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    Bienvenue dans la Base de Données des livres !

    Vous y trouverez des ouvrages post-apo que la communauté souhaite partager. Il vous est possible de rajouter des fiches de livres, alors partagez vos trouvailles avec la communauté FoGen ! Une grande partie des ouvrages que vous trouverez sont ici grâce au travail de Jacques Haesslé sur son site : http://destination-armageddon.fr/index.html. Un grand merci à lui pour son travail exceptionnel !

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  • 711 livres

    1. Type: livre Thème: menaces et guerres nucléaires Auteur: Pat FRANK Parution: 1961
      Henri Hazen, qui deviendra plus tard fusilier-marin, flirte avec sa petite amie, la nuit, sur une plage de Floride. Il sera témoin de l’arrivée sur le sol américain de quatre espions russes, sans savoir qu’ils seront les déclencheurs d’un conflit nucléaire avec les USA. Tous les quatre, parfaitement formés à la vie américaine ont pour objectif de se fondre dans la foule, puis de se faire engager dans l’armée de l’air, de profiter de leur situation professionnelle pour saboter les B-99, gros porteurs seuls capables de contrer la flotte sous-marine russe envoyée en direction de l’Amérique.
      L’un d’entre eux, le colonel Stanislaw Lazinoff, alias Stanley Smith, réussit particulièrement bien sa mission. S’étant trouvé un emploi d’aide-cuisinier à la base d’Hibiscus, il fournit aux pilotes les paniers-repas, ainsi que des bouteilles thermos piégées, destinées à exploser lorsque l’avion atteindra une certaine hauteur. Quatre appareils se perdent ainsi, provoquant dans la population américaine une réaction d’inquiétude, ce qu’escomptaient les Russes.
      D’autre part, un groupe de veille militaire « Prévisions et desseins de l’ennemi », comportant des stratèges de tous bord dont notamment Katharine Hume, déléguée de la Commission de l’Energie Atomique, et Jesse Price, commandant de l’Armée de l’Air, après examen des événements, arrive à la conclusion que des saboteurs russes opèrent sur le territoire américain. Des signes non équivoques en provenance de la Chine, de Formose, d’Inde, qui décrivent une agitation soviétique grandissante, leur suggère l’imminence d’une guerre nucléaire :
      «Etant donné l’importance que l’on doit attacher à la destruction de New-York ; le centre de finances, de communications et d’industries le plus complexe du monde ; des moyens spéciaux doivent être mis en œuvre. En complément des sous-marins, deux remorqueurs de haute mer chargés de bombes H devront pénétrer dans le port de New-York quelques heures avant le déclenchement des hostilités. Leurs équipages seront sacrifiés. Si la Marine Rouge considère que ce procédé ne risque pas de compromettre la sécurité des opérations d’ensemble, il peut également être utilisé sur des cibles de première importance telles que Boston, Baltimore, Philadelphie, San Francisco, Los Angeles et Norfolk. Le rapport estimait que l’attaque venant par mer tuerait quarante millions d’Américains, dont trente millions au cours des six premières heures. L’aviation Rouge devait se concentrer sur les bases aériennes américaines du monde entier et les anéantir en un parfait synchronisme. »
      D’après le groupe, l’événement aura lieu une veille de Noël.
      Leur rapport « Prévisions d’actions militaires russes », censé prévenir les USA, est mis au pilon par le général Clumb, leur chef de projet et incapable notoire. Le groupe est dissous. Ils décident de ce fait d’avertir directement les autorités compétentes, chacun selon sa sphère d’influence. En pure perte.Heureusement, l’un de membres, Félix Frombourg, appartenant au FBI, aura à traiter l’affaire du banquier Robert Gumol, en déplacement à La Havane, à qui l’on a volé une forte somme d’argent. Après interrogatoire, Gumol s’avère être un contact russe en cheville avec les saboteurs, et l’argent celui d’une banque soviétique. Il livre le nom de Stanley Smith.
      Pris la main dans le sac, le saboteur est arrêté par Jesse Price. L’état-major, enfin convaincu de la réalité de la menace, fait décoller les B-99 qui bombardent la flotte russe, marquant l’arrêt de l’invasion. Les conséquences immédiates provoquent un remaniement gouvernemental à Moscou. Les espions russes seront fusillés.
      Un petit roman dans la tradition de la guerre froide. D’une lecture agréable, le récit va à l’essentiel. En auteur éprouvé, Pat Frank signe une histoire menée tambour battant, avec une grande économie de détails.

    2. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Léopold FRACHET Parution: 1948
      Le professeur Solvol a réuni autour de lui un aréopage de financiers pour leur expliquer sa fantastique découverte. Par un changement opéré dans la structure atomique de l’eau, Solvol a pu solidifier l’eau de mer. Il envisage de construire une route sur l’Atlantique pour relier l’Europe à l’Amérique en sollicitant des fonds pour son projet. Celui-ci n’eut pas le temps de voir le jour pour deux raisons. La première, c’est que le professeur Solvol disparut peu de temps après sans plus donner de signes de vie. La deuxième, c’est le déclenchement de la deuxième guerre mondiale où les Allemands triomphèrent sur terre et sur mer. De terribles batailles maritimes eurent lieu qui devaient empêcher l’approvisionnement de la Grande-Bretagne en fournitures de guerre :
      «Les mers étaient sillonnées par de véritables forteresses flottantes qui bravaient les pires tempêtes uniquement pour aller surprendre l’ennemi dans ses repaires les plus inexpugnables. Et l’ennemi, bien entendu, répondait par les mêmes moyens et rendait les coups avec une générosité digne d’un meilleur usage. Bref… La guerre faisait rage et menaçait de détruire le monde entier pour peu qu’elle durât encore longtemps à ce rythme épouvantable. »
      Alors que le sort semblait favorable aux Alliés, soudainement, de nombreux navires coulèrent, comme s’ils avaient heurté un obstacle transparent et solide.Les Allemands, qui avaient enlevé le professeur Solvol, avaient mis en application son invention, barrant la route maritime depuis les Açores jusqu’à l’Islande. Cette digue fut puissamment bombardée mais les brèches immédiatement comblées par les diligents sous-marins allemands qui utilisaient le « Désintégrateur A » mis au point par Solvol. Les Alliées étaient en passe de perdre la partie malgré les batailles titanesques livées autour de l’obstacle, lorsqu’un aviateur français nommé Dumoulin, fortuitement évadé d’un camp allemand, les éclaira sur le sort du professeur Solvol, qu’il avait fréquenté dans une cellule du camp de Meresbourg. Le savant était mort depuis, mais avait confié les principes de son invention à Dumoulin, surtout les plans de construction d’un « Désintégrateur B », censé désunir les atomes solidifiés :
      « Ce ne fut qu’au bout de quatre heures que le premier résultat apparut : une fissure dans le barrage. Puis cette fissure grandit, grandit encore, prit la forme d’une véritable brèche, semblant s’affaisser dans l’abîme. Littéralement, elle fondait, ce qui n’avait rien de surprenant puisque les éléments du Solvol dont elle était composée avaient été empruntés à la mer. Sans bruit, presque instinctivement, la route de l’Atlantique retournait à sa forme première. Bientôt elle fut complètement disloquée sur plusieurs milles de longueur. D’énormes blocs de Solvol flottaient et partaient à la dérive, semblables à des icebergs. »
      Un travail scientifique acharné permit la démolition progressive du mur et fut la cause de la victoire des Alliés sans que l’Européen moyen ne sût jamais rien de cette aventure.
