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Bienvenue dans la Base de Données des livres !

Vous y trouverez des ouvrages post-apo que la communauté souhaite partager. Il vous est possible de rajouter des fiches de livres, alors partagez vos trouvailles avec la communauté FoGen ! Une grande partie des ouvrages que vous trouverez sont ici grâce au travail de Jacques Haesslé sur son site : http://destination-armageddon.fr/index.html. Un grand merci à lui pour son travail exceptionnel !

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Livres

  1. Type: livre Thème: menaces idéologiques Auteur: Gawin EWART Parution: 1971
    En 2066, tout commença lorsque un commando de révolutionnaires « vénériens » s’empara du Roi et de la Reine d’Angleterre, les soumettant aux derniers outrages :
    « Le meneur de jeu se tenait à présent debout sur un petit tabouret devant Sa majesté, tandis que ses deux assistants se trouvaient aussi près que possible de la chaise, sur ses côtés. Chacun des aides prit alors une main de la Reine et la posa avec respect sur son membre dressé et guilleret. Automatiquement, comme mue par une profonde impulsion féminine, avec des gestes de somnambule, les doigts de la reine commencèrent à caresser ses loyaux sujets, les frottant avec une extrême douceur. »
    Ils savaient que lorsque l’on balaie un escalier, il vaut mieux commencer par les marches les plus hautes. L’attaque du Palais Royal fut suivie par la « Nuit des Jeunes Epouses », perpétrée par la Cinquième Colonne Phallique. Le 3 septembre de la même année, toutes les chambres à coucher furent prises d’assaut, les Epoux et les Epouses mises en des mains expertes. Pour des millions de jeunes Anglais, récemment mariés ou non, tout fut possible :
    « Courbées sur les chaises, elles furent prises par derrière. Elles furent battues avec des brosses à cheveux, des fouets à chien, des chaussures à haut talon, dans une symphonie de sadisme et de masochisme. Elles montèrent sur leurs amants comme des proues de navires ; les léchèrent comme des chiennes ; expérimentèrent les positions les plus incroyables; firent assurément l’amour de plein cœur, donnant libre cours à leurs désirs, les plus secrets, jusqu’ici cachés. »
    Le lendemain, tous gardèrent de cette soirée une nostalgie ardente qui se reflétait dans les comportements. Ils étaient prêts à suivre le nouvel Evangile qui venait de faire son apparition chez les libraires appelé « le grand Livre des Perversions». Mais le jour où tout bascula véritablement, fut le jour « F », pour « Fornication ». Les Vénériens s’étaient emparés des médias, augmentant significativement leur audience. Ils organisèrent et planifièrent la plus grande orgie du monde, devant absolument convaincre les classes moyennes anglaises, les plus réactionnaires,  de la justesse de leur point de vue :
    « Les hommes de quarante-cinq ans enlacèrent de bon cœur les jeunes filles de dix-sept ans, se jetant dans une forêt blanc et brun de seins et de jambes. Les femmes de quarante et cinquante ans s’enchevêtrèrent avec enthousiasme avec les garçons lascifs et adolescents, éperdus de désir et de joie. Ce fut une magnifique nuit de stupre. Tout y était permis. »
    A partir de ce moment-là suivirent les réformes politiques : tout ce qui allait dans le sens d’une diminution du plaisir fut interdit ou contingenté : l’alcool, les cigarettes, le travail excessif. Par contre, on mit en vente libre des pilules aphrodisiaques et des machines à masturber. Même les pièces de théâtre classique, comme Roméo et Juliette, intégrèrent  des scènes sexuellement explicites. La prostitution disparut. La religion elle aussi qui, au départ regardait d’un œil inquiet toutes ces nouveautés, y trouva son compte. Le changement profond des mœurs prouva la réussite irréversible de la Révolution Sexuelle :
    « Dans la bonne société, le port de dessous intimes devint même facultatif. Certaines jeunes filles préféraient voiler leurs mystères ; d’autres, au contraire, les arboraient ouvertement. Celles qui désiraient attirer un partenaire hésitant ou provoquer un esclandre viril, teignaient leur toison d’amour en rose, en bleu ou en vert. Ce n’était, bien sûr, que le début, mais c’était déjà pour les clases moyennes britanniques un grand pas en avant. »
    Une nouvelle jouissive, ironique, irrévérencieuse. Relève-t-elle du thème cataclysmique ? A chacun d’en juger  selon ses opinions et croyances.


