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  • La Fin Des Livres

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    Fiche du livre :

    Type : livre

    Auteur : Albert ROBIDA

    Parution : 1895

    Thème : disette d’éléments


    Sur l'auteur :

    (1848-1926). illustrateur, polygraphe, journaliste. Sa vocation d'être illustrateur l'emporte sur tout. Caricaturiste dans les revues et journaux en vogue qui imposent sa célébrité. Il fonde sa propre revue "la Caricature" avec les meillurs dessinateurs du temps. Il s'intéresse à tous les domaines: histoire, voyages, fantaisie, classiques, anticipation, etc. Après une éclipse, il s'impose aujourd'hui comme l'un des meilleurs dans le domaine conjectural au niveau de Jules Verne ou de H.G. Wells. La justesse de ses spéculations font de lui un visionnaire de l'inventivité et du pessimisme social. Son oeuvre est immense: 60 ouvrages, 200 livres illustrés, 70 revues, et environ 60 000 dessins.


    Préambule :

    la Fin des livres par Albert Robida , pp. 125-145 in "Contes pour les Bibliophiles " par Octave Uzanne et Albert Robida, Ancienne maison Quantin éd., 1895, 1 vol. cartonné, in-quarto, 232pp. couverture illustrée par Robida. nouvelle d’expression française
    1 ère  parution : 1895
    disette d’éléments


    Synopsis :

    Un petit groupe de gentlemen, après avoir assisté à une conférence du savantissime William Thompson à la Royale Institution de Londres où celui-ci évoqua le sort futur et funeste de notre globe, se retrouva pour un dernier verre au Junior Atheneum Club. Chaque participant y alla de sa propre vision du futur, utopique ou pessimiste, selon le cas. Le narrateur, sommé de s’exécuter lui aussi pour ce qu’il pensait de l’avenir du livre et des écrivains, jeta un pavé dans la mare en annonçant leur fin prochaine :
    « Si par livres vous entendez parler de nos innombrables cahiers de papier imprimé, ployé, cousu, broché sous une couverture annonçant le titre de l’ouvrage, je vous avouerai franchement que je ne crois point (…) que l’invention de Gutenberg puisse ne pas tomber plus ou moins prochainement en désuétude comme interprète de nos productions intellectuelles. »
    Basé sur l’égoïsme et la paresse du lecteur, la mutation se fera de l’œil à l’oreille, de l’écrit à l’auditif, grâce à la technique :
    « Je me base sur cette constatation indéniable que l’homme de loisir repousse chaque jour davantage la fatigue et qu’il recherche ce qu’il appelle avidement le confortable. (…) Je crois donc au succès de tout ce qui flattera et entretiendra la paresse et l’égoïsme de l’homme ; l’ascenseur a tué les ascensions dans les maisons, le phonographe détruira probablement l’imprimerie. »
    Toute oeuvre sera désormais gravée sur cylindre et déclamée:
    « Il y aura des cylindres inscripteurs légers comme des porte-plumes en celluloïd qui contiendront cinq ou six cents mots et qui fonctionneront sur des axes très tenus qui tiendront dans la poche ; toutes les vibrations de la voix y seront reproduites ; on obtiendra la perfection des appareils comme on obtient la précision des montres les plus bijoux. »
    L’écrivain deviendra un narrateur, l’éditeur sera un «storygraphe », le bibliophile un « phonographophile » et les bibliothèques des « phonographothèques ». Les œuvres enregistrées les plus recherchées seront celles où l’auteur lui-même déclame avec sensibilité et émotion. Et cette révolution concernera tout et tous. Le monde savant, mais aussi le peuple, la multitude à qui il sera donné d’écouter et de se procurer les enregistrements , à petit prix, à tous les carrefours de la ville, dans les gares, les salles d’attente, et les transporter dans leurs poches, grâce aux miracles de la miniaturisation :
    « Il se fabriquera des phono-opéra graphes de poche utiles pendant l’excursion dans les montagnes des Alpes ou à travers les canyons du Colorado. »
    Quant aux illustrations et images imprimées elles seront remplacées par les merveilles du « kinétographe », dérivé de l’invention d’Edison, où « des tranches de vie », fictives ou réelles, satisferont le goût de tous. Enfin les nouvelles du jour et de la presse pourront être avantageusement consultées par un consommateur délicieusement allongé dans son lit, et qui n’aura plus à tourner fastidieusement de grandes pages froissées. Et le narrateur de conclure qu’il s’agit là d’une évolution inéluctable et proche et que nul ne regrettera la disparition totale et absolue du livre imprimé :
    « Il faut que les livres disparaissent ou qu’ils nous engloutissent ; j’ai calculé qu’il paraît dans le monde entier quatre-vingt à cent mille ouvrages par an, qui tirés à mille en moyenne, font plus de cent millions d’exemplaires, dont la plupart ne contiennent que les plus  grandes extravagances et les plus folles chimères et ne propagent que préjugés et erreurs.  Par notre état social nous sommes obligés d’entendre tous les jours bien des sottises ; un peu plus, un peu moins, ce ne sera pas dans la suite un bien gros excédent de souffrance, mais quel bonheur de n’avoir plus à en lire et de pouvoir enfin fermer ses yeux sur le néant des imprimés ! »
    Une autre petite échappée sur le futur de la part de l’écrivain et romancier de génie, Albert Robida.  L’on ne sait ce que l’on admirera de plus ici, de la justesse de sa vision, où de son ironie en face d’une situation de disette culturelle à venir. L’éradication du livre qu’il entrevoit – crainte encore partagée il y peu par bon nombre de nos savants contemporains- si elle ne semble pas exister dans la réalité est pourtant bien un état de fait lorsque l’on sait, qu’en France par exemple, 90% des lecteurs se contentent de déchiffrer des étiquettes des boîtes de conserve.


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