      Une petite nouvelle gauchissant l’histoire datée par des éléments conjecturaux injectés dans une guerre réelle qui, du coup, prend une dimension onirique.

    3. Type: livre Thème: sociétés post-cataclysmiques 1, menaces climatiques Auteur: Guy THUILLIER Parution: 1999
      Arthur Taillandier, cybernéticien, habitant la périphérie de Paris en 2099, est le héros manipulé du récit.Avec ses amis, Seb, Marie, Thétys, il s’abandonne aux délices frelatés d’un futur urbain abominable. L’Europe unie et fasciste du président Linhardt dans laquelle le seuil de pollution impose le port constant d’un masque, la « Zone », qui recueille les «drop-out » avec leur langage codé et leur violence, l’ensemble d’une technologie high-tech et l’usage constant des drogues forment le cadre de l’univers d’Arthur :
      « De son point de vue, il découvrait toute la vallée de la Seine entre Mantes-la-Jolie et les Mureaux, construite sans interruption. Les coumarous alternaient avec les Zones Industrielles et Commerciales, les Pôles d’Activité et les Cités, chaque ensemble retranché derrière ses barbelés, ses murs, ses miradors. Sur le fleuve brun sombre, les cargos, et les péniches, à la queue leue leu, remontaient vers le port autonome de Paris. A l’ouest, tout proche, se détachait le mirador du compound d’Aubergenville, avec son vigile devant la mitrailleuse lourde. Au loin, le soleil embrasait les tours de Mantes-la-Jolie, une des Cités les plus chaudes du Far West francilien. Des nuées de pigeons nichaient dans les étages supérieurs, à l’abandon, tournoyaient autour des gratte-ciel en un ballet permanent, comme des vautours au-dessus d’un charnier. Le grondement sourd qui montait des dix voies de l’autoroute servait de bande-son à ce paysage banlieusard. »
      Professionnellement, il est attelé au projet « Cogito » avec son patron Nelson Westley et ses amis, projet qui doit, en s’articulant sur les souvenirs du cerveau humain, créer des univers de jeux (C-Univers) de plus en plus réalistes et évolutifs. Car la réalité virtuelle constitue la grande distraction de cette société hiérarchisée en huit cercles progressifs, suivant le degré de dangerosité ou de réalisme des jeux, qui permettent de s’extraire d’une réalité morne et misérable.
      Arthur fréquente souvent le huitième cercle, celui de la pornographie. Mais il aspire à autre chose, surtout lorsque des indices inquiétants de paranoïa se révèlent à lui : son appartement qui se transforme, des portes qui aboutissent à des impasses, etc.D’autre part, l’existence de la RV, un organisme de « hackers », bras armé de « l’Apple », groupement révolutionnaire, le fascine. Enfin, il apprend l’existence d ‘un neuvième cercle, celui d’un C-Univers tellement perfectionné que l’illusion vécue apparaît comme réalité totale puisqu’on y perd son identité même. Seule une mort (virtuelle mais vécue dans la douleur) permet à Arthur de réintégrer son appartement d’Aubergenville.
      La souffrance, la cruauté infligée et le goût du sang restent pour lui des expériences indépassables. Dans l’univers de Dunyah, une sorte de moyen orient virtuel, Arthur devient tour à tour Eno, puis Issar, bras armé du prophète qui appelle à la réalisation d’une autre vie, en un « jardin », au-delà du «sanctuaire » et des « Cinq portes », après que le monde ancien ait été dévasté par un déluge purificateur.
      Eno/Arthur vit à Dunyah l’expérience de plusieurs vies se montrant le zélateur le plus proche du prophète, taillant son royaume à grands coups d’épée. Le retour à la vraie vie se fait de plus en plus difficilement et les rapports avec ses amis se dégradent. Dunyha est un C-Univers inconnu et donc illicite au sein de Cybéria, ensemble des réalités virtuelles. C’est pourquoi Arthur est traqué par le cyber-flic Borovitch  aussi bien dans sa réalité quotidienne qu’à travers diverses phases du jeu.
