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Livres

  1. Type: livre Thème: disette d'éléments Auteur: Théo VARLET Parution: 1930
    Aurore Lescure, première jeune Américaine à voler dans l’espace, prend son essor et, après un temps passé en orbite, atterrit en France, en Provence. Elle est découverte par Gaston Delvart, peintre,  et par son ami le docteur Alburtin , médecin, qui la ramènent dans leur propriété, afin de l’examiner, l’atterrissage ayant été quelque peu mouvementé. Le peintre, à sa vue, tombe éperdument amoureux d’Aurore, ce qui nous vaut la sempiternelle romance sentimentale de rigueur dans les récits du genre. La jeune femme a rapporté sur terre de la poussière météoritique contenant des germes  d’un lichen qui ne tardera pas à proliférer intensément dans l’atmosphère terrestre.
    Aurore est ramenée à Paris par son ami Gaston.  Le tendre sentiment de celui-ci est déjà contrarié par l’infect Américain Lendor J. Cheyne qui, sponsorisant l’aventure, a pris une option sur la jeune astronaute. Aurore s’évertuera sur plus d’une centaine de pages à fuir les journalistes qu’elle abomine. Arrivée à Paris avec Gaston elle soumet un échantillon de lichen au grand et désagréable savant Nathan pour analyse.
    Le lichen continue son développement en se nourrissant des flux magnétiques générés par les conducteurs électriques. Il se fixe sur tout ce qui produit de l’électricité, sur les ampoules, les fils, les compteurs, les moteurs. La dispersion des spores dans l’air produit aussi des démangeaisons insoutenables. Selon la vitesse de propagation du fléau, le lichen primitif se diversifie en variétés plus ou moins dangereuses.
    L’une de ces variétés est même comestible avec un goût de confiture de framboise et l’on verra apparaître aux coins des rues des marchands de «Xénobie», nom donné à  ce lichen. L’on  suivra la propagation du lichen à la trace,  du cabinet médical du  Dr Alburtin, en passant par l’oncle de Gaston, à l’hôtel où Aurore a élu domicile et le laboratoire de Nathan. La menace devient de plus en plus grande, et de simple désagrément, le lichen se met à désorganiser la structure de la société en empêchant la vie nocturne et les transports:
    " Dès le portillon d’entrée sur le quai, une odeur suffocante de fleurs en putréfaction remplaça le phénol des couloirs qui attestait un essai de désinfection. Sous la voûte de la station grondait une sourde rumeur, non humaine. On eut dit, mêlé à des crépitations, le bruit d’une forêt dont les branches craquent sous le givre, en hiver. Les lampes " malades " pour la plupart, enrobées d’un réseau de végétations, rougeoyaient. Tassés au bord du quai, les voyageurs ouvraient de grands yeux et se grattaient en silence.
    La Xénobie avait envahi les voies. Mais ce n’était plus comme le matin à " Villers ", une offensive timide; une véhémente poussée de la création extraterrestre développait sur les rails un lichen aux bataillons agressifs, un revêtement d’un rouge violacé, hérissé de pointes, comme une cristallisation géante. "
    Rien ne semble pouvoir l’arrêter, sauf à couper toute électricité partout pour le priver de nourriture. Entre temps, le père d’Aurore, en compagnie de l’homme d’affaires américain, arrive en France. Gaston, qui accueille les deux hommes,  présente son amie Luce, américanophile et fascinée par les dollars,  à son rival Cheyne. Coup de foudre réciproque. Cela laissera le champ libre au peintre pour déclarer sa flamme à Aurore. Le fléau s’étendant, la France prend des mesures radicales: coupure d’électricité et abandon des moteurs à explosion en faveur de la traction animale.
    " Avec la suppression de l’électricité, tout s’arrête dans Paris. Les moyens de transport: métro, tramways, chemins de fer électrifiés, sont déjà virtuellement abolis. Si les véhicules automobiles ont pu circuler jusqu’à ce matin, c’est parce que l’intensité de leurs sources d’électricité, batteries d’accumulateurs, magnétos, dynamos, est assez faible pour n’engendrer que des variétés de lichen peu exubérantes et relativement bénignes. Mais ces variétés, comme les autres , produisent des spores, dont la descendance risque d’être calamiteuse. "
    La régression sociale, le chômage et des grèves s’installent durablement. La France mise en quarantaine par les pays voisins et l’Amérique, Aurore ne pourra plus rentrer chez elle, ce qui arrange bien les affaires de Delvart. Les ouvriers communistes ne respectent pas le décret et remettent en marche la centrale de Saint Denis malgré l’interdiction gouvernementale. Alors l’impensable se produisit: la centrale,  desservant tout Paris , sera infectée par la Xénobie, et c’est " la Grande Panne ".  Une variété extrêmement dangereuse de lichen,  appelé le " lichen ardent " fait son apparition. Son effet est redoutable et provoque la terreur:
    " Un point lumineux au fond de l’avenue mal éclairée, s’avançait avec de petits bondissements souples... tiens, comme un ballon de football qui eût roulé tout seul sans personne pour le pousser. Il grossissait et se rapprochait, suivant l’axe de l’entrevoie des tramways, et, derrière ce premier ballon, il y en avait encore, un, deux, trois, dix... Toute une ribambelle à la queue leue leu... de grosses boules de lumière verte... comme des globes de pharmaciens... Mais ces boules avaient un mètre ou deux de diamètre.
    (...) Feu à volonté! Les lebels claquèrent, la mitrailleuse pétarada. De la première boule verte, des flammèches s’arrachèrent sous les balles; elle parut agitée de violentes palpitations, se déforma, comme si quelqu’un caché à l’intérieur se fût débattu, lançant coups de pieds et de poing qui faisaient saillir l’enveloppe du ballon....Mais elle avançait toujours droit sur l’auto blindée, qui finit par me la cacher. Je ne vis pas l’abordage, mais soudain une grande flamme sortit de l’auto, qui s’enveloppa de fumée. "
    Les pays voisins sont touchés à leur tour. Que faire contre la " Terreur électrique " ?  Dans le laboratoire du Dr Nathan, qui a engagé Aurore et son père, se prépare la découverte capitale: il suffit d’attendre l’hiver, la baisse de température fera périr le lichen récalcitrant. Or, quelle coïncidence !, le froid arrive sous la forme d’une bonne gelée. Il ne reste plus qu’à attendre et le monde sera sauvé.   
    Comme un bonheur n’arrive jamais seul, le papa d’Aurore se fait sauter dans son laboratoire après avoir découvert le secret de la scission atomique grâce au lichen,  secret dont il lègue la formule  à sa fille, devenue sa légatrice universelle. La voie est ouverte pour Gaston qui aura tout le prochain roman , sous le titre de " Aurore Lescure, pilote d’astronef ",  pour roucouler à son aise avec sa dulcinée.
    " La Grande panne ", malgré certaines naïvetés dans la description des situations, quelques faiblesses de style, des conventions répétées à satiété dans les intrigues, n’en demeure pas moins intéressant. Hors du guimauve des bons sentiments, il subsiste, ça et là, des descriptions de la catastrophe qui ne dépareraient pas un roman plus moderne. Le thème de la disette énergétique, variété du thème "disette d’éléments", sera largement exploité par la suite, à commencer par Barjavel dans "Ravage" jusqu’aux romanciers populaires comme Jimmy Guieu,  en passant par "la Mort du fer " de Held.

