Bienvenue dans la Base de Données des livres !
Vous y trouverez des ouvrages post-apo que la communauté souhaite partager. Il vous est possible de rajouter des fiches de livres, alors partagez vos trouvailles avec la communauté FoGen ! Une grande partie des ouvrages que vous trouverez sont ici grâce au travail de Jacques Haesslé sur son site : http://destination-armageddon.fr/index.html. Un grand merci à lui pour son travail exceptionnel !
Livres
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Les Ruines De Paris - Par BenF
" Ce qui fut l’île de la Cité, le berceau de Lutèce, le centre de Paris, n’est plus qu’un amas confus de pierres éboulées que la mousse recouvre. Des chênes, robustes et forts, ont éventré les voûtes; les lézards se chauffent au soleil sur les autels de Notre-Dame. Les deux grosses cours démantelées, échancrées, à demi effondrées, élèvent encore au-dessus des fourrés épais leurs squelettes déchiquetés. Un pan de muraille se soutient encore, appuyé sur un arc-boutant qui repose dans un taillis, et troué par les hautes fenêtres dont les ogives se sont affaissées.
De temps en temps un bruit sec éclate dans le grand silence, effarouchant les lézards et les couleuvres, seuls bêtes de ces ruines. C’est une pierre qui se détache, laissant un trou béant, et qui vient rejoindre sur le sol verdoyant les autres pierres, ses soeurs. Les vieux piliers trilobés de la cathédrale se sont couchés, pareils à des géants de granit fatigués du lourd fardeau porté pendant des siècles.
A terre gît tout ce peuple de dragons, de goules, de hiboux, de démons, nuée sinistre qui s’était abattue sur l’église gothique. A demi brisés, ils dorment dans les hautes herbes, peu à peu recouverts, ensevelis par la marée montante des ronces et des broussailles."
Enumérant les divers monuments connus de Paris, Notre-Dame, le Panthéon, l’Arc de Triomphe, l’auteur les décrit tels qu’en son imagination la végétation les transforme.
Dans la plus pure tradition de la poésie romantique établie par Volney, Clarétie précède l’architecte Speer qui, par la présentation d’une maquette, a enthousiasmé Hitler avec sa vision d’un Berlin futur. Une description touchante et fugace de la grande métropole française.
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Londres Engloutie - Par BenF
Félix Aquila est le héros de cette histoire qui se déroule quelques siècles après qu’un astre errant a bouleversé la configuration de la Terre, balayant les sociétés et les états, noyant les territoires émergés sous une vague gigantesque :
« Au bout de trente ans, en-dehors des collines, il ne restait plus un seul espace ouvert où l’homme aurait pu se frayer un chemin sans suivre les pistes d’animaux où être obligé de se défricher un passage. Depuis longtemps, les fossés s’étaient emplis de feuilles et de bois mort, si bien que l’eau qui aurait dû s’écouler stagnait et se répandait dans les creux et les rigoles de ce qui avait été autrefois des champs, formant ainsi des marais où prêles, iris et joncs dissimulaient les eaux. »
Le site de Londres se trouve enseveli sous un lac gigantesque autour duquel se sont établis les descendants des derniers survivants en une nouvelle société féodale:
« Car cette cité merveilleuse source de tant de légendes, n’était en fait qu’une construction de briques et quand le lierre, les arbres et les buissons se mirent à croître, et que finalement les eaux souterraines jaillirent, cette vaste métropole fut vite engloutie. De nos jours, tout ce qui était construit sur des terres basses s’est transformé en marais. Les maisons des hauteurs, furent, comme toutes celles des grandes villes, pillées de leur contenu; même le fer en fut extrait. Les arbres fendirent les murs qui ne tardèrent pas à s’effondrer et à se recouvrir de buissons; lierre et orties engloutirent bientôt les amas de briques. »
Des bois immenses entourent le lac où des « hommes des buissons» primitifs et des « gitans » constituent un réel danger pour les petites cités moyenâgeuses:
« Dépravé, sans vergogne, l’homme des buissons est essentiellement vêtu de peaux de moutons, ou d’effets volés, s’il est habillé. Il n’observe aucune sorte de cérémonie. Le nombre de ses « camps » doit être considérables, et pourtant on a rarement l’occasion de voir l’homme des buissons et d’entendre parler de ses exactions, ce qui nous donne une indication du terrain qu’il couvre. C’est surtout lors des hivers rigoureux qu’il devient dangereux; poussé par la famine et le froid, il s’approche des villages pour dépouiller les enclos.
Il est si habile à se faufiler parmi ronces, roseaux et joncs, qu’il peut passer à quelques mètres de vous sans se faire remarquer, et seul le chasseur expérimenté a une chance de déceler sa trace, mais ce n’est même pas toujours le cas. »
Tout a basculé dans la barbarie car il ne subsiste rien de l’ancien monde, ni écrits, ni technologie. L’arc et la flèche triomphent, les moeurs sont brutales, les sujets plient devant des roitelets ignares ou incompétents, l’esclavage est particulièrement apprécié:
« La campagne aussi est affaiblie par la multitude des esclaves. Dans les royaumes et les provinces qui jouxtent le Lac, il n’est guère de villes où ils ne sont pas dix fois supérieurs en nombre aux hommes libres. Les lois sont forgées pour réduire la population à la servitude. Quelle que soit l’offense, la punition en est l’esclavage, et les offenses sont artificiellement aggravées pour que la richesse des rares êtres privilégiés s’accroisse encore. »
Félix, fils de noble, est un être à part dans ce monde rude. Très habile au maniement de l’arc, il est plus emprunté, plus sensible, plus frêle que son frère Olivier qui frappe de taille et d’estoc (avec une épée magnifique, vestige du passé). Se sentant insatisfait au château familial et honteux de son père qui se livre à l’agriculture au lieu de briller dans la haute société, Félix Aquila conçoit le projet d’explorer les pourtours du Grand Lac, ce qui n’a jamais été fait, en dépit de l’amour qu’il porte à Aurora Thyma, sa dulcinée.
En grand secret, et avec l’aide d’Olivier, il construit un canoë qui sera le véhicule idéal. Il s’embarque, après une dernière fête au château du baron Thyma, durant laquelle il a pu mesurer toute l’hostilité que le baron manifeste à son égard. Félix rêve de reconquérir Aurora après son périple.Celui-ci s’avère très vite difficile et dangereux, autant pour éviter de s’échouer contre les rochers affleurants avec sa barque que pour échapper aux gitans.
En dépit du danger, il traverse de nombreuses contrées, vierges d’hommes et débordantes de vie sauvage. Il se rend compte de l’intérêt stratégique que représente une avancée de terre bloquant tel un verrou le détroit donnant accès au lac. C’est là qu’il décidera de construire son château afin de contrôler la totalité de la région. Cachant son esquif sous des roseaux, il poursuit à pieds vers une ville entrevue -qui n’est en réalité qu’un hameau - , décidé à s’engager dans l’armée du roi. Cela va prendre du temps car les obstacles s’élèvent nombreux, qui l’empêchent de se faire reconnaître par le seigneur du pays. Enfin mis en sa présence, il est engagé dans un conflit qui n’est pas le sien. Félix, déçu par l’attitude grossière du roi et son incompétence de tacticien, désertera de l’armée.