      La dépression psychologique d’Arthur s’accentue, surtout après la disparition de Nelson dans ses bureaux de la firme Virtual opposée à Macrosoft dans le cadre du projet Cogito. Arthur sera finalement contacté par RV qui le charge de l’assassinat de Linhardt lors de la réélection de celui-ci. Bien que se sachant manipulé, Arthur accepte, car le monde réel lui est odieux. Après l’attentat réussi, Arthur sera capturé par Borovitch et torturé jusqu’à la survenue d’une pluie diluvienne transformant la région parisienne en mer intérieure :
      « Paris avait entièrement disparu, remplacé par une mer infinie, ridée de vaguelettes. Pareilles aux piles d’une plate-forme de forage en construction, les deux tours de la cathédrale engloutie émergeaient encore. A travers le rideau de pluie, Arthur distinguait aussi, plantés au milieu de l’océan, les restes de la tour Montparnasse, de la tour de la Sécu, à Bercy, et le cône au sommet renflé du troisième étage de la tour Eiffel, comme une énorme balise marine. Au nord, Belleville-Ménilmontant et la butte Montmartre évoquaient un double îlot volcanique surmonté d’un temple à stûpas – le Sacré-Cœur. »
      Finalement, il se réveille dans un souterrain, engoncé dans une capsule cryogénique comme deux mille de ses compatriotes.Car tout ceci était faux. En réalité, en 2099, un conflit nucléaire a fait fondre les calottes glaciaires, provoquant une subduction mondiale et la ruine de l’espèce humaine. Dans les souterrains de Massy où travaillaient Macrosoft et Virtual, la décision avait été prise de survivre à la catastrophe en mettant tout le monde en hibernation durant un an. Or, aujourd’hui, la date qui apparaît est 2499. Voilà plus de quatre cents ans que Borovitch le cybernéticien et son complice Carter, utilisant le programme «Cogito» ont branché l’ensemble des endormis sur l’univers « Gaia 1099 » qui donne l’illusion parfaite de la réalité à travers une reconstitution du monde puisée dans l’inconscient même des dormeurs. Chaque année les compteurs étaient remis à zéro. Par certaines altérations (les « bugs »), Nelson a peu à peu pris conscience de cette illusion. Il a neutralisé le cycle fatal, Borovitch et ses jeux de pouvoir, en créant un contre-univers, Dunyah, pour que la réalité puisse, grâce à Arthur, émerger : c’était le Dixième cercle.
      Un jeu troublant entre le virtuel et le réel sur fond de dégradation sociale et de catastrophe écologique. Un style maîtrisé, un suspense permanent font de cette première œuvre une réussite.

    4. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Alex PECK Parution: 1954
      Les trois officiers Nicolas Barsof, Wladimir Tourmanos et Boris Kachmensky, de l’armée slavanienne, à bord du navire de guerre Norskoi Shorokhod, discutent de la réalité d’un immense serpent de mer appelé « Loung » qui a la mauvaise idée d’intervenir dans les zones de combat, la nuit, terrorisant la marine slavanienne. Ils sont chargés par le haut commandement de traquer la bête et de l’anéantir. La nuit venue, Loung fait une brève apparition près de leur navire, tuant un matelot, engloutissant Nicolas, pour disparaître sous le flots. L’examen de débris flottants révèle que Loung est un leurre grossier, l’imitation d’un gigantesque serpent destiné à épouvanter leurs hommes, en réalité c’est le maquillage d’un sous-marin ennemi de la flotte de l’armée du Kitaï (c’est à dire de la Chine) en guerre contre la Slavanie (c’est-à-dire la Russie soviétique).
      Dorénavant, les jours de Loung sont comptés. A sa suivante apparition, le décor de carton-pâte est incendié et le sous-marin des Kitaky  fait prisonnier avec son équipage. A la tête de celui-ci, le général Poo-Son-Ling préfère se suicider plutôt que de tomber entre les mains de ses ennemis. Nicolas, sauvé, participera finalement au bal de fiançailles de l’un de ses deux amis.
      Un épisode d’une guerre dont les termes imaginaires cachent mal les menées d’un combat sino-soviétique du futur.

    5. Type: livre Thème: invasions d’insectes Auteur: Herbert Georges WELLS Parution: 1914
      Le capitaine Guérilleau et l’ingénieur anglais Holroyd  sont chargés d’une mission bien ennuyeuse : on leur a signalé la présence de fourmis susceptibles de chasser toute la population d’un village de brousse. Parcourant sur leur canonnière, le Batimo, affluent du Guaramadena au Brésil, ils devront rendre compte du fait et  prendre les mesures appropriées. La première rencontre avec les insectes a lieu lorsque qu’une barcasse, chargée de cadavres, s’approche de la canonnière. Les fourmis venimeuses ont colonisé le bateau. Le lieutenant Da Cunha monte à bord :
      « Holroyd vit les fourmis battre en retraite devant les bottes de Da Cunha. Le Portugais marcha lentement vers le cadavre tombé, se pencha, hésita, empoigna la veste et retourna l’homme. Un flot noir de fourmis se précipita hors des vêtements.»
      Holroyd reprit la lorgnette. Il aperçut autour des pieds de l’intrus les fourmis dispersées et agissant comme il n’avait jamais vu agir des fourmis. Elles n’avaient rien des mouvements aveugles de l’espèce commune ; elles regardaient le lieutenant comme un groupe d’hommes, en se ralliant, pourraient observer un gigantesque monstre qui les a mis en déroute. Elles agissent comme si elles étaient douées d’intelligence :
      « Il découvrait qu’un grand nombre de fourmis géantes – elles mesuraient environ deux ou trois pouces de longueur - et qui traînaient des fardeaux aux contours baroques, dont il ne pouvait saisir l’utilité, se déplaçaient par petits élans d’un coin obscur à un autre. Elles ne se formaient pas en colonnes dans les endroits découverts, mais en lignes ouvertes, clairsemées, évoquant curieusement les bonds de l’infanterie moderne progressant sous le feu. »
      Da Cunha sera mordu lui aussi et mourra le soir même. Arrivé devant le village déserté par les humains et colonisé par ces fourmis géantes, Guérilleau se rend compte de son impuissance : comment combattre des adversaires aussi minuscules ? Il fit donc ridiculement donner du canon contre eux puis s’en retourna à son port d’attache avec un désagréable pressentiment :
      « Jusqu’ici leur action consiste en une progressive et croissante installation, impliquant le meurtre ou la mise en fuite de tout être humain dans les nouvelles zones envahies. Leur nombre augmente rapidement, et Holroyd tout au moins est fermement convaincu que les fourmis enlèveront finalement à l’homme la totalité de l’Amérique équatoriale du Sud. Et pourquoi s’en tiendraient-elles à l’Amérique du Sud ? »
      Une nouvelle dont le ton intimiste accentue le sentiment d’horreur. Nous sommes en présence de l’archétype du thème de l’invasion par les insectes ennemis du genre humain, largement exploité au cinéma (« Arachnophobia », « les Insectes de feu », « Them », etc.)

