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    Bienvenue dans la Base de Données des livres !

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  • 711 livres

    1. Type: livre Thème: menaces végétales Auteur: Harry Adam KNIGHT Parution: 1985
      A Londres, une série de contaminations par des Champignons terrifiants inquiètent les autorités. La responsable en est une biologiste, Jane Wilson, qui,  avec les meilleures intentions d’éradiquer la faim dans le monde, a provoqué une mutation du mycélium à l’aide d’un virus. Les résultats, par suite d’une dispersion accidentelle du catalyseur, dépassent toutes les espérances. Les spores, par milliards, s’infiltrent dans les corps animaux et humains, en les transformant en « choses » monstrueuses :
      « A première vue, la grosse femme noire semblait intacte. Puis Carter remarqua les profondes gerçures qui crevassaient ses membres et son torse. Il étudia son visage. Les yeux étaient ouverts mais la surface des globes oculaires étaient ternies par un voile gris. Le même duvet gris tapissait les fissures dans sa peau. Heureusement, elle ne respirait pas. »
      Carter lui-même, le médecin qui avait donné l’alerte, n’échappera pas à l’infection :
      « La tête de Carter disparaissait sous d’épaisses écailles brunes aussi rugueuses que l’écorce d’un arbre. Elles s’enfonçaient à l’intérieur du col de sa chemise trop ample pour en gonfler les épaules. Seul son œil gauche était encore visible au fond d’une fente dans les croûtes. Une crevasse s’ouvrit à l’endroit où aurait dû se trouver sa bouche. Sa voix était rauque et sifflante. »
      La contamination se répand à une vitesse foudroyante, transformant la ville de Londres et ses habitants. Une équipe d’intervention est mise en place pour récupérer la formule du Dr. Wilson qui seule permettra de sortir de la catastrophe. La Task force comprend le mari de Jane, Barry, enlevé de force à Belfast où il résidait, et qui seul sera capable de retrouver son épouse à Londres, Le Dr. Kimberly Fairchild, une jeune femme spécialiste des champignons et Gloocok, un baroudeur sans scrupules, exclu de l’armée pour meurtre.
      Dans un half-track puissamment armé, ils s‘ouvrent un chemin vers l’enfer, temporairement immunisés contre l’infection. Ils n’auront qu’une semaine devant eux pour éviter une dissémination  de l’horreur à l’échelle de la Grande-Bretagne.
      Les hostilités entre Barry et Gloocok, qui auraient pu mettre en péril la mission, seront gommées par la vision d’apocalypse qu’offre la ville noyée sous le mycélium :
      « A l’approche de Londres le paysage devint terriblement déprimant. Le tissu urbain était trop dense pour qu’ils puissent éviter systématiquement les agglomérations. Elles étaient méconnaissables sous leurs couvertures surréalistes. Aucun angle droit, les maisons disparaissaient sous des tumulus informes. Entre les bâtiments poussaient de monstrueux bolets, coulemelles ou clavaires. Des coprins chevelus étalaient leurs tignasses noires et gluantes sur les trottoirs. Les boules blanches des vesses-de-loup avaient la taille de stations radar. Les champignons sortaient à l’évidence vainqueurs de la guerre qu’ils livraient à l’humanité. »
      Autour d’eux des zombies, êtres vivants transformés, les traquent sans relâche. Ils subissent aussi des bombardements d’une variété géante de spores, les « sphaerobolus », attirées par la chaleur dégagée par le half-track. Lorsque les spores envahissent finalement l’habitacle, les membres de l’équipe présentent un début de contamination alarmant :
      « Wilson continuait à dormir. La moisissure remplissait tout l’habitacle mais elle n’était pas assez dense pour vraiment gêner sa respiration. Elle avait dévoré ses vêtements et sa couverture sans qu’il en prît conscience. Ses hyphes, en fait, n’avait rien laissé d’organique qui leur fût accessible ; Ils avaient dissous ses cheveux et digéré les particules de nourriture coincées entre ses dents. S’infiltrant dans tous ses orifices, ils avaient vidé ses intestins, curé ses oreilles, dégagé ses narines du mucus desséché. En même temps, ils s’attaquaient aux cellules mortes de son épiderme. Ce fut ce qui le réveilla : une insupportable démangeaison. »
      Obligés de laisser leur véhicule, ils poursuivent la quête à pieds ; s’ouvrant la voie aux lance-flammes qui grille d’innombrables formes semi-humaines et semi-végétales, ils progressent très lentement. Kimberly sera capturée, puis violée par un Gloocok répugnant, tout couvert de mycélium. Wilson, poursuivant bravement sa route vers le quartier d’Oxford découvre enfin le repaire de Jane, au sommet de la tour de la Grande Poste de Londres,  où elle réside, gardée par des fidèles végétaux. La rencontre avec Jane est explosive. Son ex-épouse semble encore normale et veut persuader son ex-époux de se « convertir au nouvel ordre », comme s’il devait entrer en religion. Mais  Barry ne s’en laisse pas conter : décapitant Jane à coups de barre de fer, il met à jour un être monstrueux, une forme de vie symbiotique intelligente, totalement étrangère à l’humanité :
      « Décapité, le corps de Jane chancela devant lui. Un filet de liquide vert suinta de la blessure et se perdit dans le col de la blouse. Battant des bras, le cadavre fonça vers Kimberly. Il frappa de sa barre de fer. La lance improvisée transperça la poitrine sans rencontrer de résistance. La chose fit encore quelques pas puis s’écroula. »
      Il n’en est pas sauvé pour autant ; traqué par les autres entités, il se réfugiera sur la terrasse du toit de l’immeuble pour y attendre un hypothétique secours.
      « L’immonde invasion » se présente comme un roman gore, mais aussi comme une texte enlevé d’épouvante pure, aux descriptions soignées. Les scènes de frénésie, l’étrangeté d’une nature devenue folle, nous empêchent de quitter le récit, qui, pour une fois, s’achève dans le pessimisme le plus noir. Le roman se donne comme l’exercice de style d’un grand écrivain qui semble s’y être beaucoup amusé.

    2. Type: livre Thème: pollution généralisée, fins du monde et fins de l’humanité Auteur: Max-André RAYJEAN Parution: 1971
      Klix, après le suicide de son chef Hulz au Kol-200, se sent menacé à son tour. Il faut dire qu’ayant neutralisé son psycor (appareil du contrôle de la volonté situé dans le cerveau) par un sekor (brouilleur mis au point par les révolutionnaires), il devient suspect au cerveau électronique répondant au doux nom de Zupa, qui contrôle la société de Pâal Zuik.  Il vole la fusée AS-13 en compagnie d’Ino, sa fiancée,  et d’un groupe d’amis. Ils fuient l’astéroïde où quelques milliers de terriens dégénérés avaient trouvé refuge, redécouvrent la terre, cachée sous un écran d’invisibilité, sur laquelle ils atterrissent.
      Ils constatent qu’elle est ravagée par la pollution et qu’une seule île reste verdoyante. Là, ils font la connaissance des Chouks, une tribu de primitifs bien plus costauds qu’eux-mêmes.  Ceux-ci deviennent leurs amis, leur montrent l’entrée de la cité sous-marine d’Aquatorg dans laquelle Klix s’est fait entraîner par les sbires de Zuika, descendante de l’initiateur Pâal Zuik,  restée sur Terre afin de se préparer un petit nid douillet après avoir éliminé quelque trois milliards d’individus, responsables, selon Pâal Zuik l’ancêtre, de la pollution généralisée.   Zuika espère devenir la reine de terriens regénérés en les personnes des Chouks, ses sujets d’expérimentation. Mais Klix le bien-nommé, grâce à son polyray cracheur des rayons,  met fin à ce rêve.
      Avec l’appui de Nura et de Hotar, des Chouks très forts, il fait exploser Aquatorg. Zupa, désorganisé, en fait de même pour la société des " psycorisés " de Pâal Zuik.  Ce qu’il avait d’ailleurs de mieux à faire. Résumons-nous : il reste les Chouks, Klix et quelques-uns de ses amis sur une terre polluée (mais pas là où ils se trouvent) prêts à repeupler ce misérable monde.