Repartant en canoë sur le lac, il lui arrive une aventure singulière. L’air autour de lui se transforme, l’eau devient toute noire, des vapeurs méphitiques se soulèvent au fur et à mesure de sa progression, sur les bords une terre noire et souillée laisse deviner en creux des silhouettes de squelettes. C’est le site de l’ancienne « Londres engloutie », devenu lieu de mort et de rejet:
« Il était entré au coeur de cet endroit terrifiant dont il avait tant entendu parler: la terre empoisonnée, l’eau empoisonnée, l’air empoisonné, empoisonnée aussi la lumière des cieux qui traversait cette atmosphère. On disait que par endroits, la terre brûlait et crachait des fumées sulfureuses, venant sans doute des énormes réserves de produits chimiques inconnus, fabriqués par le merveilleux peuple de l’époque. Sur la surface des eaux flottait une huile vert-jaunâtre, fatale à toute créature qui la touchait; c’était l’essence même de la corruption.
Parfois, elle voguait au vent, et des fragments se collaient aux roseaux ou aux iris, bien loin des marais. Si une foulque ou un canard effleurait la plante contaminée, ou si une seul goutte d’huile tombait sur ses plumes, l’animal en mourait. Des eaux rouges, et du lac noir sur lequel le hasard l’avait conduit, il n’avait jamais entendu parler. »
Se sauvant à grand’peine, en un dernier sursaut d’énergie, du piège empoisonné de cette région maudite, il est recueilli par une tribu de pasteurs qui le soignent. Pleins d’admiration envers sa personne - il est le premier à avoir survécu à cette épreuve - , ils lui reconnaissent des qualités supérieures. Menant victorieusement un combat contre les Gitans - les ennemis naturels des Pasteurs - Félix est proclamé roi. L’admiration pour Félix se transforme en dévotion. D’autres tribus se rallient à sa bannière. Bientôt à la tête d’une fédération puissante de guerriers, Félix n’a pas oublié son projet premier: celui de construire son château au lieu stratégique découvert précédemment. Pendant que ses guerriers s’attellent à la tâche, il les quitte pour annoncer la bonne nouvelle à Aurora.
« Londres engloutie » est l’un des premiers romans du genre développant la thématique post-cataclysmique: une nature redevenue sauvage, la disparition de la technologie, un retour à la barbarie mesurée d’un nouveau moyen-âge. Les épigones de ce type romanesque feront souche à leur tour, les auteurs développant jusqu’à la satiété tel ou tel aspect de la thématique, jusqu’au cliché.
Aujourd’hui, les « nouveaux barbares » sont légion et « le nouveau moyen âge » forme la toile de fond de nombreux romans. Jefferies est cependant plus intéressé par la psychologie de son héros que par le décor, par sa volonté affirmée de libération, par l’amour que Félix porte au lac , symbole de virginité. L’horreur de la technologie et son pessimisme se traduisent par la description étonnante du marécage qu’est devenu l’ancienne cité de Londres.
Peu connu en France, avec une traduction à diffusion quasi-confidentielle, le roman mérite une place de premier plan dans le courant de la science-fiction cataclysmique.
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Paris En L'an 3000 - Par BenF
La comète de Halley a eu raison de l’indifférence des citoyens de la Terre à son égard. Lors d’une de ses réapparitions, en 1985, sa queue balaie la surface du globe provoquant une catastrophe mondiale et notamment, le détournement du Gulf-Stream:
"New York, Londres, Paris, Pékin, Berlin, le Maroc, la principauté de Saint-Martin, le val d’Andorre et le Japon lui-même s’effacèrent de la carte du monde. Ainsi que jadis Troie, Herculanum, Pompéi, toute la terre habitée en 1985 s’ensevelit sous les couches de cendre de boue ou de glaces.
Je dis de glaces, car la température tomba partout à 55° au-dessous de zéro. Un amas prodigieux de bolides et d’aérolithes, une pluie de scories recouvrit tout. Villes et villages, collines et montagnes, rivières et routes, tout fut ballotté, cahoté, écrabouillé."
Le Pôle Sud devient l’une des seules régions tempérées qui accueille les rares survivants , alors que l’Europe est ensevelie sous de vastes étendues glaciaires.
Mille ans après, en vue de favoriser la vérité historique, l’Académie des Sciences de Pôle-Sud dépêche " l’Obus-32", un navire volant dernier cri, pour explorer ces confins glacés et de redécouvrir Paris.
A son bord prennent place deux distingués Académiciens, messieurs Pudding et Ventrepotte, aussi dissemblables au physique qu’au figuré. L’un se réfère aux (fausses) mémoires historiques de Valtermoche pour situer la ville, l’autre analyse et déduit son emplacement à partir de preuves fossiles et géologiques.
Ils s’arrêtent tout d’abord dans leur voyage au-delà d’un équateur glacé, au-dessus d’une plaine en mettant à jour ce qui apparaît comme une ancienne boîte de foie gras, preuve incontestable qu’ils survolent bien le territoire français.
Les découvertes se multiplient, toujours plus prodigieuses et toujours plus frustrantes : une statue sans bras (c’est la Vénus de Milo), un ancien couloir de métro effondré (c’est la station Rome), le tombeau de l’empereur Napoléon, des morceaux de fer (c’est la Tour Eiffel).
Pudding et Ventrepotte se chamaillent, l’un en faveur de l’hypothèse de l’origine " romaine ", l’autre croyant indéfectiblement à l’origine " parisienne " des trouvailles:
" C’était un spectacle étrange que celui des dix hardis explorateurs, lampe électrique à la main suivant ce tunnel où mille ans auparavant circulèrent des trains de voyageurs.
On marcha pendant dix minutes ; les ferrailles, les fils tordus s’enchevêtraient de plus en plus. Puis un amas informe de débris sans nom: restes de plates-formes et de wagons assurément, car on retrouvait des roues de fer, des plaques blindées, et, spectacle horrible, sous l’amas de terre, de bois pourri, le capitaine Balthazar retira un ossement humain.
Pudding s’écria: -Messieurs, ce sont les débris d’un train... d’un train rempli de voyageurs au moment où se produisit le cataclysme. "
L’ambiguïté sera levée en la personne de Gallichard, un vrai de vrai de Pantruche, qui a décidé en son temps de se faire congeler et de ne se réveiller qu’au bout de cent ans:
" C’était en effet, entre deux rocs, une sorte de boîte, de parallélépipède de glace qu’avait aperçu le lieutenant, et dans la glace transparente, on voyait distinctement les formes d’un corps humain, admirablement conservé. On travailla toute la journée à remonter le bloc, et on décida de remettre l’ouverture au lendemain. L’aurore vit ce spectacle inoubliable, extraordinaire et pourtant véridique: les parois de la glace fondant doucement à la chaleur d’un chalumeau, et débarrassant de son enveloppe réfrigérée le corps d’un homme ayant vécu mille ans auparavant. "
Au grand contentement des savants polsudiens, Gallichard rétablit la vérité historique en traçant un portrait flatteur de l’empereur.
