Bienvenue dans la Base de Données des livres !
Vous y trouverez des ouvrages post-apo que la communauté souhaite partager. Il vous est possible de rajouter des fiches de livres, alors partagez vos trouvailles avec la communauté FoGen ! Une grande partie des ouvrages que vous trouverez sont ici grâce au travail de Jacques Haesslé sur son site : http://destination-armageddon.fr/index.html. Un grand merci à lui pour son travail exceptionnel !
Livres
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Rainbow Six - Par BenF
John Clarke, devenu général, a constitué une unité de combat anti-terroriste ultra-secrète qui s’entraîne en Angleterre sur la base de Hereford. Elle comprend les meilleurs éléments des diverses armes, se trouve nantie des gadgets électroniques les plus sophistiqués et est assistée par la force de frappe d’un hélicoptère de combat. Avec son frère d’armes Chavez, qui depuis est devenu son gendre, Clarke assume un rôle de veille international dans la lutte contre le terrorisme. Il n’est donc pas étonnant qu’on leur demande leur aide lorsqu’un attentat est commis en Suisse. Le groupe 1 (il y en a deux) délivre les otages sans désemparer et les méchants passent à la trappe. La situation est identique, quoique plus complexe, lorsqu’un couple de terroristes allemands, émules de la Bande à Baader, s’emparent d’un richissime banquier autrichien, Herr Ostermann. Le succès de cette seconde opération leur rapporte une considération universelle.
Ce que John ignore, c’est que ces opérations ne sont que broutilles téléguidées pour instaurer une crainte salutaire à l’Occident. En effet, le véritable danger provient d’une vaste organisation écologiste ayant à sa tête le multimilliardaire d’un groupe de recherche biomédicales, John Brightling, patron de " Horizont Enterprises " et son épouse, Carol Brightling, divorcée pour la bonne cause, femme politique proche de la présidence. Ils sont appuyés par Kilgore, un médecin-chercheur épidémiologiste, et Hendrikson, ancien membre du FBI qui a viré sa cuti et fondé sa propre entreprise de protection, Global Surveyors. Tous, et bien d’autres encore, ont purement et simplement décidé l’élimination de l’espèce humaine, afin de redonner à la terre sa virginité :
" L’unanimité ne régnait pas au sein du Projet. Certains parmi les plus radicaux allaient jusqu’à soutenir que garder les médecins était contraire à la nature de la mission – parce que la médecine ne laissait pas la nature suivre son cours. Ben tiens, ricana Kilgore. Laissons ces crétins pondre leurs bébés en pleine nature après avoir passé la matinée à la cueillette ou à la chasse et tous ces idéologues auront vite fait de s’éteindre. Il avait l’intention d’étudier et d’apprécier le milieu naturel mais il comptait bien le faire avec des chaussures et un blouson pour se protéger du froid. Il tenait à rester un homme cultivé, pas à régresser au stade du singe nu. Son esprit vagabonda… Il y aurait une division du travail, bien entendu. Des fermiers pour faire croître les récoltes et soigner le bétail qu’ils mangeraient… ou des chasseurs pour tirer le bison dont la viande était plus saine, moins riche en cholestérol. Les bisons devaient revenir assez vite. Le blé sauvage continuerait d’envahir les régions des Grandes Plaines, et les bovidés ne tarderaient pas à engraisser " (…) " Il se demanda ce que penseraient ceux qui auraient l’occasion de visiter les cités mortes… Ce serait sans doute une bonne idée de les laisser y aller, qu’ils puissent se rendre compte du nombre d’erreurs commises par l’homme et apprennent à ne pas les rééditer (…)
Il faudrait bien mille ans, sinon plus, pour que les gratte-ciel finissent par s’effondrer par manque d’entretien, leurs poutrelles rongées de rouille…Les fondations de pierre ne bougeraient pas, mais assez vite, dans dix ans peut-être, on verrait de nouveau des daims gambader à Central Park. "
Leur stratégie se déploie à plusieurs niveaux. Un homme-clé en est Popov, ex-agent du KGB mis à la retraite, motivé par l’argent, redoutablement efficace bien qu’ignorant tout du projet.
C’est lui qui, sur les instructions de Brightling, a fomenté les deux attentats terroristes afin de permettre à Global Surveyors l’exclusivité du service de protection pour les jeux olympiques de Sydney, puisque c’est là que devra se déclencher l’apocalypse.
Un deuxième pivot en est le docteur Kilgore qui a développé, construit et conçu une arme bactériologique diabolique : le virus Shiva. Virus Ebola modifié, indécelable dans l’organisme, à effet retardé, Shiva est extrêmement contagieux :
" Le résultat le plus probable de la pandémie serait un rapide effondrement de la société. L’armée n’y échapperait pas non plus, mais le complexe du Kansas était à bonne distance de la base militaire la plus proche et les soldats de Fort Riley seraient d’abord dépêchés vers les villes pour assurer le maintien jusqu’à ce qu’ils soient à leur tour atteints par les symptômes. Ils seraient alors traités par des médecins militaires –ça leur ferait une belle jambe – et le temps que disparaisse la cohésion de leur unité, il serait alors bien trop tard pour que les survivants, même en uniforme, soient en mesure d’organiser une action quelconque. "
Shiva devra être libéré dans le système de brumisation des jeux olympiques de Sydney, respiré par des centaines de milliers de personnes qui s’empresseront de le transmettre au reste de la planète à leur retour des jeux. Horizont Enterprises a développé deux anticorps à Shiva, le A et le B. Le A renforce l’action du virus mortel, le B le rend inopérant. Lors de la première phase d’infection mondiale, l’entreprise médicale de Brightling fournira au monde entier le faux antidote, soit le virus A, gardant pour les rares élus le virus B. En cinq mois, le sort de l’espèce humaine devra être réglé :
" Viendrait alors la phase deux. Horizon Corporation fabriquerait et mettrait sur le marché le vaccin A. Il serait aussitôt distribué par milliers de doses, livrées par avion dans le monde entier vers des pays où l’ensemble des personnels de santé publique se mobiliserait pour l’injecter au maximum de gens. (…) Quatre à six semaines après l’injection du vaccin A, les receveurs commenceraient à tomber malades. Soit, calcula Gearing, trois semaines à partir de maintenant, plus six, plus deux, plus encore six, et enfin deux. En dix-neuf semaines en tout, cinq mois à peine, même pas une saison de base-ball, plus de quatre-vingt-dix-neuf pour cent de la population mondiale aura disparu. Et la planète serait sauvée. "
Pour que tout se déroule sans anicroche, ils procèdent dans leur laboratoire à des tests in vivo sur des groupes de femmes et d’hommes enlevés qui serviront de cobayes à l’instar de la façon dont opéraient les nazis. Tous mourront et les preuves que représenterait leur existence seront détruites. Kirk Mc Lean, en enlevant le futur cobaye appelé F4, une certaine Marie Bannister, mettra la puce à l’oreille à des agents du FBI, sans toutefois les emmener très loin dans leur investigation.