    6. Type: livre Thème: sociétés post-cataclysmiques 2 Auteur: Jean-Bernard POUY Parution: 1928
      Vol.01 : Spinoza encule Hegel, Gallimard éd., 2003, coll. « Folio policier », N°127, 1 vol. broché, in-12 ème , 141 pp. couverture avec photo par Stone Images. roman d’expression française
      1 ère  parution : 1996
      La décomposition urbaine a fait émerger des bandes adverses de situationnistes, d’anarchistes, de révolutionnaires ou de conservateurs. Se rapportant à leur idole philosophique particulière, elles portent toutes des noms pittoresques comme les Hégéliens, les Spinozistes, le groupe de Jdanov, celui de Carlo Ponti ou de Thorez, et sont en lutte incessante les unes contre les autres, luttes ponctuées par des flash-backs et relatées en écho par la «Radio Cinquième Internationale » :
      « Quelques groupes de femmes avaient fait leur apparition, mais ne se mêlaient pas à nos petits jeux phallocrates. Certains hommes s’étaient frottés à ces féminités responsables et avaient vite compris que le néo-féminisme était armé jusqu’aux dents. Ces groupes avaient des noms bien aussi ridicules que les nôtres : Lesbos Rouge, Utérus d’Acier, 28 , les Deux Moitiés du Ciel, Tampax Aeternam. »
      Le jeune héros Julius Puech, leader des Spinozistes, déteste les Hégéliens, leur vouant une haine mortelle. Avec ses amis Momo, Riton et Nanar, tous sur leurs puissantes motos lourdement armés, ils se dirigent vers le sud de la France pour anéantir définitivement le groupe adverse, selon un rituel gestuel et langagier précis, à travers un code de comportement apparenté à celui du théâtre Nô.Délaissant leur raffinerie de la région parisienne, ils roulent vers Salon de Provence, considérant la mort comme l’un des Beaux Arts :
      « Ce soir, nous roulons vers Salon, dans l’air tiédasse, vers notre campement provisoire installé dans un casse de voitures. Là, protégés par les entrelacs de ferraille, les carcasses démentes et imbriquées, nous sommes tranquilles: ce labyrinthe de fer engloutirait nos attaquants éventuels.»
      Au passage, ils déferont le groupe Thorez Rouge, des cypto-staliniens, dont le viol, l’achat des armes, l’assassinat, le sexe, la musique et la drogue forment des valeurs appréciées par Julius. Mais avant de partir, ils détruisent aussi les symboles de la société de consommation, se cachant d’abord dans des entrepôts du BHV, puis mettant le feu à la Chambre des Députés dans une capitale en perdition sillonnée par des groupes violents et dissidents. Près du jardin des Plantes, Julius gagnera son trophée, emprunté au dernier survivant du groupe « Fourier Rose », une paire de bottes en peau de lézard mauve. Elles deviendront son symbole personnel et ne le quitteront jamais plus :
      « La seule chose qui me fit rougir l’œil, cette nuit-là, ce furent les bottes en lézard mauve, extrêmement neuves, que portait un des membres de Fourier Rose, le poète du gang, Ginsberg attardé aux Folies irradiés. La vision de cette tranche de beauté pure me speeda toute la nuit, et le sommeil ne vint pas. L’obscurité était de croco. »
      Se livrant encore à quelques facéties comme arroser de rose le Sacré-Cœur, Julius apprend à l’assemblée générale des dissidents que Hegel les attend sur le pont du Gard.Durant l’attaque, Momo, éblouissant de vertu guerrière, est frappé à mort sur sa moto, comme Jaja, le petit ami de Julius, qui s’éteint dans une mare de sang :
      « Nous avons attaché Momo sur sa moto, pantin grisâtre, car sa vie le quittait, personnage puissamment évocateur, car il voyait la mort et vivait avec elle. Une fois sanglé, il devenait également érotique, dans une sorte d’attirail sado-maso, prêt à l’acte, dans son aura de pulsion de mort. Prêt pour le grand éclatement. Un peu de sang coulait sur la selle et, avec sa main, négligemment, Momo en tartinait son réservoir. Le sang caillait sous la chaleur, et les résidus poisseux d’essence se mélangeaient au plasma en fusion. Ballard revenait en force, et ce n’était au fond que justice. »
      Spinoza n’oubliera pas ses héros même si la fraction armée spinoziste est provisoirement défaite. Repartant à Marseille avec son amant/ami François, Julius y aperçoit le traître, « le Niais » qui a passé à l’ennemi, et était responsable de l’anéantissement des Spinozistes. Il lancera les miliciens fascistes de Marseille à sa trousse, assistera à la mise à mort de Carlo Ponti où le Niais avait trouvé refuge, et lui règlera son compte, définitivement.Julius sait que « les temps anciens ne sont plus ». Alors il prépare sa Guzzi pour l’ultime affrontement avec Hegel pendant que, tout autour de lui, la société se normalise, la politique et la police reprenant force et vigueur. Pour finir, Julius, en partance de ce monde cruel, tombe entre les mains des femmes féministes qui lui font subir un esclavage humiliant dans le but de triompher de sa mâle résistance :
      « Enfermé et sous bonne garde, je repris des forces, et redevins, en moi-même, disponible et dangereux. Je me permis de rigoler, mais seulement des yeux. Quand mon infirmière ou bien l’une de ses sœurs me pansait et inspectait ma blessure que j’avais en haut de la cuisse, elle regardait obligatoirement mon sexe, et le touchait évasivement, en me remettant les pansements.Un jour, je fus ému pendant leur visite. Inexplicablement. Leur présence n’était pas érotique. Contre mon gré. Mais ce fut irrépressible. Je me pris un seau d’eau glacé et plusieurs coups de fouet. Maintenant je ne rigole plus. Je travaille. »
      François ayant disparu dans la lutte, Julius patiente dans la déréliction, prêt à tout pour sillonner à nouveau, sur sa flamboyante moto, une France déliquescente.
