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Vous y trouverez des ouvrages post-apo que la communauté souhaite partager. Il vous est possible de rajouter des fiches de livres, alors partagez vos trouvailles avec la communauté FoGen ! Une grande partie des ouvrages que vous trouverez sont ici grâce au travail de Jacques Haesslé sur son site : http://destination-armageddon.fr/index.html. Un grand merci à lui pour son travail exceptionnel !

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Livres

  1. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Marc GOUVIEUX Parution: 1914
    Les carnets de vol du lieutenant Saint-Bris et de son mécanicien l’Alsacien Kaufmann forment la trame de l’ouvrage ; notes prises au jour le jour par un pilote, chef d’escadrille, durant la première Guerre Mondiale, et qui relatent sa lutte contre les éléments, les impondérables techniques,  ou les Allemands envahissant la France. Sa mission consiste à récupérer des informations pour en informer les lignes arrière ou à bombarder des zones stratégiques, pour retarder la poussée des Prussiens.
    D’une audace folle, à l’instar de ses autres amis pilotes, le regard fixé sur la ligne bleue des Vosges, animé d’un patriotisme ardent, Saint-Bris construit à lui seul l’épopée moderne.Parti du territoire de Belfort, il survole l’Alsace occupée et ses villages chatoyants, il suit de là-haut les manœuvres des zeppelins teutons qui souillent notre beau ciel d’azur en y semant la mort et la destruction. Ses vols l’amènent, en un premier temps, avec ses mitrailleuses, à faire le coup de feu contre trois zeppelins. L’un sera immédiatement abattu et s’écrasera dans la plaine d’Alsace. Les deux autres prendront la fuite. Lors de sa poursuite, l’avion de Saint-Bris sera criblé de balles, lui imposant un atterrissage forcé dans une des clairières de la forêt de Boerenwald. Ce qui lui vaudra l’aide des autochtones, notamment celle de la belle Colette de Tichemont avec ses yeux bleus :
    « Soudain la porte du fond de la salle de billard s’ouvre, et dans l’encadrement une silhouette fine et élégante de jeune fille apparaît. Est-elle jolie ? je ne sais. Mais l’ensemble est séduisant, fait de grâce, de jeunesse, et de ligne aristocratique.
    -Colette, dit M. de Tichémont, qui regarde comme moi s’avancer la jeune fille, je te présente le lieutenant  Saint-Bris, officier aviateur, arrivé tout droit de France en descendant du ciel !
    -Monsieur, répond une voix charmante, à ce double titre soyez le bienvenu.
    Et la poignée de main est à la fois douce et énergique, tandis que les yeux bleus sont résolus et vaillants comme le sont les yeux d’Alsacienne…. »
    Ceci lui permettra d’aller au bout de sa mission, soit de faire exploser un  pont, privant les envahisseurs  d’une grande voie d’accès en territoire français. L’avion réparé, Saint-Bris reprendra l’air difficilement, se délestant de tout poids superflu :
    «L’avion semble monter péniblement. Les sapins se précisent. Ils émergent du brouillard. J’ai l’impression rapide que je ne passerai pas, que nous allons nous écraser dessus…. Brutalement, je pousse à droite et à fond la direction et le gauchissement. L’avion projeté sur l’aile fait presque un demi-tour sur lui-même. Mais devant moi, dans la nouvelle direction, j’ai vu une trouée entre deux sapinières moins hautes. Je pique dessus en cabrant désespérément. Nous passons juste. J’aperçois, en me penchant, le train d’atterrissage qui frôle la cime des sapins tandis que les roues continuant leur mouvement du départ, tournent dans le vide ! »
    Une deuxième mission l’incitera à poursuivre des zeppelins jusqu’en pays ennemi. Avec une folle témérité, il s’engage au-dessus de la gare aérienne de  Friederishafen sur laquelle il laisse tomber des bombes incendiaires :
    « Du côté des ateliers pour lesquels j’ai gardé ma dernière série d’explosifs, j’ai eu une agréable surprise. Le résultat a dépassé mes prévisions. Mes premiers projectiles sont tombés sur des toitures vitrées, faisant plus de bruit que de mal, semant plus d’épouvante que de mort, autour d’eux. Mais à ma profonde stupéfaction, j’ai vu tout à coup une fumée noire, épaisse, surgir des bâtiments bombardés. Puis de longues flammes ont apparu. Sans m’en douter, j’ai dû atteindre un des magasins de réserve d’essence et de matières inflammables. »
    Il s’ensuit un énorme incendie qui anéantit un grand nombre de zeppelins. Immédiatement pris en filature  par la chasse allemande, et quoique blessé, il s’en sortira vivant. Ramassé inconscient dans son biplan en morceaux, il sera soigné au lazaret de Mulhouse et chouchouté par de gentilles infirmières, avant de rejoindre son escadrille et son chef, le capitaine Beauchery qui déborde de joie à cette occasion. Son héroïsme et ses coups d’éclats lui valurent une grande renommée et une montée en grade. Le nouveau capitaine répondra à une autre mission de la plus haute importance au moment même où les divisions allemandes furent en passe d’être repoussées du territoire sous la formidable pesée des armées françaises qui reconquièrent l’Alsace et la Moselle. Du haut du ciel, son cœur bat à l’unisson avec celui des «pious-pious » :
    « A ce signal, une clameur formidable, plus formidable encore que la voix des canons, s’élève, clameur sortie de milliers de poitrines hurlantes, redisant à l’envi le mot de «Chargez ! » De tous côtés, ce ne sont que des lignes noires qui se dressent, qui, brusquement, surgissent du sol. Il en sort de partout… des bois de Bezange, de la forêt de Champenoux, des maisons de Moncel, baïonnette au canon, dévalant en une ruée irrésistible vers les bataillons allemands, vers la Seille, tandis que par-dessus la clameur des voix, par-dessus le refrain endiablé de la charge sonné par tous les clairons, monte par bouffées le chant de la Marseillaise, répété par toutes les musiques militaires de la 11 ème  division. »