      Un récit minimaliste au plan de la forme et du fond qu’il aurait mieux valu désintégrer d’un coup de polyray. Bravo ! l’auteur, quelle imagination !

    3. Type: livre Thème: péril jaune et guerre des races, Adam et Eve revisités Auteur: Edmund COOPER Parution: 1970
      Une expédition martienne visite la terre. Celle-ci, après deux mille ans de guerre raciale est différente de la nôtre ; la lune ayant été détruite par des missiles, le climat bouleversé, l’Antarctique redevenu continent tropical :
      " La série de catastrophes qui avaient accablé la Terre avait commencé deux mille ans auparavant – avec d’abord la guerre de la Révolte noire, qui avait abouti à la destruction de Luna et à la dévastation partielle de la Terre – et elle avait eu des conséquences étranges et terribles. Les contours et l’équilibre des masses continentales et des océans avaient été radicalement modifiés. Les zones tempérées s’étaient transformées en déserts torrides. L’océan Pacifique, bombardé par des fragments errants de Luna, s’était soulevé dans un raz de marée tel que les vagues avaient pris d’assaut les plus hauts sommets des Andes, dévoré des îles, englouti le Japon, submergé la Chine et l’Australie, détruit la Nouvelle-Zélande et l’Indochine, crée une nouvelle génération de volcans, provoqué des tremblements de terre d’une intensité inconnue de mémoire d’homme et projeté des billions de tonnes de poussière et d’eau en ébullition dans les couches minces de l’atmosphère! Les terres basses avaient été submergées, de nouvelles terres avaient surgi convulsivement de l’Atlantique : la Méditerranée s’était vidée de ses eaux, et, paradoxalement l’Antarctique s’était mise à fondre. (…) L’Antarctique avait déployé un parapluie de verdure pour protéger et nourrir tous ceux qui avaient pu atteindre son sanctuaire. "
      L’absence apparente de vie humaine permet à la mission extraterrestre de collationner toutes sortes d’observations pertinentes. Mirlena la psychologue,  Kord Vengel le délégué officiel vayénite, Rudlan l’ingénieur en communications, et Carl Sinjorge le jeune physicien, forment la première expédition qui débarque dans la forêt pluviale antarctique. Ils sont Noirs tous les quatre, comme les autres Martiens. En effet, après la guerre fratricide entre Noirs et Blancs qui a décimé l’humanité, une poignée de rescapés noirs avait réussi à émigrer vers Mars. Là, ces colons ont fondé une nouvelle société calquée sur un modèle dictatorial tout en gardant une haine farouche à l’égard de l’homme blanc.
      Milréna, en explorant la forêt, découvre Kymri, un sauvage blanc. Avec ses moyens technologiques supérieurs, elle le capture pour l’étudier. Elle en arrive à la conclusion que cet être blanc sous ses oripeaux de primitif, est en réalité fin et intelligent. Une attirance mutuelle de plus en plus forte lui ôte toute réticence et la confiance s’établit entre les deux êtres humains. Kord Vengel, envoyé fanatique du vanéyisme, préconise la mise à mort immédiate de Kymri. Durant ce temps, sur Mars se déroule une révolution : la doctrine officielle du vanéyisme, de type extrémiste, est combattue et le régime se démocratise.
      Kymri conduit le petit groupe à Noi Lantis (New Atlantis) sa cité, pour présenter les Martiens à Urlanrey, le roi sage et avisé, père de Kymri et maître de Noi Lantis. Celui-ci accueille ses hôtes avec déférence en ayant conscience que leur arrivée compromettra un équilibre social jusqu’ici préservé. Mirlena et Kymri traquent peu de temps après leur arrivée Kord Vengel qui s’est introduit sans autorisation dans la "demeure de la mort", seule tour interdite aux visiteurs sous peine d’exécution capitale. Ils découvrent que le bâtiment, dans sa partie souterraine, est une sorte d’arche, datant de la fin de la période troublée, qui se présente comme une réserve immense d’engins et de potentialités technologiques, soigneusement entretenue  par des robots.
      Alors que Kord Vengel meurt, tué par un robot, Urlandey fait capturer le couple en attendant de statuer sur son sort.  La perte de la fusée qui devait ramener  le groupe d’explorateurs les oblige à un long contretemps : ils resteront sur Terre pour plusieurs années. Délai profitable puisqu’au retour de Stanley, le commandant martien à la tête d’une nouvelle flottille, non seulement personne n’a été exécuté, mais encore Kymri et Mirlena attendent leur premier bébé, symbole d’une nouvelle union des races,  tandis que les Martiens, débarrassé du vanéysme, seront accueillis comme des frères. Il semble que, pour un temps du moins, les luttes raciales soient éradiquées et que l’espèce humaine puisse espérer un recommencement glorieux :
      "Et soudain , tous quatre éclatèrent d’un rire fou , communicatif. Les trois Martiens noirs et l’homme blanc de la Terre. Après la destruction d’un satellite et la dévastation d’une planète, après la mort d’une civilisation et d’innombrables millions d’êtres, après deux mille ans de haine fomentée sur Mars et après de longs siècles passés dans l’isolement et dans l’ignorance du dernier continent vivant de la terre, la couleur de la chair humaine avait pris moins d’importance que l’esprit qui l’animait. Tel était l’humour de Godfred. "
      Récit ni trop mièvre – vu le thème abordé – ni trop cérébral, mené tambour battant, à la manière d’un space-opera. Il ne possède pourtant pas la verve de "l’Etreinte de Vénus" ou la vigueur "du Jour des fous" ; comme quoi avec de bons sentiments on ne fait pas toujours de la bonne littérature…

    4. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Francis Henry SIBSON Parution: 1932
      Une expédition scientifique, partie sur le trois-mâts Springbook, achemine vers l’Antarctique quarante trois personnes dont Dane le capitaine, Rattray son second, dans le but est de dresser la cartographie des lieux se situant derrière la falaise de glace qu’ils abordent. A fins d’économie, aucun avion d’exploration n’a été prévu. Bien que le voyage se déroule sans incident, il ne s’agit  de ne pas traîner pour ne pas se faire emprisonner par le pack de glace qui ne tardera  à se former. Le point d’accueil, une sorte de vaste baie qu’ils baptiseront " baie de Mills " leur permettra d’approcher au plus près de la côte avec le bateau.
      Les conditions météorologiques se dégradant rapidement, ils n’auront même pas le temps d’achever la totalité du déchargement qu’un bloc de glace qui se détache de la falaise, coule le navire. Avec des vivres en quantité limités et un abri prévu pour dix-sept personnes seulement, ils subsisteront en pratiquant la chasse  aux phoques et aux pingouins.
      Dane est persuadé que les secours ne tarderont pas,  bien que tout appareil de communication ait été anéanti durant le naufrage. Une stricte répartition des tâches structurant le temps, leur donnera la force d’attendre. De plus en plus inquiet, sachant qu’ils ne pourront résister à un deuxième hiver dans la glace, Dane fait apprêter un Cutter et deux baleinières à bord desquels  ils espèrent atteindre les îles Kerguelen sans autres instruments de bord que sa science de la navigation. L’équipée sur une mer inconnue et souvent hostile leur cause des souffrances inouïes et une perte importante en hommes.
      Soit ils tirent leurs bateaux sur la glace pour éviter qu’ils ne soient broyés, soit ils subissent des tempêtes australes qui les laissent exsangues au fond de leurs embarcations :
      " Le tableau que présentait l’intérieur du cutter eût paru fort lugubre à un spectateur non averti. Sales, tout couvert de l’inévitable suie, hirsutes, enveloppés de haillons, les hommes gisaient un peu partout au milieu des caisses de provisions. "
      la chance leur sourit enfin lorsqu’ils croisent le Langford Hall,  un cargo dérivant à propulsion diesel, manifestement abandonné. Parvenu à son bord, aux limites de leurs forces, ils découvrent les squelettes de l’équipage encore prêts au poste comme si une catastrophe survenue avait été d’une terrifiante soudaineté.