  2. Type: livre Thème: péril jaune et guerre des races, guerres futures 2 Auteur: Jack LONDON Parution: 1910
    A partir de 1976, la Chine se réveille, menaçant le monde par son taux de fécondité. L’émigration chinoise se transforma en menace, d’abord pour les Européens, puis pour le reste de la planète. Rien ne semblait pouvoir s’opposer au flux énorme de la main-d’œuvre chinoise qui, en retour, assimila les technologies occidentales. Le Japon, vainqueur de la Russie, comprenant l’âme chinoise, forma les futurs cadres de la nouvelle société, la rendant d’autant plus performante et menaçante.
    L’armée chinoise fut réorganisée, puis l’infrastructure, puis les communications. La Chine ne se montra pourtant ni hostile ni belliqueuse mais continua d’envahir pacifiquement les pays voisins ou lointains, en en transformant rapidement le substrat autochtone. C’est ainsi que l’Indochine française devint chinoise, ce qui ne plut pas à la France qui tenta de s’opposer à elle militairement :
    « La France assembla une armée de cent mille hommes à la frontière chinoise de sa malheureuse colonie, et la Chine y envoya une armée d’un million de miliciens, derrière laquelle en marchait une autre composée de leurs femmes, enfants et parents des deux sexes. L’expédition française fut balayée comme un essaim de mouches. Les miliciens chinois avec leurs familles, au nombre de plus de cinq millions, prirent tranquillement possession de l’Indochine français et s’y établirent à demeure pour quelques milliers d’années. »
    Comme la Chine continuait sa progression en Asie, le nouveau gouverneur Li-Tang-Foung accentua encore la pression démographique, ce qui terrifia le monde entier qui ne savait toujours pas comment endiguer le fleuve jaune. Ce fut un obscur savant d’une officine de New-York qui conçut la solution à ce problème. En un premier temps, il s’employa à convaincre les leaders mondiaux de respecter une «Grande Trève », puis d’encercler le territoire chinois par terre et par mer, en y envoyant tout ce que le monde comptait de ressources militaires.
    Une mobilisation générale fut décrétée, en un mouvement d’encerclement qui amena le sourire sur les lèvres des Chinois lesquels attendirent l’invasion occidentale de pied ferme. Alors tombèrent, du haut du ciel, quantité d’ampoules en verre, éclatant sur une large frange du territoire,  ainsi que sur la ville de Pékin, en libérant un cocktail de microbes parmi les plus virulents : Laningdale venait d’inventer la guerre bactériologique :
    « Mais si le lecteur s’était trouvé encore une fois à Pékin six semaines après, il eût cherché en vain ses onze millions d’habitants. Il en aurait aperçu un petit nombre, quelques centaines de mille peut-être, à l’état de carcasses en décomposition dans les maisons et les rues désertes ou empilés sur des chariots funèbres abandonnés sur place. Pour retrouver les autres il aurait dû chercher sur les grandes et petites voies de communication. Encore n’en eût-il repéré que quelques groupes en train de fuir la ville empestée de Pékin, car leur fuite était jalonnée par d’innombrables cadavres pourrissant au bord des routes. Et ce qui se passait à Pékin se reproduisait partout dans les cités, villes et villages de l’Empire. Le fléau sévissait d’un bout à l’autre du pays. Ce n’était pas une épidémie ou deux: c’en était une vingtaine. Toutes les formes virulentes de maladies infectieuses se déchaînaient sur le territoire. (…)
    S’il se fût agi d’un unique fléau la Chine s’en serait peut-être tirée. Mais à une vingtaine d’épidémies, nulle créature ne pouvait échapper. Celui qui esquiva la petite vérole mourait de la scarlatine ; tel qui se croyait à l’abri de la fièvre jaune succombait au choléra, et la mort noire, la peste bubonique, balayait les survivants. Tous ces microbes, germes, bactéries et bacilles, cultivés dans les laboratoires de l’Occident, s’étaient abattus sur la Chine dans cette pluie de tubes de verre. »
    Les survivants, errants entre des millions de cadavres, furent tous exterminés et le territoire de la Chine annexé par les belligérants unis dans une même vengeance.