    Quittant là ses amis, il se met en quête de l’endroit exact où serait installée la base du haut-Commandement allemand, dans laquelle se terrent et les généraux abhorrés, et le Kaiser lui-même. Une mission à haut risque puisqu’il s’agit de survoler à très basse altitude le territoire ennemi. Echappant souvent aux balles  avec son fidèle Kaufmann, qui colmate en plein vol les brèches faites au réservoir d’essence, il mitraille de-ci, de là des véhicules militaires engagés sur la route et s’astreint même à vérifier, en atterrissant, si ses balles ont touché leur objectif. Lors d’une de ces opérations, il constate, à sa grande surprise, qu’il vient de mitrailler et de blesser à mort le Kaiser lui-même :
    « Je cours vers la route où règne le silence. La première auto brûle encore, amas de ferrailles rougies et tordues… Et plus loin la deuxième auto est couchée, éventrée. C’est bien une des Mercédes impériales. Un des conducteurs à casquette ornée des aigles d’argent gît sur la route, l’autre est affalé sur son volant, mort… La mitraille destructrice a fait son œuvre. …Au pied d’un arbre un officier général que je n’avais pas encore vu, est étendu. La tête est très pâle, coiffé du casque à aigles et pointes d‘or. Sur la tunique bleue un filet de sang coule sur les décorations et l’écharpe. En entendant marcher sur la route sa tête s’est soulevée… un vertige passe en moi… Je le reconnais. C’est le Kaiser. »
    La poussée générale se poursuit, irrésistible, par Donaueschingen vers Mannheim, puis  jusqu’au Danube. Et l’empire militaire allemand s’écroule. C’est le jour de l’armistice, le 21 septembre, que l’on retrouvera le corps de Saint-Bris et de son mécanicien, dans leur avion reposant dans un champ avec, autour d’eux, les carnets de vol du pilote qui, plus tard,  fourniront la matière du présent ouvrage. Icare avait donné sa vie pour l’honneur de la France :
    « Or ce même 21 septembre, le jour même où la Victoire poussait de ses ailes l’armée française, la mort frappait brutalement le plus vaillants de nos pilotes militaires, le capitaine Saint-Bris, et son mécanicien Kaufmann. (…) Le capitaine Saint-Bris avait l’air de dormir, assis sur son siège, le volant entre les mains, frappé comme il l’avait rêvé, en pleine lutte, en plein ciel, là-haut, à son poste de combat.»
    «Haut les ailes» est un authentique témoignage des conditions de vie à bord des premiers avions de combat. Le texte clair, sans fioritures stylistiques est d’une lecture aisée. Les sentiments prêtés au héros sont évidemment d’une seule pièce : l’amour de la patrie et la haine de l’ennemi qui nous a volé l’Alsace et la Lorraine, « nos deux sœurs. ». Peu d’éléments dans le corps du récit signalent que nous sommes en présence d’un texte conjectural tant l’effet de vraisemblance s’impose. Quoique nous soyons en 1914, les carnets de vol ne sont pas datés. Le texte s’ouvre sur l’incipit suivant : « Carnets de route d’un Officier aviateur pendant la guerre de 19… » Et comme le héros tue le Kaiser durant un raid aérien, qu’il empêche nombre de zeppelins de bombarder Paris, qu’il détruit la plus grande usine de construction allemande, tous ces faits, étrangers à la vérité historique, nous obligent à classer l’ouvrage dans la thématique des « guerres futures » ou, plus précisément, des « guerres rêvées ».

  2. Type: livre Thème: archéologie du futur Auteur: Marc DAUBRIVE Parution: 1933
    Le savantissime Fatimolara, rapporteur des résultats de la mission Chou-Lan-Po devant l’Académie des « Intelligences Elevées » met en cause la trouvaille de ce savant qui prétendait avoir découvert les vestiges de l’ancienne ville de Paris et, plus précisément de la colline de Montmartre .
    En ce futur très avancé, l’on se perd toujours en conjectures sur les causes de la destruction de la ville. Les uns, compulsant les écrits préhistoriques (entre 2000 et 2500 ans de l’ère chrétienne) prétendent qu’elle fut anéantie par les «Boches », ainsi appelés selon les cris que poussaient les assaillants.
    Les autres, mettent l’accent sur l’utilisation plus tardive des « rayons Z » qui, réunissant la chaleur solaire à la chaleur terrestre souterraine furent également employés à faire sauter la barrière himalayenne ainsi que la chaîne des Pyrénées.
    Quoiqu’il en soit, au quarante neuvième degré de latitude nord, sous une mer peu profonde, Chou-Lan-Po découvrit une colline émergeante sous forme d’île sur laquelle subsistait une colonnade : il s’agirait du « Mont des Martyrs» ou « Montmartre ». Sous l’eau,  des débris de poutrelles rouillées le confortaient dans le sentiment qu’il avait enfin mis au jour les vestiges de cette grande ville :
    « Enfin, comme nous avions décidé d’explorer parallèlement à la côte les fonds marins avoisinant l’îlot « Montmartre », nous aperçûmes, par vingt mètres de profondeur et à quatre kilomètres environ du rivage, une immense carcasse étendue, de métal ouvragé, qui nous intrigua particulièrement. (…) Ici gisait la fameuse tour métallique – géante pour l’époque – et appelée par quelques auteurs : Tour Eiffel, pour ce que le fer employé à sa fabrication fut extrait du massif montagneux rhénan : l’Eifel. Le deuxième f est une oblitération produite par l’usage de prononcer la deuxième syllabe du mot en exagérant l’appui de la consonne – habitude populaire.Désormais j’avais acquis la preuve irréfutable de l’existence de Paris au lieu que mes calculs l’avaient située… »
    Et aussi, une série de statues, devant certainement appartenir à des mannequins, ainsi que des tubes à canon, reposant près de ruines surnommées « les Invalides » formèrent autant de preuves pour l’explorateur qu'il ne s’était pas trompé. Pourtant le rapporteur conteste ces conclusions prétendant que Chou-Lan-Pou confondraient  ces ruines avec ceux de phares et de navires engloutis. Au milieu de sa démonstration, des haut-parleurs l’interrompirent, qui annoncèrent à grands renforts de bruit et de musique la mise en place de voyages transatlantiques vers « l’île de Montmartre » enfin visible et retrouvée.
    Une petite nouvelle méconnue (sauf de Marc Madouraud) d’archéologie-fiction, distanciée et ironique, à l’instar de celle de Béliard ou de Franklin,  comme si ce sujet, pourtant récurrent, ne pouvait se décliner que sur le mode de l’humour.


