Bienvenue dans la Base de Données des livres !
Vous y trouverez des ouvrages post-apo que la communauté souhaite partager. Il vous est possible de rajouter des fiches de livres, alors partagez vos trouvailles avec la communauté FoGen ! Une grande partie des ouvrages que vous trouverez sont ici grâce au travail de Jacques Haesslé sur son site : http://destination-armageddon.fr/index.html. Un grand merci à lui pour son travail exceptionnel !
Livres
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L'avant-Dernier Homme - Par BenF
Jéroboam Papoux traverse une société à l’agonie. Autour de lui, les gens meurent, sans raison. La maladie mortelle, foudroyante et non douloureuse, sans signes révélateurs, terrasse progressivement le monde entier, sauf lui, Jéroboam Papoux, fonctionnaire au ministère des Ressources langagières, qui constate les faits, sans pouvoir les expliquer:
« Puisque tout le monde mourait, pourquoi pas lui, mais il devait constater que tout son entourage familial, professionnel, amical était mort depuis belle lurette quand lui demeurait en vie, sans souci majeur, avec juste une petite angoisse bien naturelle, quand il avait trouvé sa femme froide un matin à son réveil, son aîné mort à l’école, la benjamine et la cadette frappées à cinq minutes d’intervalle devant la télévision, laquelle ne marchait plus, faute de personnel et parce qu’il était déprimant, voire même un peu lassant de contempler les gens mourir en direct sur le petit écran. »
Cette maladie, la « morticose » ne le dérange pas plus que cela. Se déplaçant à l’aise dans une France de plus en plus vide, Papoux s’organise « une vie pépère de retraité de l’existence » mais il ne sait pas encore qu’il était le dernier humain sur terre. Et pour cause : la morticose est de son fait, c’est lui qui, par cercles concentriques, avait contaminé son entourage, de par sa seule qualité relationnelle. Le dernier homme sur terre, c’est vite dit. N’était-il pas plutôt «l’avant-dernier » ou même «l’avant-avant-dernier » car le texte qui le dépeint – écrit par qui et pour qui ?- ne suppose-t-il pas au moins deux autres survivants ? Une petite nouvelle sans prétention qui s’amuse avec les conventions du thème.
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L'autre! La Derniere! - Par BenF
André, le narrateur, nous convie à une visite programmée de l’enfer. Agriculteur en 1933, jeune homme amoureux d’Alberte sa femme, amoureux de la vie, pacifiste convaincu, probablement anarchiste, il est invité à participer à la grande boucherie anticipée de 1940. Elle s’accomplira, comme en 14-18, au fond des tranchées et sur un champ de bataille transformé en charnier. On y généralisera également l’usage des gaz et celui des armes bactériologiques.
La guerre future sera « vécue » de l’intérieur, décrite au jour le jour sur le mode intimiste, analysée et expliquée à l’usage de ceux qui ont la chance d’en être éloignée. Les amis qu’André se fait au front ne le restent pas longtemps. La mort fauchera les Max, les Antonin, les Cassou, les Gaulo, les Tellier. Ils mourront tous gazés, empoisonnés, brûlés, réduits en charpie, volatilisés, déchiquetés en une bouillie sanglante. Lui-même, à la fin de l’holocauste, en 1942, amputé d’une jambe, la « gueule cassée », tordu et en butte aux mépris des « planqués» ne survivra pas longtemps à l’ignominie et à la trahison de sa femme : il se suicidera d’une balle dans la tête.
Mais, au moment de partir pour la ligne de front, il a encore la force de vitupérer les « pousse-au-crime », les individus comme Georget, son ami de collège, et patron de journal, heureux de la situation :
« Ne soyons pas trop pessimistes. Le fait n’est que la conséquence de ce que nous appelons l’esprit français : un coup de fouet qui cingle bien et tout le monde se croit piqué au vif. D’ailleurs… Si la guerre doit arriver nul ne l’empêchera. Pour ma part, je sais, que s’il y en avait une, tu comprends… L’armée a besoin d’imprimeurs. – Toi à l’abri, les autres peuvent se faire tuer. C’est ce que tu veux dire sans doute ?
-Pourquoi pas ? j’espère bien que de ton côté… »
A peine André parti, Alberte en profitera (mais a-t-elle le choix ?) pour le tromper avec cet ignoble individu. S’élevant contre la frénésie populaire qui réclame le sang de l’Allemagne, le narrateur sent qu’il vit ses derniers beaux jours. Un rêve prémonitoire le conforte en cette opinion, rêve où les morts jugent les coupables de la tuerie à venir :
« Le silence se fit à nouveau. – Les coupables maintenant, dit la voix devenue dure. Les rangs se desserraient pour les laisser passer. La horde apparut : c’était quelques centaines d’hommes laids, vils, monstrueux. Une rumeur indescriptible salua leur apparition. Il fut exigé que chacun se confessât et, l’un après l’autre, ceux qui avaient été rois, présidents, ministres, consuls, généraux, tous, comme subjugués, s’accusaient de leurs forfaits.
-J’ai voulu cette guerre !
-J’aurais pu intervenir !
-Moi seul pouvais empêcher le conflit !
-J‘ai sur la conscience trois millions de vies humaines .»