      « Spinoza encule Hegel », au titre intensément provocateur, est un récit original aussi bien au plan de la forme qu’à celui du fond. A la frontière entre la violence et la dérision, c’est le récit fantasmé d’une jeunesse à la dérive, qui dénonce les postures de la consommation et de l’idéologie. Hors de «l’esthétisme douceâtre » évoqué par Léo Ferré, c’est une œuvre originale, qui s’enferme difficilement entre les limites d’un genre, une sorte d’immense délire relatif aux excès idéologiques de mai 68.
      Vol. 02 : A sec (Spinoza encule Hegel, le retour), Gallimard éd., 2002, coll. « Folio Policier » N°149, 1 vol. broché, in-12 ème , 149pp. couverture illustrée (photo William Lesch). roman d’expression française
      1 ère  parution :1998
      Julius Puech reprend du service. A Bombay, où il s’était réfugié, il voit venir à lui deux spinozistes, Léonard et Iris, qui espèrent faire renaître l’Ethique. En effet, Hegel est de retour en France, intervenant autour des stades de football, soutenant la cause des  «fouteux ». Quand Julius se voit offrir une Guzzi toute neuve, il n’hésite plus, et, avec ses deux compagnons, il ressuscite le groupe Spinoza.
      La situation en France s’est encore dégradée.La démocratie déliquescente a fait place libre aux forces anarchistes ou fascisantes qui s’en donnent à cœur joie dans les tribunes, réunies dans une franche et haineuse inimitié, réactivée à chaque match de foot :
      « Et tout à coup, parce qu’un pékin un peu chanceux vient sans doute de pousser du pied la baballe dans un filet, une immense clameur éclate derrière les grands murs de béton. Les Verts venaient d’en marquer un. Trente mille gosiers kro-formatés hurlent la joie imbécile du supporter qui viole la ville d’en face. (…) Dans la nuit on voit luire les longs couteaux et l’acier nickelé des fusils à pompe. En face, la rage resserre les rangs des petits-beurres d’Ultra-Lu, le kop nantais réputé pour sa grande sauvagerie et une victoire historique sur le Koppa corse en huitième de Koupe de France.Les flics n’ont aucune réaction. Seuls quelques sourires luisent sous les visières, tant que les empaffés se bousillent entre eux, les oies étaient bien gardées et pouvaient voir les matches tranquille, sans se faire aplatir ce qui leur restait de cortex. Quelques coups de feu. Des étincelles dans le noir profond. Un corps qui tombe, le raclement de l’acier sur l’asphalte. Des ombres qui courent dans tous les sens, cherchant protection ou trahison. »
      Julius concocte un  plan pour se débarrasser de Hegel II, tête bicéphale puisque composée par deux jumeaux. Remontant du sud de la France vers Paris, traversant la région lyonnaise dévastée, il recrute quelques partenaires de premier plan. Notamment Luna, une jeune et efficace femme pilote d’hélicoptère, en passe d’être violée par une bande de «supporters ». Tout en distillant sa haine incommensurable à l’égard des hommes, Luna met son hélicoptère, son armement et sa science du pilotage à la disposition de Spinoza, embrassant la cause de Julius. Direction l’île Saint-Louis, camp retranché de Hegel et des « fouteux » :
      « De là où j’étais, tout cela semblait imprenable. Les ponts, absents, écroulés, tranchés à la dynamite, blessures pierreuses. Saint-Louis faisait désormais du bateau à voile. Au bout de l’île, du côté de l’ancien pont de Sully, une passerelle branlante, genre pont de singe, reliait les restes éboulés d’une ancienne arche au repaire flottant d’Hegel. »
      Julius appâte leur sentinelle avec la fausse prédiction d’un soi-disant retour charismatique de Spinoza, information suffisante pour déclencher l’envie chez ses opposants de le liquider définitivement.Pour ce faire, GWFH2 , l’un des deux chefs de Hegel, prend immédiatement langue avec les « Hell’s Angels », qu’il méprise, mais auxquels il propose une alliance objective. Du côté de Spinoza, ils seront six dont Ray, un homosexuel improbable mais dangereux, nouvel ami de Julius, prêt à en découdre.
      L’hélicoptère s’apprête à l’assaut. Les hégéliens investissent l’immeuble qui servira de zone de combat, lieu d’une explication définitive, se réservant le toit pour les snipers , les Angels occupant les envions immédiats.Déjà, ignorants tout de l’hélicoptère et de la stratégie de Julius, les hégéliens se croient vainqueurs. Lorsque les Angels sautent dans l’explosion de la voiture garée près d’eux, et lorsque Luna en quelques passes rapides et meurtrières mitraille le toit en le débarrassant de tous les hégéliens,  dont notamment GWFH2, le deuxième jumeau éclate de rage :
      « Une vague chaude de napalm lécha le toit de la base et des hégéliens sautèrent en feu dans le bassin. Le carton total. Rouge. GWFH2, planqué derrière la rambarde de la casemate, regardait toujours Julius de l’autre côté, immobile comme un épouvantail. Il vit aussi, du coin de l’œil, son frangin Hégueldeux péter les plombs, courir à découvert, hurlant des imprécations dialectiques, une kalache à la main, et tirer en direction de l’hélico. A bord, Luna repéra les cheveux rouges, manoeuvra l’appareil, fit un signe discret à Iris qui mit une charge dans le bazooka. Elle appuya sur le bouton de commande, une traînée blanche, une flamme jaune et Hégueldeux s’éparpilla, plus bas, en dahlia rouge sombre. »
      Voyant devant lui la Guzzi de Julius, il se l’approprie, persuadé qu’avec la disparition de ce symbole le royaume de Julius cessera d’exister.  La moto explose, l’envoyant lui aussi au royaume des fouteux éthérés.Julius, définitivement trop vieux pour continuer à incarner l’idéal éthique poursuivra sa destinée, pacifié, avec Luna, devenue sa compagne.