  3. Type: livre Thème: menaces idéologiques Auteur: Marc AUDREN (aucune référence) Parution: 1961
    « Le gros morceau fut découvert dans le troisième bâtiment: un cyclotron et cent kilos d’uranium 235 récupérées sur les réveille-matin ainsi que dix litres d’eau lourde. Une bombe atomique d’un modèle réduit était en cours de fabrication. Cette bombe était destinée au Cap Carnavéral. La présence parmi les physiciens et ingénieurs de quatre agents exécutifs d’un pays situé derrière le rideau de fer prouvèrent que la mystique des « Frères de la paix » n’était pas si pure que Wasterman voulait bien l’affirmer. Les fichiers saisis permirent de situer toutes les agences des « F.P. » aux U.S.A. Six cent quarante Frères de la Paix purent être ainsi mis hors d’état de nuire. Tous les « accidents » mystérieux furent également expliqués. Les « projets » immédiats des Frères de la paix étaient les suivants : l’explosion en vol de vingt prototypes de chasseurs supersoniques, le sabotage de sept engins téléguidés de la base de Van Den Berg et l’assassinat de douze spécialistes de questions nucléaires. Wasterman venait de terminer le plan de ces « exécutions » au moment de son arrestation. »
    L’extrait ci-dessus résume l’ensemble du contenu conjectural et cataclysmique de notre ouvrage. Le reste de l’intrigue n’étant qu’une course-poursuite menée conjointement par O’Shea et Roy qui remontent la piste des terroristes, lesquels utilisent des réveille-matin maquillés, aux aiguilles badigonnées d’uranium 235, moyen astucieux  qui leur permettait de rassembler la quantité de minerai nécessaire à la fabrication d’une bombe A.
    Un roman policier comme il y en eut tant dans les années soixante,  égaré dans notre thématique.

  4. Type: livre Thème: guerres futures 1 Auteur: LORD CHESNEY Parution: 1871
    La « Bataille de Dorking » se présente comme la relation vécue de l’invasion de l’Angleterre par les Prussiens, racontée par l’un de ces vétérans. Parmi les causes d’un si grand malheur, facilement évitable par une Angleterre puissante et commerçante, il place le manque de fierté de l’Anglais envers son armée, sa suffisance à l’égard  des autres puissances  liées à une organisation militaire défectueuse. L’éparpillement de la flotte anglaise au Canada, aux Antilles, en Chine, les révoltes en Inde et en Irlande ont affaibli d’autant la Grande-Bretagne. Ce furent les annexions de la Hollande et du Danemark par les Prussiens qui décideront de l’engagement dans la guerre, dans la certitude de la gagner:
    « L’invasion est un rêve. Une flotte anglaise montée par des marins anglais, dont le courage et l’enthousiasme trouvent un écho dans le cœur des habitants du pays, est déjà partie à la rencontre de notre présomptueux ennemi. L’issue d’une lutte entre des navires anglais et des navires de toute autre nation, à nombre à peu près égal, ne saurait être douteuse. L’Angleterre attend avec calme et confiance le résultat de l’action, qui est imminente. »
    L’Angleterre, isolée dans le nord de l’Europe eut soudain connaissance de la condition misérable de sa flotte en perdition, coulée par des mines prussiennes ou « engins infernaux ». Immédiatement, le gouvernement procéda à l’enrôlement de 20 000 volontaires dont fit partie le narrateur. La Bourse et les spéculateurs se précipitèrent pour pallier le coup du sort :
    « Nous prîmes le premier train pour Londres, et nous y arrivâmes au moment où la fatale nouvelle de la perte de la flotte fut télégraphiée de Portsmouth. La panique et l’agitation de ce jour-là, la baisse effroyable des fonds publics ; l’assaut de la banque, obligée de suspendre ses payements ; la moitié des maisons de commerce de la ville en faillite ; la publication d’un décret du gouvernement suspendant les payements en espèces et la présentation des billets (…), enfin l’appel aux armes et l’empressement unanime de la population à y répondre, tout cela appartient à l’histoire, et je n’ai pas besoin de vous le répéter. »
    Tandis que les marins ennemis approchent de la côte anglaise, les volontaires, mal préparés, mal armés, mal commandés, se dirigent vers Harwich, cantonnant de gare en gare, dans la confusion, le désordre, le vacarme et la cohue, sans que l’intendance ne suivît. Les ordres et contre-ordres se succédant, la seule information sûre qui leur parvint, fut celle de stopper l’avance ennemie dans une région de collines, au voisinage du village de Dorking :
    « L’ignorance où tout le monde, depuis le colonel jusqu’au soldat, nous laissait des mouvements de l’ennemi, nous remplissait d’inquiétude. Nous nous représentions l’Allemand poursuivant avec fermeté son plan d’attaque bien combiné, et nous comparions son assurance avec notre propre irrésolution. Le silence au milieu duquel s’accomplissaient les mouvements de l’ennemi nous inspirait une terreur mystérieuse. La journée s’avançait, nous souffrions de la faim, car nous n’avions rien mangé depuis le matin. »
    le commandement, assuré par des brutes narcissiques, installe en son esprit d’amères réflexions sur la valeur humaine :
    « Le capitaine écouta froidement mon récit, mais il ordonna au peloton de relâcher les deux captifs, qui se sauvèrent à la hâte par un chemin de traverse. Le capitaine était un bel homme à l’air martial, mais rien ne pouvait égaler l’insolence de ses manières, insolence d’autant plus remarquable qu’elle semblait naturelle et provenir d’un incommensurable sentiment de supériorité. Entre un pauvre volontaire boiteux et un capitaine de l’armée victorieuse, il y avait à ses yeux un abîme. Ces deux hommes eussent-ils été des chiens, il est évident qu’on n’aurait pas décidé de leur sort avec plus de dédain. »
    Les volontaires perdront rapidement confiance, surtout avec le ventre vide, les batteries de cuisine étant restées en arrière, ce qui les obligea à manger leur viande crue. Ils s’établiront cependant sur une hauteur pour défendre la vallée. De là, les volontaires verront manœuvrer les armées successives qui se pressent, sans cesse plus nombreuses, pour défendre ou forcer l’accès de Dorking, clé de l’invasion et chemin assuré vers Londres :
    « C’était comme une scène de théâtre : un rideau de fumée enveloppait le champ de bataille, avec une échappée au centre éclairée par un rayon de soleil couchant. Le versant rapide et glissant de la colline était couvert de troupes ennemies, dont je voyais pour la première fois les uniformes d’un bleu foncé. Elles formaient des lignes irrégulières sur le premier plan ; mais par derrière elles étaient très compactes.»