Le troisième pivot est constitué par deux bases ultra-secrètes édifiées en pleine nature, l’une au Kansas, l’autre, plus petite, au Brésil, près de Manaus. Sortes d’arches qui accueilleront les happy few écologistes survivants afin qu’ils puissent subsister plus tard avec délices sur une terre purifiée :
" L’Olympe , tel était le nom qu’il allait donner au complexe, décida-t-il sur le champ. La demeure des dieux, car c’était précisément ce qu’il espérait en faire. D’ici, ils pourraient observer le monde, l’étudier, en jouir… l’apprécier dans toute sa plénitude. Il choisirait Olympe-1 comme indicatif pour sa radio portative. En partant d’ici, l pourrait d’un coup d’aile survoler la planète avec les compagnons de son choix, pour observer et comprendre comment l’écosystème était censé fonctionner. "
Enfin Edward Gearing est la main qui devra, à la clôture des J.O., introduire Shiva dans le circuit des brumisateurs. Mais toute cette belle mécanique va se dérégler à cause de Rainbow Six. Clara Brightning ayant appris l’existence du groupe, se rendant compte de la menace potentielle qu’il constitue, envisage à son encontre une nouvelle action terroriste, sur la base même de Hereford par l’entremise de Popov qui recrute des Irlandais menés par leur chef Sean Grady.
Ceux-ci enlèveront les épouses de John et Chavez, un prétexte pour éliminer les membres du groupe d’intervention. Les terroristes faillirent réussir mais seront finalement détruits et Sean Grady sera capturé. Par lui, Clarke remonte jusqu’à Popov qui se hâte de fuir vers le refuge du Kansas. D’un autre côté, l’enquête sur Marie Bannister fournira des présomptions fortes à l’encontre de Kirk Mc Lean. Mais c’est par Popov, horrifié de ce qu’il apprendra au Kansas, que John sera mis au courant du Projet.
Chavez, délégué au J.O. avec son groupe, saura arrêter le bras d’Ed Gearson dans son acte meurtrier. La conclusion est à la hauteur du crime: alors que tous les responsables du Projet Shiva – une cinquantaine de personnes environ – cherchent refuge dans leur base brésilienne, John les poursuit dans leur retraite grâce à un réseau d’entraide militaire. La base des terroristes sera détruite et, puisque les écologistes aiment vivre en contact étroit avec la nature, il leur donnera satisfaction en les abandonnant nus et sans armes dans la jungle brésilienne.
Un techno-thriller efficace comme tous les ouvrages de Clancy. Roman bien (trop ?) long – plus de 1200 page -, il développe l’intrigue à travers des actions en parallèle qui amèneront le coup de théâtre final. Le dénouement heureux sera dû au retournement de Popov et l’on sent toute la tendresse de l’auteur envers ce personnage. Malgré cette mise en place redondante (entraînements interminables du groupe, actions terroristes préparatoires), le récit une fois entamé ne se quitte plus et l’horreur qu’il distille s’insinue peu à peu dans le réel
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Radio-Infernal - Par BenF
Une fête réunissant les grandes pontes de l’aéronautique mondiale eut lieu chez Raymond Garde, l’un d’entre eux, pour son anniversaire. Du pick-up sortent des parasites puis une voix, celle de Radio-Infernal, qui les menace de destruction. Pour appuyer ses dires, le hangar qui abrite le fameux prototype G-5 explose, provoquant la mort de Raymond Garde.
Avec Patrice Maréchal, l’aviateur, Teddy Verano, le détective, recherche le site de Radio-Infernal dont la puissance menace le monde civilisé. Ils volent vers son repaire situé au Labrador en se guidant sur des relevés goniométriques. Mais le fou fait exploser les divers avions les uns après les autres. Ils atterrissent donc en catastrophe près de sa base secrète ce qui leur permet de neutraliser l’antenne émettrice haute d’une centaine de mètres, coupant le criminel d’une partie de sa puissance.
Le véritable repaire se trouve sous terre. En y pénétrant, ils découvrent son poste de commandement, l’auditorium. Patrice Maréchal fait voler en éclats les miroirs du panorama photo-électrique ce qui rend le savant fou encore plus fou. Poursuivis par les malfaiteurs, Radio-Infernal en tête, nos deux héros devront la vie sauve à l’ingéniosité de Patrice qui a eu l’idée d’électrocuter tous les malfaiteurs en une seule fois :
« Le bandit se para de la main armée du révolver. Le fil électrique toucha le métal de l’arme. Une immense étincelle violette en jaillit. Epouvantés eux-mêmes, Patrice Maréchal et Teddy Verano reculèrent. Le courant électrique foudroyait le speaker infernal et, de sa main, passait à son premier compagnon, de celui-ci au second, et ainsi de suite. Toute la bande des six forbans de Radio-Infernal, foudroyée en dix secondes, chancela comme une équipe de pantins. Les corps décomposés, devenus noirs comme du charbon, chavirèrent et tombèrent dans le torrent tous ensemble, comme une digne théorie de ceux qui avaient animé le poste de Radio-Infernal. »
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Reaction Deluge - Par BenF
Harry Scott, narrateur de SF réputé, fait une curieuse rencontre, celle de William Brent, un individu porteur d’un cristal , qui le force à le conduire à l’hôpital du Dr. Price, en service de neurologie. Puis, Brent lui abandonne sa pierre de cristal. L’individu sort rapidement de l’esprit de Scott qui a d’autres chats à fouetter. Notamment de mettre la touche finale à son dernier roman « Commandos pour Altaïr ». D’ailleurs les idées affluant de façon extraordinaire et avec une facilité déconcertante, il termine son ouvrage.
C’est quand il est convoqué par le F.B.I en la personne du colonel Hendrix que tout se complique. Celui-ci veut savoir comment Scott a pu décrire dans son roman, avec une telle exactitude, le mécanisme de l’anti-gravitation sur lequel travaillent sans succès, et depuis longtemps, une pléiade de savants. D’autres troublantes rencontres accentuent le malaise de Scott : des agents délégués de tous les pays lui font un pont d’or pour ces mêmes informations.