La guerre s’ouvre sur un bombardement aux gaz de la région parisienne :
« Les gaz ! Des cris semblables à des râles s’élèvent. L’infamie de la bousculade commence. Des toux retentissent. Des gestes démesurés animent ce spectacle de fin du monde. On entend un bruit prodigieux d’affaissements et d’essoufflements, un halètement insensé de foule qu’on bâillone. Ensuite c’est la lutte entre ceux qui ont des masques et ceux qui n’en ont pas. »
Au front, dans les tranchées, se poursuit laborieusement une vie de cauchemar :
« Le sol est criblé. L’air est agité par toutes sortes de déflagrations. La terre s’élève en gerbes pâteuses qui retombent avec un bruit sourd qu’on croirait venir du sein de la terre. Au-dessus du vacarme on entend cependant des imprécations. Des cris d’enfer, des clameurs atroces s’élèvent. »
Il partage avec son ami Max, un jeune agrégé, les premières expériences du combat, et la mort. Lorsque Max lui fait signe de venir :
« Je cherche vainement Maréchal qui, d’habitude, même sous sa cagoule se fait reconnaître par ses vertes plaisanteries. –Viens ! fait Max les dents serrés. Ce disant il m’entraîne. Au bout de quelques pas, je heurte quelque chose de mou. –Voilà ! Effectivement Maréchal est mort. Un éclat d’obus lui a déchiré son masque et, par surcroît, brisé la mâchoire. L’action des gaz a été instantanée. La plaie est déjà toute bleue ainsi que le visage. »
La vie dans les tranchées, dans la crasse et la sanie, est ponctuée par des tueries sporadiques, des incursions sur le terrain, lorsqu’ils déboulent à l’arrière des chars, par la haine et la peur qui leur nouent les tripes. L’horreur s’amplifie :
« Un regard de côté me montre Max en fâcheuse posture. Je prends de flanc un de ses assaillants. L’autre glisse. Je lui tranche la gorge. Mes jambes tremblent. Mes tempes battent, horriblement. Je suis malgré tout Max qui court comme un diable. Dans une tranchée trois baïonnettes se dressent. J’hésite un instant en regardant dans les yeux ces hommes qui, eux aussi, me dévisagent. Ce contre temps suffit pour qu’un coup de crosse s’abatte de mon côté. Max est tout rouge. Il a l’air d’un boucher. Le ciel est rouge. La terre est rouge. (…) Mon pied est enfoncé profondément dans une fange sanguinolente. »
Ils ne comprennent pas pour quoi et pour qui ils s’ont amenés à se battre. Les profiteurs de tout acabit, les aggioteurs, la collusion intime entre les politiques et les religieux, coiffés par le grand capital, leur paraissent être les principaux responsables de la tuerie. Le vécu quotidien les rend pareils à des bêtes ou des monstres déshumanisés :
« Le tapis rouge lèche Tellier puis l’environne. Il environne aussi Goguet ! Ils s’agitent dans l’incendie comme les flammes elles-mêmes, remuant au-dessus d’eux des lueurs surnaturelles. Leurs vêtements flambent. Des cris surhumains courent, exténués, vers tous les horizons de la plaine ensanglantée. Plusieurs torches s’agitent encore un instant, puis tout s’abîme dans le feu… Pendant un quart d’heure, de la chair grésille. Soixante hommes au moins viennent de périr brûlés vifs. »
La récurrence des faits de guerre, l’accumulation voulue et naturaliste des détails du meurtre collectif sont destinées à provoquer un malaise croissant chez le lecteur, jusqu’à l’insoutenable. Dans cet univers de feu et de sang, un seul sentiment le fait encore réagir, celui de retrouver le paradis perdu, la vie d’avant, à la campagne, avec sa douce Alberte, et l’amour pour son enfant. Hélas ! lorsqu’il « touche » enfin une permission, c’est pour découvrir qu’Alberte le trompe.
Lui-même se perçoit dorénavant comme une brute. Le beau cadre bucolique accentue l’horreur de sa situation. Il sait, en repartant au front, que la guerre lui a tout enlevé. Les belligérants sont exsangues : l’emploi des gaz de plus en plus toxiques, le carnage répété, rend le silence au champ de bataille :
« Nous allons comme des aveugles en pleine attaque. Tous les éléments sont déchaînés. C’est une furie. Le terrain est si fréquemment remué, les sifflements et les bouleversements tellement orageux que le front a plutôt l’aspect d’une mer gigantesque où se heurteraient d’énormes unités.(…) Quelques fous que les gaz à grande concentration ont atteints courent sur le terrain embrasé. Leurs hurlements dépassent en horreur le spectacle de la bataille elle-même. Ils dépassent les bornes extrêmes de la démence. Toute une compagnie, la semaine dernière, s’est enfuie de la sorte. Deux mitrailleuses en X les ont terrassés en quelques minutes et, lorsque nous les avons ramassés, ils étaient troués comme les perles immenses d’un sinistre collier. »
Par un miracle inespéré, il reste en vie, quoique blessé. Dégagé vers l’arrière en un hôpital militaire, il partage le sort des autres éclopés de la vie, infirmes, amputés de corps et de cœur, épaves que la guerre a éparpillées sur le bord du chemin. La terreur de la réinsertion s’installe en lui et ne le quittera plus jusqu’à sa décision finale d’abréger ses souffrances.