Pressé cependant de faire connaissance avec le doux climat de Pôle-Sud, il s’empare de " l’Obus-32 " en compagnie de Ventrepotte, abandonnant les hardis explorateurs à leur sort, en leur promettant de leur envoyer vite du renfort. Ceci fut fait. Une flottille d’engins volants viendra à leur secours, explorera en profondeur le site et tout le monde rentrera au bercail avec une ample moisson de renseignements sans prix.
Un ouvrage cataclysmique français, tout en ironie et bonne humeur, destiné au public enfantin de l’époque. Henriot y fait courir son admiration envers la personne de Napoléon. Au-delà de l’humour, subsiste l’hypothèse de l’hibernation (déjà utilisée par Boussenard dans "les secrets de M. Synthèse ").
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Si Lord Killyett n’avait pas été si plein de morgue à l’égard de Maxime-Jean Darnozan, rien ne se serait produit. Mais il se trouve que Darnozan, jeune Français robuste et intelligent, ayant sauvé du naufrage le « Lapwing » sur lequel se trouvaient Lord Killyett et sa fille Héléna, non seulement essuya le mépris de ce dernier mais encore se vit refuser la main de sa fille , Lord Killyett se pinçant le nez devant la roture.
Maxime-Jean, de caractère fier et ombrageux, promit de se venger et de faire plier l’obstiné vieillard, en déclarant la guerre à l’Angleterre. Son projet, chimérique à première vue, fut soigneusement élaboré.A son arrivée en Amérique, il consulta un banquier qui lui accorda un prêt pour démarrer son entreprise. Il réunit une quarantaine d’aventuriers prêts à risquer leur vie pour parfaire leur fortune. Des meilleurs, il en fit ses lieutenants : Pontins, Kasaloff, Kellner, Lamanon, qui jouèrent un si grand rôle dans la conquête du pouvoir. Il sut également se faire respecter et éliminer les profiteurs et les instables.
En leur dévoilant son projet de conquête, il leur indiqua la première étape à atteindre, celle de se procurer l’armada navale de base en l’empruntant à l’Angleterre même, par d’audacieux coups de mains, partout dans le monde, et de garnir ces cuirassés de marins habiles aptes à en découdre :
« -Vous, Pontins, quel compagnon voulez-vous ?
-Je demande à opérer seul
-Comment ferez-vous ?
-J’irai chercher à Salé, sur la côte du Maroc, trois ou quatre mille gaillards qui s’ennuient joliment depuis une quinzaine d’années, et qui viendront pour rien »
Sa fortune ayant été augmentée par le don inattendu d’Ata-Capac, authentique descendant des rois incas, Maxime-Jean officialisa son entreprise :
« Je veux fonder l’Empire des mers. Je veux que toutes les îles du globe nous appartiennent un jour. L’Angleterre, qui avait acquis la plus grande puissance maritime du monde, a joué naguère une comédie infâme pour s’emparer de l’isthme de Suez, qu’elle convoitait depuis longtemps. Elle s’est moquée de l’Europe. (…) L’Europe ne regimba pas. Eh! bien, messieurs, ce que l’Europe n’ose pas faire, nous le tenterons, nous, avec l’aide de Dieu. Nous attaquerons l’Angleterre sur son terrain favori, sur toutes les mers ; nous la battrons, c’est du moins mon espérance ; nous la diminuerons, nous la détruirons, et nous aurons ainsi accompli le plus grand acte de justice des temps modernes.»
Se proclamant roi de Pola, Maxime-Jean Ier, basé sur l’île de Perim, envoya en Angleterre son ministre plénipotentiaire Boilucas pour exiger une entrevue avec Gladstone :
« Toute l’Angleterre fut prise d’un rire inextinguible quand le Times révéla au monde que le roi de Pola, en sa qualité de souverain océanien, prétendait avoir quelque droit au règlement des affaires d’Egypte et surtout du canal de Suez.»
Il prépara donc une opération de vaste envergure avec pour cible les arsenaux de Woolwich où se construisait la flotte anglaise. Au moyen d’aérostats qui lui permirent également de s’échapper, il les fit incendier. Le Premier ministre anglais écuma de rage et promit de venger l’affront. Sa colère s’accentua quand il apprit, que partout dans le monde, les vaisseaux commerciaux anglais étaient pris pour cible, attaqués et pillés, menaçant la suprématie anglaise dans le cadre du commerce international. La population anglaise accusa les Irlandais d’être de mèche avec l’aventurier.Le coup le plus dur fut asséné à Gibraltar où Maxime-Jean enleva deux vaisseaux avec leurs équipages, orgueil de la flotte anglaise, puis il établit sa base près de Madère, attendant la réaction anglaise.
L’amiral Hopkins commettant l’erreur de sous-estimer son adversaire lors de la bataille de Pontevedra, et par une tactique militaire et navale supérieure, la flotte de l’Empereur des mers coula les navires anglais.Le succès de l’aventurier entraîna un nouveau jeu des alliances en Europe; alors que la France resta en une stricte neutralité, l’Espagne prit parti pour l’Angleterre et l’Italie pour l’Empereur des mers, escomptant un substantiel profit dans cette affaire.
La lutte continua. Chypre est enlevée, les navires de Maximilien-Jean semblent partout, dans le canal du Mozambique, dans les Antilles où Haïti, la république Dominicaine, Madagascar seront investis par Kellner et Smith. En Angleterre l’on vota des crédits massifs pour venir définitivement à bout du trublion ; une flotte moderne sera mise à l’eau, commandée par l’amiral Beauchamp Seymour. Elle cingla vers Gibraltar dans le but de pénétrer en Méditerranée dont l’accès était gardé par les « tortues » de Maxime-Jean :
« S’inspirant, en la rendant pratique, de l’idée qu’a eue, il y a vingt-cinq ans, l’amiral russe Popoff, il avait demandé aux ingénieurs américains de lui construire d’immenses bâtiments entièrement ronds, d’un diamètre de quatre cents mètres environ, pouvant contenir dans leurs flancs une garnison considérable, couverts d’un toit en acier d’une épaisseur prodigieuse et bâti en dos de tortue, de façon à ce que les obus ennemis ne fissent que ricocher sur cette glissante carapace. »
Douées d’une force de frappe prodigieuse, appuyant le reste de la flotte polane, les tortues s’opposèrent avec efficacité aux nouvelles armes anglaises, navires en forme d’obus destinés à accrocher l’ennemi, bateaux-volcans en forme de cigares. Rien ne put venir à bout de l’arme secrète de l’aventurier :
« Jamais on ne vit pareille fureur dans l’attaque, ni semblable vigueur dans la défense. Chacune des tortues s’entourait à chaque minute d’un cercle de feu et vomissait d’épouvantables projectiles. »
Finalement, le reste de la flotte anglaise dut se replier dans un port espagnol. En Angleterre la fureur redoubla. Partout, de par le monde, l’on rappela les unités anglaises et sur terre les réservistes. La bataille maritime dite des Trois-Jours allait décider du sort de l’Angleterre. A nouveau devant Gibraltar, se rencontrèrent les deux formidables armadas :
« Des béliers furent lancés contre les cuirassés du roi des Iles et allèrent les ébranler dans les profondeurs de leur carènes, pendant que les obusiers envoyaient en l’air de formidables poids. »
La réponse ne se fera pas attendre :
« Presque au même instant, une espèce de radeau qui n’avait l’air de rien, et qui sortait aussi des flancs du Vésuve, s’avançant entre les deux flottes se dirigea vers l’endroit où se tenaient les torpilleurs et les petits navires de guerre. (…) Les Anglais tirèrent dessus avec rage, mais l’autre avançait toujours. Il aborda par tribord un cuirassé de station, et l’on vit, tout à coup, de grands bras de fer se dresser en l’air automatiquement et s’abattre sur le bâtiment qui fit de vains efforts pour se soustraire à cet embrassement terrible ; puis on entendit une explosion, un déchirement effroyable, et tout s’effondra pour disparaître, brûlot et cuirassé, dans la mer. »
La bataille devint décisive à la fin des trois jours, par l’héroïque sacrifice de Pontins et l’admirable percée de William Smith, qui, séance tenante, devint Duc de Gibraltar.