      « A sec » représente le deuxième volet des aventures de Julius Puech. Par cet ouvrage de commande, lié au succès du précédent, l’auteur s’en tire honorablement, avec toujours autant de verve, fascinant le lecteur par la structure étrange du récit, même si la surprise provoquée par le premier épisode s’est quelque peu ternie, et que certains procédés stylistiques ont une allure de déjà-vu.


    7. Type: livre Thème: menaces et guerres nucléaires Auteur: Pascal MESLIN Parution: 1978
      Au sein du petit état imaginaire d‘Anabase se situe la centrale nucléaire d’Algave, orgueil de cette nation et productrice de la quasi-totalité de l’électricité du pays. Sophistiquée et bien protégée derrière ses enceintes de confinement, elle nécessite peu de surveillance, à travers un personnel hautement qualifié. C’est pourquoi l’ancien technicien Alain Londy, obligé de démissionner après plusieurs fautes techniques, n’aura aucune difficulté pour se venger. Esprit perturbé, Londy a fraternisé avec une cellule de jeunes écologistes de combat qui voient en lui le spécialiste capable de provoquer une prise de conscience du pays contre le danger nucléaire.
      Et comme rien ne vaut la démonstration par l’exemple, ils souhaitent saboter la centrale en créant un incident limité susceptible d’alerter les autorités. Mais Londy ne l’entend pas de cette oreille. Il programmera la sabotage du circuit primaire de manière à relâcher la vapeur circulant dans les tuyaux proches du cœur du réacteur, asséchant les piles d’uranium, pour provoquer leur fonte, puis leur explosion.
      Ils pénètrent dans le bâtiment par une bouche d’évacuation d’eau chaude puis investissent le centre de commande principal où l’ingénieur de surveillance, Robert Morand, sera réduit à l’impuissance. Corinne, Pierre et Vincent, les comparses de Londy , ne comprennent pas que l’homme les condamne à mort. Il disparaît pour désactiver la centrale de refroidissement et, en détruisant les commandes automatiques de fermeture des portes d’enceinte, il espère provoquer une explosion majeure par ce que l’on appelle déjà un « accident de référence » :
      « A ses pieds, la vaste piscine du réacteur, doublée d’acier inoxydable, asséchée à l’exclusion des périodes de chargement et de déchargement du combustible, lorsque, dans son fond, le couvercle de la cuve est enlevé. Trente mètres plus haut, le dôme de l’enceinte sur la face duquel serpentent les tubes d’aspersion utilisés en cas d’accident grave. Et, accrochés aux parois internes, les générateurs de vapeur qu’alimentent, pour le circuit secondaire, de grosses tuyauteries courant le long du mur, quelques mètres au-dessus de lui. La base d’un générateur de vapeur, quinze mètres plus bas, constituait son objectif. ».
      Mais Jean-Bernard Picot, un second ingénieur en tournée d’inspection dans l’intérieur du bâtiment, a échappé à la vigilance des terroristes. Il refermera les portes. Aussi, Londy, après avoir déposé sa charge de plastique pour faire sauter les canalisations aussi proches que possible du cœur du réacteur, trouvera-t-il le sas du retour hermétiquement fermé. Prisonnier de sa folie, il sera condamné à mourir dans l’explosion.Picot réussira aussi à joindre les autorités compétentes qui mettent aussitôt en place le plan d’évacuation de la zone dangereuse en faisant appel à l’armée. L’explosion aura lieu, mais grâce à la prévoyance de Picot, les effluves mortelles resteront contenues suffisamment longtemps pour que les dispositions prises puissent éviter le pire.
      Ecrit quelques années avant le tragique accident de Tchernobyl , le roman de Meslin, lourdement appuyé sur une foule de détails techniques, met en évidence la faiblesse du système qui peut provenir de l’intérieur même, ce que nulle autorité ne saurait prévoir : le sabotage prémédité et consciencieux par un personnel qualifié et décidé. Un récit travaillé en un style clair et qui incite à la réflexion.

    8. Type: livre Thème: menaces et guerres nucléaires Auteur: Jean-Paul KLEE Parution: 1986
      " Il y aura d’abord une odeur de TABAC !…
      Une épouvantable odeur de caramel brûlé
      Tout le monde au fond des rues, lèvera les yeux, le nez ;
      Dans les écoles/dans les usines/ dans les hôpitaux…
      O cette bonne foule de 5h 12 du soir qui descend vers la gare,(…)
      dans la rue dans les jardins dans les châteaux voici
      déjà des enfants/des vieillards. Qui brûlent, debout !…
      voici déjà L’o.n.d.e./d.e./c.h.o.c. : IL N’Y A PLUS RIEN
      A FAIRE ! ! ! voici la mort atomique pour tous/ la Mort
      (ATTENTION) at.//
      Un poème écrit à la manière d’une danse macabre dont la désarticulation formelle épouse le cataclysme émotionnel.