Afin d’en avoir le cœur net et soupçonnant le cristal de jouer un rôle dans cette affaire, il contacte son ami, le professeur Stuart Hawkins. Peu après, un troisième personnage mystérieux, une jeune fille nommée Mira, enlève les deux amis à bord d’un engin extraordinaire et les entraîne en une cité située dans l’île de Kambora, en plein océan. Parallèlement, le climat terrestre se dégrade, des tempêtes, de la neige, des pluies incessantes affectant toutes les régions émergées de la Terre :
« En fin de journée, on devait annoncer qu’un violent raz de marée avait dévasté les côtes de la Floride tandis que de gigantesques tempêtes étaient signalées dans l’Atlantique. Des orages d’une puissance extraordinaire se manifestaient en Europe, en Allemagne principalement, mais on prévoyait une accalmie pour le lendemain. »
A Kambora, ils pourront apercevoir, grâce à un téléviseur spécial à ondes hertziennes rémanentes, les vestiges d’une civilisation passée, engloutie lors d’un déluge universel. Pourtant Hawkins et Scott sont bel et bien prisonniers dans cette île, en un lieu sauvage hanté par des créatures insensées, tels que cette femme-féline, ou cet homme-qui-rit, ou ce géant triste, ou encore cet homme-vampire, tout aussi prisonniers qu’eux, semble-t-il. Ils apprendront ultérieurement qu’ils se trouvent dans « le jardin des erreurs», de la bouche du véritable chef de Kambora, l’extraterrestre Vikroz, un être en provenance d’Aldébaran qui, depuis longtemps, s’était installé sur Terre. C’est lui qui, muni du cristal et avec ses connaissances avancées en génétique et en biologie a développé une race humaine synthétique, des androïdes, possédant une espérance de vie démesurée de plus de mille ans, destinés à remplacer l’espèce humaine traditionnelle, jugée trop brouillonne et trop remuante par Vikroz.
Malgré quelques tâtonnements au départ, des androïdes ratés qu’il a relégués au jardin des erreurs, sa race arrive à maturité. Elle scellera le sort de l’humanité. Vikroz, a scellé celui des ressortissants de sa race installés sur terre avant lui. En provoquant un déluge universel, dont les désordres climatiques actuels sont les prémisses, il fera place nette sur terre pour ses créatures, qui seraient déjà opérationnelles dans de nombreuses autres bases sous-marines. S’il tergiverse encore, c’est parce que William Brent, un raté du jardin des erreurs, s’était échappé de la cité en volant le cristal dont Vikroz a un besoin urgent. Entre-temps la synthonisation de cet objet avec l’esprit de Scott l’oblige à prendre le romancier en considération puisque une bactérie maligne fait périr ses androïdes. Seul le cristal, et par conséquent Scott, pourraient y remédier, sous son impulsion.
La situation déjà délicate pour Vikroz se détériore encore plus lorsque s’y ajoute un élément inattendu en la personne de Mira, tombée amoureuse de Scott. Elle s’arrangera pour libérer les Terriens du jardin des erreurs, envoyant deux de ses compagnons et complices faire sauter la cheminée d’évacuation volcanique de l’île de Kambora.
Alors que Vikroz succombe déchiqueté par les griffes de l’homme-vampire, nos amis s’échappent de la cité maudite. La fin s’annonce prometteuse puisque le déluge sera remis à plus tard, les androïdes décimées par la bactérie tueuse, sauf Mira évidemment qui, en fin de compte, était une humaine enlevée jadis par Vikroz qui manquait d’éléments femelles. Acclamés par les leurs, Harry Scott et Stuart Hawkins recevront tous les honneurs avec, en prime pour le romancier, le cœur (et le corps) de Mira. Quel bonheur !
Toujours dans la veine des pulps, « Réaction Déluge » ne décevra pas les auteurs adolescents de la collection «Anticipation », qui y retrouveront leurs thèmes favoris.
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Quinzinzinzilli - Par BenF
Ceci est un roman épouvantable. C’est l’histoire triste, traitée avec une ironie désespérée par le narrateur, du dernier groupe d’enfants survivants à la surface du globe. Tout commença ce jour où, après de nombreux pas de deux, le conflit mondial éclata enfin, coup de tonnerre dans un ciel serein. Gérard Dumaurier, futur dernier survivant adulte était en train de faire visiter les grottes de Lozère à un groupe d’enfants tuberculeux, lorsque les gaz des belligérants produisirent une réaction en chaîne dans l’atmosphère qu’ils polluèrent complètement et que de grands tremblements, des cyclones et autres joyeusetés ébranlèrent le monde.
Eux seuls -Ils n’auront aucun moyen de le vérifier- seront sauvés en se réfugiant sous terre. Après une pénible période d’adaptation à la situation, Gérard Dumaurier devint le témoin privilégié de l’involution des enfants. L’auteur étudie, à la manière des "physiologies" du XIXème siècle, le langage, les rites, la philosophie des derniers petits d’hommes livrés à eux-mêmes.
Ils sont neuf. Les voici: Tchaon, Manibal, TsiTroèn, Pantin, Bidovin, Lanroubin, Bredindin, Embrion, Sanlatin, Ilayne. Une seule fille. Le narrateur ne les aime pas beaucoup : "Ecorché, boueux et sanglant, j’étais d’assez mauvaise humeur. La petite fille était au premier rang et hurlait sur un mode plus aigu que les autres. Je lui décochai une paire de claques qui la fit reculer, et éloignai les autres à coups de pied. (...) Le tour de la fille venu, elle s’accotait en geignant à la paroi rocheuse, se tenant la joue. J’avais tapé de toutes mes forces. Je lui tendis sans mot dire le gobelet plein. Elle fit un signe négatif. Sans hésiter, je vidai moi-même la timbale. Le temps n’était plus aux douceurs. La fille resta jusqu’au soir à geindre avant de daigner accepter à boire. Quelle sale race de femelles sortira de ce ventre-là! "
Sceptique voltairien, le narrateur, comme en un leitmotiv, répète:" je m’en fous! ". Il " s’en fout " des enfants, de leurs tâtonnements, de leurs méprises, mais note avec une férocité joyeuse qui se veut lucide, leur dégradation. Les enfants créent donc un semblant d’organisation sociale, tout en régressant. Ils ne se lavent plus, leur langage est fait d’un sabir entièrement nasalisé. Le raisonnement mathématique a totalement disparu, et la causalité redevient magique. A cet égard, ils ont inventé " Quinzinzinzili ", la cause universelle, le "Grand Tout", déformation de "Qui est in Coeli", une ancienne prière.