  2. Type: livre Thème: menaces animales, guerres futures 1, savants fous et maîtres du monde Auteur: Paul D'IVOI Parution: 1912
    Max Trelam, reporter célèbre au Times de Londres, retrouve sa mystérieuse Tanagra, sœur du non moins célèbre X323, l’espion au mille visages, terreur des ennemis de la France. En mission à Boulogne, il doit également résoudre l’énigme de la disparition de Miss Elen d’un pensionnat de jeunes filles,  et qui ressemble à la sœur jumelle de Tanagra (ce qu’elle est.) Entre temps, plusieurs personnalités européennes ont été retrouvées inexplicablement mortes avec, figé sur leurs lèvres, un horrible rictus, environnés d’une poussière de cristal :
    « Un spectacle terrifiant attendait les personnes qui se précipitèrent dans la chambre. Le député était mort, assis devant sa table, ses notes éparpillées sous sa main. Et, détail stupéfiant, la mort avait figé sur ses traits un rire formidable, convulsif. »
    Sur le ferry qui l’emmène en France, Trelam est persécuté par Aghatas Block, un soi-disant confrère, qui n’est autre que le sinistre comte Strezzi, ennemi juré de X323 et responsable des morts subites européennes. Avec l’aide de Tanagra déguisée, Trelam déjoue la surveillance de Strezzi. Par un long périple qui les conduit en Bavière via Bruxelles, le couple – répertorié dans les hôtels comme mari et femme au grand plaisir de Trelam, amoureux de Tanagra-  sera rattrapé par Strezzi et capturé.
    Pourquoi le comte montre-t-il un tel acharnement à leur encontre ? Par le biais de Trelam, il espère capturer X323 seul capable de le contrer dans ses sinistres projets de déstabilisation de l’Europe. Strezzi est aussi le ravisseur d’Elen, comptant se servir de ses proies pour faire sortir de l’ombre le mystérieux espion X323, qui a suivi toute l’affaire de près. Ce dernier apparaît donc à Strezzi  sous un déguisement. Nos héros seront embarqués de force dans le dirigeable du comte d’où celui-ci, de façon très précise, choisit de nouvelles cibles qui seront bombardées avec des boules de cristal remplies de miasmes mortels, tirées par le «canon du sommeil » :
    «Il paraît que dans quelques minutes, nous arriverons au-dessus d’un village, occupé par des troupes de Serbie… Là, se trouve le quartier général d’un commandant de corps d’armée, dont la compétence militaire exalte les espérances des patriotes serbes… Si cet homme vit, la guerre est presque inévitable contre l’Autriche ; des milliers de jeunes soldats périront. Alors, au-dessus du logis de cet homme dangereux, M. le comte Strezzi m’accorde l’insigne honneur d’actionner la manette du Canon du sommeil… Le général meurt de rire, et une charmante petite épidémie de choléra asiatique donnera satisfaction à ces Serbes remuants, qui ne rêvent que morts et batailles. »
    Tous ceux qui sont touchés par les projectiles meurent de maladies épidémiques: choléra, peste, etc. Strezzi - décidément très odieux – recourt au simulacre d’un mariage avec Tanagra pour tenir en laisse X323. Le dirigeable flotte vers la forteresse de Gremnitz  qui servira de prison aux infortunés, sous la paternelle et obèse surveillance des époux Logrest.
    Alors que Strezzi disparaît dans son usine à fabriquer des miasmes dont l’emplacement est tenu secret, nos amis s’étiolent à Gremnitz jusqu’à ce que X323, se prétendant malade, arrive à détourner l’attention des Logrest et à s’évader. Strezzi, prévenu, écume de rage. Immédiatement, il conduit ses prisonniers à son usine, prêts à les faire mourir par une injection du bacille de Hansen si X323 ne se manifeste pas. Cette usine, située au bord du lac Weisen, représente le centre malfaisant de la corruption allemande d’où Strezzi , en compagnie de son âme damnée le docteur Morisky, un savant fou de la pire espèce, compte bouter le feu à l’Europe :
    « Tout un côté de la pièce est occupé par une vaste étuve, où mijotent des liquides dont la seule vue donne le frisson. Quelles épidémies grouillent dans ces marmites véritablement infernales, quels bacilles virulents, bâtonnets, virgules, chapelets, microcoques ou streptocoques ? Ah ! le professeur Morisky, cet insensé sinistre, a eu raison de s’intituler l’Attila des microorganismes.(…)
    Ce savant (car il l’est au plus haut degré) avait trouvé le moyen de préparer un projectile dont la combinaison est telle qu’en cas d’explosion, il se fragmente en impalpable poussière, ne permettant pas de connaître sa nature. Mais le génial de sa découverte consistait dans la charge de ce projectile. Du protoxyde d’azote liquide, qui par sa soudaine expansion pour redevenir gazeux, produisait à la fois un froid intense congelant instantanément tout dans un rayon déterminé et figeant, sur les traits des défunts, cette contraction joyeuse (…) Le docteur Morisky avait réussi à ensemencer ses projectiles des bacilles ou microbes de diverses maladies contagieuses, et à assurer la vie de ces atomes dangereux dans le gaz comprimé jusqu’à la liquéfaction.  Le projectile explose : les assistants meurent de rire ; ceux qui pénètrent plus tard dans la salle, emportent avec eux les germes de maladies terribles, germes qui ont conservé toute leur virulence. »
    Surviennent plusieurs événements imprévus qui entravent ses abominables projets. X323, qui a suivi incognito le criminel en son antre souterrain, a fait exploser le dirigeable pour provoquer une diversion. Trelam, Tanagra, Miss Elen s’apprêtent déjà à mourir en d’atroces souffrances, rongés par la lèpre, lorsque X323 , ayant pris l’apparence de Goertz, un garde-chiourme, se fait reconnaître par eux et les délivre, élimine Strezzi, fait sauter l’usine infernale.
    L’Europe (notamment l’Angleterre et la France) devront une fière chandelle au patriotique espion et le reconnaîtront en anoblissant X323 tandis que Trelam aura pour royale récompense la main de Miss Elen (au fond c’est comme s’il épousait Tanagra elle-même), avant de repartir vers de nouvelles et merveilleuses aventures.
    « Le Canon du Sommeil » constitue la suite de « X323, l’homme sans visage ». Le style, résolument teinté d’anglicismes et souvent amphigourique, s’allie à la thématique du savant fou et de la menace bactériologique, ainsi qu’à l’antigermanisme début de siècle. Le roman, quoique vieillot et parfois lourd à digérer, se lirait encore n’était sa rareté sur les rayons des bouquinistes.

  3. Type: livre Thème: menaces climatiques Auteur: Léon LAMBRY Parution: 1937
    Ceci est l’histoire d’un petit groupe d’hommes qui survit à la catastrophe mondiale. Il y a Robatz, le géologue, Nelly l’infirmière, Miguel le marin, Lardy le peintre, Jemot le banquier. Ces gens ont passé leurs vacances ensemble dans un chalet de Haute-Savoie, qui domine le lac de Genève. Malgré l’insouciance des vacances, les nouvelles sont mauvaises: inondations, raz-de-marée, tremblements de terre, etc. alimentent les articles des journaux. Robatz prévoit une catastrophe de grande envergure. Après s’être séparés quelque temps, ils se retrouvent, sentant confusément que le chalet sera encore leur asile le plus sûr.
    En explorant la région, Robatz découvre une grotte préhistorique non encore visitée. Elle pourra toujours servir d’abri en cas d’urgence. Grâce à la prescience de Nelly, le groupe put gagner à temps le refuge; l’abri fut cependant fortement secoué dans son assise rocheuse, lorsque la Terre inclina légèrement son axe pour une raison inconnue.Le matin venu, le groupe sort de sa léthargie. Il constate que l’ancien monde a disparu. Un déluge quasi-universel s’est abattu sur les côtes : les fleuves n’existent plus, les montagnes ont changé de place, et ils se retrouvent seuls au monde à quelques centaines de mètres d’une mer battant un rivage inconnu.