      Se dirigeant vers la côte sud-africaine, un soupçon désagréable commence à naître en leur esprit parce que nulle part ils ne croisent de navires. Au-delà de Cape Peninsula commence l’approche du port de Simonstone. La nuit, tout est noir. On n’y voit ni phares, ni feux de navigation en ces lieux dangereux.
      Au matin, une vieille chaloupe se propulsant à la vapeur se dirige vers eux. Le jeune officier qui la commande est incapable de s’expliquer, comme frappé de déficience mentale. Hagard, il prie Dane de l’accompagner voir l’Amiral, son chef. En abordant le quai désert, Rattray risque une explication : tout se passe comme si une guerre venait d’avoir lieu, une guerre au moyen de gaz :
      " - Les gaz, interrompit Rattray. Que disait-il ? Un mur de gaz. On laisse tomber sous le vent une rangée de bombes à gaz… C’est ce qu’ils ont fait pour ce navire… Et l’on achève l’ouvrage avec des bombes incendiaires et explosives… mais certains, sûrement, ont eu le temps de mettre leurs masques à gaz. D’autres pouvaient être alors en permission et sont revenus plus tard… (…) Ils ne sont certainement pas tous morts à terre. Il y a l’Amiral… et il doit avoir un état-major, je pense."
      Dane, à pieds, flanqué du jeune officier, traverse la ville anéantie :
      " A mi-chemin, ils se trouvèrent devant une longue file de squelettes ; ils gisaient sur l’asphalte revêtus d’uniformes bleus en lambeaux. A la tête de cette terrifiante colonne, au milieu des ossements, Dane aperçut des instruments de cuivre couverts de vert-de-gris. Il s’arrêta, frappé d’horreur.
      -Les malheureux !… Ils ont été fauchés en revenant de l’église, musique en tête "
      L’anéantissement total ne fait aucun doute. Ne subsistent plus que de rares survivants dans des villes dévastées ; l’Amiral lui-même n’existe pas : c’est seulement un cadavre momifié auquel obéit encore le jeune officier. Dane, ayant rejoint ses amis, suggère au moyen de la chaloupe, de longer la côte jusqu’à trouver un hameau qui leur donnerait asile. Ils échouent finalement en un lieu appelé " Finis Terrae ", où dans un état semi-comateux et suicidaire,  ils écoutent les explications d’un jeune couple qui a également trouvé un refuge précaire en ces lieux. Tous les doutes seront levés :
      " - Mais… Mon Dieu ! j’espérais… je pensais que seuls étaient atteints ceux qui avaient été directement gazés… Comme c’était le cas ici…
      -C’est justement ce qu’il y a de plus horrible ! répéta Hay. Imaginez la nocivité de l’atmosphère après…. Après ce qui est arrivé maintenant. (…)
      Mais qui donc a fait ça ?… qui sont ces " ils " ? … fit une voix rauque derrière eux. C’était Rattray. Un Rattray fiévreux, au visage dévasté, aux yeux étincelants sous des sourcils broussailleux. Il faisait penser à quelque prophète de l’Ancien Testament. Qui a déclanché la guerre ?
      -Qu’importe ! répliqua Dane. Nous ne le savons pas. Peut-être le saurons-nous jamais. Nous devons affronter l’inconnu. "
      Les gaz nocifs, par le biais des courants aériens, avaient empoisonné la planète entière. Eux seuls présents en Antarctique ont été épargnés et représentent aujourd’hui les derniers éléments sains de l’humanité.
      Un récit d’aventure qui se termine en roman-catastrophe. Palpitant, documenté, réaliste et entraînant de bout en bout, le récit se lit d’une traite,  avec des personnages héroïques qui s’accrochent désespérément à la vie dans un monde hostile. Ce roman traduit (sans mention du pays d’origine) était destiné à un public adolescent avec une date d’édition (1934) qui suggère le pessimisme précurseur de la deuxième guerre mondiale.

    5. Type: livre Thème: savants fous et maîtres du monde, le dernier homme Auteur: Roger-Henri JACQUART Parution: 1943
      Le Docteur Borislav est un savant fou. Il hait l’humanité, pervertie et perverse. Il souhaite sa destruction totale. Par conséquent, il a inventé le rayon rouge qui rase tout à hauteur du sol. Comme il  adore sa fille Sylvia dont il aimerait faire la nouvelle Eve d’une humanité nouvelle, il lui faut un nouvel Adam. Qu’à cela ne tienne, il lui adjoindra Alex, l’amoureux de Sylvia.
      Et pour que leur destin commun puisse s’accomplir, il a aussi inventé un aéronef appelé "Sylvia" qui emportera le couple dans ses flancs pour une promenade dans la haute stratosphère, le temps pour Borislav de détruire l’humanité:
      "Je ne sais si je me suis bien fait comprendre. J’ai essayé simplement de décrire les pensées harcelantes qui se sont emparées de moi dès mon retour sur cette terre de désolation. Je ne pouvais mieux faire à ce moment, car mon esprit ne se dégageait que très lentement d’une sorte de léthargie. Pourtant je me rappelle vaguement que, pour tenter de justifier ma faiblesse à mes propres yeux, j’étais près de croire à l’influence néfaste de puissances occultes redoutables. Je finis par en rire. Le malheur, qui avait fondu sur Sylvia et moi à l’instant où nous nous y attendions le moins, était né de la volonté d’un seul homme, je le savais pertinemment, et je ne voyais pas en quoi un éventuel mauvais sort aurait pu intervenir en l’occurrence . Je désirais garder la tête froide pour envisager le futur avec calme. Et je savais que si l’on admet trop aisément l’influence de quelque force occulte, on risque de perdre confiance en soi, cette confiance si nécessaire à la réussite.
      Les faibles seuls perdent un temps précieux à attendre passivement l’intervention de puissances mystérieuses, et, pendant les instants où ils les sollicitent, ils n’agissent plus utilement. Ensuite, stupidement, ils   osent se plaindre de n’être pas parvenus à vaincre les obstacles semés sur leur route et, se croyant maudits, ils désespèrent davantage. N’est-ce point là une des plus grandes déficiences de l’humanité que j’ai connue? La force d’âme manquait à la majorité de nos semblables. Ils se raccrochaient trop facilement à des idées de chance ou de malchance dont ils se croient les victimes, et ils oubliaient que la réussite de leurs projets dépendait uniquement de leur propre volonté. Ils n’étaient plus que des pantins, idolâtres ou mystiques, au cerveau affaibli par des croyances sans fondement. La révolte s’amplifiait lorsque j’écoutais les rugissements de la nature en furie, lorsque je regardais la terre noirâtre, comme écrasée par le ciel bas, et que j’entendais la pluie marteler les hublots. Et je jurais que si je réussissais un jour à jeter les bases d’une nouvelle civilisation, je ne parlerais jamais à mes descendants, ni de fées, ni de lutins, ni de dieu, ni de diable! Je voulais les habituer, dès leur jeune âge, à ne chercher le courage qu’en eux-mêmes. Je voulais créer des hommes forts, capables de se frayer seul un chemin dans l’existence, sans s’arrêter à tout bout de champ pour implorer le ciel ou l’enfer. Je voulais leur apprendre à faire eux-mêmes une discrimination logique entre le Bien et le Mal, sans leur inspirer pour cela d’inutiles et dégradantes terreurs.
      La peur d’une idole a-t-elle jamais empêché les hommes de commettre des actes immoraux? Au contraire! Certains les ont commis avec l’idée stupide de se les faire pardonner ensuite grâce à la complaisance publicitaire de textes ou de rites douteux, immoraux par leur élasticité voulue. Non, je ne croyais plus en rien de spirituel. A quoi aurais-je pu croire encore, d’ailleurs, après avoir vu le monde entier s’écrouler autour de moi sans la moindre intervention céleste pour  sauver les hommes? Avais-je entendu sonner les trompettes du Jugement Dernier, alors que tout était mort sur terre?