«Les enfants se suffisent à eux-mêmes, depuis longtemps. llayne entretient le feu dans la grotte. Ils ont élaboré un système à eux pour le faire couver et rallumer. Un système idiot. Il s’agit de mettre des bâtons d’une certaine longueur dans un certain ordre, suivant certaines figures géométriques, et de les combiner avec des braises. Ils sont persuadés que s’ils omet un seul de leurs rites absurdes, le feu ne se rallumerait pas. Ainsi, ils ont trouvé un champ de fèves, je ne sais où. Mais comme ils s’en sont donnés une indigestion, ils ont décrété que les fèves était un poison. Mais ils n’appellent pas ça poison. Les fèves, toutes les fèves, appartiennent à Quinzinzinzili, et il se venge en vous donnant la colique Si on lui vole sa nourriture. Dieu qu’ils sont bêtes! Effroyablement bêtes! Désespérément abrutis! Que sortira-t-il d’eux? Vaudrait-il pas mieux qu’une nouvelle catastrophe arrive et balaye cette insignifiante vermine?»
De temps en temps le narrateur détaille la psychologie particulière d’un enfant. Par exemple, Lanroubin, qu’il trouve le plus fin, et sa rivalité avec Manibal, le plus costaud. Les deux s’affrontent. Lanroubin vaincu, réinvente le coup de poing américain, en assommant Manibal avec un fragment de cristal de roche détaché de la paroi. Il ne nous cache rien non plus de la sensualité naissante des enfants. Ilayne est la seule femme. Elle domine le groupe et réinvente le matriarcat. Mais elle est laide:
" Le teint rouge brique avec un nez en bouton de porte, tout rond au bout, avec ça, des fesses saillantes qui lui ballottent sur les cuisses quand elle marche, et elle marche avec une grâce de canard boiteux, sur des jambes courtes et arquées, sur des pieds plats qui s’étalent longuement sur le sol, les orteils écartés en éventail. Et puis, un ventre saillant, tout rond avec le nombril au milieu comme un oeil au fond d’un vase. Et sa poitrine déjà plus que basse à quatre ans... Qu’est ce que ce sera plus tard! Et voilà Vénus! Quelle immense rigolade! "
Qu’importe, telle qu’elle est, elle plaît à Tchaon, le fragile tuberculeux avec lequel elle fait l’amour, en méprisant Manibal, le baraqué. Alors ce qui devait arriver, arriva. En un tournemain, Manibal étrangle Tchaon. Ilayne, aussitôt, laisse tomber un gros bloc sur la tête de Manibal et le tue. C’est donc Lanroubin qui profitera des largesses d’Ilayne et puis, plus tard, tous les autres, unis dans un grand amour communautaire. Tout ceci laisse le narrateur rêveur:
" Je suis un survivant des époques préhistoriques, littéralement un fossile vivant. Cette llayne que je trouve affreuse, odieuse, hideuse, cette llayne qui n’est pas belle, est en train de créer sous mes yeux, devant moi, et malgré moi, un nouvel idéal de beauté. Ses fesses molles, ses tétines basses et son ventre en chaudron seront désormais les modèles de la beauté future. Je prévois que dans l’avenir, des poètes inspirés et des amants élégiaques rêveront sans fin aux vastes dimensions de ses pieds plats et à la rougeur éclatante de son visage. "
Bien qu’Ilayne soit enceinte des oeuvres de tous (Quinzinzinzili!), il n’y a plus d’avenir. Ils n’enterrent même pas les cadavres qu’ils se contentent de jeter dans un ravin. Cependant l’eau du lac (de l’océan?) qui les entoure se met à baisser et les débris d’une civilisation morte apparaissent, tels que des allumettes par exemple, que le narrateur s’empresse d’allumer. Il observe Lanroubin qui essaye d’en faire autant:
" Un léger bruit pourtant me fait retourner. Lanroubin a pris la boîte de métal dans sa main gauche et frotte une allumette sur la surface rugueuse. Mais il s’y prend drôlement. Il tient l’allumette comme il tiendrait un bout de crayon. On dirait plutôt qu’il dessine quelque chose. En effet, oui, il écrit, ou plutôt il dessine. Car, si j’ai fait du feu, moi, c’est parce que j’ai tracé une figure magique avec l’allumette sur le côté de la boîte. Il s’agit de savoir laquelle. Est-ce un carré, un octogone ou une étoile à cinq branches? Dommage seulement qu’il trace ses figures avec le bout non soufré. "
Les enfants se décident enfin à quitter leur abri et remontent dans l’arrière-pays, en direction de la ville disparue de Lyon. Le narrateur, de plus en plus malade, est proche de la mort. Mais il "s’en fout". Il a encore le temps d’assister à la naissance de l’enfant d’Ilayne qu’il baptise "Eskato", le "dernier". Puis, c’est la fin :
" Quand je songe à l’avenir, je vois un nouveau calvaire collectif, une nouvelle ascension pénible et douloureuse vers un paradis illusoire, une longue suite de souffrances. Ah! si j’avais le choix, je n’hésiterai pas. Je les tuerai tous et je ferais éclater le faible crâne de cet enfançon sur les parois de la caverne, comme une noisette. Je ne sais plus. Je ne sais plus qui je suis. Ni si je suis. Oh, et puis... Qu’est ce que ça peut me faire? M’en fous. Quinzinzinzili! Quinzin zinzili!"
Quinzinzinzili est une oeuvre majeure de la SF française. Régis Messac, mort en camp de concentration, livre tout son désespoir, son écoeurement en face d’une humanité symbolisée par ces enfants, humanité qu’il hait puisqu’elle ne sait se conduire avec dignité. Prenant le contre-pied de Rousseau dans son " Emile ", il raconte comment la disparition de la culture humaniste façonne la sauvagerie d’une nouvelle morale de l’espèce. Le tout est observé expérimentalement sur un échantillon in vivo. A comparer avec le "Seigneur des mouches" de William Golding.
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Qui Donc Seme La Mort? - Par BenF
Jérôme Horus est fournisseur exclusif de cercueils pour les habitants de la ville. Il nourrit deux passions : celle de la mort et celle de sa fille Marie. Plus il y a de morts, plus il est heureux. Plus il contribue au bonheur de sa fille, plus il est heureux.Ses plus grands ennemis sont les médecins, accusés de réduire son commerce en lui enlevant des clients potentiels. Marie bouleversera sa vie en tombant amoureuse du docteur Henri Morin, chose inconcevable pour Horus. Mais le vieil homme trouvera une solution élégante à son problème. Concoctant dans sa réserve à cercueils un immonde cocktail microbien, à partir de rats crevés, de chiens en décomposition et autres déchets censés contaminer l’ensemble de la ville – si Dieu lui est favorable !-, il gardera pour lui et pour Marie l’unique antidote, ne doutant pas un seul instant, que le docteur Morin éliminé, Marie lui reviendra.