    «L’Invasion sans pareille» évoque une fois de plus, le Péril jaune, crainte si commune au début duXXème siècle. Aujourd’hui, alors que la Chine compte plus d’un milliard d’individus, nous sommes à même d’apprécier ces dangers liés à la mondialisation, sans toutefois y trouver une solution aussi définitive que celle imaginée par Jack London.

  3. Type: livre Thème: invasions extraterrestres Auteur: Jimmy GUIEU Parution: 1952
    Les Martiens (Kroniens) convoitent notre globe. Ressemblants étrangement à leurs frères décrits par Wells, ils habitent une planète quasi-morte dont les canaux (répertoriés par Percivel Lovell) n’assurent plus leur sécurité. Alors que notre globe, si bleu, à la température si douce…
    Mais ce forfait ne sera pas grâce au nain martien Kimdô et à sa femme Nommya qui avertissent les Terriens  si athlétiques et si beaux, les astrophysiciens Buck et Jerry en compagnie de leurs pneumatiques amies Juanita et Nicky. Empruntant une soucoupe volante supra-luminique laissée sur terre lors d’un précédent récit, ils rendent une petite visite à la planète Mars et ses habitants, libèrent Kimdô et son épouse puis s’en vont chercher des armes dans la nébuleuse d’Andromède (la galaxie Betlyor) chez les gentils Glamoriens eux-mêmes en lutte contre les abominables Taborok, géants vindicatifs et querelleurs.
    Appuyant l’ami Xung, le Betlyorien,  dans sa lutte contre Kamor le chef des Taborok, Buck et Jerry offriront les rayons démagnétiseurs de la soucoupe à la civilisation amie, ce qui permettra, petit 1 : de libérer deux princesses betlyoriennes qui épouseront in petto nos deux héros, petit 2: de supprimer la civilisation des Taborok (seulement quarante millions de mondes, excusez du peu !)
    Cette tâche accomplie, ils ont enfin le temps de songer à notre pauvre Terre déjà endeuillée par les premières vagues d’assaut des Martiens, pardon Krôniens. Volant à son secours, ils liquéfient les Martiens envahisseurs grâce à une arme ultime : le «liquéfacteur de Martiens»,  et libèrent la Terre qui pourra convoler en justes noces avec les Betlyoriens de la nébuleuse d’Andromède.
    Des combats titanesques, des vocables inouïs, des armes inédites, des milliards de parsecs franchis en une minute, du bruit, de la fureur, parsemés des notules « exact », «rigoureusement exact », « vrai », etc., bref, un véritable space-opéra comme on le concevait dans les années cinquante. Merci qui ?… Merci, monsieur Guieu. (Pourtant, quand on y songe, toute l’invasion de la terre tient en 20 petites pages sur 188)

  4. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Albert ROBIDA Parution: 1919
    Deux prologues ouvrent le récit. Dans le premier, le diable, empruntant la personnalité du moine Schwartz, présente à l’abbé Gotlieb dans l’abbaye de Fribourg, sa dernière invention (diabolique) : la poudre à canon. Nous sommes en l’an 12…
    Dans le deuxième, c’est l’ingénieur Von Satanas qui vient tenter les parlementaires de la paix réunis à La Haye. La science et le progrès allaient enfin établir la paix universelle, lorsque juste avant le banquet de clôture et après la signature du traité, comme l’on allait boire à l’amitié éternelle entre les peuples, les plans du nouveau moteur d’aéroplane et la composition chimique ou microbienne de nouveaux obus présentés par von Satanas séduisirent énormément. Cet ingénieur ressemblait  étonnamment au moine Schwartz…
    Au moment où s’ouvre le roman, le narrateur, Jacquemin, est en train de dériver sur un débris, entraîné par les courants, vers la côte hollandaise. Ayant fait partie de l’expédition Hutchinstone pour l’exploration du pôle Nord, en 1914, il était de retour en 1929  quand le bateau sur lequel il regagnait l’Europe, fit naufrage.