Un ouvrage d’une violence rare, dans la veine des grands romans de Méric (la « Der des der »), à poser au panthéon de la dénonciation de l’horreur guerrière. Là où le Colonel Driant ne voit que drapeaux et faits d ‘héroïsme, Demarty dénonce la bête en l’homme.
Bien que la projection dans le futur d’une guerre proche (celle de 39-45 a connu le « Blitzkrieg » et non la guerre de tranchées), il ne sera pas dit que dans un futur plus lointain il ne puisse avoir raison et que l’on ne retournera pas à une guerre « classique ». Une œuvre prophétique… et oubliée !
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L'autoroute Sauvage - Par BenF
Vol.01. l’Autoroute sauvage, Fleuve noir éd. 1993, coll. "Anticipation (Métal) " N°1925 (1 ère éd. dans la même collection N°742), 1 vol. broché, in-12 ème , 190 pp., couverture illustrée par Florence Magnin. roman d’expression française.
1ère parution:1976
Gérald, jeune solitaire, plutôt doué pour rester en vie, a décidé à gagner le sud du pays en empruntant à pied les restes de l’autoroute A7 en une France post-cataclysmique. Immédiatement, il liquide trois " groupés " qui le visualisent sous la forme d’un bifteck :
" Je me suis retourné pour voir l’arc, et la flèche pointée. J’ai bougé, très vite, en lançant le couteau. La flèche n’a pas fait mouche, mais ma lame, si. Elle s’est enfoncée jusqu’au manche dans le cou de l’archer. Une fronde tournoyait en sifflant. Flexion du buste, jet du deuxième couteau. Une bille d’acier a ronflé pas bien loin de mon crâne. Le frondeur hoquetait, en crachant des bulles de sang. "
En passant, il sauve la vie d’Annie, jeune fille intrépide et décidée dont il tombera malgré lui éperdument amoureux. Elevé par Jo, mort récemment de " la peste bleue ", maladie épidémique responsable de la désertification du pays, Gérald n’a aucun projet précis, sinon celui de rester en vie. Aussi la proposition d’Annie qui souhaite gagner Paris, ne lui convient pas. Ils lieront aussi connaissance avec Thomas, un autre solitaire qui deviendra plus tard leur ami. Mais le jeune couple se fera bêtement surprendre par une bande de fanatiques pseudo-religieux menée par un sadique. Ses agissements avec la petite Rose pousse Gérald à se surpasser. Annie, à l’aide de son arc, aussi efficace que le garçon avec ses couteaux, permettra au couple de s’extirper de leurs griffes.
La jeune fille n’a pas abandonné son idée fixe, se rendre à Paris pour y chercher un dossier donnant les indications d’un remède à la peste bleue. Originaire de l’île de Porquerolles où réside encore sa famille avec une poignée de civilisés, Annie, après son détour urbain, consentira à suivre Gérald en direction du sud. En ronchonnant, le jeune Solitaire se décide enfin à changer de direction :
" Tu sors d’où ? D’une autre planète ? Une grande ville, ça veut dire des poches de gaz hallucinogène, de gaz paralysants, des mares de bactéries, des floppées de rats. Les rats. Au moins ça, tu connais, non ? Ca véhicule la peste bleue, les rats, figure-toi. Une grande ville ! Rien à bouffer, parce que tout ce qui vit là-bas risque d’être infecté, et rien à boire, parce que même la Seine doit être dangereuse sur ses bords, là où il reste parfois de l’eau stagnante. Et je ne te parle pas des égouts. Un paradis de bactéries, et chaque fois qu’il pleut, ça dégorge dans le fleuve. (…) Tout est tombé sur les grandes villes. Absolument tout. Sauf la bombe atomique, parce qu’ils craignaient de détruire la Terre, mais ils l’ont détruite, quand même, d’une autre façon ".
La traversée vers le nord est animée. Dans une propriété déserte, Gérald victime d’un accident, balancera entre la vie et la mort. Sans le dévouement d’Annie, il n’aurait pas survécu. Plus loin, dans la région de Nemours, près du village de Souppes, devant une propriété fortement défendue, ils découvrent un homme supplicié, entortillé dans des fils de fer barbelés. C ‘est Thomas, victime d’un Seigneur de la guerre. Ils le délivrent. Après avoir réglé son compte au chef indigne, ils poursuivent vers Paris. L’entrée en ville est périlleuse ; des dangers innombrables guettent le petit groupe :
" La ville, c’était quelque chose ! De chouette ! Une accumulation de squelettes invraisemblable. L’ossuaire dans toute sa beauté. Des os, on en avait déjà croisé pas mal, en traversant la banlieue. Mais là, ça dépassait les bornes. Ils étaient partout. Affalés sur les trottoirs, étalés sur la chaussée, entassées derrière les vitres brisées, enfermés dans des carcasses de voitures. Des fois, ça tenait ensemble, des fois, c’était éparpillé comme par la patte d’un chat. On bousculait des crânes, on repoussait des cages thoraciques, on piétinait tibias et fémurs. "
Suivront une poche de gaz hallucinants place Denfert-Rochereau qui manque de détraquer Gérald, la pollution de la Seine, les rats, et surtout une nouvelle forme de vie mutante, une sorte de gelée animant des squelettes. Ils retrouvent cependant le dossier dans le petit appartement de la rue Croix-des-Petits-Champs, ne songeant qu’à quitter au plus vite les lieux. Une dernière rencontre avec des survivants retournés à l’état de bêtes sauvages les fera encore frémir :
" Ils ont surgi des buissons, de derrière les arbres, de l’abri d’une statue. Quinze ou vingt, peut-être. Mâles et femelles. L’une d’entre elles portait une petite horreur grise et déjà chevelue accrochée à son sein. Ils se ressemblaient comme des pois dans une cosse. On les différenciait plus par la poitrine que par le sexe enfoui dans une floraison de poils. Des yeux. Sans une lueur d’intelligence. Ca exprimait deux choses : la peur et la faim. Ca grondait, les dents à nu, mais sans oser attaquer."