    Après quelques journées d’hésitation, ils décident de marcher en direction du Sud-Est, soit approximativement vers la Méditerranée, pour aller à la recherche d’autres hommes. Ils traversent des régions inhospitalières, rencontrent un monstre supposé disparu (le serpent de mer), un homme devenu fou, et, finalement, atteignent le  bord de la mer. Stupéfaction ! Celle-ci s’est retirée très loin. Une grotte anciennement sous-marine leur sert de refuge pour la nuit, malgré les homards et autres bestioles pélagiques. Dans l’obscurité, ils voient briller des feux, au loin. Des êtres humains ! L’un d’entre eux viendra à leur rencontre pour les amener devant son chef, Sirven, un homme à poigne, qui a rassemblé quelques centaines d’humains sur le site de l’ancienne ville de Nice, totalement détruite.
    L’ambition de Sirven est de construire un poste émetteur dans le but d’évaluer le nombre d’humains survivants. Peu à peu la société se réorganise et l’on arrive à contacter Rome qui n’a subi que peu de dommages. (C’est logique puisque c’est «la ville éternelle»!). Un bateau viendra chercher nos amis pour que, à Rome, ils puissent collaborer efficacement au redressement du genre humain. Robatz se rappelant sans doute que la France dans sa réalité traversait alors la fatidique année 1938, conclut :
    " Qui oserait affirmer que les grands cataclysmes qui mettent en deuil l’humanité ne sont pour elle une dure, mais utile leçon? Celui qui vient de bouleverser la planète n’est-il pas la preuve la plus éclatante de la toute-puissance du Créateur, de la faiblesse de sa créature, et de la vanité de nos ambitions? Que sont devenus ces républiques, ces royaumes, ces empires dont les guerriers s’efforçaient d’étendre les frontières ? Ne vous semble-t-il pas aujourd’hui qu’ils prirent une peine inutile et firent preuve d’un funeste aveuglement ? A quoi ont servi ces luttes fratricides?
    Le morceau de boue que l’insecte humain appelait son territoire se trouve maintenant confondu avec le territoire voisin. Ses sanglants combats, tous aussi futiles que ceux des fourmis, ne lui ont pas assuré la possession de ce sol auquel il tenait tant! Il a suffi d’un tout petit mouvement de la terre s’inclinant sur son axe, pour que disparussent à jamais les Etats si péniblement édifiés. Fasse le ciel que la terrible leçon qui nous fut infligée porte ses fruits! Sur la terre nouvelle... Il faut que se dressent les hommes nouveaux, unissant leurs efforts pour se rapprocher d’un idéal toujours plus élevé! "
    " Sur la terre qui change " est un roman  qui joue avec les déluges et les tremblements de terre. Ne se démarquant en rien de ses semblables (voir à ce sujet " le Nouveau déluge " de Noëlle Roger), il a néanmoins l’avantage de ne pas moraliser et de mettre l’accent sur le récit détaillé des conséquences de la catastrophe.

  4. Type: livre Thème: menaces et guerres nucléaires, péril jaune et guerre des races Auteur: Max LAUGHAM Parution: 1970
    La Chine de Liang Chan, successeur du Fondateur Mao Tse Toung, organise une réunion de l’I.C.R. (Internationale des Communistes Révolutionnaires) en ce mois de décembre 1989. Lors de cette réunion, Anne Villemur et Marco Rovarelli, les représentants de l’.I.C.R. pour l’Europe, sont violemment choqués (ils seront bien les seuls), puisque Lian Chang n’annonce rien de moins que la mise à mort des Etats-Unis par une attaque nucléaire.
    La Chine, appuyée sur les émeutes fomentées de l’intérieur par les groupes-relais de l’I.C.R. devrait mettre à genoux le capitalisme mondial. Le meneur noir de l’I.C.R. U.S. Knox Miller, est l’un des plus ardents défenseurs du projet. Rovarelli, horrifié de ce que prépare "ce peuple de fourmis", charge Anne d’avertir les gouvernements européens avant que lui-même ne soit mis en camp de rééducation. Anne parvient à ne pas trop montrer sa désapprobation mais les Chinois, ne lui faisant plus confiance, la font chaperonner par Li Seng, un agent secret. La jeune femme s’en débarrasse et se réfugie à l’ambassade de Russie en Italie.
    Elle convainc successivement de sa bonne fois l’ambassadeur Balguine, puis Sillissenki , le chef du service de Sécurité soviétique, enfin Pavlenko, le Premier Secrétaire du Parti.  Les Russes, qui ont évolué dans la voie réformiste tracée par Kroutchev, ont développé une société quasi capitaliste, qui ressemble à celle des Etats-Unis tout en gardant une apparence et des structures politiques révolutionnaires. Ils ont donc tout à perdre dans le cas d’un conflit de la Chine avec les U.S.A., puisque l’Amérique les tiendra pour les premiers responsables du déclenchement des hostilités. Contact est pris avec leurs homologues politiques américains. En douceur, mais avec diligence, les médias des deux pays préparent l’opinion politique à l’idée d’une collaboration étroite entre les deux blocs contre de la Chine.
    Les troubles ont débuté et Knox Miller, s’appuyant sur les "Blacks Panthers ", en fait voir de toutes les couleurs à la police américaine. Les autres groupements révolutionnaires du bloc sud-américain, appuyés sur une logistique fournie par la Chine, les ont suivis. Sans que jamais les citoyens des pays du monde ne s’en doutent, la tension internationale augmente.
    Anne, de son côté, retrouve l’ambassadeur Balguine, qui, plutôt de type Démocrate Chrétien (peut-être dû à la situation géographique de son ambassade à proximité du Vatican ?), tente une dernière démarche pour sauver la paix dans le monde: prévenir le pape.Il s’envole vers l’Italie avec Anne, et,  en la soustrayant à l’influence russe, lui permet de rencontrer Guido, personnage innocent dans toute cette histoire, sur lequel elle pourra s’appuyer en cas de nécessité. Balguine convainc le pape mais se fait éliminer par les services secrets chinois. Anne, avec Guido, s’établit à Paris en attendant l’heure H. Toutes les armées sont en état d’alerte. A Paris, Anne apprend avec stupeur que le pape a rencontré Lian Chang:
    " Vous êtes innombrables, dit Jean XXIV, mais chaque grain est une vie, et quand un grain meurt tout le peuple est atteint car chaque grain est irremplaçable.
    Lian Chang eut un sourire. - Que de grains écrasés, que de grains perdus pour la satisfaction de quelques-uns, dit-il, et ceci depuis si longtemps. Jean XXIV porta lentement la main à sa poitrine : -Nous avons des torts, dit-il, les plus grands torts, et nous les confessons devant le monde et devant Dieu tout-puissant.  Lian Chang s’inclina. -Nous sommes prêts à vous accueillir, dit-il. "
    La Confédération Européenne Internationale, suite à cette rencontre, provoque la réunion d’une assemblée extraordinaire et la cessation des hostilités en vue d’établir une redistribution plus juste des biens mondiaux pour y inclure la Chine.
    Une histoire naïve  de politique-fiction à la frange du roman-catastrophe, écrite par un homme politique français. Quoique bien documentée, elle s’apparente davantage au conte de fées en ce qu’elle ne prend en compte,  dans le jeu de la mort qu’elle envisage, que les activités diplomatiques et politiques, négligeant la réaction des masses à l’événement.  Pétrie de bons sentiments, elle envisage même qu’un leader spirituel aussi impliqué dans le temporel que le chef de l’église de Pierre  puisse faire avorter le conflit. Ce qui ne s’est jamais vu dans la réalité et qui prouve bien que le lecteur est dans le domaine de la science-fiction.