    Il ne resta d’ailleurs pas longtemps seul sur son épave, rejoint par un autre survivant, le jeune et sympathique Marcel Blondeau, de retour d’une île du Pacifique, et qui lui aussi eut le malheur de sauter sur une mine. Unissant leurs efforts, ils s’interrogent sur l’origine de ces engins meurtriers responsables de leur malheur, sur l’absence de phares le long des côtes, sur la désertification des routes marines.
    Alors que leurs vivres diminuent, ils accostent enfin sur une plage sablonneuse, truffés d’objets ressemblant à s’y méprendre à des bombes ayant fait long feu et parsemées de ruines, ce qui témoignerait d’une incontestable violence.  Soudain ils furent abordés par une petite troupe  de gens au visage couvert d’un masque à gaz qui les entraînèrent vers  un abri souterrain. Sans qu’ils le sachent encore, l’on venait de leur sauver la vie. Bien que surpris par l’aspect grotesque et les habits en lambeaux de leurs sauveteurs, ils prirent le temps d’écouter le chef du groupe, un certain Danois,  le  Dr. Christiansen, leur indiquer la cause de leur affreuse situation :
    " La gueuse de Science, l’horrible gueuse ! répète le Danois.
    -Mais, permettez, fis-je abasourdi, permettez… pourquoi ce blasphème ?
    -Eh ! vous devez bien vous en douter !
    Sans elle serions-nous terrés dans ces ruines, en péril de mort par asphyxie, avec d’autres dangers nous guettant de tous les côtés : écrabouillements par mines, torpilles, explosions…,
    Ecrabouillements venant du ciel par avions… diffusions de maladies épidémiques par boîtes à miasmes, ou grenades à microbes de haute virulence…etc., etc., que sais-je !… "
    Et les responsables en sont les Allemands, les " Boches " :
    " -Vous avez dit gaz boche, que signifie Boche ? C’est un terme scientifique nouveau ?
    -Non ! Boche, l’horrible Boche, le Boche anthropomorphe des tribus germaniques prussifiées, les Boches de la barbarie scientifique, enfin !… les nouveaux Huns, dirais-je, si je n ‘étais certain, ce disant, de calomnier Attila, qui n’avait pas la férocité hypocrite et savante, lui… "
    L’abri souterrain où ils se terrent en attendant que se dissipent les "gaz boches" au-dessus de leurs têtes, appartient à un certain monsieur Vandermolen, un pacifique et jadis riche cultivateur de tulipes. C’est là, à Harlem en Hollande, à proximité de La Haye, tout proche du Palais de la Paix, devenu forteresse des " Boches ",  qu’ils subissent les attaques répétées de Prussiens utilisant tous les artefacts de la technologie moderne, bombes chimiques et bactériologiques, gaz asphyxiants et paralysants, lancés par aéroplanes ou par canons à longue portée.  Par manque de prudence de la part des autres nations, les Boches ont envahi, écrasé, désertifié l’Europe :
    " Au lieu de couper radicalement les griffes du monstre et de lui casser soigneusement les dents, on se contenta de les rogner légèrement, avec douceur et délicatesse… Faute capitale ! Funeste mansuétude, dont l’Univers tout entier subit aujourd’hui les conséquences effroyables !… L’Allemagne refaisait avec une hâte fébrile son matériel de guerre, le décuplait en le perfectionnant. "
    Aujourd’hui vainqueurs mais réduits en nombre, ils en sont à leur dernière extrémité belliqueuse gardant jusqu’à la fin qui est sans doute proche, leur faculté de nuisance :
    " -Horreur des horreurs !