    La plus grande confusion règne dans la gare de Dorking où des fourgons sans chevaux s’opposent à la fuite de la population. Après une attente interminable, la confrontation avec les Prussiens a enfin lieu, à trois heures de l’après-midi. Les troupes anglaises avancent sous un feu d’artillerie incessant et meurtrier. Le beau sentiment esthétique que procure la magnifique discipline anglaise s’avère éphémère : il y eut tellement de morts et de blessés dans les rangs anglais que les volontaires eurent tendance à fuir le champ de bataille :
    « Quel beau spectacle de voir ces braves soldats ! Avec quelle précision les gardes descendant le revers de la colline conservaient un irréprochable alignement ! malgré les sinuosités de la plaine, ils faisaient feu et manoeuvraient avec la même régularité que s’ils eussent été à la parade : c’était splendide. Nos cœurs bondissaient d’une ardeur patriotique ; il nous semblait que la bataille était gagnée.»
    Les charges à la baïonnette dont le narrateur fit partie ressemblent à une sanglante boucherie :
    « Je sentis une vive douleur à la jambe pendant que j’enfonçais ma baïonnette dans le corps du soldat vis-à-vis de moi. J’avoue que j’avais peur de regarder mon adversaire ; cependant je ne détournais pas la tête assez vite pour ne pas voir ce malheureux au moment où il tombait ; les yeux lui sortaient de la tête, et, tout excité que je fusse par le combat, ce spectacle me parut horrible. (…) A une longue journée d’attente avait succédé l’excitation de la bataille, et nous n’avions guère eu le temps d’envisager notre situation ; lorsque chaque minute était peut-être la dernière de notre vie, nous ne songions guère à nos amis et à nos voisins ; et lorsqu’un homme armé d’un fusil est là en face de vous et qu’il veut votre vie, on n’a pas le loisir de se demander qui est l’agresseur, ni si on se bat pour son pays et son foyer. Je pense que toutes les batailles une fois commencées se ressemblent, du moins quant aux sentiments qui animent les combattants. »
    Enfin, les rangs se rompent dans la plus extrême des confusions. Le narrateur, dont les amis ont été tués, se retrouve à l’arrière des lignes, en retraite vers Londres, l’ultime charge anglaise ayant échoué. Sur la route de Kingston, le désespoir le gagne lorsqu’il apprend la reddition de Woolwich, l’arsenal général des armées anglaises. Se traînant jusqu’à la maison de son ami Travers, il y arrive juste à temps pour voir le petit enfant de celui-ci blessé à mort par un éclat d’obus :
    « Il était trop tard, hélas ! Le pauvre enfant gisait au pied de l’escalier la face contre terre, ses petits bras étendus, ses cheveux blonds baignés dans une mare de sang. Au milieu des milles éclats de la bataille, je n’avais pas entendu l’explosion. Un éclat d’obus était entré par la porte ouverte du vestibule et avait fracassé le crâne de l’enfant. »
    Lorsqu’il sort de son évanouissement, la maison est peuplée d’Allemands triomphants. A la honte d’être avili, humilié, méprisé, spolié, il ajoutera celle de l’Angleterre occupée, dépouillée de ses colonies et ruinée dans son négoce :
    «  Je me souviens encore avec quel sentiment d’amertume nous voyions qu’il était trop tard pour épargner à notre pays cette profanation, si facile cependant à écarter. Un peu de fermeté, un peu de prévoyance, chez nos ministres un peu de bon sens seulement, et cette calamité sans seconde eût été impossible. Il était hélas ! trop tard, nous étions comme les vierges folles de la parabole. » Il en conclut qu’ «une nation trop égoïste pour défendre son indépendance est indigne de la conserver .»
    La « Bataille de Dorking », écrite dans l’anonymat à l’époque par un Lord anglais, Lord Chesney, a vu son importance croître en proportion inverse de la brièveté du récit. Jamais nouvelle plus courte n’eut une pérennité plus longue, tant fut grande son influence. L’émotion, lors de sa parution, fut immense et donna lieu à de nombreuses imitations ou réfutations tant en Angleterre que dans le reste de l’Europe. Pour la première fois, sur un ton simple et naturel, l’on osa évoquer le pire cauchemar  que peut vivre l’Anglais insulaire : l’invasion de son sanctuaire sacré et la perte de sa puissance économique.
    Le roman ne se contenta pas seulement d’en raconter les épisodes, il appuie là où cela fait mal, en recherchant les causes du désastre, liées selon lui à la morgue et au mépris anglais vis-à-vis des autres nations. La polémique fut vive à un point tel qu’elle fut à l’origine d’un nouveau genre littéraire, celui des « guerres futures », dont la veine est encore fortement exploitée aujourd’hui. Il n’était donc nul besoin d’aligner une vingtaine de volumes comme le fit le capitaine Danrit avec sa « Guerre de demain » ou Pouvourville avec son « Héroïque combat », tout était déjà écrit en cet opuscule, chef-d’œuvre authentique dont on attend la réimpression (faite aujourd'hui).

  5. Type: livre Thème: après la Bombe... Auteur: les TROUBADOURS Parution: 1045
    Le dialogue innocent entre une petite fille et son papa expose en filigrane l’horreur d’un état de la société d’après «la dernière guerre », entendez la dernière guerre nucléaire.
    Elle a trouvé dans les ruines un livre d’images montrant de bien jolies choses, des dessins sur lesquels elle s’extasie : des petites filles comme elles (rarissimes semble-t-il aujourd’hui), une jolie femme comme l’était sa mère (disparue semble-t-il aujourd’hui) et des arbres verts  (qui n’existent plus semble-t-il aujourd’hui). Les réponses tristes de son père, sa pudeur, s’opposent à la gaieté innocente de sa fille et amplifient le malaise ambiant :
    « Papa, papa, dis-moi papa, papa, je serai sage
    Pourquoi c’est  pas comme ça
    Comme c’était dans ce livre d’images…
    Viens petite Melinda, viens près de ton père
    C’est parce qu’ils n’ont rien compris
    avant la dernière guerre. »
    Une petite chanson qui dénonce de bien grands crimes.