  5. Type: livre Thème: menaces idéologiques, la cité foudroyée Auteur: Ulysse BRANDON Parution: 2006
    Coup sur coup deux bombes atomiques de vingt kilotonnes explosent sur Milan et sur Paris. Ghülam Ismaïl Khan qui a passé en force avec son camion de la mort, et bien qu’arrêté par la police, déclenchera sa bombe à proximité de l’Arc de Triomphe. La capitale dévastée reflète l’apocalypse rêvée par Al Quaïda à l’égard des Occidentaux :
    « La gifle du vent fut si violente que la tour Eiffel entière vacilla, comme prête à s’effondrer sur le Champ-de-Mars. Un hurlement métallique insensé résonna dans l’armature de l’édifice, et l’ascenseur se désagrégea : le toit, les portes et la cloison côté nord s’arrachèrent et s’envolèrent comme des feuilles de papier prises dans un courant d’air. (…)
    La tour Eiffel avait résisté ; seules l’antenne et les superstructures du sommet avaient été emportées par le souffle, plus les restaurants et les autres excroissances commerciales des deux premiers étages. En revanche, lorsque Mehdi se décida à contempler Paris, il ne put s’empêcher de pousser un cri d’angoisse : de tous côtés, ce n’étaient qu’incendies et dévastation.
    Sur la rive droite, la quasi-totalité des immeubles étaient éventrés ; il ne restait pratiquement plus un toit, plus une fenêtre, et des monceaux de débris  jonchaient les rues et les avenues. Plus au nord encore, il n’y avait plus rien, hormis quelques pans de murs de forme irrégulière, de-ci, de-là. Et puis partout, aussi loin que portait le regard, les flammes et la fumée noire d’immenses incendies, qui dévoraient des quartiers entiers, et ce nuage bizarre, déchiqueté, de couleur de plomb, qui planait au-dessus de la ville. »
    Les répercussions des attentats furent immenses dans le monde entier, sans toutefois générer une guerre totale dans laquelle l’Iran, le Pakistan, le Soudan ou l’Arabie Saoudite auraient été engloutis.
    Luc Lacordaire, un policier en exercice, a perdu sa femme Claire dans le cataclysme parisien et lui-même a été atteint par les radiations. Aussi, lorsqu’un an plus tard, devant l’incapacité des Etats à liquider définitivement le réseau terroriste, un coup de chance lui fit connaître la cache de Ben Laden dans une caserne désaffectée de Riyad, n’hésita-t-il pas un seul instant. Ne vivant désormais plus que dans l’espoir de se venger, il mettra en place l’opération devant aboutir à la capture du leader terroriste.
    Son informatrice, Shéhérazade, une prostituée marocaine avide d’argent, intelligente et authentique bombe sexuelle, possède en son pouvoir  Al Sallam, un médecin issu de la bourgeoisie arabe qui soutient le chef terroriste,  à qui il veut offrir une version illuminée du coran :
    « - Dis-donc, chouchou, tu pourrais quand même me le faire rencontrer, si tu m’aimes autant que tu le dis. – Qui donc ? s’étonna Al Sallam. –Ben Laden, voyons ! – Oh, c’est bien le moment de parler de lui ! – Allez, chouchou, puisque tu m’as raconté que tu l’avais vu à Riyad. – Moi, je t’ai dit ça ? Allons, continue et ne gaspille pas ta salive ! – Dis-moi où je peux le trouver, chouchou, s’il te plaît. Entre chaque supplique de Shéhérazade, les baisers reprenaient, toujours plus près de l’épicentre des préoccupations d’Al Sallam. – Et ça te servira à quoi ? Personne ne peut l’approcher, sauf cas exceptionnel. – Mais je suis un cas exceptionnel ! glapit Shéhérazade. Allez, dis-moi. -Dans le quartier Al Foutha, murmura le satrape. –Ne te moque pas de moi ! Si tu ne te moques pas de moi, je te jure que je viendrai chaque fois que tu m’appelleras, même dans ton pays ; je te jure que je ne ferai jamais passer personne avant toi ! –Mais je ne me moque pas de toi ! Il est dans l’ancienne caserne Al Babaka. Il y est arrivé juste avant les attentats de Paris et de Milan. – Chouchou, tu es un ange ! Et la bouche climatisée à la glace pilée se referma autour du braquemart à 100 millions de dollars. »
    Luc, avec Shéhérazade en son camp, obtient l’agrément des Américains, qui souhaitent rester au-dessus de tout soupçon. Avec efficacité, il enclenche un processus pour la capture de Ben Laden, identique à un mouvement d’horlogerie.
    Ayant recruté par l’intermédiaire de Michel de Fallières, lieutenant-colonel du 3 ème  RPMIA, un groupe efficace d’une vingtaine de paras, il articulera son action autour de la figure  de l’Irakien Assam Ouari, ressemblant à s’y méprendre à Saddam Hussein.Celui-ci, avec ses faux gardes du corps, demanderait à rencontrer Ben Laden au sein de sa caserne d’Al Babaka et l’enlèverait sous sédatif. Action périlleuse précédée par une logistique sans faille : faux-papiers pour tous, hôtels différents, véhicules tout-terrain à disposition, armes négociées d’avance.
    A l’heure dite, les protagonistes de l’enlèvement arrivent séparément à Riyad et prennent leurs quartiers. Les sommes d’argent promises, payées par les Américains, ont levé toutes les hésitations. L’avion du retour pour Djibouti, un Falcon, qui décollera d’un tronçon d’autoroute libéré de ses véhicules, attend déjà, veillé par Millari, un as du pilotage. Les premières phases du dispositif se déroulent  sans anicroche. Le commando, muni d’un armement sophistiqué se fait donner l’entrée de la caserne, trompant la vigilance, pourtant extrême, des gardes de Ben Laden. Déjà, cependant, le grain de sable qui risque de gripper la machine, s’est manifesté.  
    Barnabé Crèvecoeur, l’un des paras, trop pressé de profiter de sa prime se fera agresser dans la vieille ville de Riyad, éveillant la curiosité de l’astucieux chef de la police locale, Hassan Faradinn. Ce dernier fait part de ses doutes à la hiérarchie parmi laquelle, le colonel Al Samarriah, qui a introduit Ben Laden et sa bande en toute illégalité en Arabie Séoudite. Convaincu du sérieux de la menace française, peu enclin à être fusillé pour trahison, il fait bloquer les points d’accès à la caserne. Dans les quartiers terroristes, Ben Laden et ses gardes seront neutralisés, puis drogués. Sa barbe coupé, lunettes de soleil sur le nez, le leader d’Al Quaïda s’achemine vers la sortie avec ses ravisseurs, sans éveiller de soupçons. Lorsque le centre de la caserne saute, entraînant les principaux lieutenants d’Al Quaïda dans la mort, le barrage policier ne résistera pas à la force de frappe du commando.
    Pendant que Faradinn s’escrime à convaincre ses supérieurs d’acheminer des hélicoptères et des blindés sur le terrain, l’équipe française, débarrassée non sans casse de tout poursuivant, s’envole avec le Falcon au-dessus de militaires saoudiens impuissants. Samarriah, fait exécuter les terroristes présents sur le territoire saoudien, - autant de témoins en moins :
    « Al Samarriah contemplait le corps sans vie de Souleyman Barastan et de ses deux derniers acolytes. La Mercédes 600 était garée dans l’un des nombreux entrepôts abandonnés situés à la périphérie de la capitale, qui servaient de temps en temps de théâtre à ce genre de besogne. L’exécution s’était faite sans bavure, à bout portant ; les trois hommes n’avaient eu aucune possibilité de se défendre ni de s’enfuir.