A cette catastrophe répondit la chute du ministère Gladstone. Toutes les îles de la Méditerranée tombèrent dans l’escarcelle de Maximilien-Jean, la géopolitique de la région fut bouleversée, ainsi qu’en Asie, où les place-fortes anglaises furent réduites les unes après les autres :
« Dans la mer des Indes, et au même moment, Lamanon, comme contre-amiral, Joshua Klett et Prytz comme généraux d’armée, attaquaient successivement les Philippines, les Célèbes, les Moluques, Bornéo, Sumatra, Java, la Nouvelle Guinée, et parvenaient à installer partout des garnisons composées d’Indous et de Malgaches, de Malabars et de Malais. »
Alors que le roi des îles réclamait son dû, soit la main de Lady Héléna, l’Angleterre joua sa dernière carte en fomentant des sabotages sur les navires de l’Empereur, allant jusqu’à la tentative d’assassinat sur sa personne même, tentative qui échoua. L’idylle, rendue enfin publique, divisa les Anglais. Les uns, accusant Lord Killyett de haute trahison voulurent le forcer à céder, les autres - en majorité des femmes - trouvèrent une telle situation si romantique :
« Il n’est donc pas étonnant que le cœur ratatiné de toutes les vieilles misses dont la fatale destinée est d’être vouées au célibat se soit agité, sous la cendre, en faveur de ce galant marin qui bouleversait l’univers entier et ruinait totalement un peuple puissant, par l’unique raison qu’il était amoureux d’une héritière. »
Lady Héléna, elle aussi se montra sensible à l’appel du Napoléon des mers. Une rencontre fortuite à Paris entre les deux tourtereaux décida Maximilien-Jean d’envahir l’Angleterre afin que son mariage soit béni par l’Archevêque de Dublin. L’Irlande investie – et qui ne demandait qu’à l’être, les navires du roi des Iles acheminèrent en divers endroits de la côte anglaise les vagues d’invasion qui toutes devaient converger vers Londres. Bousculant les ultimes lignes de défense mises en place dans la hâte, cheminant avec rapidité, les armées de Maximilien-Jean réalisèrent sa promesse, scellant le sort de l’Angleterre pour les années à venir à cause de l’obstination d’un vieil homme cacochyme.
Ouvrage original, d’une écriture passionnée et frémissante, rempli de fureur et de bruit, « les Malheurs de John Bull » est l’un des meilleurs romans anti-anglais de l’époque. Dans un post-sciptum l’auteur explique son animosité envers la «perfide Albion » qu’il accuse de mépriser les autres nations. Prenant une revanche fantasmée sur la réalité historique où fut vaincu le véritable Napoléon, Camille Debans invente aussi des engins extraordinaires – proches de ceux de Robida - qui assureront le succès de son héros. Un récit qui mériterait d’être réimprimé.
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La nature même des Anglais purs produits du sol et de la géographie les conduisit à leur perte :
« La création de l’île d’Angleterre fut décidée par le Créateur pour séparer les Anglais des autres nations.»
Isolationnistes et colonialistes à la fois, « ils construisirent des navires cuirassés et inventèrent les canons Amstrong à longue portée. » En 1890 leur puissance est à son maximum, ayant colonisé le monde entier, ils avaient mis sous tutelle le Canal de Suez, apporté leur aide à la Chine grâce à une consommation forcée de l’opium, envahi l’Afrique et l’Océanie avec deux inconvénients majeurs, le premier étant que
« par suite de cet amour invétéré de la race pour la navigation, peu à peu, les extrémités inférieures des dames anglaises s’allongèrent jusqu’à prendre des formes et des proportions de petites chaloupes » , et le deuxième que
« le seul inconvénient était de mettre la nation anglaise sur les dents. Il n’y avait presque plus d’Anglais en Angleterre.»
Quatre colonisés, ayant fait leurs armes sous de faux noms en Angleterre, jurèrent sa perte totale. Ils y avait : Nana-Sahib, Maadi l’Evanqui, Arabi l’Egyptien, Cettywayo le Zulu et ils se servirent pour cela de la faiblesse de Gladstone qui avait confié la garde du pays à des troupes étrangères douteuses. Tout commença par le massacre de Portsmouth où sautèrent des cuirassés, suivi par des attentats au Caire, à Calcutta, au Cap et de l’insurrection des populations du Congo. Lorsque des vaisseaux ennemis apparurent dans le port de Douvres, Gladstone fit appel aux réservistes. Ils ne purent cependant contenir la révolte des troupes coloniales basées sur le territoire anglais.
A Portsmouth, en accord avec les Asiatiques, fut organisée l’armée d’invasion devant remonter jusqu’à Londres. Les voies ferrées furent occupées. De Guildford partirent des hordes de cavaliers afghans résolus à se venger. Avec les débarquement des 10 000 Egyptiens qui laissent Douvres en feu derrière eux, les navires cuirassés d’Arabi remontèrent la Tamise en bombardant les avant-postes anglais.Attaqués de partout, les Anglais seront aussi traqués dans leurs colonies :
« Des myriades de petits torpilleurs sortis des ports de l’Amérique et montés par des Irlandais ou des coolies chinois harcelaient ses grands navires cuirassés. »
Lourds et lents en face de leurs rapides ennemis, les navires de guerre anglais sautent les uns après les autres tandis qu’est attaquée la station navale de Gibraltar. Avec des armes nouvelles, des « obus à dynamite perforants », le canal de Suez fut rendu libre à la navigation et le rocher de Gibraltar rasé.