Après la porte de Vanves, Annie disparaît mystérieusement. Gérald perdra beaucoup de temps à la chercher, en vain. Le cœur brisé, il suivra Thomas en direction du sud. Mais, ayant trop tardé, ils seront surpris par l’hiver glacial dans le massif Central. Sans Bernard (St Bernard ?) et son groupe, ils seraient morts de froid.
Requinqués au sein d’une ferme accueillante, ils laisseront passer la mauvaise saison avant de repartir. Arrivés en face de l’île de Porquerolles, ils allument, comme prévu, un grand feu pour signaler leur présence. Une surprise divine attend Gérald : c’est Annie elle-même qui vient à sa rencontre. Enlevée par une bande de lesbiennes, elle avait finalement réussi à se dégager de sa captivité pour rejoindre toute seule sa famille. Fous de joie, l’une à l’idée que le dossier a bien été récupéré, l’autre à l’idée de retrouver sa campagne, nos deux tourtereaux prendront un long repos dans cette île bénie des dieux.
Un roman post-cataclysmique d’une grande efficacité où l’intrigue linéaire rebondit constamment en actions diverses, sans que le lecteur ne puisse reprendre haleine. Servi par un style descriptif qui privilégie décor et comportement, "l’autoroute sauvage " donne un second souffle, de par sa nouveauté, à une collection vouée à l’immobilisme.
Vol. 02 : la Mort en billes, Fleuve Noir éd., octobre 1994, coll. " Anticipation (Métal) " N° 1710 (1 ère éd. dans la même collection N° 772), 1 vol. broché, in-12 ème , 219 pp. couverture illustrée par Florence Magnin. roman d’expression française
1ère parution: 1976
Peu à l’aise sur l’île de Porquerolles, Gérald se voit confier une mission par le père d’Annie, consistant à contacter le groupe de Bernard vivant dans le Massif Central, près d’Ambert, et à le convaincre de se réfugier dans l’île qui a un besoin essentiel de techniciens et d’ingénieurs.
Dans la même foulée, il pourra aussi tester le remède contre la peste bleue, mis au point à partir du protocole rapporté de Paris. Thomas et Gérald se remettent en route et sauvent de la mort la petite (et insupportable) Marie-Thérèse, dit MariThé, de " la mort en billes ". Se reposant au bord d‘une rivière, ils se font voler le remède par Axel, un solitaire, mis au contact de la maladie. Heureusement, Axel, rejoint par le groupe, est de bonne composition et deviendra leur ami. Lorsque Axel et Thomas se feront capturer par une dangereuse bande de " groupés ", c’est lui qui conduira MariThé auprès de Bernard.
En attendant, le sort de Thomas et Gérald n’est pas enviable. Les groupés, adeptes du cannibalisme, les enferment dans le garde-manger auprès d’autres " moutons :
" -On prend celui-là, a décidé Bec de vautour.
-D’ac, a accepté Rougeaud.
Ce choix a fait exploser Pleine lune en cris stridents. Un porc à l’abattoir. Et il s’agissait de ça, tout juste. Rougeaud a tranché le licou noué à un anneau, pris l’extrémité de la corde en main, tiré un coup sec, et entraîné Pleine Lune en l’étranglant à moitié. Bec de vautour activait le bestiau en cinglant vigoureusement ses fesses charnues.
Ils sont sortis. La lourde porte s ‘est refermée, sans éteindre les clameurs suraiguës de Pleine Lune. Elles se sont intensifiées, au contraire, vibrantes à crever les tympans, puis se sont interrompues net. "
Bien que nombreux, ils auraient dû se méfier davantage de Gérald. Se libérant, nos deux héros exécuteront sans pitié la bande de cannibales, puis, laissant les moutons organiser leur propre société, ils reprendront la route vers le Massif Central jusqu’à leur rencontre avec Jean-Pierre, un soldat, dont l’hélicoptère se pose à leurs pieds. Jean-Pierre est originaire de Suisse, du canton de Vaud, où subsiste encore une force organisée. Sous la férule des militaires, les Suisses ont mieux résisté à la catastrophe et Lausanne connaît une vie civilisée. Le jeune militaire, en mission d’exploration, apprécie le fait que Gérald possède un remède contre le mal et souhaite ramener sans attendre les deux solitaires à Lausanne auprès de son chef. Malgré la méfiance légitime existant entre les deux partis et leur culture si différente, le général suisse, témoignant de sa confiance en Gérald et Thomas, commande à Jean-Pierre de les mener par la voie des airs, le plus rapidement possible, vers Bernard. Hélas ! le crash de l’engin à cent kilomètres du but oblige les trois alliés à parcourir à pieds le chemin restant, en traînant Jean-Pierre gravement blessé, dans une nature hostile, où abonde la mort en billes ou " gelée ".