  6. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Léopold FRACHET Parution: 1948
    Le professeur Solvol a réuni autour de lui un aréopage de financiers pour leur expliquer sa fantastique découverte. Par un changement opéré dans la structure atomique de l’eau, Solvol a pu solidifier l’eau de mer. Il envisage de construire une route sur l’Atlantique pour relier l’Europe à l’Amérique en sollicitant des fonds pour son projet. Celui-ci n’eut pas le temps de voir le jour pour deux raisons. La première, c’est que le professeur Solvol disparut peu de temps après sans plus donner de signes de vie. La deuxième, c’est le déclenchement de la deuxième guerre mondiale où les Allemands triomphèrent sur terre et sur mer. De terribles batailles maritimes eurent lieu qui devaient empêcher l’approvisionnement de la Grande-Bretagne en fournitures de guerre :
    «Les mers étaient sillonnées par de véritables forteresses flottantes qui bravaient les pires tempêtes uniquement pour aller surprendre l’ennemi dans ses repaires les plus inexpugnables. Et l’ennemi, bien entendu, répondait par les mêmes moyens et rendait les coups avec une générosité digne d’un meilleur usage. Bref… La guerre faisait rage et menaçait de détruire le monde entier pour peu qu’elle durât encore longtemps à ce rythme épouvantable. »
    Alors que le sort semblait favorable aux Alliés, soudainement, de nombreux navires coulèrent, comme s’ils avaient heurté un obstacle transparent et solide.Les Allemands, qui avaient enlevé le professeur Solvol, avaient mis en application son invention, barrant la route maritime depuis les Açores jusqu’à l’Islande. Cette digue fut puissamment bombardée mais les brèches immédiatement comblées par les diligents sous-marins allemands qui utilisaient le « Désintégrateur A » mis au point par Solvol. Les Alliées étaient en passe de perdre la partie malgré les batailles titanesques livées autour de l’obstacle, lorsqu’un aviateur français nommé Dumoulin, fortuitement évadé d’un camp allemand, les éclaira sur le sort du professeur Solvol, qu’il avait fréquenté dans une cellule du camp de Meresbourg. Le savant était mort depuis, mais avait confié les principes de son invention à Dumoulin, surtout les plans de construction d’un « Désintégrateur B », censé désunir les atomes solidifiés :
    « Ce ne fut qu’au bout de quatre heures que le premier résultat apparut : une fissure dans le barrage. Puis cette fissure grandit, grandit encore, prit la forme d’une véritable brèche, semblant s’affaisser dans l’abîme. Littéralement, elle fondait, ce qui n’avait rien de surprenant puisque les éléments du Solvol dont elle était composée avaient été empruntés à la mer. Sans bruit, presque instinctivement, la route de l’Atlantique retournait à sa forme première. Bientôt elle fut complètement disloquée sur plusieurs milles de longueur. D’énormes blocs de Solvol flottaient et partaient à la dérive, semblables à des icebergs. »
    Un travail scientifique acharné permit la démolition progressive du mur et fut la cause de la victoire des Alliés sans que l’Européen moyen ne sût jamais rien de cette aventure.
    Une petite nouvelle gauchissant l’histoire datée par des éléments conjecturaux injectés dans une guerre réelle qui, du coup, prend une dimension onirique.

  7. Type: livre Thème: menaces climatiques Auteur: Léopold FRACHET Parution: 1946
    Lord Bedford, le roi du cuivre anglais, propose au jeune français Jacques Maurois d’accéder à la main de sa fille tout en défendant sa patrie. Il a eu vent de ce que les Allemands s’apprêtaient à détourner le cours du Gulf-Stream en édifiant, par un procédé secret, un mur de polypes vivants au large de la Floride. La Manche et l’Atlantique se verraient gagnées par les glaces et, le climat s’inversant, il en serait fait de la suprématie anglaise sur les flots. Discrètement, ils arment  le " Médina ", un petit voilier. Jacques Maurois revêtu d’un scaphandre, va s’attaquer au mur ainsi édifié pour le détruire par un moyen chimique qui tuerait les polypes :
    " L’ingénieur voyait à présent se dresser, à une trentaine de mètres à peine – la portée des rayons du projecteur – une masse sombre aux reflets rougeâtres : le fameux barrage vivant qui se fût opposé un jour, si l’on n’était intervenu, au passage des eaux chaudes du Gulf-Stream vers les mers d’Europe. "
    Qui a construit ce mur ? Au cours d’une de ses plongées, il a la chance de pouvoir neutraliser un autre scaphandrier, le Herr Doktor Julius Warner, maître du projet contre l’Angleterre. Les Allemands ne l’entendent pas de cette oreille. A partir d’un sous-marin, ils bombardent le " Médina" et le coulent. L’arrivée opportune d’un vaisseau anglais permet de récupérer les naufragés. Le mur disparaîtra, le Gulf-Stream reprendra son cours normal, les Allemands seront vaincus, Jacques Maurois épousera la fille de Lord Bedford et l’Angleterre sera sauvée. Que demander de plus ?

  8. Type: livre Thème: menaces climatiques Auteur: Léon LAMBRY Parution: 1937
    Ceci est l’histoire d’un petit groupe d’hommes qui survit à la catastrophe mondiale. Il y a Robatz, le géologue, Nelly l’infirmière, Miguel le marin, Lardy le peintre, Jemot le banquier. Ces gens ont passé leurs vacances ensemble dans un chalet de Haute-Savoie, qui domine le lac de Genève. Malgré l’insouciance des vacances, les nouvelles sont mauvaises: inondations, raz-de-marée, tremblements de terre, etc. alimentent les articles des journaux. Robatz prévoit une catastrophe de grande envergure. Après s’être séparés quelque temps, ils se retrouvent, sentant confusément que le chalet sera encore leur asile le plus sûr.
    En explorant la région, Robatz découvre une grotte préhistorique non encore visitée. Elle pourra toujours servir d’abri en cas d’urgence. Grâce à la prescience de Nelly, le groupe put gagner à temps le refuge; l’abri fut cependant fortement secoué dans son assise rocheuse, lorsque la Terre inclina légèrement son axe pour une raison inconnue.Le matin venu, le groupe sort de sa léthargie. Il constate que l’ancien monde a disparu. Un déluge quasi-universel s’est abattu sur les côtes : les fleuves n’existent plus, les montagnes ont changé de place, et ils se retrouvent seuls au monde à quelques centaines de mètres d’une mer battant un rivage inconnu.