    Mais ils n’avaient pas supplié non plus, et le colonel savait qu’il lui faudrait un peu de temps pour se défaire du regard de haine qui lui avait lancé l’Afghan, lorsqu’il avait compris que son ancien complice avait opté pour le nettoyage par le vide. »
    Puis il donne la chasse à l’avion des Français. Le Falcon, proche d’être abattu, sera sauvé en dernière extrémité par des avions américains venus à la rescousse, lui permettant d’atterrir dans le désert éthiopien. Les Français, qui traînent toujours avec eux Ben Laden inanimé, réquisitionnent les voitures d’un groupe de touristes, puis filent vers la frontière où, se croyant sauvés, ils seront pris en mains par l’armée française.L’enlèvement du terroriste a soulevé une intense effervescence diplomatique et des accords sont intervenus entre les pays impliqués par lesquels Luc, Michel, Jessica et les autres seraient prêts à être sacrifiés sur l’autel de la raison d’état.
    Heureusement, Thorenssen, le contact américain libère le groupe, le président Bush ayant déjà signé un accord avec la France qui livrera Ben Laden aux Etats-Unis. L’aventure pourrait s’arrêter là si le chef d’Al Quaïda, revenu enfin à lui, n’avait menacé le monde de l’explosion d’une autre bombe atomique s’il n’était libéré. Intense recherche. Michel découvre, grâce à Shéhérazade et à son intuition, que Léïlah, l’amie de la jeune fille, avait été contactée par Moundir et Toufik, deux de ses cousins, intégristes convaincus qui connaissaient aussi Al Sallam. La bombe devant volatiliser la Haye au moment précis où Ben Laden passerait en jugement, toutes les forces de police, coordonnées par Thorenssen et Michel, recherchent les deux frères chargés de l’acheminer en caravane sur l’objectif  :
    « Toufik s’était mis à hurler et avait brandi le téléphone de l’apocalypse en invoquant Allah. Il s’apprêtait à appuyer sur la touche verte qui composait le numéro programmé lorsque la voiture se fit mitrailler presque à bout portant. Une vingtaine de projectiles frappèrent Moundir, provoquant une mort quasi instantanée. En revanche, Toufik, en partie protégé par le corps de son frère, ne fut que blessé au bras et à la cuisse gauches.»
    Les terroristes éliminés, Ben Laden jugé, les protagonistes survivants de l’expédition purent enfin profiter des millions d’euros si durement gagnés.
    Un ouvrage de circonstance, politique-fiction, thriller technologique, roman d’action. La description de Paris assassiné a été particulièrement soignée par les auteurs et ouvre un récit que l’on ne lâche qu’à la dernière page. On aimerait que le texte qui s’inscrit dans un futur proche, passât de l’invraisemblance à la réalité. (Ce qui a été fait au moment où ce texte apparaît sur mon site!)

  6. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Oberleutnant Michel T.... Parution: 1931
    L’Oberleutnant T… raconte, comme l’un de ceux qui ont été acteurs sur le terrain, la nouvelle guerre de revanche préparée par l’Allemagne contre la France. T…, bien que francophile, est aussi militaire dans la grande armée allemande et convaincu par sa puissance, son organisation et par la beauté esthétique des manœuvres de la Oberste Heeresleitung (le Haut-Commandement).
    Abandonnant avec regret sa petite amie Erna – ce qui lui donnera l’occasion d’avoir des nouvelles de « l’intérieur », lorsqu’il se trouvera au front – , T… participe aux préparatifs d’invasion. Rassemblés en rangs épais, les guerriers teutons seront entassés dans des trains à bestiaux qui les ramènent près de la frontière lorraine, à Trèves, dans le plus grand secret :
    « Peu à peu sa vitesse s’accélère, aux croisements des voies, des heurts nous rejettent les uns sur les autres, des fusils appuyés contre la paroi s’écroulent sur les casques d’acier avec un bruit de ferraille, puis le roulement qui devient plus monotone nous plonge dans un vague engourdissement. Mais il fait si chaud dans cette boîte sans air, que nous en sommes incommodés (…)Donnerwetter ! C’est trop fort. On nous a calfeutrés comme des bagnards, dans cette roulotte infecte. »
    L’heure H provoquera dans tout le pays une immense surprise et sera censée agir de même sur un ennemi qui, selon les dires du Heeres Kommando, sera incapable de résister à la furia germanique :
    « Toute cette colossale affaire a été étudiée dans ses plus petits détails, suivant la véritable méthode allemande. Sans entrer dans de trop longues explications, voici en quelques mots le schéma de notre attaque brusquée (…)
    Vous en saisirez encore mieux le mécanisme quand je vous aurai dit que chez les Français règne un esprit résolument défensif, que leurs formations actives sont peu instruites, à cause de leur service à court terme. L’instruction d’ensemble de leur armée est inexistante et chez eux la protection contre les gaz n’est pas assurée. Respectueux des conventions de Genève, ces idiots-là s’en remettent à des chiffons de papier pour se défendre. »
    Engagé sur le terrain, en attente dans des fossés, avant de monter à l’assaut, que l’artillerie allemande ait suffisamment «amollie» les défenses adverses de la ligne Maginot, son incursion sur le champ de bataille sera considérée avec optimisme par T… , comme une promenade de santé. Il lui faudra vite déchanter. Et ce ne sont pas les injures allemandes de « Schweinhunde » (saloperies !) et «Arschloch » (trou de c...!) employées constamment par les gradés, qui changeront quoi que ce soit à l’issue de la bataille.
    La progression des troupes allemandes est bloquée net par un épouvantable tir de barrage qui créera des vides importants autour du narrateur et forcera les adeptes de Wotan à une retraite précipitée où, incrustés dans des trous d’hommes creusés à la hâte, ils attendront dans l’angoisse la fin du déluge de fer :
    « On entend des cris, des appels déchirants : A boire ! – Au secours ! – Maman, maman ! Tout à coup, un corps couché devant une maison basse se redresse : on dirait une vision de l’enfer. Le malheureux n’a plus figure humaine, son visage n’est qu’une bouillie sanglante, un hideux moignon rouge d’où le nez est arraché, les lèvres coupées, un œil pend hors de son orbite. Ce fantôme épouvantable tend un bras dans le vide, d’un geste vengeur qu’il paraît diriger vers moi : - Salauds ! crie-t-il d’une voix rauque et comme inhumaine, criminels ! Puissiez-vous crever tous !… »
    C’est de là qu’il assistera à l’utilisation d’une arme secrète, mise au point par le génie allemand, des ondes magnétiques capables d’arrêter les moteurs français. Ainsi, de nombreux avions venus à la rescousse contre des dirigeables allemands porteurs de bombes, exploseront-ils en plein vol,  non sans avoir, au préalable, par le sacrifice héroïque des aviateurs, anéantis les engins menaçant la frontière française.
    Les troupes allemandes progressant trop lentement, le Génie chimique, en vue d’accélérer le processus, envoie des gaz toxiques vers la frontière et au-delà, à l’aide de ballonnets auto-guidés. Ce fut un horrible assassinat. Avec son groupe, T… progresse dans un territoire pavé de cadavres de soldats, de civils ou d’animaux. Des villes comme Thionville ou Metz sont dépeuplées :
    « Dans les abris que nous franchissons et dépassons, ce n’est que cadavres couchés, entassés les uns sur les autres, sans blessure apparente, mais déjà en décomposition. Des escouades entières sont étendues, les traits horriblement défigurés : la plupart de ces malheureux qui étouffaient sous leurs masque, l’avaient enlevé et avaient déboutonné leur capote, offrant ainsi une plus sûre proie aux gaz. Ailleurs, ce sont les bombes « Elektron » qui ont travaillé (…)
    Les soldats, chassés au-dehors par les flammes, avaient été aussitôt victimes des gaz, dont la plus terrible est sans contredit la fameuse « lèpre galopante » », dix fois plus active et plus dangereuse que l’ypérite.
    Ce mélange (…) a pour propriété de provoquer instantanément des abcès purulents, il pénètre partout, à travers les murs, comme à travers les vêtements et exerce très rapidement son action corrosive. En quelques heures, celui qu’il atteint n’est plus qu’une plaie gangréneuse et la mort ne tarde pas à survenir par nécrose osseuse.»