Ils toucheront non sans peine à leur but et, à peine remis, avec Bernard et son groupe, ils reprendront sans désemparer et à cheval, la route du sud. Un trajet cauchemardesque où ils affrontent les mutants transparents qui, se multipliant par scissiparité, augmentent en nombre. Quoique lents, ceux-ci demeurent redoutables car obstinés, et semblent indestructibles. A bout de forces, les humains atteignent enfin la côte en face de l’île. Prévenus par les Suisses, qui y avaient déjà dépêché un hélicoptère, les insulaires viennent chercher les immigrants en bateau. La victoire fut totale pour Gérald lorsque, par hasard, il découvrit le point faible de la gelée : elle explosait lorsqu’on y boutait le feu !
Vol. 03 : l’Ile brûlée , Fleuve Noir éd., 1 er trimestre 1979, coll. " Anticipation " N°910, 1 vol. broché, in-12 ème , 219 pp. couverture illustrée par Young Artists. roman d’expression française.
1ère parution: 1979
Gérald et Thomas retournant à Porquerolles découvrent l’étendue du désastre : toute l’île a été brûlée et les implantations humaines anéanties par ceux qu’ils appelleront plus tard " les Cracheurs de feu ", en provenance de la côte tunisienne.Grâce à leur ami, le général suisse, un groupe comprenant Alex, Thomas et Gérald, se fera parachuter au-dessus du territoire ennemi. Immédiatement capturés, ils seront confrontés à une jeune femme télépathe, mutante de la peste bleue, meneuse des Tunisiens et désireuse d’expansion territoriale.
Avec constamment un temps de retard dans leur prévision, Gérald et Thomas seront libérés par Gamal, un télépathe mâle, originaire de " la Démence ", région désertique bourrée d’insectes et de plantes aux pouvoirs étranges et souvent mortels. Là, après un nécessaire temps de repos, ils affronteront à nouveau les Cracheurs de feu pour libérer Alex et Annie. Par l’entremise d’un vieux savant, prisonnier lui aussi, qui a réussi à contrôler la gelée , l’expédition est couronnée de succès. Annie, localisée et Alex récupéré, s’ensuit le chambardement systématique de la base, la fuite vers la Démence sans que les Cracheurs de feu, désorganisés, n’aient rien pu empêcher. Les forces suisses prévenues par Gamal, règlent définitivement et sans pitié le sort des pirates en trois jours. Tandis que Gérald blessé récupère à Lausanne en rongeant son frein, Annie rejoint Porquerolles où les survivants se réorganisent.
" L’île brûlée " constitue le troisième et dernier volet du cycle de " l’Autoroute sauvage. " Toujours aussi vivant et coloré, le récit, sans prétention, se lit agréablement à cause surtout de la technique narrative du monologue intérieur attribuée à un Gérald gouailleur.
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"Il y aura dans l’abîme du ciel, un Grand Astre rouge Nommé Sahil. "
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L'astre Rouge (Trubert) - Par BenF
Le jeune et sportif reporter photographique Jean Sartène rend visite à son " père spirituel ", François Langevin, astronome de l’Observatoire de Paris pour lui faire confirmer la surprenante nouvelle d’un astre inconnu qui , s’approchant de la terre, risque de la faire voler en éclats. Mourir pour mourir, ils décident de le faire avec panache et efficacité, grâce à la " Puce des mers ", le sous-marin de leur ami, commun, l’océanographe Louis Perceval. Ils souhaitent donc traquer " l’astre rouge " sur son lieu de chute, en plein océan Pacifique, près des îles Marquises, pour un reportage scientifique et cinématographique unique et… dernier.
La " Puce " est rapidement préparée grâce à Mathurin Le Goff, un taciturne et efficace Breton, chef mécanicien, et avec les aides de Jacques Pers, le radio ainsi que celle des deux matelots Legrand et Cantebrie. La collision aura lieu dans les quinze jours. Le sous-marin ayant pris position, guette l’arrivée imminente du bolide. La mer se convulse jusqu’en ses tréfonds, la température monte de façon vertigineuse, un brouillard chaud et tenace obligent à une immersion profonde. Le temps passe, et bien que bousculés à l’intérieur de la tôle, nos protagonistes émergent… non loin d’une île extraordinaire, rouge et inquiétante qui se dresse à l’endroit de la fosse de Canet.
L’exploration de l’île-qu’ils prennent pour l’astre rouge lui-même- apporte une moisson d’informations et d’objets étranges : des animaux curieux, des végétaux bizarres et savoureux, et même un édifice construit dans un métal inconnu bleuâtre, en forme de champignon, au haut d’une volée de marches en or pur. Langevin les assure que si ce lieu est bien extraterrestre, il ne peut s’agir que d’un éclat du bolide qui , en frôlant la terre, s’est abîmé dans les flots.