    Après quelques journées d’hésitation, ils décident de marcher en direction du Sud-Est, soit approximativement vers la Méditerranée, pour aller à la recherche d’autres hommes. Ils traversent des régions inhospitalières, rencontrent un monstre supposé disparu (le serpent de mer), un homme devenu fou, et, finalement, atteignent le  bord de la mer. Stupéfaction ! Celle-ci s’est retirée très loin. Une grotte anciennement sous-marine leur sert de refuge pour la nuit, malgré les homards et autres bestioles pélagiques. Dans l’obscurité, ils voient briller des feux, au loin. Des êtres humains ! L’un d’entre eux viendra à leur rencontre pour les amener devant son chef, Sirven, un homme à poigne, qui a rassemblé quelques centaines d’humains sur le site de l’ancienne ville de Nice, totalement détruite.
    L’ambition de Sirven est de construire un poste émetteur dans le but d’évaluer le nombre d’humains survivants. Peu à peu la société se réorganise et l’on arrive à contacter Rome qui n’a subi que peu de dommages. (C’est logique puisque c’est «la ville éternelle»!). Un bateau viendra chercher nos amis pour que, à Rome, ils puissent collaborer efficacement au redressement du genre humain. Robatz se rappelant sans doute que la France dans sa réalité traversait alors la fatidique année 1938, conclut :
    " Qui oserait affirmer que les grands cataclysmes qui mettent en deuil l’humanité ne sont pour elle une dure, mais utile leçon? Celui qui vient de bouleverser la planète n’est-il pas la preuve la plus éclatante de la toute-puissance du Créateur, de la faiblesse de sa créature, et de la vanité de nos ambitions? Que sont devenus ces républiques, ces royaumes, ces empires dont les guerriers s’efforçaient d’étendre les frontières ? Ne vous semble-t-il pas aujourd’hui qu’ils prirent une peine inutile et firent preuve d’un funeste aveuglement ? A quoi ont servi ces luttes fratricides?
    Le morceau de boue que l’insecte humain appelait son territoire se trouve maintenant confondu avec le territoire voisin. Ses sanglants combats, tous aussi futiles que ceux des fourmis, ne lui ont pas assuré la possession de ce sol auquel il tenait tant! Il a suffi d’un tout petit mouvement de la terre s’inclinant sur son axe, pour que disparussent à jamais les Etats si péniblement édifiés. Fasse le ciel que la terrible leçon qui nous fut infligée porte ses fruits! Sur la terre nouvelle... Il faut que se dressent les hommes nouveaux, unissant leurs efforts pour se rapprocher d’un idéal toujours plus élevé! "
    " Sur la terre qui change " est un roman  qui joue avec les déluges et les tremblements de terre. Ne se démarquant en rien de ses semblables (voir à ce sujet " le Nouveau déluge " de Noëlle Roger), il a néanmoins l’avantage de ne pas moraliser et de mettre l’accent sur le récit détaillé des conséquences de la catastrophe.

  9. Type: livre Thème: épidémies, fins du monde, fins de l’humanité, guerres futures 1 Auteur: Le Professeur MOTUS Parution: 1933
    En 192.., l’Allemagne, désireuse de se venger de la France, met au point dans un laboratoire soigneusement camouflé,  en Poméranie, un microbe destiné à infecter les Français, les Belges et les Anglais :
    « Ludwigburg avait songé à s’adresser aux laboratoires de biologie et à leur demander s’il n‘était pas possible d’arriver à fabriquer un produit d’une virulence telle que la moindre petite plaie infectée par lui donne infailliblement la mort et que le cadavre ainsi putréfié devienne un centre de contagion terrible. »
    Le professeur Von Brück en est le maître d’œuvre et, avec l’appui du gouvernement en la personne du Chancelier Ludwigburg, dans le plus grand secret, il prépare un cocktail microbien mortel, conditionné dans des bombes en verre, qui sera répandu sur toutes les grandes villes,  larguées par des avions civils camouflés,et sans déclaration de guerre préalable. Comme les Allemands pensent à tout, Von Bruck ne déclenchera l’opération que lorsqu’il estimera être en possession de vaccins et sérums destinés à protéger ses seuls compatriotes.
    Paris bombardé est rapidement à genoux. L’épidémie se répand à une vitesse foudroyante en désorganisant en peu de temps la société civile. Les Français prennent conscience qu’il s’agit d’une attaque traîtresse de la part des Allemands mais ils ne peuvent y répondre puisque l’armée elle-même est affectée :
    « Les troupes, elles aussi, étaient très éprouvées. Les hôpitaux militaires, remplis tout de suite, ne pouvaient suffire à aliter le monde toujours croissant des malades. On avait même été obligé de les garder à l’infirmerie. Ils y mouraient, et leurs cadavres continuaient à propager le fléau dans les casernes. Toute avance des troupes en territoire ennemi paraissait devoir être impossible. La mobilisation se trouvait entravée. »
    Lorsque le Kaiser et le Chancelier estiment le délai suffisant, ils envoient un ultimatum à la France : « Capituler sans conditions et guérir par les équipes sanitaires envoyées d’Allemagne ou périr ». La rage au cœur, les Français cèdent. Aussitôt, comme par enchantement, apparaissent des équipes allemandes, toutes sur pied de guerre et parfaitement vaccinées.  Cependant Von Brück et Ludwigburg traversant la  France sont en proie à une sombre inquiétude : partout règne le silence  de la mort. Il semblerait que les microbes allemands aient été plus efficaces que prévu :
    « Déjà la mort s’installait aux carrefours. Paris prenait l’aspect d’une nécropole immense. Sur plusieurs places, des bûchers se dressaient, qui étaient destinés à brûler les cadavres ; (…) Le four crématoire de Père-Lachaise était bien entendu insuffisant, et les grandes usines construites , il y avait quelques années, à Ivry, à Issy et au Bourget, pour détruire les ordures ménagères, étaient beaucoup trop loin et suffisaient à peine à réduire en cendres les morts de la banlieue.(…)
    Tandis que la Bretagne, moins atteinte, ne laissait grandir le fléau que lentement, l’est, le nord et la région lyonnaise le voyaient venir avec une intensité effroyable. A Lyon, on était contraint de brûler les cadavres, mais dans le désarroi général, et pour aller plus vite, on en jetait dans le Rhône, qui les entraînait dans ses eaux tumultueuses, pour aller les déposer sur des rives plus ou moins lointaines où ils étaient de nouveaux centres d’infection. »
    La même situation se répète en Angleterre et en Belgique. Les Allemands se rendent enfin compte qu’ils ne maîtrisent plus la situation, leurs vaccins s’avérant inopérants. Quand les premiers médecins allemands sont touchés à leur tour, c’est l’affolement et le repli stratégique vers leur pays ; tous les trains sanitaires retournent au-delà du Rhin, les équipes germaniques cessant de soigner leurs ennemis.