      Les mains crispées sur mes tempes, le front moite je dis adieu au passé avec tout ce qu’il comportait de faiblesses et d’imperfections mortes. Je ne voulus plus regarder que l’avenir et je décidai d’avancer dorénavant tout droit devant moi, sans craintes injustifiées ni regrets déprimants et inutiles,
      Reconstruire le monde? Eh bien, oui j’acceptais.  Qu’aurais-je pu faire d’autre d’ailleurs, en de telles circonstances? Me laisser mourir sans réagir? C’eût été infiniment lâche, infiniment peu digne de moi et de mon passé ! Quitte à être vaincu par des impondérables il me fallait lutter jusqu’au bout ! Redonner naissance à une race humaine, n’était-ce point jouer un rôle magnifique? Et même, lorsque je regardais Sylvia si jolie et si fine, et que je songeais à notre amour et à notre jeunesse, j’imaginais que ma tâche n’aurait rien de désagréable..."
      De retour sur terre, nos héros ne retrouvent rien, si ce n’est une étendue de boue plate arrosée par les éléments en furie déchaînés par l’acte inconsidéré de Borislav. Cependant, celui-ci avait tout prévu pour eux: un système de guidage pour ramener les tourtereaux à bon port, un abri souterrain où ils pourront se délasser -avec décence- en attendant que le monde soit à nouveau vivable. Et même une surprise: la présence d’un deuxième couple, composé d’un agriculteur , Basile,  et de sa femme Denise, ainsi que de certains animaux, chèvre, chienne, vache , etc.
      Ainsi  Alex ne se sentira pas trop isolé comme unique cadre de la classe supérieure et comme dernier intellectuel bourgeois vivant. Basile, très intuitif, a bien compris tout cela: il vouvoie Alex qui le tutoie , et il accepte son autorité sans réticence.
      Un grain de sable détraque la belle machinerie: toutes les femelles (y compris Denise) sont enceintes et accouchent prématurément d’un rejeton mort-né (y compris Denise), à cause de l’ozone qui se répand, conséquence imprévue de la destruction imbécile de Borislav.
      Basile devient fou de douleur à la mort de Denise, puis ne pense qu’à coucher avec Sylvia (la dernière femme avec les deux mâles) ce que réprouvent la décence et l’auteur. Alex, qui est vraiment stupide, explique à Basile comment marche Sylvia (la fusée pas sa femme). Alors Basile s’embarque, ravissant Sylvia, femme et fusée, pour coïter décemment dans l’univers avec la femme d’Alex,  tandis que ce dernier, fou de solitude , marche , son carnet de notes en mains,  sur une terre réduite à une surface de boue arrosée par de la pluie. Fausse sortie: seule l’Asie a été détruite, et non la totalité de la terre. La fin du roman livre Alex délirant aux Européens venus le sauver.
      Roman  mièvre,  non par l’idée ou la description du décor,  mais à travers la philosophie de l’auteur faite toute de décence bourgeoise, de retenue morale, d’une xénophobie sous-jacente. Le cadre est  prétexte à la destruction d’une humanité supposée décadente et  incline  à répondre positivement  à la montée du fascisme de l’époque.

    6. Type: livre Thème: invasions d’insectes Auteur: Vargo STATTEN Parution: 1953
      Nick Hensley et son épouse Enna, en compagnie de son père, ont hérité de l’immense manoir de l’oncle Cyrus Odder. A peine sont-ils installés, que le Docteur Lexton, un voisin, se déclare prêt à leur racheter la propriété dans laquelle, selon ses dires, se passeraient des faits inquiétants. Nick résiste et Lexton n’insiste pas. Dans la nuit pourtant, le père d’Enna est assassiné.
      En fouillant la maison pièce après pièce, Nick découvre la momie d’une étrange fourmi géante, haute de plus de deux mètres. Len, leur ami entomologiste qui les a rejoints, confirme cette découverte. En route pour faire examiner l’immense insecte par des sommités londoniennes, Len surprend dans la nuit le Dr. Lexton qui enterre un cadavre. La police prévenue découvre qu’il s’agit du Dr. Roy, un ancien associé de Lexton. L’assassin reste introuvable.
      Entre temps, Nick et Enna se sont sortis à grand’peine d’un énorme danger. Dans un tunnel qui relie leur propriété à celle de Lexton, vit une fourmi géante, du même acabit que la précédente, un cerbère haineux et dangereux. Avec Enna, contournant le danger, Nick découvre au bout du tunnel un laboratoire où se terre le Dr. Lexton et son horrible vérité.
      Moitié fourmi lui-même,  dont il a adopté le mode d’alimentation, le Dr. Lexton ne fait qu’un avec l’oncle Cyrus dont il possède le cerveau par transplantation. Créateur des fourmis géantes, il est prisonnier de ces insectes monstrueux, télépathes de surcroît. Nul n’est plus que lui à même de constater le péril terrible que constituerait pour l’humanité le développement de cette race. Il bat sa coulpe et enjoint au couple de prévenir les autorités. Déjà, il est trop tard. La fourmi géante du tunnel, parvenue à se libérer, tue Lexton.
      Le couple, fuyant l’épouvantable spectacle, préviennent les autorités, avant de regagner Londres. La chasse à la fourmi géante est donc ouverte et le monstre découvert, puis abattu.
      Après une courte accalmie, soudain, la campagne autour de Londres, puis la capitale elle-même, est en butte à une horrible invasion de guêpes géantes tueuses de trois mètres d’envergure, qui organisent le massacre systématique des humains :
      « Les terrifiants colosses aériens aux aiguillons barbelés foncèrent sur la ville, et, sauvagement, poignardèrent tous les humains qu’ils purent repérer dans les rues. Ils volaient en masses compactes au-dessus des immeubles, entre les maisons et le long des avenues, avec une virtuosité, une vitesse et une précision interdites aux avions de chasse les plus maniables. Des travailleurs matinaux tentèrent de fuir vers les abris : ceux qui manquèrent de promptitude furent transpercés sur-le-champ et réduits à l’état de cadavres. Londres et sa banlieue devinrent en quelques secondes le théâtre du plus extraordinaire massacre de l’histoire. »
      Conjointement, un curieux tremblement de terre dont l’épicentre se situait sous la capitale même, provoqua la chute des immeubles :
      « Un sourd grondement s’éleva et Len sentit les pavés monter vers lui. Précipité sur le sol, il se redressa sur les genoux et jeta autour de lui un regard de stupeur horrifiée. Londres était en train de s’effondrer !… Les plus hauts buildings, enrobés dans leur gangue d’insectes, perdaient leur équilibre et culbutaient, s’écroulant en énormes fragments de maçonnerie, ensevelissant bêtes et hommes sans discrimination. Les avenues se fendaient, engloutissant dans d’insondables profondeurs des grappes de combattants. Du fond des crevasses montaient d’épaisses fumées âcres et nauséabondes, libérées par des incendies souterrains. »
      D’après Len, qui, de loin en loin, aperçoit d’énormes fourmilières, il ne fait aucun doute que les fourmis géantes ont fait souche et essaimé, ayant percé l’écorce terrestre comme un vulgaire gruyère, et communiquant entre elles par des galeries et salles souterraines :
      « Les fourmis géantes ont taraudé la planète aussi profondément qu’elles l’ont pu et elles ont transformé toute la Terre en une seule et immense fourmilière. (…) ce qui signifie que les insectes jouissent d’une complète liberté de mouvement d’un côté de la terre à l’autre, par l’intérieur de l’écorce. »
      L’invasion programmée par les fourmis débuta ainsi, d’une violence extrême. A l’aide de leurs alliées les guêpes, elles mettent à mort sans délai tout humain rencontré ou, dans le meilleur des cas, l’entraînent dans leurs tanières comme réserve de nourriture. Len, Nick et Enna sont pris eux aussi dans la tourmente et arrêtés par les insectes. Comme ils étaient les premiers à connaître « l’ancêtre », ils eurent droit à un sort particulier en rencontrant, au centre de l’immense fourmilière souterraine, la reine des fourmis géantes :
      « Bientôt émergea de cette radieuse incandescence une autre fourmi, plus gigantesque encore mais d’une forme identique. Elle s’immobilisa devant les trois humains en dardant vers eux des yeux fascinants. Une de ses pattes était posée sur un appareil mobile. La nouvelle venue manoeuvra un bouton. A l’instant même un flux psychique transperça le cerveau des trois prisonniers avec une telle violence qu’ils chancelèrent comme si on les avait bousculés. »
      Par télépathie, elle leur expliqua qu’elle et ses consoeurs n’appartiennent pas à cette terre mais proviennent du futur, de l’an 6980, très exactement. Télépathes, intelligentes, sans émotions, elles sont les descendantes du premier couple crée par Cyrus et se sont tellement bien développées qu’elles constituent la race dominante du futur, ayant relégué l’humanité au second plan. Dominant l’espèce humaine, se déplaçant dans des « tempoplanes», elles ont investis la terre de maintenant pour accélérer le processus de domination. Aujourd’hui même, elles comptent éliminer totalement les  humains.