L’inde entière se soulève, réduisant les poches de résistance anglaise et nomme un gouvernement autonome. En Afrique, Maadi libère la région des Grands lacs. Au cap, l’attaque par les Boers et les Hottentots coïncide avec la bataille de Wimbleton et la prise de Londres. La capitale anglaise doit faire face à l’armée de Nana-Sahib, des troupes montées sur dromadaires croisant à l’arrière des lignes, grâce à leur parfaite connaissance du terrain et au brouillard. Les cipayes, appuyés par les cuirassés de la Tamise, pénètrent dans le parc de Richmond. Les Zulus montent à l’assaut, aidés par les Néo-Zélandais, tandis que l’armée anglaise se trouve scindée en deux par l’action savante des radjpoutes. Avec la destruction du Palais de Cristal, dès midi, tout est perdu. Sydenham est prise, ce qui sonne la retraite dans les faubourgs londoniens. Les ponts sautent un à un ainsi que des quartiers de maisons.
Alors qu’une furieuse attaque se déroule sur le pont de Westminster, des batteries sont mises en place dans Oxford et Regent Street. Dans la Chambre des Lords dont les barricades ont cédées, attaquée conjointement par les africo-océano-asiatiques, se déroulent des scènes d’une grande atrocité :« Le mobilier parlementaire, les bancs, les tables formèrent un immense brasier devant lequel on fit cuire les lords les plus dodus. Telle fut la fin du coupable mais infortuné Gladstone. »
Lorsque les Asiatiques bombardent la cité, trouant Saint-Paul et la Mansion-House avec des obus à la dynamite, à six heures du soir, lorsque tout Londres flambe, la puissance anglaise a vécue. Cela devait sonner comme un avertissement pour la vieille Europe. La force des Asiatiques et des Africains sera sans faille puisque la science européenne est passée en eux.L’Angleterre, avec Londres réorganisée aux mains du Lord-Maire Cettywayo, deviendra la première colonie africo-asiatique :« Tout indique hélas ! qu’avant peu nous aurons à défendre le sol européen contre les hordes sorties des flancs féconds de la vieille mère Asie.» Enfin, le sort de S.M. la reine Victoria fut semblable à celui de Napoléon. Assiégée à Windsor, elle fut transférée à Jersey avec le musée Tussaud, la dernière terre anglaise du globe.
Une vision hallucinée, une charge féroce et des prémonitions étonnantes, rendent ce court texte de Robida exemplaire de la haine qu’inspira l’Angleterre à la France au début du XXème siècle.
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La Fin Du Monde (Mouton) - Par BenF
Eugène Mouton, dans une nouvelle qui tient beaucoup de la dissertation, explique comment, d’après lui, se produira la fin du monde. La surproduction, la surconsommation, la surindustrialisation, le développement urbain, l’exploitation forcenée de la houille fossile et la déforestation produisent par accumulations successives, fermentation, distillation et un excès de chaleur qui seront à l’origine de la combustion spontanée de la Terre.
D’abord les océans déborderont, qui noieront l’Europe, l’Afrique et l’Amérique avec leurs humanités. Puis, l’élevage intensif du bétail sur les terres restantes sera à l’origine d’une couche de détritus organique grandissante qui fermentera de plus en plus. La température ambiante ne cessera d’augmenter. L’eau disparaîtra, les océans s’assécheront. Les derniers ressortissants de l’espèce humaine, en une danse macabre, tomberont en morceaux : la terre sera morte.
Quelques pages de pure ironie, un condensé conjectural qui ne manque ni de charme ni de…chaleur ! Amusant pronostic, avec, de-ci de-là, des intuitions géniales quant à l’avenir de notre pauvre planète.
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En Plein Soleil - Par BenF
1883 à San Fransisco. A l’occasion de l’arrivée d’une comète dans le système solaire, le docteur Akwright et le narrateur discutent de l’influence des astres vagabonds surtout lorsqu’ils passent trop près du soleil. D’après le docteur, l’apport de masse généré par la comète pourrait avoir des conséquences dramatiques sur l’échauffement du soleil et, par conséquent, sur la température terrestre :
« La lumière et la chaleur de notre astre seraient multipliées par cent, voire par mille, selon la nature de la collision. On peut imaginer une combustion si intense qu’elle évaporerait tous nos océans, en moins d’une minute, ou même volatiliserait la matière solide de notre planète en moins de temps que cela, comme une goutte de mercure dans une chambre à air chaud. »
Cette conversation n’est pas innocente. Le Dr. Akwright, étant allé contrôler un ballon destiné à une ascension imminente dans les jardins de Woodward, aperçoit, de retour chez lui, une lueur immense et générale dans le ciel nocturne, identique à une aurore boréale. Les deux amis évoquent toutes les causes possibles de l’éclairement : un gigantesque incendie au Canada ou des villes ravagées par le feu. Mais la conclusion , beaucoup plus tragique, s’impose d’elle-même : c’est le soleil lui-même qui est cause de l’arc lumineux gigantesque, un signe avant-coureur de ce qui attend le continent américain dès le lever du jour. Vraisemblablement, les sinistres hypothèses liées à la comète se sont réalisées : la visiteuse a été absorbée par le soleil, dont elle a élevé la température, ce qui menace la terre. Des télégrammes de presse, en provenance du monde entier, corroborent les faits. Partout la chaleur progresse, partout des incendies font rage, partout les morts se comptent déjà par milliers :
« LONDRES, 7h 45. Depuis cinq minutes, la chaleur du soleil est devenue intolérable. Les activités ont cessé. Des gens tombent raides morts dans la rue. Le thermomètre est passé de 11 à 45 degrés centigrades. La température monte encore. Un message de l’observatoire de Greenwich annonce… - La dépêche s’arrête brusquement à cet endroit, précisa le rédacteur. Et l’opérateur de New-York ajoute : - Message coupé. Rien de plus par le câble. Alerte extrême partout… »
Akwright suppose que personne ne réchappera à l’enfer déclenchée par l’irruption de l’aube, lorsque le soleil frappera la terre en direct. Il suggère la seule possibilité pour lui et son ami, soit de prendre le ballon ascensionnel pour s’élever dans la haute atmosphère moins conductrice de chaleur et y survivre, peut-être.
A la fin de la nuit, en ville, l’effroi est à son comble. Des milliers de gens ont quitté leur domicile , des alertes au feu éclatent partout, des magasins sont pillés, des gens sont rudoyés ou prient à même le trottoir. La température montant rapidement, les deux amis gagnent l’ère de lancement, lâchent les amarres et grimpent dans le ciel. Ils savent que leur vie ne tient qu’à un fil mais désirent, avant de mourir, satisfaire leur curiosité.