    En face de ce crime horrible, son optimisme du début a fondu. T.. comprend enfin que les Allemands sont dirigés par une bande de criminels ayant à leur tête Von Sekt et Hitler, et qu’ils mourront tous, laissant une Allemagne exsangue et dépouillée. A ce pessimisme répondent les lettres de plus en plus sinistres d’Erna. La région de l’Est de la France semblant maintenant libre d’accès (et pour cause !) les troupes d’infanterie manoeuvrent pour pénétrer plus avant dans le pays :
    « Ca et là, des bûchers fument… La Lorraine est devenue une immense nécropole et ce n’est qu’au-delà de Metz, à Pagny-sur-Moselle, durant un arrêt dans la gare, que j’aperçois enfin des habitants du pays, sous les espèces de quelques femmes, le visage caché par un masque, qui balayent les quais sous la surveillance de deux feldgrauen, masqués eux aussi. »
    Tout à coup, une escarmouche survenue dans les bois de Kattenho (Catenom) révèle une action française de grande envergure. Le bois est si consciencieusement pilonné par l’artillerie que les divisions germaniques se dissolvent littéralement. Autour de T… s’accumulent les cadavres déchiquetés. Lorsqu’il reprend conscience c’est sur un lit d’hôpital de l’armée française. Découvert avec deux balles dans le poumon, il avait été dirigé – en dépit du fait qu’il fût allemand - dans un lazaret du Sud de la France, par des médecins français fidèles aux valeurs de l’humanisme universel.
    Emerveillé, T… revit, enchanté par la nature magnifique qu’il découvre autour de lui et par la bienveillance de cet ennemi qu’il avait à tort si longtemps méprisé. Il était sûr que pour lui la guerre était finie.  Elle l’était en effet, mais pas de la manière qu’il l’entendait, puisqu’il mourut le matin même sous des bombardements allemands lesquels, prétendait-on en Allemagne, avait détruit une fabrique de munitions françaises cachée sous les oripeaux d’un hôpital militaire. L’Allemagne, s’étant mis au ban des pays civilisés, perdit la guerre et sa souveraineté.
    « La Surprise (Überraschng) » est un roman digne d’intérêt. Truffé d’expressions en allemand (traduites), le récit évoque la lourdeur du mécanisme militaire germanique, sa haine viscérale de la France, son manque de sens moral, le cynisme de ces chefs prussiens remplis de morgue et de certitudes. En un style dépouillé, volontairement cru et provocateur, il décrit les horreurs guerrières comme Malaparte ou Barbusse, n’entrevoyant pourtant pas un seul instant le changement de perspective que devait apporter sur le théâtre des opérations la nouvelle guerre de mouvement.

  7. Type: livre Thème: menaces climatiques Auteur: John Bowen Parution: 1958
    M. Uppington, un bricoleur de génie, a trouvé le moyen de faire pleuvoir à l’aide d’un catalyseur,  ce qui aiderait beaucoup les agriculteurs. Il en fait part au narrateur, Clarke, employé de Foyles and Cie,  et la première - et dernière tentative - a lieu dans un champs près de Londres. Le ballon explose. M Uppington y laisse sa vie. Il commence à pleuvoir,  une pluie que rien n’arrêtera plus : c’est la "Grande Pluie " :
    Les Noé se mirent à proliférer en Grande-Bretagne. Il y avait le Noé de Plymouth, le Noé de Bradford, et un vieux fou qui habitait à la sortie de Luton.  Etant les premiers, ils furent ceux qui eurent le plus de publicité, mais beaucoup d’autres les suivirent, maudissant les péchés du monde et fabriquant tous, avec une habileté variable, des arches dans lesquelles ils avaient l’intention d’entasser leurs familles et autant d’animaux qu’ils pourraient s’en procurer. "
    La situation, d’abord préoccupante, devint bientôt dramatique. Les autorités anglaises organisent des évacuations et les regroupements des personnes sinistrées dans des camps situés sur des hauteurs :
    " En février, ce fut le dégel. Dans le pays entier, les rivières gonflées débordaient de leur lit, emportaient les ponts, inondaient les fermes, noyaient les gens et le bétail qui avaient survécu au froid.  Les rues de Londres étaient sous l’eau. Les fours crématoires de Golders Green et de Woking travaillaient vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Ils recevaient le combustible en priorité, car on ne pouvait enterrer les morts. "
    Clarke a pris en charge Wendy, la femme d’un ami, pour la mettre en sécurité. L’entreprise est périlleuse puisque petit à petit, l’eau monte, submergeant les rues des villages, l’ensemble de la campagne anglaise, puis les hauteurs. Wendy est prise d’une mauvaise grippe : elle tousse sans interruption. Les camps,  de cloaques se transforment en mouroirs, les forces d’autorité se délitent, les gouvernements disparaissent. Pour comble de malheur l’arrivée de l’hiver, transformant la pluie en neige, provoque une famine généralisée avec apparition du cannibalisme alimentaire. Clarke laisse Wendy dans un camp et reprend la navigation sur une sorte de mer intérieure (et sous la pluie) en compagnie de Sonya, une pianiste sauvée des eaux. Ils se retrouvent quasiment seuls dans l’univers lorsque leur dérive les rapproche d’une espèce d’arche publicitaire (celle des produits Glub) occupée par un petit groupe d’individus qui les recueille :
    "Ce radeau appartenait à l’International Unitarian Breakfast Food Company. Il était en balsa, et généreusement pourvu d’un stock de Glub, " l’aliment idéal du petit déjeuner : suffit à lui tout seul ! " l’International Unitarian Breakfast Food Company affirmait que l’homme pouvait se nourrir exclusivement de Glub ".
    On y trouve Arthur Rensham, le patron, Muriel Wesley, une jeune femme et son mari Otterdale, un culturiste, Tony Ryle, Gertrude Harrisson, une actrice,  ainsi que Banner Harold le pasteur, tous gens de hasard. Clarke a des difficultés à se faire admettre à bord contrairement à Sonya dont l’avenir de reproductrice plaît à Arthur. Celui-ci impose une stricte discipline, acceptée implicitement par les autres, distribue punitions et récompenses et assume enfin le leadership que la vie d’avant lui avait refusé :
    " Avez-vous la moindre idée de la proportion  de déficience mentale en Grande-Bretagne ces cinquante dernières années ? Non, bien sûr. La proportion de crétins et de demi-crétins s’est accrue parce que, si l’on peut convaincre les gens intelligents de pratiquer le contrôle des naissances, on ne peut enseigner les méthodes contraceptives à des idiots (…) En d’autres termes, les hommes ont accru leur quantité et diminué en qualité ; les imbéciles ont de plus en plus dépassé en nombre les intelligents, et, sous le système des démocraties, ils jouissaient du même pouvoir politique (…) la folie. Nous allions vers la folie. - Je vois -  Le Déluge a tout balayé. Seuls les êtres intelligents y survivront, avec ceux des êtres stupides qu’ils jugeront bon de sauver avec eux. - Pourquoi en sauver ? - Pour les travaux grossiers. Vous avez observé les proportions physiques de Mr. Ryle. Il nous sera très utile quand les eaux se retireront et que nous entreprendrons notre installation. De plus, si l’on procède à des croisements judicieux (…) - Et si les eaux ne se retiraient pas ? -Il est évident que si, affirma Arthur avec colère. Vous figurez-vous que la sélection naturelle compte nous remplacer par des poissons ? "
    La place de chacun à bord étant bien définie, le temps  vital se structure à travers les jeux relationnels qu’ils établissent entre eux. Leurs comportements se dégradent au fur et à mesure que la pluie dure. Muriel et Gertrude rivalisent entre elles pour savoir laquelle des deux a le mieux servi l’art dramatique. Quant à Clarke, la jalousie le taraude à l’idée que Sonya se livre avec Tony , en un lieu réservé au fond de la cale, à des exercices de musculation.