    Les Français, décidément très en colère, réagissent en assassinant les derniers Allemands qui résident encore en France, en menaçant le Kaiser dans sa résidence à Amerangen et en pourchassant Von Brück de leur colère, lequel meurt d’une crise cardiaque. Mais surtout, ils rendent à leurs ennemis la monnaie de leur pièce en jetant au-dessus des villes allemandes des cadavres infectés :
    « On se précipita pour constater la nature de ce nouveau bolide et quelle ne fut pas la stupéfaction des spectateurs ahuris, quand ils purent se rendre compte que la masse qui venait de s’écraser sur la chaussée n’était autre qu’un cadavre en putréfaction répandant ses organes pourris sur le sol et baignant dans une répugnante sanie. »
    En Tunisie, un petit groupe de savants français, de Manoux, de Vysne, Ginestous et le professeur Mérande, de l’institut Pasteur de Tunis, se mettent  à l’œuvre. Ginestous ayant rapporté des vaccins et des souches microbiennes en provenance de Paris, ils installent leur laboratoire, par mesure de sécurité, sur un grand yacht américain et, avec l’assentiment du propriétaire, partent pour l’Afrique, autant pour fuir le péril que pour rechercher des grands singes qui devront servir de cobayes. Entre-temps, l’épidémie entre dans sa phase explosive : les microbes n’épargnent aucun pays, éradiquant toute vie humaine en Europe, en Asie, puis en Afrique,  enfin en Amérique sans qu’une quelconque parade ait pu être trouvée :
    « Bientôt l’hiver vint couvrir de son linceul de neige tous ces cadavres dispersés, seuls les loups restèrent maîtres de cet énorme territoire, trouvant dans ce vaste charnier, une nourriture facile. (…) Tous mouraient sans sépulture. Quand le dernier Russe succomba, l’humanité avait disparu de l’Europe. »
    Même le groupe du professeur Mérande, pourtant bien prêt d’une solution, échouera,  puisque le bateau sombrera au cours d’une tempête. Le monde entier, de par la faute des Allemands et l’absurdité de la guerre, survivra sans l’humanité, livré aux animaux et aux végétaux qui réinvestissent les centres urbains abandonnés :
    « Notre-Dame continuait à se dresser majestueuse, inviolée par cette puissance microbienne destructrice de ces hommes qui, à des périodes troublées, avaient attenté à la beauté de ces pierres sculptées. Les microbes ne sont pas iconoclastes. Sur le parvis, la statue de Charlemagne continuait à lui tourner le dos. L’avenue de l’Opéra présentait la physionomie de ce qu’elle était jadis à quatre heures du matin. L’herbe y avait peu poussé à cause du revêtement de sa chaussée et de ses trottoirs. A son extrémité, l’Opéra intact semblait prêt à ouvrir ses portes et à recevoir un nouveau directeur disposé à y engloutir une nouvelle fortune. Sur l’esplanade des Invalides, toujours dominée par la coupole dorée de Mansart, quelques animaux demi-sauvages paissaient tranquillement, sans se douter de l’extravagance de leur situation. Tous les quartiers présentaient la même immobilité. Seules quelques bandes de chiens errants, qui commençaient à ressembler à ceux de Constantinople, troublaient par leur course folle, la placidité et le silence des rues. »
    Un roman écrit par un médecin anti-germanique en diable, qui va au bout d’une logique de mort, très moderne dans sa philosophie, et romantique dans ses descriptions. Un ouvrage précurseur à rééditer.

  10. Type: livre Thème: guerres futures 1 Auteur: le lieutenant-colonel R. de D. Parution: 1913
    Le « Partage de l’Allemagne » est une réponse au « Partage de la France », paru un an auparavant. Prédisant comment l’Etat français sera aboli, le pays dépecé et intégré au «Gross Deutschland ».  Le lieutenant – colonel R. de D., dont le sang ne fit qu’un tour  à cette lecture, s’est senti une âme vengeresse. « Finis Germaniae » sera son mot d’ordre. A travers une approche rigoureuse – dit-il - , il montre à son tour le processus de mise à mort de l’Allemagne par une guerre rapide, joyeuse et enthousiaste.
    Son récit ne comporte aucune scène de carnage, ni manœuvres politiques, ni croc-en-jambe diplomatiques,  ni revers bleu - horizon.  C’est par une alliance franche et cordiale entre les membres européens (en gros toutes les nations sauf celles de la Triple Entente) que, par la « Furia Francese », à l’aide de généraux remarquables s’appuyant sur des soldats prêts à mourir pour la patrie dans la joie, que les victoires s’accumulent sur terre et sur mer, conduisant tout droit vers Berlin. Partout des peuples heureux d’être débarrassés des Prussiens, en tous lieux des soulèvements populaires contre les oppresseurs teutons, partout des accueils chaleureux pour les libérateurs –même dans certaines régions autrichiennes. Des faits ?