      Après cette entrevue, prêts à être transformés en pièces de boucherie, ils devront la vie sauve à Arona, une jeune humaine résistante, elle aussi venue du futur, décidée à remonter à la source du péril pour redonner la primauté à son espèce. Elle espère retourner en son temps, et, par une fausse nouvelle, obliger toutes les fourmis restantes à gagner le passé pour soutenir leurs consoeurs. Len, qui est tombé amoureux d’Arona, la suivra dans ses pérégrinations temporelles. A leur retour en Tempoplane, ils constatent que partout, dans le monde, s’affaissent les habitats souterrains des fourmis, les précipitant dans le magma sous-jacent. Len s’explique ce revirement de la façon suivante :
      « Je crois que la clé de l’énigme réside dans le fait qu’à l’endroit où nous avons émergé en 6980, la surface est située plus bas que le point correspondant de notre époque ; de sorte que lorsque j’ai coupé les moteurs, notre Tempoplane s’est retrouvé à l’intérieur de l’écorce terrestre, à l’emplacement même d’une de ces formidables machines dégravitationnelles qui supportent les terrains de couverture. Nous avons involontairement fait sauter les installations qui garantissaient la sécurité intérieure de ces cavernes. »
      En ressortant à l’air libre, près de Londres, ils ont la joie de voir des terriens motivés quoique éprouvés, en compagnie d’alliés inattendus : des tamanoirs géants, modifiés eux aussi avec le procédé du Dr. Cyrus, qui se délectent des fourmis tueuses restantes !La partie se termine en « happy end » pour Nick et Enna qui pourront enfin consommer leur lune de miel, et pour Len qui accompagnera définitivement Arona en son temps.
      Spécialiste de la science-fiction cataclysmique des années cinquante, Vargo Statten signe un roman de plus dans la veine des pulps, avec ses thèmes archétypiques. Le récit, débutant dans une tonalité de fantastique gothique qui se transforme en  science-fiction débridée, reste sans prétentions et agréable à lire pour des adolescents d’après-guerre.

    7. 48 - Par BenF BenF

      Type: livre Thème: la cité foudroyée, guerres futures 1, menaces animales Auteur: James HERBERT Parution: 1996
      En 1948, Londres est un immense brasier. Hitler, avant de perdre la guerre, a expédié sur la capitale de l’Angleterre quantité de V2 bourrés d’un gaz empoisonné et de microbes, ce qui a déclenché une épidémie foudroyante par corruption du sang : la « Peste Sanguine » . Hoke, un ancien pilote américain volontaire dans la R.A.F. parcourt  cet univers urbain délabré :
      «Nous passâmes devant des immeubles détruits, certains par les bombardements de la Luftwaffe, d’autres plus tard, lorsque les canalisations de gaz avaient explosé, à cause d’une cigarette, d’un court-circuit ou d’une bougie, bref toutes sortes d’accidents domestiques provoqués par les victimes de la Peste Ecarlate Lente quand ils succombaient subitement. Les dommages infligés à la ville n’étaient pas terminés, d’ailleurs. Des canalisations de gaz continuaient d’exploser, des conduites d’eau de se briser, et des bâtiments frappés par les bombes de s’écrouler bien après la fin du Blitz. Londres était un endroit dangereux, même sans cette armée de barjots qui sillonnait les rues. »
      Il est l’un des rares rescapés grâce à son sang de groupe AB. Pourchassé par les « Chemises Noires », les derniers nazis anglais sous la direction de Hubble, bras droit de Morlay, un leader fanatique, il a, pour leur échapper à coup sûr, constitué des planques disséminées un peu partout dans la ville morte.  Les Chemises Noires sont elles aussi atteintes par le fléau mais meurent plus lentement, en pourrissant sur pied. Hubble est persuadé qu’en capturant Hoke, il parviendrait à survivre par une exsanguino-transfusion :
      « Les victimes de la Peste Sanguine, appelée aussi Peste Ecarlate, ou Pandémie par les plus littéraires, n’avaient pas eu le temps de comprendre ce qui arrivait à leur corps. Leurs artères s’étaient soudain gonflées avant de se rigidifier sous la peau ; leurs mains avaient noirci, les extrémités des doigts s’étaient gorgées de sang  tandis que les veinules éclataient. Le liquide vital s’était mis à couler de tous les orifices corporels, des oreilles, des yeux, des narines, de la bouche, du sexe, de l’anus, puis des pores de la peau.
      Ils ne s’étaient pas rendus compte que les artères principales coagulaient tandis que les organes principaux, engorgés, cessaient de fonctionner et qu’une hémorragie instantanée les envahissait. Leur poitrine avait été broyée dans l’étau d’une effroyable souffrance, jusqu’à ce que leur peau se fendille et que tout organe vital cesse de fonctionner. »
      Pour corser le tout, la ville est régulièrement survolée par un aviateur allemand fou qui la bombarde au hasard. Quant au reste de l’Europe, l’on ne sait ce qui s’est passé mais l’on suppose que la Peste Sanguine a étendu partout son action.
      Hoke est repéré dans l’une de ses planques et doit la vie sauve à Cissie, Muriel et Stern, trois personnes valides qui passaient par là. Poursuivis eux aussi par les Chemises Noires, ils manquent  d’être capturés dans les couloirs du métro londonien transformé en nécropole. Finalement, ils prennent leurs quartiers au Savoy, le grand hôtel international pour élite, lui aussi rempli de cadavres ou décomposés ou momifiés :
      «J’avais nettoyé la rue. C’était le dernier cadavre. Tous les autres étaient hors de vue, à l’intérieur des bâtisses. Comme on dit : loin des yeux, loin du cœur. Mais c’était faux. Je les voyais encore en pensée, avachis dans leurs fauteuils, écroulés sur les tables, recroquevillés sur le sol. Desséchés, des coquilles vides aussi légères qu’une plume, des silhouettes de poussière. Pour moi ils peuplaient toujours les magasins, les restaurants, les bureaux, les usines, les habitations, les stations de métro, les véhicules… La liste n’avait pas de fin. Et je ne pouvais les apercevoir tous. »
      Leur repos sera de courte durée : trahis par Muriel pour des raisons idéologiques, Hoke et son petit groupe est capturé et immédiatement apprêté pour la transfusion, lors d’une séance dans le plus pur style d’un opéra wagnérien. Par une ironie du sort,  le bombardier fou, apercevant de la lumière,  prend le Savoy pour cible ce qui permettra à Hoke et consorts de se libérer. Re-poursuite. Finalement, ils aboutissent dans une autre planque, une maison du quartier de Pettycoat Lane. Stern, ayant été touché par les Chemises Noires, meurt. Hoke se retrouve avec Cissie alors que les chemises Noires, remis en piste grâce à Cagney, le chien ami de Hoke, les menacent à nouveau.  Cette fois-ci, Hoke décide de faire place nette. Profitant du fait que les Chemises Noires sont occupées avec d’autres captifs sains dans leur repère de la tour de Londres (avec Muriel a qui la trahison n’a pas profité), le héros, armé jusqu’aux dents, les fait sortir de leur cache, les attire sur le pont de Londres dont il fait exploser le tablier, manquant de justesse d’y rester lui aussi.  Les Chemises Noires définitivement rayées du monde, après un dernier adieu à la ville sous la forme d’un immense brasier funéraire qu’il allume dans le stade de Wimbledon, Hoke, Cissie et quelques-uns des nouveaux rescapés quittent la cité meurtrie à la recherche d’un endroit et d’une autre société à reconstruire.