Le temps presse car l’eau du Pacifique ronge le soubassement de l’île lequel bientôt disparaîtra dissous dans l’océan. Se dépêchant de faire une ample moisson de chaque objet étrange, ils ne prennent pas garde à la menace constituée par un pauvre fou de naufragé lequel, ayant vu lui aussi les richesses de l’île, tente de se les approprier, en réduisant l’effectif du sous-marin à l’impuissance. Ce qui faillit réussir, si l’île ne s’était mise à s’enfoncer, amenant la fuite éperdue de tout le monde vers le large. Quant au reste du monde, on apprend incidemment que :
" il ne demeurait plus rien de la Nouvelle-Guinée, ni des îles de la mer d’Arafoura. Ils apprirent que les deux tiers de l’Océanie s’étaient abîmés dans le Grand Pacifique. Les Philippines n’existaient plus. La presqu’île de Malacca était également rayée de la géographie.(…) On sut plus tard que Madagascar était désormais rattachée à l’Afrique et n’était plus qu’une presqu’île. Le Japon s’était augmenté de quelques îles et le détroit de la Corée était comblé "
Grâce aux droits d’exploitation des films et des produits extraordinaires rapportés par la petite équipe, l’observatoire de Paris put être reconstruit et la renommée de Jean Sartène portée jusqu’aux confins du monde encore intact.
Un roman d’aventures pour enfants dont seule la première partie se rattache à notre thème. Un style volontairement mâché et didactique qui fait passer les extravagances d’une intrigue que l’on retrouve aussi bien chez Katsantsev que chez Hergé.
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Le président français Prader-Miquet est assassiné dans sa propriété de Hauterives. Comme il possède des documents ultra-importants dont la divulgation pourrait faire basculer le pays dans le chaos, le fin limier Julien Cazalis est chargé de l’enquête. Par la puissance de ses déductions, il met à jour le coupable, soit le ministre des Affaires Etrangères de… (Le nom du pays ourdissant le complot n’est pas mentionné mais comme nous sommes en 1932 il n’est donc pas difficile de le deviner) et retrouve les documents compromettants. Finalement le chaos annoncé se réduit à une nuit d’émeute autour de la tour Eiffel.
Un bon roman policier à la française qui ne touche notre domaine que tangentiellement.
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L'assassin Du Monde - Par BenF
Le détective Serge Servin suit les traces du boxeur Trucq Bert, enlevé en Algérie. Après «une catastrophe incompréhensible» qui détruit le Transaharien, Serge saute en parachute au-dessus de l’Atlas, repaire d’un savant fou. Capturé par des robots, il est emmené devant le Docteur Satanas qui désire se venger de la société. Devant lui, celui-ci étale sa puissance, une usine entièrement robotisée et un « rayon de la mort ».
Serge s’élance sur Satanas et, avec de la dynamite, fait sauter son repaire tout en sauvant les robots, en réalité des êtres humains conditionnés, quelques Chinois ainsi que… le boxeur Trucq Bert. Satanas, reprenant ses esprits provoque de terribles éruptions volcaniques avec son rayon, s’apprêtant – dit-il d’une voix sarcastique - à « disloquer le monde ». Serge reprend du service et, par un terrible uppercut, met définitivement le monstre hors d’état de nuire.
Un récit complet comme en fleurirent beaucoup après-guerre, à l’intrigue convenue et au dessin effroyable.
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L'arrivee Des Glaces - Par BenF
Denell, le dernier homme au monde, se remémore avec nostalgie sa longue vie. S’étant prêté à une expérience supposée le rendre immortel, elle a réussi mieux que prévu en lui ôtant toute possibilité de ressentir des sentiments. Alors, stérile par nécessité, il fait de son mieux pour pallier ses manques : il s’adonne aux joies de la contemplation des concepts ; mais son esprit épuise au cours des longs millénaires le champs des découvertes et, insensiblement, les êtres humains autour de lui, le dépassent en intelligence.
Il resta pourtant un témoin muet et taciturne, assistant au lent basculement des millénaires, aux convulsions des races, aux guerres, aux transformations progressives de la terre, jusqu’au moment final où celle-ci fut recouverte par les glaces , ne laissant de libre qu’une mince bande équatoriale. La terre se transformant en un tombeau glacé, ses derniers compagnons humains, redevenus sauvages, auront disparu dans la tourmente. Denell restera le seul de son espèce sur une planète morte :
" J’ai froid. Je l’ai déjà écrit. Je suis gelé. Mon haleine tombe en petits glaçons au contact de l’air et je peux à peine remuer mes doigts gourds. La glace se referme sur moi, je ne peux plus la briser. La tempête hurle autour de moi dans le crépuscule et je sais que c’est la fin. Et moi… moi, le dernier homme…Le dernier homme…"
Une nouvelle inédite originale en son temps qui partage quelques accents communs avec celle de Campbell Jr,
"Crépuscule".