Peu après, les gens meurent comme des mouches. La vie se défait dans la cité. Des grèves spontanées éclatent. Des cortèges de femmes contestataires réclament des autorités qu’elles sauvent leurs enfants. Même une augmentation exponentielle de l’ivrognerie sera impuissante à contenir le fléau ! Les cadavres s’amoncellent dans les rues. Le docteur Morin, sur la brèche, et supposant que la contamination se fait par voie aérienne, préconise l’usage de masques à gaz pour tous :
« Bref, trois jours après, la ville présentait un aspect diabolique : les passants n’avaient plus visage humain ; sur le cou, un groin s’allongeait, ignoble, repoussant. Leshommes avaient des groins de porc, les femmes des groins de truie, les enfants des groins de pourceau. Les pauvres petits s’effrayaient entre eux. Des mioches criaient et pleuraient en voyant leurs mamans aussi épouvantables. »
Marie, qui ne soupçonne toujours pas son père, s’étonne pourtant de le voir si joyeux. Elle ne comprend pas non plus qu’il veuille à tout prix lui injecter un vaccin de sa composition sans en référer au docteur Morin. Elle pense que son père est devenu fou et s’empresse de faire part de ses craintes à son fiancé. D’ailleurs, disait-elle, mon père a également fait édifier sur le toit de notre maison un appareil constitué d’énormes cornets en étoile, comme une sirène d’alarme, destinés, d’après lui, au passage de courants d’air. (En réalité pour répandre les miasmes).
L’épidémie prend une dimension tragique. La vie sociale et économique est arrêtée. Les vivants se terrent chez eux et attendent la mort comme une délivrance. Les rues sont livrées aux animaux :
« Des animaux y circulaient en foule, hurlant, s’entredévorant ; des chiens au poil hérissé, la langue pendante, les yeux en feu, enragés, maigres ; des rats qui rongeaient les arbres, les bancs, les portes ; des chevaux galopants, affolés, hennissant, chargeant dans des roulements de tonnerre ; des chats sautant sur les fenêtres, s’élançant en bonds fantastiques sur les oiseaux ; des taureaux, des vaches suivies de leurs veaux, fonçant, tête baissée dans les devantures ; des ânes brayant, bêtement.
Car le fléau n’atteignait pas les animaux. Seulement, personne ne leur donnait plus à manger, et, échappés, ils couraient au hasard, renversant les derniers passants. Un matin, l’on trouva un enfant que se disputaient les chiens et les rats. »
Bientôt la végétation vient à la rescousse et envahit à son tour l’espace :
« Les vergers, les jardins s’étendaient, envahissaient les maisons ; les arbres débordant de sève,poussant avec une incroyable rapidité et une force extrême, défonçaient els obstacles qu’ils rencontraient, pénétrant dans les chambres, montant, montant toujours, renversant, brisant, engloutissant, submergeant. Bientôt cette végétation folle dépassa les toits. Les habitations disparurent complètement, la ville ne fut plus qu’une immense masse de verdure, une forêt.»
Morin, toujours vaillant –ce dont s’étonne Horus – demande conseil à ses deux confrères, Lelongt et L.andrin : Faut-il ou non utiliser le vaccin d’Horus ? Entre temps, comme les médecins mettaient trop longtemps à mourir au gré du vieillard, ce dernier décide d’aider la nature. Muni de ses bacilles en flacon et d’un soufflet, il espère infecter l’air de la maison de Morin. Ce dernier, toujours méfiant dans le cas d’une propagation aérienne, avait fait calfeutrer toutes les issues possibles et avait tendu un piège à l’assassin dont il découvre enfin l’identité. En une ultime discussion dans l’antre du criminel, Morus menace de le dénoncer s’il ne lui donne pas l’antidote pour l’ensemble de la cité. Marie, qui a tout entendu, cachée derrière un rideau, s’évanouit d’horreur. Morin pensant que la jeune fille est atteinte par le mal, supplie Horus que ce dernier lui injecte le vaccin. Horus s’exécute de mauvais gré car il sait maintenant que jamais Marie ne renoncera à son médecin. Echappant aux deux jeune gens, il s’isolera dans sa cave, au milieu de ses cercueils, s’immolant par le feu, pendant que le couple, muni du remède, fuit cette maison maudite pour apporter la potion salvatrice aux survivants.
Un récit populaire, parfois à la limite du grand guignol, vrai roman policier et faux roman d’anticipation, dont il présente malgré tout certains thèmes canoniques (l’invasion de la cité par les plantes, notamment). Le style est toujours soutenu et le récit propose de belles descriptions d’horreur. Que nous faut-il de plus ?
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Quelle Secousse! - Par BenF
Le « Big One » s’est déclaré. Toute la côte Ouest des Etats-Unis subit des bouleversements dramatiques avec, pour corollaire, une désagrégation sociale et morale de l’Etat et des individus. Le narrateur, logé au moment fatidique dans un hôtel de Santa Monica, devient le témoin sans concession du retour à la barbarie de ses semblables, analysant et répertoriant les crimes les plus vils, les bassesses les plus odieuses, les actes les plus dégradants. Lorsqu’il se remet du choc causé par l’effondrement du plafond de sa chambre, il constate chez ses concitoyens un déni généralisée de la catastrophe : l’on continue de vivre comme si rien ne s’était passé ! Les uns font l’amour à côté des cadavres, les autres seront obsédés par l’unique idée d’une voiture à faire démarrer ou d’un bus à rattraper.En déambulant dans la ville sinistrée, il se montre sensible aux divers changements :
« Des égouts éventrés montait une odeur de merde et de gaz qui rendait l’air irrespirable. Au bord de la chaussée lézardée, couverte d’éclats de verre et de gravats, une canalisation béante lâchait des flots d’eau savonneuse. Des fils électriques sectionnés se tordaient sur le trottoir comme de serpents furieux. Une Chevrolet rouge avec une plaque du Texas avait échouée dans la devanture du snack. Au-dessus du crâne écrabouillé du conducteur, aplati contre le pare-brise, un petit crucifix en plastique oscillait tristement. »
La recherche de nourriture constitue son premier objectif. Il se méfie des gens qui, autour de lui, ne présentent plus un comportement normal. Il se fera tout de même embaucher – par qui exactement ?- pour déblayer des gravats alors que les secousses telluriques se poursuivent en répliques rapprochées. Encadré de manière militaire et coercitive, il obéit à ces parfaits inconnus jusqu’à ce que des coups de feu le ramènent à la raison. D’autres individus, armés jusqu’aux dents, prêts à assassiner tous ceux qui résisteraient, le capturent pour le mener dans un camp de regroupement à quelques kilomètres de là :
« Nous marchions au milieu de la rue, suivis par les deux hommes qui portaient Helena. Les plaques de fibro-ciment et les poteaux arrachés ralentissaient notre progression. Puis nous arrivâmes près d’une station Texaco dont le toit venait de céder. Un homme armé d’un fusil et adossé à un break familial rouge, fit un signe de la main à Orville. Tout autour de la station on avait installé un camp provisoire, délimité par une corde de nylon jaune fixée à des piquets. Derrière, une maison en bois de style colonial achevait de brûler. Il n’y avait que trois prisonniers dans ce camp. Deux, les mains liées dans le dos, étaient allongés sur le ventre. Le troisième nous regarda approcher. »
D’où viennent ces individus ? Qui sont-ils ? De qui tiennent-ils leur légitimité ? Nul ne le sait, car la force brute a remplacé le droit, la guerre civile venant de se déclarer sans raison, avec ses injustices et ses meurtres arbitraires :
« Quatre hommes, torse nu, approchaient. Ils tiraient un tombereau rempli de cadavres. A chaque tour de roue, un corps basculait et venait s’écraser par terre. Ils ne s’arrêtaient pas pour autant. Ils vinrent se ranger près de notre enclos. (…) Ils déchargeaient les corps et les jetaient par-dessus la corde. Tous les morts avaient la nuque trouée.»