      Un récit curieux, efficace, irritant. Curieux, car c’est l’une des rares uchronies post-cataclysmiques que nous ayons rencontrées. (Si Hitler avait déclenché une épidémie pour rayer l’Europe de la carte du monde, cela se serait su !)  Efficace, car la poursuite, la description de l’enfer urbain livré aux cadavres est d’un réalisme fort.  Irritant, car l’action est inconsistante, Hoke étant convié, durant 368 pages, à une partie de cache-cache avec les Chemises Noires. Au final, un roman lisible mais qui manque littéralement de « sens », mise à part la critique lourdement appuyée d’un nazisme « vampire du reste du monde ».

    8. Type: livre Thème: le dernier homme Auteur: Michel de PRACONTAL Parution: 2004
      Cette société d’un futur proche ressemble à celle du «Meilleur des mondes » de Huxley. Aseptisée, pure, asexuée, androgyne. Les enfants y sont élevés dans l’aversion, dans la honte de la souillure et de la tache.
      Depuis les lois de Georges Bush III, la plus stricte sévérité est appliquée aux derniers délinquants que sont les fumeurs ou les érotomanes. Ainsi, faire l’amour ou fumer sont des activités totalement illicites et le dernier fumeur l’apprendra à ses dépens puisqu’il sera tué et émasculé par une bande de zonards. Car la bête ne demande qu’à relever la tête dès que se présente la moindre faille.
      C’est dans cet univers, issu de la troisième guerre mondiale (nucléaire), où les survivants vivent sous cloche transparente, que prend place l’enquête du détective Lönnrot envers le meurtrier Scharlach sans que cela ajoute un zeste d’intérêt à une nouvelle, certes bien écrite, mais aussi bien conventionnelle.

    9. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Albert ROBIDA Parution: 1919
      Deux prologues ouvrent le récit. Dans le premier, le diable, empruntant la personnalité du moine Schwartz, présente à l’abbé Gotlieb dans l’abbaye de Fribourg, sa dernière invention (diabolique) : la poudre à canon. Nous sommes en l’an 12…
      Dans le deuxième, c’est l’ingénieur Von Satanas qui vient tenter les parlementaires de la paix réunis à La Haye. La science et le progrès allaient enfin établir la paix universelle, lorsque juste avant le banquet de clôture et après la signature du traité, comme l’on allait boire à l’amitié éternelle entre les peuples, les plans du nouveau moteur d’aéroplane et la composition chimique ou microbienne de nouveaux obus présentés par von Satanas séduisirent énormément. Cet ingénieur ressemblait  étonnamment au moine Schwartz…
      Au moment où s’ouvre le roman, le narrateur, Jacquemin, est en train de dériver sur un débris, entraîné par les courants, vers la côte hollandaise. Ayant fait partie de l’expédition Hutchinstone pour l’exploration du pôle Nord, en 1914, il était de retour en 1929  quand le bateau sur lequel il regagnait l’Europe, fit naufrage.
      Il ne resta d’ailleurs pas longtemps seul sur son épave, rejoint par un autre survivant, le jeune et sympathique Marcel Blondeau, de retour d’une île du Pacifique, et qui lui aussi eut le malheur de sauter sur une mine. Unissant leurs efforts, ils s’interrogent sur l’origine de ces engins meurtriers responsables de leur malheur, sur l’absence de phares le long des côtes, sur la désertification des routes marines.
      Alors que leurs vivres diminuent, ils accostent enfin sur une plage sablonneuse, truffés d’objets ressemblant à s’y méprendre à des bombes ayant fait long feu et parsemées de ruines, ce qui témoignerait d’une incontestable violence.  Soudain ils furent abordés par une petite troupe  de gens au visage couvert d’un masque à gaz qui les entraînèrent vers  un abri souterrain. Sans qu’ils le sachent encore, l’on venait de leur sauver la vie. Bien que surpris par l’aspect grotesque et les habits en lambeaux de leurs sauveteurs, ils prirent le temps d’écouter le chef du groupe, un certain Danois,  le  Dr. Christiansen, leur indiquer la cause de leur affreuse situation :
      " La gueuse de Science, l’horrible gueuse ! répète le Danois.
      -Mais, permettez, fis-je abasourdi, permettez… pourquoi ce blasphème ?
      -Eh ! vous devez bien vous en douter !
      Sans elle serions-nous terrés dans ces ruines, en péril de mort par asphyxie, avec d’autres dangers nous guettant de tous les côtés : écrabouillements par mines, torpilles, explosions…,
      Ecrabouillements venant du ciel par avions… diffusions de maladies épidémiques par boîtes à miasmes, ou grenades à microbes de haute virulence…etc., etc., que sais-je !… "
      Et les responsables en sont les Allemands, les " Boches " :
      " -Vous avez dit gaz boche, que signifie Boche ? C’est un terme scientifique nouveau ?
      -Non ! Boche, l’horrible Boche, le Boche anthropomorphe des tribus germaniques prussifiées, les Boches de la barbarie scientifique, enfin !… les nouveaux Huns, dirais-je, si je n ‘étais certain, ce disant, de calomnier Attila, qui n’avait pas la férocité hypocrite et savante, lui… "
      L’abri souterrain où ils se terrent en attendant que se dissipent les "gaz boches" au-dessus de leurs têtes, appartient à un certain monsieur Vandermolen, un pacifique et jadis riche cultivateur de tulipes. C’est là, à Harlem en Hollande, à proximité de La Haye, tout proche du Palais de la Paix, devenu forteresse des " Boches ",  qu’ils subissent les attaques répétées de Prussiens utilisant tous les artefacts de la technologie moderne, bombes chimiques et bactériologiques, gaz asphyxiants et paralysants, lancés par aéroplanes ou par canons à longue portée.  Par manque de prudence de la part des autres nations, les Boches ont envahi, écrasé, désertifié l’Europe :
      " Au lieu de couper radicalement les griffes du monstre et de lui casser soigneusement les dents, on se contenta de les rogner légèrement, avec douceur et délicatesse… Faute capitale ! Funeste mansuétude, dont l’Univers tout entier subit aujourd’hui les conséquences effroyables !… L’Allemagne refaisait avec une hâte fébrile son matériel de guerre, le décuplait en le perfectionnant. "
      Aujourd’hui vainqueurs mais réduits en nombre, ils en sont à leur dernière extrémité belliqueuse gardant jusqu’à la fin qui est sans doute proche, leur faculté de nuisance :
      " -Horreur des horreurs !