Ils aperçoivent la cité, totalement paralysée. Quand l’aube commence à flamboyer violemment, la chaleur progresse encore, même dans les hauteurs. Transpirant abondamment, ils aperçoivent de petites silhouettes :
« trapues et noiraudes, remuer, tomber, et rester étendues dans les rues. En bas du front de mer, les quais étaient constellés de corps nus ou quasi-nus, qui baignaient dans l’eau et restaient immergés, à l’exception de la tête, quoique celle-ci disparût sous la surface par de brefs intervalles. Des milliers de personnes occupaient ainsi cette position. Le spectacle aurait atteint le comble de l’absurde et du grotesque s’il n’avait pas été aussi terrible par son caractère lugubrement suggestif. »
A sept heures du matin, la chaleur insoutenable les oblige à jeter du lest. Ils entrent dans une brume de chaleur épaisse due à l’évaporation des plans d’eau, ce qui les isole du monde. Akwright sait que ce n’est qu’un sursis, car la tranquillité n’est qu’apparente. Bientôt de gigantesques masses d’air se mettront en mouvement, les précipitant à terre. Personne sur terre ne réchappera à cette catastrophe généralisée.
L’air chaud commence à se mouvoir et une terrible bourrasque déséquilibre brusquement le ballon. Au deuxième coup de boutoir, Akwright passe par-dessus bord, le ballon étant violemment entraîné vers le bas, hors de la brume. Le narrateur eut encore le privilège d’observer les effets de la catastrophe avant de mourir lui aussi :
« Par les trouées mouvantes des nuages de vapeur qui obscurcissaient la scène, j’entrevis un spectacle qui m’emplit d’une indicible et indescriptible horreur. A l’ancien emplacement de la ville, on ne pouvait plus discerner ni rues ni immeubles. L’œil n’avait plus rien sur quoi s’attarder, si ce n’était des tas informes et irréguliers de scories vitrifiées et de cendres calcinées. Tout apparaissait, dans un mortel silence, aussi ravagé que la surface de la lune.(…) Ca et là, une lueur rouge sombre, d’aspect menaçant, prouvait que la lave en laquelle la ville avait été transformée était encore incandescente.. A l’Ouest, les dunes de sable brillaient comme des glaciers ou des miroirs ternis à travers les déchirures de la vapeur, et de longues masses informes – apparemment constituées de bois calciné - parsemaient la surface de la baie. »
Une nouvelle méconnue que Marc Madouraud a eu raison d’exhumer. L’assise scientifique solide et rigoureuse souligne de manière permanente l’horreur d’une situation vécue au sein d’une catastrophe VRAIMENT universelle. Un beau texte se positionnant en plein dans notre thématique.
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Après une courte introduction sur la nature des comètes, rocheuses ou gazeuses, et sur leur périodicité ainsi que leur influence sur les sociétés, l’auteur annonce qu’une comète viendra dans la banlieue solaire en 1904 (le roman a été écrit en 1882).
Découvert par l’astronome Cométard de l’observatoire de Paris, l’astre annoncé jette le trouble dans la population, provoquant la création de la « Commission Internationale de Berne » dans laquelle siègeront entre autres, des astronomes, (Cométard, Cosmognaute, Orbitson), des mathématiciens (Cosinus), des météorologistes (Ventadouros et Ouragnos) :
« Mais que sont toutes ces commissions auprès de celle qui fut proposée par l’honorable conseiller de Schaffhouse, qui possédera pendant un temps donné le pouvoir absolu de toute la terre ! Berne, centre du monde pendant un mois ! Administration de savants universels ! Quel beau rêve pour un centralisateur ! Cantons où êtes –vous ? Le vieil ours de Berne debout sur le planisphère, un drapeau à la main, et sur le drapeau encore des ours en sautoir ! Quelle gloire, quel bonheur ! »
Avec un clin d’œil particulier de l’auteur envers un écrivain de grande stature , il complète le groupe d’étude :
« Sur la proposition du président Cosmognaute , acclamée par tous ses collègues, le poste de secrétaire en chef fut proposé à M. Jules Verne, écrivain scientifique célèbre de Paris. Malgré son grand âge, cet illustre propagateur de la science voulut bien accepter ces importantes fonctions, pour lesquelles il était si bien qualifié. Aucun savant peut-être ne connaissait sa planète aussi bien que lui, extérieurement et même intérieurement ! »
Les travaux confirment la nature entièrement gazeuse de cette comète , ce qui constitue un très grand danger pour la Terre:
« les raies caractéristiques de l’hydrogène et du carbone sont parfaitement déterminées, aucun doute n’est possible ! (…) La comète est un gros volume d’hydrogène carbonné qui va fondre sur la Terre ! Malheureux habitants ! »
les calculs feront apparaître une conjonction de l’astre vagabond avec notre globe. Dans un délai d’un mois, la terre sera totalement immergée dans une masse de gaz hautement toxique :
« A partir de 2000 mètres de hauteur, les deux gaz seront mélangés sur une épaisseur qui atteindra 40 kilomètres ; cela donne, pour le grisou, le chiffre : Dix-sept milliards de kilomètres cubes, en chiffre rond !
Voilà l’ennemi qui menace la terre ! L’épaisseur de la couche d’air pur sera égale dans tout l’hémisphère boréal, mais elle ira en augmentant à partir de l’équateur ves le pôle sud, où elle atteindra une épaisseur de 10 kilomètres pendant le moment d’équilibre. Le point exact où aura lieu le maximum d’épaisseur ne sera pas exactement le pôle sud, mais un point du cercle polaire antarctique, situé au midi de la Nouvelle-Zélande. En résumé, notre atmosphère prendra la forme d’un œuf dans lequel le jaune central se trouverait très près du petit bout. La comète a un diamètre quatre fois supérieur à celui de la terre, son volume est donc soixante-quatre fois plus grand. C’est un astre très gros ! Le temps total de l’immersion de la terre dans la masse gazeuse sera de 8 minutes. »
Des décisions devront être prises très vite, après vérification des calculs par le brave Dr. Ox de Hollande (référence à Jules Verne) qui minimise le danger. Pourtant, la comète arrivant par le nord, l’atmosphère terrestre sera violemment refoulée vers l’hémisphère austral en provoquant des vents violents et des raz de marée :
« Les côtes de l’hémisphère austral seront inondées au flux, celles du boréal au reflux de l’énorme marée. L’eau se précipitera dans toutes les vallées des fleuves qui arrivent à la mer et remontera leurs barres à plusieurs lieues en amont, en dévastant tout sur leur passage. Plus d’une plaine basse, quoique située au milieu des terres, sera transformée en mer intérieure. »
Au-dessus de 2000 mètres, la couche d’air sera comprimée selon un facteur trois, puis le mélange détonnant d’hydrogène carboné et d’oxygène terrestre se mettra en place durant huit minutes, jusqu’au départ de la comète hors de l’orbite terrestre. Durant ces huit minutes, la Terre se trouvera en danger de mort, menacée d’exploser à la moindre étincelle.
La Commission de Berne, au-delà des motions de sauvegarde telles que l’interdiction de toute spéculation en bourse à ce moment-là, énonce les dispositions à prendre par le monde entier, d’interdire toute flamme artificielle et de prévenir toute mise à feu naturelle durant cette très courte période de temps, se réservant de s’inquiéter du cas des orages, le volcanisme naturel n’étant même pas envisagé. Réguler les réactions humaines pourrait s’avérer plus délicat:
« A quelles extrémités vont se porter ces humains ?… C’est à faire frémir ! Spectroskof lui-même devint tout pâle en y pensant !