Ces « volontaires nationaux » l’obligeront à marcher pieds nus, puis arrivés au lieu de détention, à se mettre entièrement nu, comme tous les autres. Gare à ceux qui n’obéiraient pas :
« Un couple de vieillards sortit de la colonne en titubant. Un garde les frappa à coups de crosse. Ils tombèrent l’un sur l’autre. L’homme se redressa et prit sa femme dans ses bras. –C’est notre argent que vous voulez ? On n’a plus rien. Vous nous avez tout pris. On n’a jamais fait de mal à personne, nous. C’est la faute aux types qui logeaient chez nous. On savait pas ce qu’ils faisaient. Allez, tuez-nous. Tuez-nous. Le garde posa le canon de son fusil sur le front ridé du vieil homme et pressa la gâchette. L’homme culbuta, foudroyé. »
Tout au long du chemin, les occasions de mourir ne manquent pas. Des balles sifflent au-dessus de sa tête, tirées par des snipers isolés ; un hélicoptère survole la colonne, les menaçant tous. Sur le lieu même du rassemblement, dans une zone industrielle, une faille large et profonde entaille le terrain. Certains s’amuseront à la franchir en sautant. Quelques-uns y laissent leur peau. Le repas improvisé de grillades que se préparent les miliciens déclenche la convoitise des prisonniers démunis et affamés. S’en suit une rébellion généralisée au cours de laquelle le narrateur prend la fuite… pour tomber sur une barricade, elle-même tenue par d’autres assassins anonymes. Il sait maintenant que préserver sa vie est une entreprise désespérée. Lucide, il attend une mort qui ne tardera pas.
« Quelle Secousse ! » qui pourrait aussi s’intituler « Scènes de guerre civile » a été publié dans la collection du «Sagittaire », spécialisée dans les textes conjecturaux sulfureux. (Voir « Plein gaz » paru dans la même collection). Ici, plus que le sexe, la violence, l’absurdité des situations, l’arbitraire de la survie en temps de crise, forment l’objet du scandale. La vision cataclysmique permet la distanciation utile à l’auteur dont le but est de dévoiler la noirceur de l’animal humain, la haine qu’il voue inlassablement à son semblable et la part prédominante que prend en son esprit le cerveau archaïque. Un texte brut de décoffrage au style halluciné.
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Que Se Passe-T-Il? - Par BenF
Roland Chandreau, jeune et brillant avocat, manifeste beaucoup d’inquiétude lorsque la Banque de France où travaille Suzy, sa douce fiancée, disparaît dans le trou énorme qui s’ouvre soudain dans le sol de Paris. Le drame affole ses concitoyens, la municipalité et la police, qui empêchent l’accès au quartier. Suzy est toutefois sauve, les employées ayant été prévenues par une voix inconnue. Le mystère s’épaissit encore quand respectivement le palais du Luxembourg et la gare Montparnasse suivent le même chemin, faisant cette fois-ci de nombreuses victimes :
« Une aube blême se leva difficilement. Une clarté grise et douteuse traîna sur une vision d’apocalypse, découvrant mieux à chaque seconde l’ampleur d’un effondrement sans nom. Le palais célèbre n’existait plus, si ce n’est qu’à l’état de magma de pierres et de terre, mêlé à des arbres déracinés des jardins. Et tout cela au fond d’un cratère d’une largeur démesurée aux parois presque lisses , comme celles qu’adoptent les entonnoirs de sable. »
Que se passe-t-il ? C’est la question que Roland pose à Pierre Lerat, son ami, ingénieur des Carrières, au moment où tous deux rendent visite à Suzy, habitant chez son père, rue de Champerret. Ils seront accueillis par une jeune fille inquiète des absences répétées de son papa, M. Merlin, lequel est géologue. Un carnet abandonné sur le bureau de M. Merlin livre de terrifiants secrets à Pierre. Le coupable est le père de Suzy, son futur beau-père !
Géologue génial mais méconnu, il en conçoit une amère déception et décide de se venger. Mettant à profit sa bonne connaissance du sous-sol parisien, percé de trous comme un gruyère, il fit construire en grand secret une foreuse géante dans le but de saper les fondations de tous les grands édifices parisiens. Lorsque Merlin se sut découvert, à l’insu de Suzy, il gagna son quartier général, les souterrains de Montparnasse, d’où il fit s’écrouler sur lui, au moyen de sa taupe mécanique, tout le quartier, anéantissant l’œuvre de sa vie. Suzy ne sut jamais rien de la culpabilité de son père car la municipalité, mise au courant de la démence du bonhomme par Pierre Lerat, camoufla ce crime en séisme localisé et naturel.
Un petit récit sympathique et sans prétention, entièrement voué à la joie de détruire.
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Que La Lumiere Soit - Par BenF
Blakie, Vito le Trapu, Syd et Mike, disposent un énorme tronc en travers de la route pour arrêter la patrouille de robots qui passe immuablement par ce même chemin. Puis, ils se camouflent dans la végétation qui recouvre :
« La puissance disparue de sa race… un immense amas de pierres brisées et de métal fondu. Des herbes et des mousses étranges envahissaient la zone, mais il s’écoulerait des siècles avant qu’elles puissent masquer les dévastations.