      -Gesta diaboli per Germanos ! dit Jollimay (…) Ah ! cette Allemagne que nous admirions naïvement et bêtement, nous laissant prendre à sa fausse façade, camouflée avec tant d’art . Hélas ! (…) la docte Allemagne ! Gretchen aux blonds cheveux effeuillant la marguerite de la Science ! Pour nous, à part les Hohenzollern, au fond de la Prusse, à part un clan de hobereaux et de militaires bismarckiens, il n’y avait que la docte Allemagne, la douce, familiale et scientifique Allemagne ! Et nous ne l’apercevions pas, chargeant ses canons derrière un rideau protecteur de poètes suaves et de braves savants à lunettes, préparant son arsenal satanique, accumulant ses moyens d’agression, de meurtre et de pillage. "
      Les seuls endroits sûrs qui permettent d’échapper aux bombes de toutes sortes sont les abris, les " terriers " qui ont vu naître une nouvelle civilisation préhistorique :
      " Eh bien, est-ce que tout ne vous semble pas préhistorique ici ? Est-ce que nous ne vivons pas dans des espèces de cavernes comme les hommes des premiers âges ? (…) Ah ! comme la comparaison tournerait à l’avantage des premiers hommes ! Ah ! Comme ils y perdraient de vivre avec nous, les braves gens des cavernes préhistoriques, qui n’avaient à craindre que l’ours ou quelqu’autre honnête bétail dépourvu de malice, quasi-inoffensif à côté du bipède scientifique et "kulturé " d’aujourd’hui !… (…)
      Les populations qui dans les premières années de la guerre générale ont échappé aux écrabouillements par explosifs, aux intoxications par les nappes de gaz, par les couvercles de vapeurs mortelles, aux infernales projections de flammes, d’acides ou de miasmes, se sont enfoncées dans le sol. On vit sous terre, on creuse la glèbe aussi profondément qu’on le peut, la bonne vieille terre nourricière de jadis, on fouille l’argile, la pierre ou le roc. "
      L’abri qui les a accueilli regroupe des ressortissants du monde entier. Christiansen présente à Jacquemin et Blondeau, quelques-uns de ses compagnons d’infortune : Miraud, l’aviateur français, à qui il manque le bras gauche, Bustamente, lieutenant d’infanterie péruvienne et Felton le grenadier néo-Zélandais, Mohamed Bamoko le tirailleur sénégalais, un géant avec une main en crochet et son ami Kuomang, le fils d’un mandarin de Hué, Gibson, ancien milliardaire américain et Démétrius Manoli le Roumain ; enfin et surtout Mme Vitalis, une Parisienne à la jambe de bois et sa fille Jeannne, une délicieuse demoiselle qui n’a jamais connu que la vie des terriers. Autant dire que le  Boche  est l’ennemi du genre humain :
      L’Europe !… Rappelez-vous les photographies de la Lune qui nous montraient un astre en démolition, au sol criblé de trous, de cratères écornés et effrités… Eh bien, s’il y a des astronomes dans la lune, c’est exactement ce qu’ils doivent voir chez nous maintenant ! Sans doute la lune a passé par les mêmes horreurs que nous, il s’y sera trouvé quelque race de proie, des Boches lunatiques, pour tout dévaster et saccager jusqu’à extinction complète et définitive !… Dans notre Europe bouleversée, il n’y a plus que des tranchées. Ces tranchées, qui zigzaguent à travers tous les pays, qui sillonnent, coupent, découpent et recoupent plaines et montagnes, c’est depuis longtemps déjà la seule manière de labourer la pauvre terre que connaisse l’Européen !… Les fronts, je ne dirai pas des armées, il n’y a plus d’armées, mais des peuples tout entier en armes, les fronts se pénètrent et s’enchevêtrent, amis et ennemis pêle-mêle les uns dans les autres. (…)
      Ces révélations provoquent l’effondrement moral de Jacquemin, frappé d’horreur devant l’effrayant cataclysme. A cause des Allemands, le monde entier a régressé. A cause d’eux, à cause de leur science traîtresse, la civilisation humaine à été réduite à néant :
      " Au pilori, la science ! Certes, la guerre de tout temps fut quelque chose de triste et d’horrible, mais notre science est venue, et elle a centuplé…que dis-je, " centimilluplé " les horreurs et les terreurs de la guerre, elle a développé, multiplié, généralisé les possibilités et les facilités de massacre, à toute distance et aux plus longues portées…
      Elle a tellement changé et aggravé les conditions des luttes de nations, si affreusement gâté la guerre, enlaidi, sali hideusement l’horreur, que les guerres d’autrefois ne semblent plus que de simples bousculades un peu vives , la bataille d’autrefois  un geste d’héroïsme brutal…. "
      Habillés avec des lambeaux de peaux, armés de massues ou d’arcs, mangeant des rats ou les lapins des dunes, n’enlevant leurs masque à gaz qu’à de rares occasions, les troglodytes s’obstinent à survivre malgré tout. Ils ont tous été dupés par l’Allemagne, par son sentimentalisme, par ses " Gretchen ", alors qu’elle ne songeait qu’à utiliser la science en un but de mort, en s’aidant des microbes :
      " Quel travail !… Préparation des cultures infectieuses, étude des ferments et des virus, élevage et trituration en grand nombre de tous les microbes, de tous les bacilles susceptibles de transmettre les pires maladies et de faire éclater les épidémies, dosage des produits de nos bouillons de culture arrivés à point, pour les charger en torpilles miasmatiques, en bombes, boîtes, fioles, tubes, pastilles, etc."
      La vie dans les terriers est bien organisée. Alors que Jeanne et sa mère s’occupent de faire pousser de rares salades, les hommes partent, quand cela est possible, en expédition. Dans l’environnement en ruines, tous les monuments sont à terre, les bois dévastés, les dunes bouleversées. On y court à la chasse aux rats ou au ramassage des rares escargots. Et lorsque une rencontre s’établit avec d’autres survivants c’est pour s’échanger de pauvres médicaments, des tisanes ou des décoctions contre le typhus ou le choléra.
      Avec le temps, les terriers ont été arrangés du mieux possible et Jeanne possède même des fragments de miroirs pour ménager sa féminité. Tous regrettent le temps d’avant, celui de l’abondance et des chefs-d’œuvre.Aujourd’hui, de tous les chefs-d’œuvre détruits, seul un fragment de la toile de Franz Hals " Banquet de la garde civique " subsiste, restauré par M. Vandermolen, fièrement accrochée dans les ruines.
      La recherche de nourriture demeure leur  occupation principale. Quelquefois, des prises d’exception améliorent l’ordinaire, comme celle du jour où Bamoko revint avec un cheval errant capturé dans les dunes. En étant nourri il fournira dans quelques temps des réserves importantes de nourriture.Pour cela, il faut aller au fourrage. Un groupe, parti en ce but, tombe sur une horde à l’apparence préhistorique menée par un véritable géant. Pas de panique ! Ce sont de braves pêcheurs de Noorderick commandés par leur bourgmestre qui leur indique la direction de Leyde.
      Se faufilant entre les cratères de bombe et les marmites enterrées, ils se reposent un instant dans un village où ils feront la connaissance de Yamoto, aviateur japonais reconverti dans le tir à l’arc qui les accompagnera dans leur entreprise. Le soir tombant, ils devront chercher un abri pour y passer la nuit. Une monstrueuse forteresse roulante hors d’usage dans laquelle vit un Bulgare (allié des Allemands) dégoûté par la guerre, servira en ce but :
      " Dans le petit brouillard mouillé du matin, notre ruine de forteresse roulante se dessinait de façon impressionnante et dramatique, dominant un vaste et sinistre paysage de dévastation, où tout était ravage et ruine, le sol crevassé, éboulé, rempli d’aspérités, de trous et de cicatrices, avec des traces blanches ou rouges de fermes ou de villages évaporés, disparus à jamais, les eaux répandus par flaques, les ruisseaux au cours changé, stagnant ça et là dans des trous, les arbres décapités, invalides amputés et disloqués, qui s’obstinaient à vivre tout de même, poussaient de nouvelles branches et garnissaient de feuillage leurs misérables moignons déchiquetés. "
      Une bande de loups sentant la chair fraîche les traquera toute la nuit. Yamoto et ses compagnons en tueront un grand nombre mais au petit matin on ne trouve plus trace des cadavres : les loups tués auront été dévorés par leurs congénères.