    9. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Serge REGGIANI Parution: 1954
      Attention, chef-d’œuvre ! Voici une chanson qui dénonce toutes les guerres, passées ou futures, toutes les invasions, présentes ou à venir, toutes les spoliations, celles de jadis et celles de l’avenir. La figure archétypale du loup avec son comportement en meute renvoie aussi bien à celui des nazis  qu’à celui de toutes les troupes d’occupation. Ancrée dans la réalité historique de l’invasion de la France par les Allemands et de l’occupation de Paris, elle s’ouvre aussi sur un temps mythique, un Ailleurs barbare, un monde d’avant le désordre où « le rire d’Elvire » se fige en une grimace affreuse. Les causes de la catastrophe sont connues,  telles que la lâcheté, l’irresponsabilité, l’abandon de tout valeur :
      « Les hommes avaient perdu
      le goût de vivre
      Et se foutaient de tout
      Leur mère, leur frangin, leur nana
      Pour eux, c’était du cinéma
      Le ciel redevenait sauvage
      Le béton bouffait le paysage. »
      Le vide moral, l’égoïsme et le développement technique ouvrent des opportunités à toutes les forces obscures de l’univers, les loups» qui, lentement, répondant à leur nature archaïque, se préparent pour la curée. Ayant regardé vers Paris, de la « Germanie », de la «Croatie», profitant de la neige et du froid, du vide des rues comme de celui des cœurs, ils s’infiltrent par « Issy » (ou « Ici ? ».) Peu féroces au début, ils montrent une face de plus en plus agressive, jusqu’à envahir totalement Paris :
      « Attirés par l’odeur du sang
      Il en vint des mille et des cents
      Faire garousse, liesse et bombance
      Dans ce foutu pays de France »
      Le seul remède à la situation réside dans le sens du courage et de la responsabilité, dans « l’amour et la fraternité ».
      Cette chanson résonne comme un avertissement, un devoir de mémoire, un glas funèbre. «Les Loups» suggère un univers de misère moral où, malgré tout, subsiste un fragile espoir. A comparer avec l’ouvrage de Calonne « Hurleville» qui apparaît de peu de consistance, malgré ses deux cents pages, en face de cette force d’évocation fantastique et sauvage

    10. Type: livre Thème: fins du monde, fins de l'humanité Auteur: Elise THIEBAUT Parution: 2000
      fascicule 01 : Accordez-moi cette bombe :
      Avec beaucoup de finesse et d’ironie, la romancière, prenant le lecteur pour personnage (" vous pensez que… ", " votre famille"), évoque en touches rapides l’ensemble des séquelles terrifiantes que provoquerait l’explosion de bombes thermonucléaires : la mort, l’errance dans les ruines, la présence de décombres :
      " Vous êtes terriblement étonné d’avoir survécu. Votre orgueil vous souffle d’abord que vous êtes ELU parmi tous les humains, mais votre manie de l’échec vous réfute aussitôt : survivre quand tout le monde a péri, n’est–ce-pas  là le comble de l’infortune ? Pour en avoir le cœur net vous essayez confusément d’engager un dialogue avec Dieu, sur le mode " pourquoi moi, Seigneur ? ". Il ne répond pas. Il ne répondra jamais. Vous resterez seul avec vos doutes et votre peau qui part en lambeaux.
      Vous marcherez dans la ville en ruines. Partout des morts, des flammes et des fontaines d’eau bouillante, les carcasses de voitures, un ciel rouge et noir, et des statues qui paraissent plus vivantes que les gens. "
      Adroitement, elle relie cet imaginaire à un vécu non moins effrayant, soit celui de la mort réelle dans les camps d’extermination nazis, ou celui de la mort imaginée à travers une psychologie malade. Du grand art.
      fascicule 02: l’amour de A à Z
      Ou petit traité à l’usage des jeunes filles. Des premiers émois avec ses tendresses et ses ridicules, au répertoire des illusions. Du premier garçon pour lequel l’on se serait damnée,  au vieillard qui souffre son agonie et dont l’on s’occupe. Car la fin du monde est aussi la fin de la vie, et vice-versa :
      " Le fait est que vous vous êtes raconté pas mal d’histoires sur le monde et sur vous-même. Enfin, plus sur vous-même que sur le monde – question de matière première.
      De toutes les catastrophes qui doivent inéluctablement fondre sur l’être humain, la vieillesse vous paraissait  –  de loin - la plus improbable. La mort en revanche vous terrifiait. Et l’amour. Mais la vieillesse, la désillusion, la façon qu’a la vie de s’accumuler par strates géologiques sur votre petit cœur, vous ne pouviez pas l’imaginer. "
      fascicule 03 : Construire son abri anti-atomique
      " Quand François proposa à Bettina de construire un abri antiatomique, il était en train de prendre son bain. " Le couple décide d’acheter une maison en Camargue puisque la fin du monde est proche. Bettina travaillera pour payer ladite maison qui sera rénovée par François et ses amis. Ils vivront en communauté et creuseront une piscine.
      Ceci servira d’alibi à François pour proposer le creusement d’un abri (l’habitude étant prise de creuser). Alors, ils se fâcheront entre eux. Lorsque le moment fatal arrivera, François et Bettina se réfugieront seuls dans l’abri, car:
      " S’ils entrent tous, on n’aura pas assez d’air, pas assez de vivres, pas assez de temps pour attendre que les radiations s’atténuent.(…) Autour de nous, les gens mourront dans d’atroces souffrances, et il faudra s’organiser pour vivre dans ce trou (…) Nous serons les piliers de ce monde tombé en ruines et nous repenserons à ce jour ancien où je te parlais, dans la salle de bains, pendant que tu nattais tes cheveux en regardant la buée se déposer lentement sur le miroir. "
      fascicule 04 : Vaincre l’autruisme
      Ou la rencontre avec l’autre lorsque le moi est en construction : " Vous étiez détestable puisque vous étiez détestée ".
      Même la mort de la personnalité adolescente dans la pétrification du moi adulte n’enlève rien au miroir tendu par l’autre :
      " Vous pleurez en la regardant, parce qu’elle est belle, parce qu’elle est douce, parce que tant de bons moments vous unissent depuis toutes ces années même si son mariage vous désespère. Vous pleurez parce qu’elle vous aime et que vous n’aimez pas. Vous pleurez sur vous-même comme tous les autruistes, ricanante et empruntée dans cette robe qui met vos genoux cagneux en valeur et votre poitrine à la torture.
