore non solidifié de la terre a subi d’importantes convulsions, traduites soit par des réveils de volcans assoupis, comme l’Etna, le Vésuve, l’Erèbe (aux régions antarctiques), le mont Pelé (à la Martinique), ou depuis longtemps réputés morts, par exemple les cratères du Plateau Central, en France, plusieurs de montagnes d’Arménie, et d’autres de la Cordilière des Andes ».
L’eau monte toujours dans les rues de Paris, faisant s’effondrer les immeubles les uns après les autres. Soudain Delange, qui se sent bien seul, se rappelle qu’il possède un «éthéro-
Soudain, les lumières s’éteignent, l’eau ayant accédé au second étage. Un mois a passé depuis le début du journal avant que Delange puisse noter un fait extraordinaire : une jeune femme l’a rejoint ! Eva Vankeer, une artiste, avait été oubliée dans l’appartement voisin. Comme lui, elle était restée sans liens avec le monde, se contentant de durer. La rencontre d’Eva avec Delange leur procure un grand réconfort. Il la rassure et part à la recherche de nourriture, du pain et des légumes, arrachés aux rats dans le grenier d’un boulanger absent :
« C’est là, au fond de ce noir, qu’étaient alignés les sacs du bienheureux marchand à qui nous devions de vivre encore ! Il fallait d’abord traverser des flaques d’eau, puis s’avancer avec résolution, un fort gourdin à la main, vers ces recoins d’ombre, où grouillaient mille petites existences féroces. J’entendais les rats s’agiter au milieu des précieux pois chiches et des haricots, comme des fourmis dans leur tanière. Je poussais des exclamations inarticulées, devenu moi-
Ils se réveilleront au sein d’un engin sous-
« Tout contre la vitre du Triton, un instant, vint se coller une vision atroce. Une face verte et tuméfiée, avec des yeux qui pendent en gélatine sous la chevelure soulevée. La bouche se convulse dans une grimace sinistre (…) Maintenant, à mesure que nous avançons à travers la cité lugubre, d’autres morts se montrent, innombrables, dans toutes les contorsions de la fin. Les uns attachés à des épaves, flottant entre deux eaux ; les autres accroupis ou couchés, retenues au sol par des causes inconnues. Ceux que le flot porte se heurtent, s’entrepoussent, se rassemblent en groupes visqueux et blêmes qui nous regardent passer, rient sur notre chemin, agitent les bras comme pour des acclamations muettes. Plus nous allons par les rues, les carrefours, plus cette ville de l’enfer vomit sur nous tous ses cadavres. Dans ce qui a été le boulevard Saint-
« Très loin, au-
« Les poissons peuvent visiter les loges veuves de leurs occupants ordinaires. Les sièges sont pourris, les étoffes déchiquetées, les balcons de bois et de plâtre disloqués. Le lustre qui éclairait de ses feux les chambrées étincelantes des premières représentations, gît, aplati sous la montagne de déblais que la voûte a dressé en tombant(…) Soudain Antoni nous fait un signe et nous désigne quelque chose de pâle qui évolue lentement à cinq ou six mètres de nous. C’est une lamproie énorme que la clarté de nos phares a attirée. Elle tourne, serpente sans oser trop s’approcher, fixe un instant sur nous ses petits yeux, et, d’un coup de queue, se retourne. Elle finit par s’éloigner, comme un long ruban ondulant. Nous sortons, pour la suivre, nous la voyons évoluer près d’un groupe de pierre, l’œuvre exquise de Carpeaux, où quatre femmes nues dansent allègrement, tandis qu’au centre de leur ronde, un dieu rieur agite un tambour de basque. Elle s’enroule autour du cou de l’une d’elles, flaire lentement la bouche ouverte, puis, se dénouant, remonte, passe entre deux colonnes, et rentre dans l’Opéra par une fenêtre.»
Ressortant du bâtiment, Antoni les invite à le suivre au Palais Législatif où se sont élaborées toutes les lois, pour y récupérer « cylindres et disques phonographiques » de quelques grands hommes politiques. Plus tard, au sein de leur refuge, ils écouteront religieusement un discours du grand « Raujès » avec ses nobles aspirations vers le socialisme, ainsi que celui de l’anarchiste « Sauvageol » qui promet le châtiment aux capitalistes de tout poil. Une heureuse transition surviendra par la visite de la Bourse, temple de l’argent maintenant disparu, puis celle de Notre-
De retour, Antoni prend la décision de quitter Paris. Cependant Pierre constate que le caractère de leur sauveteur s’est aigri. La présence d’Eva, promise au seul Delange, en est l’unique raison. Antoni espère la convaincre de perpétuer l’espèce avec lui mais se heurtera à un refus. Certainement rompue par tant de désirs, Eva tomba gravement malade. Agonisante, elle sera sauvée par Antoni à l’ultime moment, grâce à une injection de piqûre d’eau de mer pure, seul remède susceptible de la guérir en « rappelant » au corps le milieu naturel de ses origines. Eva se remet à peine quand c’est au tour de Bonin de flancher. Abominablement ivre, Bonin, se rappelant le concept de lutte des classes, refuse tout de go d’aider son patron :
« Ce Bonin, lui aussi, avait sa tare, et il suffisait d’un peu de liquide corrosif pour lui empoisonner le sang, le changer en un fauve. Ou bien, peut-
Comme un malheur n’arrive jamais seul, un troupeau de morses gigantesques, chassés des mers du pôle, prennent le Triton pour un reposoir. Le danger est immense et nos amis y vont de bon cœur, à la hache et à la barre de fer. Antoni, directement menacé par le « roi », un morse géant blanc aux canines redoutables sera sauvé à la toute dernière extrémité par le mécanicien, revenu à de meilleurs sentiments de coopération. Le péril écarté, ils optent pour le grand large et suivront l’opinion d’Eva qui se rappelle avoir lu jadis le roman d’un certain… Marcel Roland :
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N‘ayant jamais eu la curiosité de regarder le titre de ce bouquin, j’y jetai un coup d’œil et lus : « Le Presqu’homme». Ce qui, naturellement, n’éveilla en moi l’idée d’aucun ouvrage dont l’histoire littéraire eût gardé la souvenance.
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Elle expliqua :
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Le «Déluge futur» constitue le deuxième volume d’un ensemble de trois baptisé « les Temps futurs ». le premier relatait l’existence d’une race de singes évolués et transformés en « Presqu’homme ». Le professeur Murlich avait ramené à la civilisation « Gulluliou », l’un de ces êtres, anthropoïde doué de la parole, qui représentait, selon lui et Darwin, le maillon ultérieur de l’humanité. Gulluliou fut ramené chez lui par Murlich et devint l’ancêtre de la société d’Anthar.
Le troisième récit relate la suite des aventures du Triton et de ses occupants. Arrivés à l’île d’Anthar, Antoni et les siens, malgré leurs efforts, ne seront jamais acceptés par les Presqu’hommes. Se sachant condamné, délaissé par Eva, aidé par Bonin, Antoni partira à la «Conquête d’Anthar», décidé à détruire cette nouvelle culture pour donner sa chance au dernier couple d’humains, Eva et Pierre Delange, de faire renaître l’humanité.
«Les Temps futurs» constituent une saga exceptionnelle dans le champ de la science-