Leurs tas disséminés au long de la route étaient mieux dissimulés, apparemment repoussés sans ordre derrière les accotements de gravier… Des monceaux pourrissants qui, selon la légende, avaient été des machines permettant de rouler sur la chaussée. »
Tandis que ses congénères étaient occupés à dégager l’obstacle, le dernier robot de la file fut maîtrisé par une corde, abattu, entraîné dans les ruines, sa carcasse défoncée à coups de masse. Les femmes recueillirent religieusement l’huile qui coulait de son corps. Voilà qui permettra à la tribu de s’éclairer au moins deux mois sans interruption !
Une nouvelle brossant un tableau sombre de notre futur avec une grande économie de moyens
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3000 ans après la « Grande Déflagration », la cité sous-terrienne de « Surréal » (déformation de « Sous le Mont-Réal »), au Canada, reste prospère et stable. En ce lieu utopique réussi, les Surréalais, descendants des survivants d’une guerre totale, ne manquent de rien mais leur existence est étroitement contingentée par le peu de place disponible:
« Seuls ceux qui ont trouvé refuge dans les souterrains creusés à même le Mont-Royal ont été sauvés. Ces quelques centaines de privilégiés ont scellé les portes de plomb derrière eux et ils ont fondé la cité. Au-dessus d’eux mourait le monde civilisé, détruit par la bêtise des hommes et les guerres atomiques. »
Trottoirs roulants, pilules nutritives, exercices physiques obligatoires et invocation au « Grand Moteur » qui les maintient en vie, forment leur quotidien :
« … Une lumière rouge s’allume sur le mur, lui annonçant sans le surprendre que l’inspecteur-robot de l’hygiène ne le juge pas assez propre pour lui autoriser l’accès de la Demeure. Des traces de poussière et de boue ont alerté le mécanisme et déclenché le signal : « conseille une toilette immédiate ; » S’il passait outre, le computeur électronique en prendrait note et, dès le lendemain, il recevrait par télétype un démérite du Conseil d’Hygiène. Plusieurs démérites entraînent une sanction du Grand Conseil et des sanctions répétés s’accumulent dans un dossier, pouvant disqualifier le coupable comme citoyen de première classe.»
Les jeunes, toujours curieux de tout, dynamiteront sans le vouloir ce cadre de vie. Eric, Paul, Bernard et Luc, chacun selon son tempérament propre, écrira une nouvelle page d’histoire.
Bernard, raisonnable et mature, courageux et estimé par les adultes, sera seul capable de ramper dans de dangereux tuyaux où reposent les câbles d’alimentation en énergie électrique de la cité pour détecter l’origine d’une perte énergétique inexplicable qui, à terme, mettrait en péril la société souterraine. Bernard découvrira la cause du dysfonctionnement, un détournement du flux électrique, malversation opérée par de mystérieux petits hommes, qui, selon toute apparence, proviennent de la surface et seraient, peut-être, d’autres descendants des survivants du conflit de jadis. L’on n’en saura pas plus sur leur origine.
Luc, aidé par Eric, jouit d’un privilège rare : il est télépathe sans le savoir, et très curieux. C’est pourquoi, en dépit de l’interdiction absolue de regagner la surface que l’on croit toujours dangereuse, il transgresse les lois de la cité, découvre la splendeur de la nature et…Agatha, une jeune fille de son âge, appartenant à une tribu de pasteurs établie dans un village appelée Laurana :
« Luc ramasse son casque-lumière et le replace dans son tube de plastique. Puis il se met en route, à petits pas prudents, arrêté à chaque seconde par une découverte nouvelle. Le chant d’un oiseau le ravit et son vol rapide encore plus. Le grand silence de la nature assaille ses oreilles après le ronronnement de son existence motorisée. Ses sandales foulent avec plaisir le sol spongieux et bruissant de la sapinière. Il touche l’écorce rugueuse et noircit son doigt à la gomme luisante. Comme Adam au Paradis Terrestre, Luc découvre le grand univers de Dieu. »
Ebloui par Agatha, télépathe elle aussi, Luc vient en aide aux habitants contaminés par la variole, contre laquelle ils sont sans défense, en leur apportant les médicaments appropriés, prélevés sur le stock de Surréal, et les guérit en moins de deux grâce, notamment, à la fameuse onde Upsilon. Mais, surpris par la nuit et blessé dans une chute, il sollicite l’aide d’Eric pour réintégrer sa cellule familiale.
Paul, enfin, féru de géologie et orateur hors pair, démontre aux Anciens que la vie est possible à l’extérieur et convainc les membres du grand Conseil d’entraîner les habitants de Surréal à la surface pour y rencontrer les Lauréanais.
Un roman pour adolescents, d’une écriture aisée et rempli de préceptes moraux, qui a obtenu à l’époque le prix de l’ «ACELF » 1963, ce qui a sans doute justifié sa réimpression sous le titre de « Surréal 3000 ». Les jeunes héros, positifs et tout d’une pièce, provoquent une révolution tranquille pour le bien de l’humanité. Peu d’effets dans une intrigue, somme toute, banale.
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Quatre Cavaliers - Par BenF
Unité de temps, de lieu, d’action, de personnages. Le lieu : Paris et la France. Le Temps : une journée de 24 heures, comme dans les pièces classiques, qui commence à 19 h le soir et s’achève à 19h le surlendemain, rythmée heure par heure. L’Action : la préparation de la bombe atomique se désintégrant au-dessus de Paris et renvoyant tous les personnages au néant. Les Personnages : l’analyse de leurs faits et gestes, généreux ou odieux, qui s’emploient à vivre leur dernière journée.
Odart, tout d’abord. Un vieux biologiste, auteur réputé de plusieurs ouvrages sur l’ADN, qui entretient une relation coupable à ses yeux avec Mily, une jeune comédienne sans scrupules. S’étant intéressé aux conséquences des retombées d’Hiroshima, il en a publié un ouvrage d’avertissement qui n’a pas plu aux autorités :
«Sa première leçon du monde moderne, deux mantes religieuses la lui donnèrent. (…) Au lieu de les écraser, il les avait enfermés sous une cloche de verre. Longtemps elles s’observèrent, cambrées sur leurs pattes arrière, la tête tournée, les ailes rigides. Ensuite l’une s’est avancée imperceptiblement, en suivant la circonférence, bientôt imitée par la seconde. Elles commencèrent à sautiller, toujours s’épiant et se menaçant de leurs bras hérissés d’épines, de leurs griffes tendues, de leurs mandibules ouvertes. Puis elles tournèrent de plus en plus vite, s’injuriant dans leur langage, gesticulant.
