Sur l'auteur :
(1932-
Préambule :
l’Odyssée du Vagabond par Luke Rhinehart, Robert Laffont éd., 1984, coll. " Best-
1 ère éd. : 1983 titre original : Long voyage back
menaces et guerres nucléaires
Synopsis :
Lorsque Neil le skipper et Jim le fils de son employeur et ami Frank, atteignent la baie de Chesepeake à une centaine de kilomètres de Washington, les nouvelles internationales étaient préoccupantes. Prêts pour une virée en mer, Frank leur avait fixé un rendez-
« Auparavant, ils avaient tous écouté le transistor. Sur la bande AM, ils n’avaient pu capter que cinq stations là où, d’habitude, il y en avait plus d’une quarantaine. Des bribes de nouvelles chaotiques, parfois à peine cohérentes arrivaient. Ce n’était que lorsqu’une information avait été répétée plusieurs fois, et sur des postes différents, qu’ils la croyaient vraie. Ainsi, il paraissait établi que Whashington, New York et entre cinquante et cent grandes villes avaient été détruites ; que le nombre des victimes se situait dans une « fourchette » de vingt à quatre-
« Jeanne regarda de nouveau son rétroviseur et vit la même lueur. Elle jeta un bref regard sur sa gauche : deux voitures la dépassaient à toute vitesse. Alors, elle se retourna carrément : la lueur grossissait à l’horizon, s’élargissait, s’élevait… le noyau central semblait baisser d’intensité à mesure que le reste du ciel s’illuminait. Les doigts de Lisa s’enfonçaient dans la chair de son bras, qui tremblait toujours. Jeanne pensa simplement : « une bombe nucléaire est tombée sur Washington. » Elle en ressentit sur le coup ni terreur ni peur, seulement une lucidité à l’égard de l’événement.»
Lorsque Neil arrive à Christfield avec, derrière lui, un immense nuage de cendres radioactives, c’est pour sauver Jeanne et Lisa menacées par la folie humaine. Déjà, des personnages douteux ont pris son bateau d’assaut, notamment Macklin, une sorte de truand, qui tente aussitôt de prendre le pouvoir à bord. Neil l’accueille malgré tout car, en ces circonstances, il a besoin d’un second à poigne. De retour du ravitaillement à quai, il s’aperçoit que Vagabond a disparu. Macklin le lui a volé, avec à son bord tous ses amis.
Le skipper légitime sait qu’il lui faudra reprendre son bien avant que Macklin ne le fasse sortir de la baie. Avec Olly, un ancien capitaine pêcheur haut en couleurs et marin émérite, qui, lui aussi, n’a plus rien à perdre, ils se lancent à la poursuite du trimaran, réussissant par ruse à investir son bord. Macklin sera désarmé et si Neil l’épargne à nouveau c’est qu’il lui sera indispensable dans les jours à venir. Il est d’ailleurs plus que temps de chercher Frank qui monte sur Vagabond avec Tony, un autre individu susceptible d’aider à la manœuvre.
Vagabond prend le large en direction du sud alors que des retombées radioactives s’abattent sur un pont que Frank et Neil nettoient scrupuleusement :
« Une terreur diffuse planait sur les équipiers de Vagabond, tandis qu’ils continuaient de descendre le Chesapeake vers l’Atlantique. Ceux qui attendaient, entassés dans le carré, parlaient à voix basse comme s’ils étaient à une veillée funèbre. De tous côtés, les monstrueuses masses grises semblaient converger avec des intentions meurtrières : tandis que l’un des nuages virait au nord, l’autre bouchait l’horizon sud au-
A bord, après que plusieurs d’entre eux aient souffert de la maladie des radiations, les survivants se divisent dans leurs options. Les uns souhaiteraient pousser jusqu’aux Caraïbes pour mettre le maximum de distance entre eux et la menace, les autres, dont Frank et Tony, encore mus par un esprit patriotique, suggèrent d’aborder au plus vite la terre ferme pour pouvoir se mettre à la disposition des forces combattantes.