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L'armee Invisible - Par BenF
Le narrateur se trouve sur un champ de bataille. Sans que l’on sache de quelle guerre il s’agit, les Prussiens, une fois de plus, comme en 17, tentent d’envahir la France. La bataille tourne à leur avantage et le narrateur s’aperçoit avec horreur de l’avance ennemie, lorsque soudain :
" Du tertre le plus proche, une main surgit… puis un bras… Rejetée de part et d’autre par des efforts désespérés, la terre, enfin, desserra son étreinte . Le linceul d’humus écarta ses plis, découvrit une épaule, une tête, un buste… Pâle, avec les mêmes cheveux longs, la même barbe terreuse, poussée sur les joues creuses, les mêmes yeux flamboyants, un nouveau soldat se dressa sur son séant. "
L’ «armée invisible» se lève, aux soldats nombreux comme les épis dans un champ de blé, ceux de 14-18, ceux de 70, mais surtout ceux de la grande Armée. Avec stupéfaction et sans en comprendre la raison, le narrateur assiste à cette résurrection bouleversante :
" A travers champs, à travers bois, sautant haies et fossés, franchissant les ruisseaux, dédaignant les routes ravagées qui coupaient sa ruée, la charge passait, piétinant l’herbe rase des prés. Et nulle troupe régulière, correctement alignée et équipée, marchant au feu, conduite par ses chefs, n’aurait davantage impressionné que ce torrent déchaîné, menaçant déjà un ennemi encore invisible. "
Les libérateurs fantômes sont pourtant décontenancés par les armes modernes et hésitent à s’engager tant qu’ils ne perçoivent pas l’ennemi en chair et en os :
" Les ressuscités s’étaient arrêtés et considéraient avec surprise les horribles blessures des cadavres. Le bouleversement du sol, éventré par la chute des projectiles, parut aussi retenir leur attention. Mais ils n’accordèrent même pas un regard aux fragments de ferraille qui avaient causé ces dégâts. L’homme épiait leur ébahissement. Il jubilait, envahi par un sentiment de vanité puérile, comme si la supériorité destructrice de ses contemporains eût augmenté ses mérites personnels. Et il dit, sans prendre garde que nul ne semblait l’entendre, ni même l’écouter :
- C’est un peu mieux que vos boulets. Ah ! dame, en fait d’artillerie nous avons quelque chose… Vous n’étiez que des enfants. "
La mise à sac d’un village perpétrée par les bandits prussiens avec leur brutalité coutumière, les décide soudain. Ecoeurés par le lâche et vil comportement de l’envahisseur, ils foncent sur lui, le hachent menu avec leurs sabres invisibles. L’ennemi, ne sachant d’où vient le coup mortel, prend la fuite, épouvanté. L’armée invisible continue de s’étoffer, tous les vieux fidèles répondent à l’appel mais demeurent hésitants car il leur manque le Chef, l’Unique, l’Empereur lui-même.
Le narrateur se trouve toujours engagé à la suite de la masse fantomatique et guerrière. En un clin d’œil, il survole Paris, où une tornade invisible souffle sur la capitale et se dirige vers les Invalides. Il comprend le but des grognards désincarnés : ils sont à la recherche de l’Empereur !. Tout aussi soudainement, il saisit son rôle : si lui seul voit ces êtres fantastiques, c’est parce qu’il est le "Témoin", celui qui devra rapporter aux siens, plus tard, l’exploit des ancêtres. Terrifié, il assiste à la résurrection de Napoléon :
" Un vide s’était fait, ouvrant dans la foule une sorte de couloir qui allait de l’autel à la balustrade de la crypte. Dans ce couloir s’avançait un groupe chamarré, précédé d’un petit homme habillé en gris. Sous les ailes noires du chapeau, un visage pâle, au fond noyé d’ombre. Les yeux brûlaient au fond des orbites. La bouche, sévère, se pinçait. Le menton se perdait dans les profondeurs du collet, frileusement relevé.
-Lui ! murmura l’homme, cloué au sol. "
Reprenant la tête de son armée, l’Empereur procure son appui aux troupes françaises bien réelles engagées dans un combat incertain. Le revirement de situation est foudroyant :
" Devant les yeux émerveillés du témoin se déroulait un panorama triomphal. Soudés en une ligne unique, reliant l’Ouest à l’Est, cavaliers et fantassins refoulaient devant eux une autre ligne grise, celle des Allemands. A cette apothéose victorieuse figuraient tous les uniformes : le modeste bleu horizon, les capotes et les vareuses bleu ardoise, les culottes au passepoil jaune et jusqu’au pantalon jadis garance, maintenant gris et poussiéreux, fraternisaient avec les couleurs éclatantes des guerriers exhumés. Drapeaux déployés, clairons sonnant, les régiments chargeaient en chantant. "
Lorsqu’il se réveillera, plus tard, au lazaret où il avait été admis pour choc traumatique, le "Témoin", malgré toute sa sincérité n’arrivera pas à persuader le médecin-chef de la véracité de sa vision. A vrai dire, nous non plus.
Un texte curieux, atypique dans le domaine, qui traduit à la fois l’angoisse d’un nouveau conflit (le texte est écrit en 1933) et un patriotisme cocardier.
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Robin Cruso est conducteur automobile comme l’ensemble des gens habitants sur la planète. Tout se fait en automobile, y vivre et surtout y mourir. Il faut trois jours pour faire cinq mètres, pare-chocs contre pare-chocs. Tout dans cette société dystopique est réglé en ce sens: les automobilistes sont happés, concassés, écrasés, tirées, décapités, vrillés:
"Il existait parfois une hiérarchie parmi les policiers, divisés en plusieurs groupes. Le premier groupe, situé en bas de l’échelle, était formé de viseurs d’omoplates. Les viseurs d’omoplates étaient des tireurs spécialement entraînés pour atteindre à bout touchant, entre les omoplates, les individus blessés couchés sur le trottoir. Les autres groupes étaient conditionnés d’une façon générale pour réagir à tout ce qui pouvait nuire au conducteur de voiture. Deux cent mille policiers de plus dans le pays. C’allait être l’enfer."