    Arthur, lui, reste imperturbable. Se sentant désigné par le destin pour conduire l’arche à travers tous les périls, il affronte victorieusement la tempête, un tsunami géant provoqué par un effondrement océanique, ainsi qu’une pieuvre gigantesque qui, comme celle du capitaine Nemo, menace l’esquif :
    " Vous êtes Dieu ! criait-elle à Arthur. Vous êtes Dieu, vous nous l’avez dit ! Faites que cela s’arrête !-Ne dites pas de bêtises, l’ai-je interrompue. Il ne voulait pas être pris au sérieux.  -Mais Muriel a continué à crier : " Dieu ! Dieu ! Faites que cela s’arrête ", bientôt soutenue par Gertrude  -Alors lâchez-moi, a dit Arthur. Otez vos mains de ma chasuble.
    Les deux femmes ont cessé de s’accrocher à la couverture, tout en restant à genoux, les cuisses reposant sur les mollets. D’un geste, Arthur a indiqué à Banner que nous devions aussi nous agenouiller, et nous avons obéi. Il a paru s’en satisfaire. Tenant en mains deux coins de la couverture, il a ouvert les brais comme des ailes, est resté un instant immobile pendant qu’elles se déployaient, puis les a repliées en avant. -Au nom des pouvoirs qui me sont dévolus en tant que Dieu, a-t-il clamé, je vous commande de vous arrêter. "
    La raison d’Arthur bascule: il se prend pour Dieu,  fondateur d’une future humanité ! Les autres lui devront dévotion et adoration. Tout acte à bord du bateau constituera les éléments d’un nouveau rituel. Il se fait fabriquer deux masques  - car la face d’un dieu ne saurait être regardée impunément ! -, il y a le masque de dieu rieur et celui de dieu sérieux, qui exprime la colère. Ne quittant plus sa cabine devenue le Saint des Saints, il se fait apporter à manger. Le reste du groupe lui passe ses lubies, les considérant comme mineures par rapport au danger que représente la submersion de tout.
    Bientôt, le pire se fait jour. Afin de se concilier le Dieu Arthur, le Grand Prêtre Arthur (car Dieu est aussi l’instrument de Dieu) envisage, à l’instar des tragiques grecs, de sacrifier une Iphigénie pour que les eaux baissent. Or Sonya est enceinte des œuvres de Clarke et elle accouchera sous peu. Arthur arrache à Clarke son consentement au sacrifice, donné du bout des lèvres. Clarke, taraudé par la monstruosité dont fait preuve Arthur, s’en ouvre à Tony :
    " Arthur dit que le Dieu demande un sacrifice, que c’est pour cela qu’il est sorti de la mer. Il a dit qu’il demande une vie, neuve et sans tache.  Il y eut un long silence. - Vous êtes tombés sur la tête, a dit Tony, et il est rentré. - Il est allé droit au temple. Il n’a même pas frappé. - Quand Arthur l’a vu, il a mis précipitamment le masque sévère. "  Hi ha… " a-t-il commencé, avant que Tony ne le lui ait arraché. - Assez fait joujou, a-t-il dit. "
    Tony, dans sa simplicité, prend les décisions qui s’imposent: il poignarde Arthur et,  voulant le jeter par-dessus bord, celui-ci l’entraîne dans sa mort. Peu de temps après, la pluie cesse, le soleil se met à briller, une nouvelle terre se profile à l’horizon.
    Bowen signe un roman remarquable sans concession au réalisme de la catastrophe évoquée avec son cortège d’horreurs. Pourtant, l’essentiel n’est pas là. L’analyse des interactions psychologiques entre les personnages placés dans une situation limite, débouche sur un univers où le mythe se construit à travers le rite. Avec finesse et humour, l’écrivain se livre à une recréation du monde et de l’homme dans laquelle, la catastrophe ayant décapé l’âme humaine, cette dernière se révèle dans toute sa noirceur. " la Grande Pluie " est une oeuvre de refondation comme l’est " le Seigneur des Mouches " de Golding.

  8. Type: livre Thème: guerres futures 1, fins du monde, fins de l'humanité Auteur: Georges LE GLOUPIER Parution: 1981
    Gérard Manvussa  petit truand paresseux et inapte au travail est coincé sur un boulevard à Paris. Il espère rentrer chez lui avant que l’orage n’éclate, bien qu’il n’ait pas un sou en poche. Il pense voler une voiture et se rabat sur un triporteur.
    Les cris d’orfraie poussés par une concierge alertent la maréchaussée. C’est la poursuite infernale qui se conclura par une rencontre de calandres avec la voiture d’Emma. Grâce à cette jeune femme, tout aussi anti-conventionnelle que lui, Gérard échappe aux policiers. Il sent qu’Emma ne lui est pas indifférente et lui fixe un rendez-vous pour le lendemain dans son taudis en se rendant chez ses parents qu’il déteste. Comme c’est son anniversaire, ils ne pourront lui refuser quelques billets. Chez eux il apprend de la bouche de sa mère qu’il est né d’un autre père, un bonhomme vieux et curieux qu’elle n’a plus jamais revu mais qui l’a chargé en son temps de révéler à Gérard son origine et son identité.
    Goguenard, Gérard se rend chez Simon Cussonnet qui l’attend. L’abominable vieillard connaît tout de lui et lui révèle l’extraordinaire vérité : Cussonnet est Dieu et, par conséquent son fils Gérard, également ; mais c’est un dieu paillard, jouisseur, fatigué des hommes qu’il a crées,  et qui envisage de prendre sa retraite. Se retirant du monde pour se consacrer exclusivement aux femmes, il délègue à Gérard sa toute-puissance.
    Celui-ci de retour chez lui  prendra progressivement conscience de son pouvoir lorsque voulant arranger son taudis il lui suffit de le vouloir pour avoir. Ayant rendez-vous avec Emma ce jour même, il embellit son intérieur en y accrochant la Joconde qu’il fait disparaître in petto du musée du Louvre. Leur nuit d’amour est merveilleuse et Gérard ressent un trouble profond : pour la première fois, il est en train de tomber amoureux d’une femme. Lorsqu’il l’annonce à Emma, celle-ci reste très distante : elle ne croit pas à l’amour.
    Profondément contrarié, l’Odieux tout-puissant, anarchiste et amoureux transi, se libère de sa mauvaise humeur en perturbant la vie sociale des humains. Après avoir envoyé la Tour Eiffel au sommet du Mont Blanc, il bafoue le président de la République lors d’une interview télévisée et, comme si cela ne suffisait pas, transfère la ville de Paris au bord du lac Titicaca :
    " Paris se trouvait désormais au bord du lac Titicaca à cheval sur le Pérou et la Bolivie, à près de 4000 mètres d’altitude. Les banlieusards venant travailler dans la capitale ne découvrirent, à la place de celle-ci, qu’une vaste étendue désertique au bord de laquelle s’interrompaient brusquement routes et voies ferrées. Seule la Seine était toujours là, sans ces ponts. "
    De tels bouleversements provoquent les prémices d’une guerre européenne, impossible à mener puisque Gérard transforme et les armes et les hommes :
    " Les soldats, n’ayant plus d’officiers pour les commander, auraient alors pu peinardement rentrer chez eux. Ils n’en firent rien, s’associèrent entre ex-ennemis, se mirent à rançonner la population civile et se livrèrent, pour passer le temps, à d’affreux holocaustes sur celle-ci, décimant et détruisant des villages entiers avec d’autant plus d’allégresse qu’ils étaient assurés de ne pas subir de représailles. "
    Agacé de voir les religieux évoquer Dieu à tout instant, il envoie sur orbite d’attente toutes les cathédrales, temples, mosquées qui jalonnent le monde, bientôt suivis par le pape lui-même :
    " L’instant d’après, le palais papal tout entier, et avec lui tous ses occupants, du pape lui-même au plus insignifiant des gardes pontificaux, prenaient leur essor et décollaient, avec toute la lenteur convenant à la solennité du moment, pour rejoindre dans la stratosphère les temples arrachés au sol français. "
    Enfin, il se décide de vivre dans la solitude avec la seule Emma, comme au début des temps, quand on jouait la pièce d’Adam et d’Eve. Alors, de par sa seule volonté, il abolit toute la création en faisant disparaître la totalité de l’espèce humaine, à l’exception d’Emma (et de Berthe on ne sait jamais!), qu’il rend immortelle.