      De retour avec le fourrage, ils découvrent que Blondeau – qui ne les avait pas suivis – avait réinventé le flirt à l’âge des terriers, poétisant auprès de Melle Vitalis qui, d’un naturel gai et optimiste  malgré la situation,  avait non seulement gagné son cœur mais aussi celui de Miraud, établissant entre eux deux une saine émulation à son sujet.
      Les nouvelles fraîches sont très difficiles à obtenir en ce temps de " guerre totale " , selon le concept de Luddendorf :
      " La Guerre scientifique à longue distance, à l’aveuglette, ne peut plus faire de distinction entre civils et belligérants, tout le monde vit en plein dans les mêmes dangers, partout et toujours, dans la fournaise infernale commune, et je distingue chez tous la soumission à l’inéluctable, le fatalisme résigné, cette forme nouvelle et si triste du courage. "
      Pourtant à la Haye, le Palais de la Paix  qui résistait encore semble être à bout de forces : les Boches brûlent leurs dernières cartouches ! Mystérieusement avertis par l’instinct, les survivants des terriers se regroupent, se préparent à l’assaut final avec leurs arcs et leurs flèches, leurs massues et leurs casse-tête.  Pour que la bataille suprême ne soit pas trop sanglante, il faudrait faire taire définitivement les canons. Pour cette dernière fois, le Dr. Christiansen consentira à utiliser la science par la mise au point d’une invention jalousement sauvegardée jusque là, les " Rayons Herziens " qui, en faisant exploser la poudre noire, délivreront définitivement les hommes de l’emprise de l’ingénieur von Satanas. Le roman se conclura avec Miraud, entonnant " la Marseillaise " légèrement modifiée :
      " Voici tous les obus toxiques
      les suffocants, les asphyxiants,
      Torpilles et bombes chimiques,
      L’Enfer lâché sur les vaillants !
      (bis)
      Et sentez-vous dans nos campagnes,
      Les nappes de gaz empoisonnés
      Venant jusque sous notre nez,
      Asphyxier nos fils et nos compagnes !
      Aux armes, citoyens,
      Assurez vos baîllons… "
      " L’Ingénieur von Satanas " paru en 1919 est le plus rare des ouvrages d’Albert Robida. Et le plus sinistre. Ses visions pessimistes du futur, développées dans " le Vingtième Siècle" mais surtout dans " la Guerre au Vingtième Siècle " et, avec Giffard, dans " la Guerre infernale ", intuitions géniales, trouveront ici leur réalisation. La science, source de progrès infini chez Jules Verne, toujours regardée avec méfiance par Robida, devient dans ce roman " cette gueuse de science ", le rêve d’une société mécanisée et d’une vie facile ayant été brisé par la mystérieuse adéquation (qui ne peut être que d’essence satanique) entre la science et la dévorante ambition des Prussiens (les Boches ) rendus seuls responsables du carnage :
      " Voyez tous à l’œuvre la hideuse Allemagne,
      Hideuse dans son âme, hideuse en ses forfaits,
      Son Kaiser qu’on dirait vomi par quelque bagne,
      Ses princes procrées par l’Enfer tout exprès (…)
      Appétits monstrueux de quelques brutes féroces, d’une caste de féodaux en fringale de richesses et d’avantages, de théoriciens du massacre productif, de hauts seigneurs de la grande industrie et de la finance affamés de milliards et de puissance… A table pour le festin ! à table ! "
      La description de la vie dans les " terriers " est calquée sur celle des tranchées. La lutte pour la survie des individus s’enracine dans un décor minutieusement reconstitué. Aucun détail de la vie quotidienne ne sera laissé de côté : agencement des lieux, difficulté de subsister, de s’habiller, les blessures du corps, les atteintes épidémiques, la crasse, la pauvreté, la misère, la mort, lot quotidien des défenseurs de Verdun. L’agressivité et le désespoir véhiculés dans le récit est à mettre en parallèle avec ceux de Méric dans " la Der des ders " et ceux d’autres romans – non conjecturaux- de Malaparte et de Dorgelès. " L’Ingénieur von Satanas " entonne le chant du cygne d’une Europe défunte et de sa future éclipse de la scène de l’histoire. Un livre prémonitoire composé par un utopiste d’une valeur inégalée.

    10. Type: livre Thème: sociétés post-cataclysmiques 2, menaces animales Auteur: Jean-Michel DAGORY Parution: 1985
      Les A.E. (Anglais - Enculés) lâchent sur le continent une petite troupe de loubards habillés en costume de personnage historique (Dagobert, Musset, Cromagnon, Grand Charles, Vercingétorix, Murat, etc.).  En France, ceux-ci s’achemineront vers le sud  afin de comprendre ce qui s’est passé cinq ans auparavant. Car tout et tout le monde a disparu sur terre, et en France notamment, à l’exception de l’Angleterre qui reste la seule nation active. Comment cela a-t-il pu arriver ? Nul ne le sait encore :
      " Enfin on est arrivé. La ville n’avait pas trop souffert ; ce qu’on voyait d’abord, c’était l’énorme bunker, enterré jusqu’aux oreilles, que les Rosbeefs avaient construit dare-dare quand la CHOSE s’était produite, couic ! Paris s’était tu, et la France et, depuis, rien…  Pas de nouvelles du reste de l’Europe, un vrai rêve d’Anglais. Mais pas de nouvelles non plus de l’Amérique, ni de l’Afrique, ni de rien. Plus jamais… (…)
      On aurait pu croire que tous les habitants étaient partis la veille faire un pique-nique. Mais, à la réflexion, ça ne nous rassurait pas du tout, car on savait que les habitants n’étaient pas partis. Ils avaient disparu… Un coup des Russes ? Dans ce cas-là, les vainqueurs auraient donné signe de vie, et le Parti Communiste Britannique aurait enfin gagné des adhérents. Une erreur de manipulation d’un vague plombier atomique, déclenchant une réaction en chaîne ? Pourquoi l’atome fou n’avait-il pas traversé la Manche ? Il y avait des ferries pour ça. Sinon, quoi ? "
      Le narrateur et ses amis vont apprendre ce qu’il en coûte, de s’enfoncer au centre du continent avec leurs motos. Contrastant avec un paysage uniformément gris, leurs souvenirs, extraordinairement vivaces, concrets et colorés, les assaillent comme en une véritable reconstitution surréelle, absurde et mortelle.  Depuis des fermiers qui en décapitent certains avec leurs faux, dans un "vert paradis des amours enfantines ", jusqu’à la mort de la quasi-totalité des membres du groupe, tués par des jouets devenus énormes et menaçants, les morts jonchent le parcours :
      " Ce fut comme le signal de l’orage ; tous à la fois des centaines, des milliers de jouets se précipitèrent sur nous, crépitant sur les nappes blanches, faisant exploser les bouteilles, écorchant les crânes, aveuglant ceux qui se précipitaient vers la sortie. Il y eut une bousculade, les plus paniqués glissant sur les jouets amoncelés, les suivants leur passant dessus. Des cris, des types qui lançaient les jouets vers le plafond, un motard qui s’ouvrit la main en sautant par une fenêtre. "
      Un livre à moitié détruit détenu par Musset, le leader du groupe, évoquerait vaguement l’annihilation de l’espèce humaine (à l’exception des A.E.) par des Martiens, outrés par l’action polluante de Terriens trop remuants. Ils les auraient donc tous " gelés " en rendant meurtriers leurs souvenirs. C’est pour trouver une parade à ce génocide que Musset a besoin du souvenir du narrateur qui a survécu à  l’événement de l’incendie d’un cinéma, au temps de sa jeunesse, lequel a détruit la bibliothèque qui contenait le seul exemplaire complet de l’ouvrage. Mais l’évocation sera la plus forte et personne ne sortira vivant d’un enfer grotesque et fantasmatique.
      Un récit dur, saccadé, abrupt, aux trouvailles souvent inattendues et au style dynamique. Une atmosphère baroque avec des accents de fantastique flamand qui augmentent le malaise du lecteur jusqu’à l’angoisse. Une réussite colorée tranchant sur la grisaille habituelle de la série.

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