      Vous pleurez parce qu’elle est devenue une femme, et que vous n’êtes même pas sûre d’appartenir à la race humaine. Vous pleurez par ce que vous avez une amie, une au moins ; vous l’aimeriez pour l’éternité si seulement l’éternité n’était pas destinée à prendre fin avec vous. "
      fascicule 05 : Extraterrestre mon ami
      Les extraterrestres ont envahi la terre :
      " Ils débarquent un jour sur la terre et veulent faire de nous leurs esclaves. Seulement moi, je ne marche pas. C’est déjà assez pénible de devoir aller pointer à l’ANPE, sans avoir à brusquement supporter les extraterrestres qui veulent réduire le monde à leur merci. "
      D’ailleurs, actrice de second ordre, la narratrice se doit de changer la litière du Chat sans l’équipement adéquat qui devrait être fourni:
      " le Changement de la Litière du Chat reste un secret militaire et ils refusent de distribuer des masques à gaz en conséquence. "
      C’est chez Shopi qu’elle rencontre Enrico, un extraterrestre certainement, avec qui elle se rappelle avoir couchée. " Que deviens-tu ? " Il ne devient rien. Il en veut à la narratrice de s’occuper du Chat de Mathieu Volar, l’individu qui lui a volé sa pièce " Prise de Tête ".
      Elle en conclut que nous sommes tous dans la 4 ème  dimension et n’avons qu’un seul but dans la vie : acheter de la litière pour chat. La vie est dure sous le joug extraterrestre!
      fascicule 06 : Une femme à votre vue
      En se réveillant aveugle, il ne se voit plus qu’au miroir,  mais se reconnaît en cette fille appelée au hasard au téléphone pour lui faire l’amour… et qui disparaît à sa vue.
      Qui est donc qui dans ce jeu du visible invisible ? :" Comment saurais-je que j’existe si je ne plais pas ? "
      fascicule 07 : l’homme tel qu’on le parle
      Son frère a un gros chagrin d’amour et comme  tous les hommes il ne peut pas arrêter de pleurnicher. Il s’en ouvre à sa sœur qui lui fait le compte des amants qu’elle a connus,  au nombre de douze comme les disciples du Christ. Aucun d’entre eux n’échappe à la critique féminine. Nostalgie, quand tu nous tiens !
      fascicule 08 : Le prolétaire sans peine
      " Les prisons sont des pays morts, désolés, comme imprégnés d’une brume radioactive, à l’intérieur les vivants sous-vivent, c’est ce qui les distingue des survivants : ils survivent avant que la mort ne les ait touchés. "
      Elle avait épousé un ouvrier, fidèle à son conditionnement familial. C’était aussi un révolutionnaire sans qu’elle n’en sût jamais rien et aujourd’hui, il sort de prison. Alors elle l’attend avec angoisse et espoir, soucieuse d’en finir avec la vie précédente et craintive d’en commencer une nouvelle :
      " Il va sortir, votre prolétaire. Vous en ferez un bourgeois parce que comme aux cartes c’est la reine qui gagne sur le valet. La lutte des classes est terminée. Les terroristes se sont perdus. Vous êtes rescapée d’un accident qui n’a jamais eu lieu : la révolution. Le prolétaire sans peine n’a jamais existé. Tant pis, vous prenez celui-ci avec peine. Il porte une valise, il marche sans vaciller. Vous vous dites : Que l’argent reste où il est, que l’amour reste là où il est. Que rien ne change. "
      fascicule 09 : J’y pense, donc je jouis
      Ou de la difficulté d’une psychanalyse réussie.
      fascicule 10 : Stérile et heureuse
      Elle a une envie d’enfant et se sent stérile. Trois ans qu’elle essaie en vain. Alors, en route pour les tests, notamment l’hystérosalpingographie au mot si compliqué, à la puissance trouble. Démission dans les mains du Dr Duras :
      " On pense à ces gens qui font des années de médecine pour passer le reste de leur vie à explorer l’utérus ou l’anus de patients terrifiés. "
      Connaissance intuitive par le corps de sa propre finitude.
      fascicule 11 : J’élève mon mutant
      Victoria qui se rappelle toutes ses vies antérieures ne sait comment attirer l’attention de ses parents. Ils sont moins évolués qu’elle et, pour le leur faire savoir, elle vomit sur tout. Mais, il n’y a rien à faire. Plus elle grandit plus la mémoire de ses vies antérieures disparaît : à nouveau elle sera condamnée à mort :
      " Victoria haussa les épaules. Elle voyait la vanité de toute chose et même celle de son orgueil. Elle pensa qu’elle ne devait pas lutter, la démémorisation n’en serait que plus pénible. Elle devait attendre et s’abandonner à la mutation inéluctable : devenir de plus en plus grande, de plus en plus bête, de plus en plus ordinaire. Mais elle parvint à se convaincre que rien de tout cela n’avait la moindre importance.
      Le genre humain n’est pas de ceux qui méritent l’attention d’un enfant. Un jour, elle se rappellerait peut-être ses vies, par hasard, elle les écrirait, les insérerait dans un livre, et personne ne la croirait. Peut-être qu’elle fût une mutante. L’heure du goûter approchait, et elle demanda à sa mère de lui donner un verre de lait. Elle but consciencieusement, jusqu’à la dernière goutte, et quand elle eut fini, il ne lui restait pas le moindre souvenir de sa vie. "
      fascicule 12 : Comment devenir anonyme
      Etre anonyme est très difficile surtout quand on oscille du communisme au capitalisme :
      " Vous n’avez rien d’autre que votre vie et ils veulent vous la prendre. " D’ailleurs : " Ne rien faire vous obligeait à vivre et vivre s’était révélé beaucoup plus fatigant que travailler. Il est terrifiant d’exister par soi-même. "
      Cette conscience malheureuse de l’insondable insignifiance de soi vous renvoie un état des lieux où ne subsiste que le seul désir de survivre en dépit du : " désastre (qui) ne cessait de gagner nos vies, comme la sécheresse inexorable dans le désert, la famine, la pollution, des phénomènes presque surnaturels si puissants qu’on pourrait oublier ce qui les a causés : votre obstination à ne rien faire pour empêcher la fin du monde. "
      En douze petits livrets Elise Thiébaut offre un panorama complet de l’apocalypse vécue au quotidien. Une approche moderne et réussie du concept de finitude.

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