Neil, quoiqu’ancien combattant, et Olly, savent qu’il importe de fuir mais devant la fatigue engendrée par des jours de mer sans pitié, ils se résignent à gagner le port de Morehead City, à la pointe du cap Hatteras. Dès leur arrivée, l’organisation locale de l’armée les avertit de se tenir à disposition. Vagabond devra être réquisitionné et tous les hommes valides rejoindront les rangs. Les autres, dont les femmes, seront reversés parmi les réfugiés. Ils trouveront asile dans un grand garage désaffecté. Olly, trop vieux, restera à bord en attendant. Jim et Tony touchent leur paquetage. Jeanne travaillera avec Katya, une nouvelle venue, pour soigner les nombreux grands brûlés. La situation semble désespérée :
« Une dizaine de personnes gisaient à même le sol de ce qui avait dû être auparavant une grande salle d’attente ; certains de ces malheureux gémissaient et l’un d’eux hurlait. Deux au moins étaient déjà morts. La salle sentait le vomi. Tous ces corps agonisants, sur le parquet, avaient des brûlures irréversibles. Un homme n’avait plus d’yeux et son visage était arrivé à un tel point dans l’horreur que sa vue était difficilement soutenable : la peau d’une de ses joues pendait comme de la chair sur un croc de boucher. »
Neil se résout à rejoindre la corvette commandant le port dont il croit connaître le capitaine, un ancien ami de l’école militaire, tandis que les conditions des réfugiés s’aggravent jusqu’à devenir insupportables :
«D’autres maladies commençaient à faire autant de ravages que les radiations et les brûlures. Les dysenteries, le typhus et le choléra devenaient rapidement endémiques dans de nombreuses régions du monde : en effet, l’interruption du réseau électrique avait entraîné une raréfaction et une pollution des ressources en eaux dans les régions surpeuplées. Et la maladie mystérieuse apparue dans l’Ouest des Etats-
«la Guerre », l’holocauste : la guerre des missiles, des bombardiers, des lasers, des satellites ; la guerre mettant en action toute une technologie sophistiquée de la science militaire moderne ; la guerre entre les Etats-
Voguant vers les îles Saint-
«Et c’est ainsi que dans la foulée de l’holocauste et du conflit Nord-
Bien que les restrictions pleuvent, ils ont quand même le droit de quitter le bord. Mais ici, rien ne peut s’acquérir sans or ou sans argent. Or, ils avaient un besoin vital de trouver des vivres dans cette société qui commençait à se désintégrer. Jim et Lisa, de plus en plus repliés sur eux-
Dans l’île s’était cachée une bande de pirates dont il fallait voler et les vivres et le bateau. Avec Jeanne comme appât sexuel, Neil et les siens attaquèrent avec succès les bandits, s’emparant du Mollycoddle et du Scorpio deux bateaux qui, avec Vagabond, allaient leur permettre de quitter l’île. Le départ se fit dans la précipitation car une émeute généralisée anti-
« La première vague d’une hauteur de sept à huit mètres était une colline plutôt qu’un mur d’eau, et elle était coiffée d’une couronne d’écume blanche. Le grondement s’intensifia, puis la vague gigantesque les saisit, souleva l’avant de Vagabond et l’ensevelit aussitôt, heurtant sauvagement les trois coques : trois mètres d’eau déferlèrent sur tout le bateau, faisant voler en éclats l’arrière de la timonerie et propulsant le bateau à une vitesse d’une vingtaine de nœuds. Olly, Jim, Jeanne et Frank se retrouvèrent écrasés et entassés contre le mur et le panneau de descente vers le carré, tandis que Neil se cramponnait à la barre. »
Grâce à l’habileté de Neil le danger fut jugulé avec une seule victime, Katya, emportée par la vague gigantesque. Le convoi reprend la route du sud, vers Punta Arenas , l’extrême pointe de l’Amérique. Cependant, la peste qui vient d’éclater à bord d’un des bateaux crée une nouvelle situation conflictuelle : Macklin et Tony, subvertissant Frank, font sécession. Menaçants les autres, ils espèrent s’emparer de Vagabond laissant le groupe en perdition. Le revirement de Frank qui lui coûtera la vie, règlera définitivement le sort de Macklin écrasé entre les deux quilles de bateau. Tony, abandonnant Vagabond, cherchera la terre à bord du Scorpio. Le groupe meurtri et endeuillé aura au moins un motif de satisfaction: les guérisons de Jim et de Lisa que la peste a épargnés.
C’est donc au sein d’une famille ressoudée que Neil et Jeanne aborderont à Punta Arenas où, avec quelques autochtones indifférents au sort du monde, quelques Roumains et d’autres rescapés de l’holocauste, ils tenteront de refaire leur existence dans la paix et la sincérité :
«Au Nord, les guerres auxquelles ils avaient échappé continuaient sans doute à faire rage. Ici, au bout du monde, quelques survivants s‘étaient rassemblés. Ils luttaient encore pour survivre, mais ils luttaient ensemble et non plus les uns contre les autres : un premier pas sur la route du long retour d’Apocalypse. »
« L’Odyssée du vagabond » est un grand roman dans lequel se conjuguent l’amour de la mer et du grand large, une vision humaniste de l’homme et une description minutieuse de la folie nucléaire. C’est une œuvre aux rebondissements multiples et à l’action enlevée qui se lit d’une traite. Peu connu en France malgré sa date de parution récente, il n’en constitue pas moins une performance impressionnante dans le genre.