Pianetti disait avec son accent italien :
-Maladetta, sers camarades, si nous trouvons des zazérolithes dans la cométa, nous pouvons plier bagaze presto ; fera pas beau sur la terre, les derniers zours, les hommes y deviendront fous !
-Qu’ils deviennent fous, ajoutait Spectroscof, qui parlait fort bien le français, comme tous les Russes, cela nous serait assez égal, ils le sont déjà beaucoup, mais ils deviendraient enragés, et comme il leur faudra nécessairement des victimes, nous serons les premiers pris. La comète étant un astre et nous des astronomes, c’est à nous la faute, si elle menace la terre, car tout astre est de notre ressort ! (…) Ce raisonnement des savants était logique. Dans toutes les calamités publiques, l’humanité cherche à décharger sa colère sur quelque victime. Autrefois les Juifs étaient des souffre-douleur universels dans les cas d’épidémie et de disette d’argent. Comme il n’est guère possible de les rendre responsables des futurs méfaits de la comète, ce seront les malheureux astronomes qui paieront la carte ! »
Pour éviter les forts coups de vent, ils conseillent aux individus de se coucher ou de de réfugier sous terre, selon leurs possibilités. Les côtes devront aussi être désertées pour les hauteurs avoisinantes. Les icebergs, détachés de la banquise polaire, constituant un grave danger pour la circulation maritime, la navigation devra impérativement cesser. Enfin, pour éviter la foudre , l’on utilisera l’invention du professeur Ventadouros, le « paragrêle », une tige, qui envoyée dans les nuages à l’aide des ballons réquisitionnés à l’armée, empêchera les éclairs de se former. La plus importante des mesures sera l’interdiction formelle de fumer, de faire sa cuisine au feu, de se chauffer, et de continuer la fabrication des arsenaux militaires, en un mot de rendre inerte tout ce qui serait susceptible de faire éclater le grisou atmosphérique.
En Russie, un groupe de nihilistes, réunis dans un bar d’apparence honnête autour de demoiselle Katarina (alias l’affreuse anarchiste Dynamita) et d’Astrolovitz, un jeune savant de l’observatoire de Moscou, autre membre anarchiste influent, ne l’entendent pas de cette oreille. Ils voient dans l’arrivée de la comète une occasion unique et définitive de régler le problème de la lutte des classes. L’action votée et approuvée par les membres du comité prévoit la montée en ballon de Dynamita et d’Astrolovitz au-dessus de 2000 mètres pour enflammer l’atmosphère terrestre à l’aide d’une bombe au pétrole.
A moins de douze jours de l’échéance fatale, la tension extraordinaire n’empêchera pourtant pas certains citoyens d’utiliser le danger à leur profit :
« Plusieurs magasins, toujours à la poursuite de nouvelles réclames, ont pris pour enseigne : A la fin du monde, prix de faveur !
L’un d’eux annonce qu’à l’occasion des derniers jours de l’existence terrestre, il vendra à 30% de rabais des articles indispensables à posséder pendant le mauvais moment. C’étaient des sortes de cache-nez, avec régulateurs de pression, permettant de respirer sous une pression quelconque, aussi ajoutait-il dessous : Appareil recommandé par la commission internationale de Berne.
Un autre a pris pour enseigne : A la comète ! »
De même, toutes les inventions modernes, téléphone, microphones, phonographes, bateaux qui se modifient en sous-marin en cas de mauvais temps, et surtout dirigeables, seront mis en usage pour observer la situation et prémunir les populations de la catastrophe.
Les nihilistes, dans un désir de vengeance, ont encore pris la décision de prévenir la population moscovite de sa mort prochaine, deux heures avant l’explosion, grâce à un invention étonnante, une affiche dont le texte initial se transforme au bout d’un laps de temps, révélant un second texte d’une toute autre nature, à l’aide d’un système d’encre temporisateur.
Le ballon d’Astrolovitz est paré, la bombe en place. Sous le prétexte d’observer l’évolution du gaz à 2000 mètres d’altitude, le couple d’anarchistes s’élève dans les airs pendant que, partout à Moscou, est affichée la déclaration suivante :
« Peuple russe !
Le comité révolutionnaire, estimant qu’il vaut mieux pour toi disparaître que continuer à vivre dans la servitude, a, dans sa séance du 12 septembre 1904, décrété la fin du monde, utilisant à cet effet le grisou qui entourera la terre pendant le passage de la comète, aujourd’hui, 22 septembre, à 2 heures et quart du jour ! Le frère Pavel Astrolovitz, adjoint supérieur à l’observatoire de Moscou, a été chargé de l’exécution de la sentence, aidé par Dynamita Fougassief. Tel est le motif de leur départ en ballon, auquel tu viens d’assister.
A 2 heures et quart (longitude de Moscou) la terre sera pulvérisée de nos mains et tes chaînes tomberont pour toujours.
Sois-nous reconnaissant !
Le Conseil Supérieur. »
Dans la panique effrénée qui s’ensuit, le général Bombardicoff avec son aide de camp Obusine, tente la manœuvre de la dernière chance en poursuivant les deux criminels. Vieil officier blanchi sous le harnais, fin aérostatier, au bout d’une longue course-poursuite, il pourra s’approcher de si près des anarchistes qu’il n’a plus qu’à les abattre d’un coup de sabre. Mais en ce jour radieux d’un 22 septembre 1904, la comète aborde la terre. Soudain l’arrivée subit du gaz comprimé provoque des oscillations de la nacelle qui éloignent derechef Bombardicoff des assassins. Dépité, outré, galvanisé, celui-ci ne voit plus qu’un seul moyen d’en venir à bout : les abattre à coups de canon ! Ce qu’il fit, faisant du même coup sauter la terre :
« Prompt comme la foudre, sans que le major qui s’élance puisse l’arrêter, il (= Bombardicoff) saisit son sabre par la lame et frappe d’un geste désespéré sur l’amorce du canon…….. qui part !!!
….…………..
Un seul cri, perçant, instantané, atroce, celui de dix-huit cent millions de créatures humaines s’éleva dans l’espace et tout fut fini !
La terre avait vécu !!!!
……………..
La force cosmique qui retenait les molécules attachées les unes aux autres n’a pu résister à l’explosion des dix-sept milliards (17,000,000, 0000) de kilomètres cubes de grisou !
…………
la science avait sauvé la terre.
La méchanceté humaine développée par l’oppression la condamna.
Le sabre, toujours digne représentant des plus grandes calamités de notre globe, lui donna le coup fatal.
Chacun est bien resté dans son rôle jusqu’à la fin !!….. »
Aujourd’hui encore les autres astres du système solaire peuvent contempler la magnifique masse gazeuse augmentée du poids de tous les atomes terrestres, qui orbite autour du soleil à la place de la terre.