    L’organisation déficiente de l’ennemi ajoutée à son orgueil qui, attaquant le long des frontières de l’Est sans préparation, sûr de remporter une victoire aisée sur des Français en décadence, rate d’emblée son entrée en guerre. A cette illusion répond notre appareil militaire, parfaitement ordonné, parfaitement réglé, qui achemine dans l’ordre nos soldats sur le front, avec des armes nouvelles :
    « Ces petites flèches étaient en fil d’acier écroui, d’une longueur de dix centimètres, d’une épaisseur de 1millimètre, très pointues d’un bout, aplaties de l’autre pour former deux petites ailettes hélicoïdales qui, en tombant, devaient faire tourner la flèche afin d’orienter sa pointe vers la terre. Les essais avaient démontré qu’une  de ces flèches, parfaitement droite, bien pointue, bien écrouie, tombant d’une hauteur de 800 mètres, était capable de traverser un homme de part en part. Enfin le poids de l’unité était de 1 gramme. Un avion de puissance moyenne pouvait donc emporter 150 000 de ces fléchettes dont le poids total était de 150 kilogs (sic). Quant au procédé de jet, il consistait à les laisser tomber régulièrement à l’aide d’un semoir tenu à la main. »
    Pendant que deux régiments français se font tailler en pièces pour contenir la ruée de l’ennemi, le reste de l’armée s’enfonce comme un coin en Lorraine et en Alsace, aidés par les sabotages des autochtones, qui n’ont jamais digéré la défaite de 1871 :
    « Ce fut pendant deux jours,  une lutte épique, où tous, depuis le chef placé au plus haut degré de la hiérarchie jusqu’au dernier troupier, se défendirent sans compter et firent preuve de l’abnégation la plus pure et de l’esprit de sacrifice le plus complet. (…)  Résolus à mourir plutôt que de manquer à la mission qui leur avait été confiée : donner au reste de l’armée le temps d’arriver, ils ne cédaient le terrain que sous l’effort des baïonnettes infiniment plus nombreuses et après avoir infligé à leurs ennemis des pertes qui leur faisaient chèrement payer les succès partiels obtenus. »
    Les Français culbutent l’ennemi et le poursuivent au-delà du Rhin, cavaliers et fantassins se montrant d’une redoutable efficacité.Les autres pays participent à l’assaut. La Russie, qui guigne vers Berlin, en espérant augmenter son glacis protecteur. L’Angleterre, dont le sens de l’équilibre est bien connu, qui pense développer sa domination économique en Atlantique. L’Espagne qui lorgne vers les colonies d’outre-mer. Les pays baltes qui ont maintes fois soufferts des exactions prussiennes et autrichiennes. Dans le Sud, l’Italie, qui n’arrive pas à se forcer un passage dans les Alpes, et dont la flotte, immédiatement anéantie, ne pourra acheminer les renforts de ses colonies d’Afrique du Nord. L’Autriche elle-même, embarrassée par la Hongrie, et dont les intérêts sont divergents de ceux de la Prusse :
    « Au bout de ce délai de 30 jours, non seulement les Allemands étaient battus à l’ouest ; mais sur la frontière de l’Est le danger devenait pressant, car trois armées russes étaient sur le point de déboucher de la région de Varsovie. Et ce n’était pas l’Autriche qui pouvait être d’un grand secours à la Prusse. Dès le début de la guerre, elle avait eu les plus graves désordres à réprimer dans l’intérieur. Tous les peuples divers qui la composent, toujours en bouillonnement, toujours bataillant pour la conquête de leur autonomie, avaient cru enfin l’heure venue, de la liberté.
    La Bohême s’était proclamée indépendante. Le drapeau tchèque avait été arboré à Prague. A Trieste, le préfet autrichien avait été massacré. Partout, dans les nations de races slaves : Ruthènes, Tchèques, Slovènes, Croates, on acclamait le nom de la Russie ; il n’est pas jusqu’à la Hongrie qui ne témoignât d’une tiédeur inquiétante… »
    La lenteur de la mobilisation russe qui aurait pu apparaître comme un avantage pour l’Allemagne, se retourne contre elle lorsque, harcelée d’un côté par les rapides troupes françaises, elles tombent dans la nasse russe enfin tendue du côté de Berlin.
    Si, sur terre, les victoires s’accumulent, sur mer, la confrontation tourne très vite en faveur de l’Alliance. Les Anglais, déjà maîtres en Atlantique, se faufilent en mer du Nord et en Baltique, pilonnent les villes hanséatiques. En Méditerranée, la partie est jouée : les Italiens, à genoux,  leur laissent toute la mer à courir :
    « Certes les adversaires s’étaient bien défendus ! Ce fut, durant des heures, une vision d’enfer dont nul peintre, plus tard, ne pourra rendre l’effroyable et tragique beauté. Ceux qui y assistèrent conserveront toute leur vie, la vision de ce spectacle fabuleux: des énormes tourelles crachant, vomissant le feu ; des canons énormes de 370 et de 420 dont les détonations étaient si monstrueuses qu’elles secouaient la mer et faisaient trembler les masses des navires ; des projectiles énormes arrivant en trombes dévastatrices et éventrant les cuirasses les plus épaisses ;Des gerbes d’eau fusant jusqu’à des hauteurs insensées et retombant en tornades parmi les marins excités. Puis, au milieu de tout cela, de ce cataclysme, des sous-marins surgissaient des gouffres, apparitions fantastiques et soudaines, pour replonger plus loin. Il en fut qui ne reparurent jamais ! »
    D’ailleurs la France, fille aînée de l’Eglise, sera aidée par la providence. Au début de la guerre, lors d’une audacieuse action aérienne, une bombe, lâchée au-dessus de la demeure du Kronprinz, tuera celui-ci, démoralisant  les Allemands dès l’ouverture des hostilités. Finalement, lorsque les belligérants entrent dans la capitale du Reich, il n’y plus d’armée, plus de chefs, plus d’Allemagne. Par le nouveau traité de Berlin, le pays sera démembré. Ne subsistera que la Thuringe en tant que pays autonome. Le Bade-Wurtemberg ira à la France, l’Angleterre s’octroie les anciennes colonies allemandes de l’Est Africain, le Danemark récupère le Schleswig-Holstein, la Belgique étend son territoire jusqu’au Rhin, l’Espagne acquiert l’Ouest africain, enfin les frontières de la Russie passeront au-delà de Berlin et de l’Elbe moyen.
    L’Italie sera bridée, avec interdiction de construire une flotte de guerre comportant plus de dix cuirassés. Les états balkaniques, pour leur aide précieuse, se partagent Bosnie, Herzégovine, Slovénie et Croatie. L’Autriche, réduite de moitié, portera en germe, grâce à la diplomatie française, de futures dissensions avec ce qui reste de l’empire déchu, qui empêchera à jamais une nouvelle union avec la Prusse.
    Ce texte constitue un témoignage intéressant, à travers une guerre conjecturée, de l’inconscient collectif français. Ce que la France aurait souhaité met davantage en relief la tragique distorsion d’avec la réalité de la guerre de 14-18, celle qui enverra mourir des millions de jeunes dans les culs de basse fosse que forment les tranchées de Verdun et d’ailleurs, sous le commandement d’incapables somptueux, tels que les Gamelin, purs produits d’une nomenklatura militaire « fin de race » semblables, dans leur criminelle insouciance,  aux officiers prussiens bouffis de morgue, dans leurs bottes et sous leur casque à pointe.