Tout à coup, elles bondirent, s’étreignirent, se piquant, se mordant, se déchiquetant avec rage. Et des pattes tombaient, arrachées, parmi des fragments d’élytres. Un lait blanchâtre coulait des cuirasses trouées, fendues. Ainsi pendant un tragique quart d’heure, elles s’étaient acharnées, s’étaient entre-dévorées, pour s’abattre enfin et mourir presque ensemble. »
En conséquence, le voilà mis au placard, avec assez de temps pour méditer sur la méchanceté des êtres qui ont tué son chien, ou la trahison d’Ermant, son disciple, qui lui a pris Mily :
« Bon Dieu, encore une journée à tirer ! Le bus, le métro, les dossiers, le rien… C’est Ermant qui travaillera au microscope électronique, la merveille que tu as tant réclamée. La laborantine que tu as formée, lui passera les plaques. La secrétaire que tu as choisie, sténographiera ses observations… Et toi, tu rédigeras des minutes qui seront amputées, dénaturées ou refusées. Tu attendras le soir. L’huissier chauve te fera un brin de conduite, en te parlant du temps, de la guerre ou des bonshommes de neige. Et la rue sera obscure. L’avenue, animée par une foule heureuse, parce que Noël approche. Le métro, le bus, l’œuf à la coque et le verre de lait… Un nouveau mensonge de Mily, une explication oiseuse, ensuite la nuit solitaire, les lumières du dix-septième étage, les rêves morbides, et rien, plus rien… Ce rien que tu as voulu… »
Talvart, le ministre de l’Intérieur. Tout en façade et sourire qui cachent l’obscénité de son ascension sociale. Prêt à s’allier avec tous, pourvu qu’il en tire de substantiels bénéfices. Notamment avec Jullien, le banquier, et sa famille, égoïste, odieux, méprisant, à vomir. Criminel dans l’âme, prévoyant, l’instinct de survie chevillé à son corps lui a fait concevoir un abri anti-atomique opérationnel en sa propriété. Mais comme l’on ne peut gagner sur tous les plans, il a hérité d’un fils lucide et cynique qui le condamne, condamne son époque, préférant mourir à Paris, en faisant la fête avec ses amis.
Monsieur Pascuel, dit « Bin-Bin » et sa femme. L’archétype du profiteur de guerre, pour qui toutes les situations dangereuses sont bonnes à se remplir les poches. Incrédule devant la radicale nouveauté de la guerre qui se profile, il mourra vaporisé, heureux d’avoir cru à la bonne affaire.
D’autres encore, comme Tony Bartel, le syndicaliste, qui clouera au sol les avions d’Air France destinés à la fuite des ministres et hommes politiques, mais qui restera sans voix devant le cadavre de sa femme, tuée par les gardes civils. Ou les tendres amants, Martine et Jean qui s’aiment, fragiles et heureux comme au premier jour, avant l’embrasement final. Ou encore l’abbé Louis, qui incarne les doutes de la religion en face de l’épouvante humaine. Enfin, celui par qui le crime s’accomplit, l’ancien nazi Oberst Karl.
Obsédé par la défaite allemande, bouleversé par la disparition de son père spirituel Adolf Hitler, il songe à réunifier les deux Allemagnes quitte à faire exploser le monde. Fomentant révoltes et émeutes avec d’autres aigris de l’histoire, un coup de main sur une base américaine d’occupation lui permet de faire main basse sur du matériel d’assaut. Il prépare un raid sur Magdebourg aux mains des Russes, pour leur faire croire à la duplicité des Américains. Le gouvernement de Bonn imprévoyant ou fragile, ne mesure pas immédiatement le danger. Les Russes, en la personne de M. Karine, confronté aux agissements des post-nazis, envoient un ultimatum aux puissances occidentales décrétant que la situation devrait être normalisée avant 19 heures, sous peine d’une intervention massive :
« M. Karine hoche la tête. Ce qu’il aperçoit, au-delà du crâne ras de son général atomiste, ce n’est pas une gigantesque chaîne de déflagrations ravageant les territoires ennemis, mais la ruine de tant d’années d’efforts, le saccage de son propre pays. La mort hideuse est assise en face de lui. Elle ricane sous ce crâne ras. Elle dit :
-Je suis à tes ordres, Camarade Président. »
Les gouvernements allemand, français, américains ne cèdent pas devant ce qu’ils considèrent comme un chantage. Lorsque Oberst passe à l’action, les Français, anesthésiés par les médias et les annonces gouvernementales, vivent encore sans souci. Heure après heure, l’histoire s’accélère. Odart est rappelé au ministère comme conseiller, pour ouvrir une «antenne psychologique d’aide à la population », le « Plan Soleil », le plan précédent d’évacuation de la capitale en cas de danger ayant montré son inefficacité. Les citoyens commencent à fuir Paris, la panique gagne de proche en proche, les armes individuelles apparaissent, et les incendies. Destins individuels et collectifs se croisent :
«Des milliers, des millions d’hommes et de femmes s’en vont à la dérive, par ce début de nuit froide et venteuse, pareils à des barques dont se sont rompues les amarres et qu’emporte un courant irrésistible. Et les convictions, les traditions, les principes hautement invoqués, les résolutions, tout ce qui compose l’individualité, s’enfonce, se dilue dans le néant sombre et tumultueux de l’effroi collectif. Des barques folles, une mer balayée par une tornade, dont les lames claquent le long des pierres dans l’obscurité qui va en s’épaississant. »
L’Amérique, en la personne du président Kellings s’est réveillée mais toutes les tentatives de communication avec M. Karine restent sans effet. Oberst est écrasé par les troupes russes. Il se suicide dans les ruines de la cathédrale de Magdebourg peu avant que l’échéance fixée par le président russe n’arrive à expiration. Odart meurt, enfin réconcilié avec lui-même, en tentant de sortir une fillette d’un immeuble incendié. Talvart, dont le masque est tombé, attend la mort en compagnie du vieux président français. Jullien s’enterre pour prolonger une misérable existence en une vie de troglodyte ; le destin de millions d’êtres humains semble comme suspendu pour l’éternité. A 19 heures précises, la bombe éclate dans le ciel de Paris. L’apocalypse a débuté.
Dans un style irréprochable, l’auteur fouille au scalpel l’âme de ses personnages, y mettant au jour les ordures qui s’y révèlent. Les destins individuels, aussi variés soit-il, convergent vers une même fin. L’ombre de la mort projetée au long du récit teinte de son angoisse la description d’un somptueux hiver. Enfin et surtout, l’immense imbécillité humaine, tellement énorme qu’elle en devient crédible, achève de convaincre le lecteur de la fragilité de son espèce.
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