Ce roman, précurseur des récits de comètes et rempli des idéaux et préjugés de son époque. L’ironie appuyée, l’humour constant, cache à peine la haine de l’auteur envers les mouvements révolutionnaires, responsables directement de la destruction du monde. Hormis quelques longueurs où il passe en revue –comme dans tout bon roman scientifique du siècle- les progrès des sciences, l’intrigue avance lestement rendant la course-poursuite finale digne d’un film d’aventures. L’ambiance du texte est proche de celle dégagée par une série de cartes postales humoristiques, éditées en 1910 pour saluer l’approche de la comète de Halley. Cet ouvrage, cité par Versins, est de toute rareté et représente vraisemblablement avec « Olga Romanoff » de Griffith (non traduit) l’une des premières tentatives (avant celle de Flammarion) de se représenter « scientifiquement » les conséquences d’une conjonction cométaires avec la terre aboutissant à sa totale destruction.
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Cet ouvrage est mentionné uniquement pour son titre et sa rareté. Les seuls éléments en rapport avec notre thème sont représentés par des glaces polaires descendues jusqu’à l’équateur sur une terre à son déclin, appelée Hyranie. Pour le reste, l’ensemble du récit représente une charge féroce des mœurs politiques corrompus d’Hyranie – en fait ceux de la Troisième République - et qui n’ont rien perdu de leur force de contestation encore aujourd’hui.
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Une première lettre envoyée par l’Amiral Quesitor au Ministère de la Marine relate la découverte de Paris. Partie de Nouméa, l’expédition archéologique jeta l’ancre de ces trois vaisseaux dans une baie immense et sûre, à proximité des ruines de Paris, prouvant déjà la montée des eaux qui avaient englouti ces côtes primitives. Ils furent accueillis par les autochtones, curieux, sympathiques, fiers de leur cité, mais barbares et attachés à leur sol, doués d’un intérêt viscéral envers la politique :
« Il y a d’ailleurs bien d’autres difficultés à résoudre pour organiser le pouvoir chez une peuplade où tout le monde brûle de commander, et où personne ne consent à obéir. Les plus modestes rêvent une fonction publique, qui leur livre au moins quelques subalternes à gouverner ; mais tous, même les plus misérables et les plus ignorants, se croient parfaitement aptes à régir la tribu, parlent à tort et à travers des affaires de la cité, émettent des idées, des théories, des principes aussi insensés que disparates, et ne les voyant pas adoptés, se sentent envahis par un impérieux désir de révolte. »
D’après Quesitor, ce sont les descendants des Français d’antan. Accompagnés par les naturels, il se rend au sommet d’une petite colline pour avoir une vision complète de la cité antique :
« C’était bien Paris, nul de nous n’en douta, ces ruines grandioses étaient bien le tombeau de la reine du vieux monde. Sa tête orgueilleuse plane encore au-dessus de ces espaces désolés.
Dans une vallée, dont nos yeux pouvaient à peine embrasser l’étendue, se dressaient pêle-mêle des dômes, des colonnes, des portiques, des flèches élancées, des combles immenses, des frontons, des statues, des chapiteaux, des entablements, des crêtes, des corniches ; et à notre gauche nous voyions se profiler, fier et hardi sur le ciel noir, le couronnement de l’arc triomphal élevé par un des derniers Poléons de la France à la gloire de ses armées. »
Le déblaiement des ruines aussitôt commencé avec de grands moyens amena son lot de découvertes et de fausses interprétations, les restes de la flore et de la faune prouvant que l’endroit était jadis fortement habité. Des statues furent mises à jour comme celle du Laocoon, et les hardis explorateurs s’attachèrent à relever l’arc de Triomphe au bout de « l’Avenue des Chefs Illustres » » (les Champs Elysées). La découverte de l’obélisque entièrement engravée d’une écriture inconnue les plongea dans la perplexité. La lettre de Quesitor provoque la constitution d’une séance de «l’institut de Calédonie ». L’enthousiasme sera immense et la discussion acharnée autour de la nature d’une statue féminine découverte, appelée "la République". La conclusion de l’Institut fut sans appel. Il s’agissait « d’une Minerve qui a été fondue dans la ville d’Orléans sous le gouvernement de la Reine République ».
On attribua aussi la médaille d’honneur aux hardis navigateurs. Pendant ce temps, à Paris, la curiosité des indigènes se fait de plus en plus vive à l’égard des étrangers dont ils ont assimilé les principes politiques et les institutions :
« Nos institutions politiques leur sont aujourd’hui connues dans leurs moindres détails, et ils les critiquent tout haut. Chose étrange, dès qu’ils abordent ce sujet, la passion les emporte et la raison semble les abandonner.Ces barbares, absolument étrangers, il y a quelques mois, à notre organisation sociale, sur ce point encore nous proposeraient volontiers des perfectionnements ; ils ont déjà à nous offrir deux ou trois systèmes complets, plus insensés les uns que les autres, et qui renversent toutes les idées reçues en matière d’impôts, d’instruction publique, de religion, de franchises municipales, etc…, etc…. Ils seraient enfin charmés de nous voir adopter le principe fondamental de leur gouvernement, qui consiste à changer de chef le plus souvent possible. »
Pourtant les fouilles continuent, livrant d’abondants trésors comme cette magnifique Vénus sans bras qui fut attribuée au sculpteur du XVIème siècle, « Karpeau », ou la Mairie du Louvre qui fut reconnue comme un bâtiment dédié à « la Sainte Marie du Louvre ». L’exhumation de deux fioles et d’un bouchon prouvèrent que les Français de l’époque participaient grandement à des libations, surtout à l’époque de la dynastie des « Poléons » dont une médaille votive prouva sans contestation possible le règne.
La dernière lettre de Quesitor sera alarmante et terrible. Il dit que ses marins se sont mutinés en faisant cause commune avec les natifs, fraternisant dans leur idéal de liberté. Les mutins le convainquirent aussi de se joindre à eux sans qu’il ne perde rien de ses titres ou prérogatives. L’amour de la politique chez les barbares avait contaminé les explorateurs:
« Ma dépêche d’hier a été interrompue par la visite de notre nouveau chef. Il venait me développer les idées politiques qui serviront d’assises à son gouvernement, et m’exposer les réformes sociales qu’il médite. Quelques-unes m’ont paru, en réalité, fort sensées, fort urgentes même ; car, à bien des égards, les bases sur lesquelles repose la société moderne sont barbares, injustes et heureusement vermoulues. Je n’ai donc pas cru devoir lui refuser mon concours et l’appui de ma longue expérience .D’ailleurs, à moins de regagner Nouméa à la nage, force m’est bien de demeurer ici, puisque tous mes marins m’ont abandonné et que l’on a confisqué ma flotte. »
« les Ruines de Paris en 4875 » forment une courte nouvelle par lettres , une étude fine et ironique de la difficulté à établir la vérité historique et une critique des moeurs politiques du régime impérial en un style d’une grande virtuosité.
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