Les pièges innombrables ne suffisent pas à faire diminuer le nombre des automobilistes, car sur la Terre, submergée par la tôle, plus personne n’arrive à vivre. C’est du moins le but que se propose le Grand Cerveau qui dirige toutes les opérations. Il invente sans cesse de nouveaux moyens de torture, des fausses pistes pour les conducteurs, des éliminations en masse, au cyanure ou à l’acide:
"Dans le compartiment entrèrent trois personnes. Un homme, une femme et un enfant, guidés par des grands bras d’acier articulés, commandés de façon invisible. La première cuve se remplit d’acide et l’homme y fut plongé. La seconde, celle qui était sur pied, s’emplit de métal en fusion et le bras métallique y enfonça la tête de la femme. La troisième s’emplit d’huile bouillante et l’enfant y fut assis. J’étais suffoqué d’horreur."
Robin Cruso, ne tient pas à mourir. Il tente d’échapper aux multiples pièges qui se dressent devant lui, et il y arrive, parfois. Le Grand Cerveau, un cerveau humain greffé sur un corps d’automobile, une Rolls en diamant, tient à comprendre pourquoi Robin Cruso possède tant de chance car il surveille tout sur la planète et tout le monde, y compris ses opposants:
"Le Préfet, qui chaque soir s’adressait aux foules à la télévision, était un mannequin à l’image de son ancienne enveloppe charnelle, dont la boîte crânienne en plastique contenait un magnétophone transistorisé. Je comprenais maintenant pourquoi chacun de ses discours était semblable aux autres et je songeai que, dans le passé, la chose avait dû être fréquente. Depuis l’invention de la télévision, combien d’hommes politiques, s’adressant à la nation, n’étaient autres que des mannequins de plastique agités en dehors des caméras par d’ingénieux dispositifs mécaniques."
Or, c’est chez ces opposants, les Piétons, qu’aboutit Robin. Modifiés selon les lois darwiniennes, ils vivent dans des galeries entre la terre et le béton, comme des rats. Ils sont impuissants à se révolter et la Grande Machine à Coudre aura bientôt raison d’eux. Seul, Robin, grâce à son inventivité échappe à l’aiguille destinée à lui percer la poitrine. Alors, le grand Cerveau se révèle à lui:
"Ceux qui semblaient diriger, qui croyaient diriger ont toujours été entre les mains de véritables forces. Je me suis emparé du système, Robin Cruzo, c’est-à-dire de ces forces. Je n’ai presque rien eu à faire. Le monde entier dépendait de l’automobile. Devenant le Maître de l’automobile, je devins le maître du monde. Mais je n’ai rien changé aux apparences. Il y a toujours des présidents, dans le monde, qui pérorent, ronronnent, annoncent, déclarent, proposent, refusent, selon ma volonté. Il y a toujours des polices qui obéissent, des agents qui frappent, des militaires qui tuent, sans savoir d’où viennent les ordres, quelles en sont les rai-sons. Sans savoir - permettez-moi cette plaisanterie- qui est le cerveau?»
Il lui propose une association puisqu’il a besoin, pour la suite de son programme humanitaire (!), de ministres intègres (ce qui est rare). Flatté en un premier temps de participer au Grand Oeuvre, Robin Cruso déchante rapidement lorsqu’il voit à quoi sont réduits les ministres: leurs corps servent d’aire de stationnement à la Rolls du Grand Cerveau et leurs cervelles fonctionnent à l’intérieur de bocaux. Une dernière tentative de résistance lui donne pouvoir sur le Grand Cerveau.
Cruso le prive de son disque de commandement mais lui permet de s’implanter dans une fusée, qui est censée être son nouveau corps. Le Grand Cerveau disparaîtra de la terre en emmenant avec lui son peuple de ministres-cervelles. Il annonce à Robin Cruso qu’il lui laisse le monde en héritage, l’évolution automobile ayant atteint un tel point de pollution qu’elle sera à l’origine d’une immense apocalypse technologique. Robin Cruso, resté seul de son espèce, fait revivre les humains grâce aux graines accélératrices d’évolution, en repassant de coelacanthe à homo sapiens en un temps record. Il espère créer une espèce écologique délivrée de l’obsession technique. Il lui faudra déchanter quand l’homme réinvente la roue.
Une satire à la limite de la charge. Le sadisme naturel qui s’étale dans ces pages - en dépit de son appartenance à l’esprit d’Alfred Jarry - donne au lecteur une sensation de malaise liée à l’invraisemblable attirail des procédés utilisés pour détruire l’être humain . C’est aussi un roman anti-technologique dans la veine des années soixante-dix, dans lequel les fantasmes d’une domination absolue de l’automobile sur l’être humain pointent avec humour ce que Ballard décrit sérieusement dans " Crash ". Un ouvrage curieux et original.
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