    Roman truculent, humoristique, au texte argotique lestement  troussé, " l’Odieux tout-puissant " se greffe sur le genre cataclysmique comme par hasard, et sans vraiment y toucher. Un petit roman très curieux.

  9. Type: livre Thème: la cité foudroyée, guerres futures 2 Auteur: J. BERNARD-WALKER Parution: 1916
    A la conférence de paix de Genève, l’Allemagne est sommée de désarmer et de payer en guise de dommages de guerre, 75 milliards de marks-or. Elle feint d’accepter, mais refuse le démantèlement de sa flotte. Le kaiser envisage une nouvelle possibilité : celle de faire payer les Etats-Unis à la place de l’Allemagne. Le plan, mis au point de longue date, se déroule avec une précision toute germanique. D’abord, une partie de la flotte se dirigera vers les grands ports maritimes des USA, dont notamment New York et Boston. Pendant que des escadrons de cyclistes, débarqués clandestinement (ce que nous appellerions aujourd’hui des « forces commandos ») s’assureront des centres de communication, les villes seront bombardées sauf si elles capitulent en acceptant de verser un premier acompte sur les milliards à venir. New York, prise sous le feu des cuirassés appuyés par des sous-marins et des aéroplanes,  essaye  de tergiverser. Mal lui en prend. Elle sera bombardée sans pitié et de façon systématique :
    « En quelques minutes, l’affluence des fuyards était devenue si énorme que tout trafic avait dû cesser. Et puis, à mesure que se multipliaient les bombes lancées par le navire amiral, des blocs immenses de maçonnerie étaient venus s’abattre sur cette cohue affolée, blessant et tuant les malheureux par centaines, sur le lieu même où ils se tenaient. Mais d’autant plus les survivants s’efforçaient d’avancer ; et sous la pression fatale des plus forts les faibles tombaient : femmes et enfants étaient foulés aux pieds, tandis que d’autres infortunés périssaient debout, faute d’air respirable ; et, là encore, des centaines de victimes mouraient à la fois.»
    Les gratte-ciels, la mairie, les centres de communication volent en éclats. A Boston, la mise au pas est moins rapide mais tout aussi complète. L’arrivée des cyclistes allemands n’est pas passée inaperçue et a permis aux notables de fuir la ville. Pourtant, ici comme ailleurs, la ville est soumise à un chantage : ou elle paye une partie des indemnités allemandes ou elle sera réduite en miettes. En un deuxième temps, aura lieu la bataille navale des Antilles qui décidera du sort de la guerre. Par un subterfuge tactique, les Allemands donnent à penser que la totalité de leur flotte est engagée dans le combat, bloquant ainsi les gros navires de défense américains. L’arrivée opportune des renforts allemands, cachés jusque-là derrière la pointe de Guantanamo, réduira à néant les espoirs américains :
    « Bientôt, en effet, un ouragan de fer et de feu balayait la tête de la ligne américaine. D’après un plan arrêté d’avance, tout l’effort des navires ennemis s’adressait, en premier lieu, à l’Oklahoma. Jamais encore pareille averse d’obus ne s’était abattue sur le pont d’un navire. Durant les quelques brèves minutes qui précédèrent la perte définitive de l’Oklahoma, celui-ci avait littéralement cessé de ressembler à un navire de guerre. Et sans arrêt, les Allemands s’acharnaient à le détruire, en riant de sa triste agonie ! »
    Cette situation de faiblesse est essentiellement due, selon l’auteur, à l’inaction scélérate du Sénat américain qui a non seulement éparpillée les forces militaires du pays dans toutes les directions mais encore bloqué les crédits nécessaires à la création d’une armée moderne et efficace :
    « L’action décisive, d’après ce plan allemand, aurait à être livrée entre les deux escadres de cuirassés ; et dans une telle action notre escadre, à nous, trouverait en face de soi une force deux fois supérieure . Ah ! si le Congrès, toutes ces années passées, n’avait pas obstinément refusé d’écouter les avertissements de notre conseil de la marine, et s’il avait voulu, comme nous le lui demandions, voter la création d’une escadre capable de défendre nos côtes, alors seulement nous aurions été prêts, aujourd’hui  à affronter la lutte avec des armes égales ! »
    La troisième phase consistera à parachever la victoire allemande en s’emparant des centres industriels pour couper l’Amérique de ses ressources, potentiellement énormes. Précédée par les cyclistes,  une armée de 100000 fantassins sera déployée sur le sol des Etats-Unis, pénétrant largement au cœur du pays, jusqu’à Washington :
    « A l’exception des mitrailleuses, dont chacune était emmenée sur deux tandems, tout l’ensemble de ce corps se trouvait disposé suivant l’ordre de marche le plus léger possible, chaque homme n’emportant avec soi que la ration de deux jours de vivres ainsi qu’un certain supplément de munitions. Dès que la troupe entière avait fini de débarquer, on avait allumé les lanternes des bicyclettes, et l’on était parti en silence, dans la nuit. »
    Le gouvernement, retiré à Pittsburgh, où de lourdes batailles opposent les deux protagonistes, cèdera en fin de compte : il versera les indemnités demandées car c’est à cette seule condition que les Germains libéreront le territoire des Etats-Unis.
    La « Vengeance du Kaiser » est une guerre future «d’invasion » dans la droite ligne tracée par « la bataille de Dorking ». Pour irréaliste qu’elle apparaît, le message que délivre le récit est clair : halte aux incuries des politiques, qu’ils cèdent la place aux militaires éclairés !

  10. Type: livre Thème: menaces et guerres nucléaires Auteur: Ray BRADBURY Parution: 1950
    Une vision intimiste et marginale de la guerre nucléaire qui vient d’éclater aux Etats-Unis. Dans une ferme isolée, au bord d’une route du Nouveau Mexique, Hernando plante et récolte son maïs. Personne ne passe jamais par là, sinon très rarement. Un jour, surgit l’incroyable :
    "Et soudain, comme à un signal donné, les voitures arrivèrent. Des centaines, sur des kilomètres, qui filaient devant lui. Grandes, longues et noires, en direction du nord, vers les Etats-Unis, rugissantes, prenant trop vite les tournants.
    Les avertisseurs n’arrêtaient pas. Il y avait quelque chose dans l’expression des occupants entassés à l’intérieur, quelque chose qui le plongea dans un profond silence. Il se recula pour mieux laisser passer les voitures. Il les compta jusqu’à en être fatigué. Cinq cents, mille, et il y avait quelque chose sur les visages. Mais ils allaient trop vite pour qu’il pût distinguer ce que c’était."
    Une bombe thermonucléaire venait d’éclater dans le Sud et tous les habitants de cette région tentaient de la fuir. Hernando ne s’émeut pas pour si peu. Et comme Louis XVI inscrivant " rien " dans son cahier de notes le jour du 14 juillet 1789, à l’affolement d’un des fuyards lui signifiant que c’était la " fin du monde ", il retourne à son travail en se demandant ce que c’est que " le monde ".
    Un récit très bref mais avec le style de Bradbury. Une force tranquille émane de ce  bijou de philosophie zen.