    -Gesta diaboli per Germanos ! dit Jollimay (…) Ah ! cette Allemagne que nous admirions naïvement et bêtement, nous laissant prendre à sa fausse façade, camouflée avec tant d’art . Hélas ! (…) la docte Allemagne ! Gretchen aux blonds cheveux effeuillant la marguerite de la Science ! Pour nous, à part les Hohenzollern, au fond de la Prusse, à part un clan de hobereaux et de militaires bismarckiens, il n’y avait que la docte Allemagne, la douce, familiale et scientifique Allemagne ! Et nous ne l’apercevions pas, chargeant ses canons derrière un rideau protecteur de poètes suaves et de braves savants à lunettes, préparant son arsenal satanique, accumulant ses moyens d’agression, de meurtre et de pillage. "
    Les seuls endroits sûrs qui permettent d’échapper aux bombes de toutes sortes sont les abris, les " terriers " qui ont vu naître une nouvelle civilisation préhistorique :
    " Eh bien, est-ce que tout ne vous semble pas préhistorique ici ? Est-ce que nous ne vivons pas dans des espèces de cavernes comme les hommes des premiers âges ? (…) Ah ! comme la comparaison tournerait à l’avantage des premiers hommes ! Ah ! Comme ils y perdraient de vivre avec nous, les braves gens des cavernes préhistoriques, qui n’avaient à craindre que l’ours ou quelqu’autre honnête bétail dépourvu de malice, quasi-inoffensif à côté du bipède scientifique et "kulturé " d’aujourd’hui !… (…)
    Les populations qui dans les premières années de la guerre générale ont échappé aux écrabouillements par explosifs, aux intoxications par les nappes de gaz, par les couvercles de vapeurs mortelles, aux infernales projections de flammes, d’acides ou de miasmes, se sont enfoncées dans le sol. On vit sous terre, on creuse la glèbe aussi profondément qu’on le peut, la bonne vieille terre nourricière de jadis, on fouille l’argile, la pierre ou le roc. "
    L’abri qui les a accueilli regroupe des ressortissants du monde entier. Christiansen présente à Jacquemin et Blondeau, quelques-uns de ses compagnons d’infortune : Miraud, l’aviateur français, à qui il manque le bras gauche, Bustamente, lieutenant d’infanterie péruvienne et Felton le grenadier néo-Zélandais, Mohamed Bamoko le tirailleur sénégalais, un géant avec une main en crochet et son ami Kuomang, le fils d’un mandarin de Hué, Gibson, ancien milliardaire américain et Démétrius Manoli le Roumain ; enfin et surtout Mme Vitalis, une Parisienne à la jambe de bois et sa fille Jeannne, une délicieuse demoiselle qui n’a jamais connu que la vie des terriers. Autant dire que le  Boche  est l’ennemi du genre humain :
    L’Europe !… Rappelez-vous les photographies de la Lune qui nous montraient un astre en démolition, au sol criblé de trous, de cratères écornés et effrités… Eh bien, s’il y a des astronomes dans la lune, c’est exactement ce qu’ils doivent voir chez nous maintenant ! Sans doute la lune a passé par les mêmes horreurs que nous, il s’y sera trouvé quelque race de proie, des Boches lunatiques, pour tout dévaster et saccager jusqu’à extinction complète et définitive !… Dans notre Europe bouleversée, il n’y a plus que des tranchées. Ces tranchées, qui zigzaguent à travers tous les pays, qui sillonnent, coupent, découpent et recoupent plaines et montagnes, c’est depuis longtemps déjà la seule manière de labourer la pauvre terre que connaisse l’Européen !… Les fronts, je ne dirai pas des armées, il n’y a plus d’armées, mais des peuples tout entier en armes, les fronts se pénètrent et s’enchevêtrent, amis et ennemis pêle-mêle les uns dans les autres. (…)
    Ces révélations provoquent l’effondrement moral de Jacquemin, frappé d’horreur devant l’effrayant cataclysme. A cause des Allemands, le monde entier a régressé. A cause d’eux, à cause de leur science traîtresse, la civilisation humaine à été réduite à néant :
    " Au pilori, la science ! Certes, la guerre de tout temps fut quelque chose de triste et d’horrible, mais notre science est venue, et elle a centuplé…que dis-je, " centimilluplé " les horreurs et les terreurs de la guerre, elle a développé, multiplié, généralisé les possibilités et les facilités de massacre, à toute distance et aux plus longues portées…
    Elle a tellement changé et aggravé les conditions des luttes de nations, si affreusement gâté la guerre, enlaidi, sali hideusement l’horreur, que les guerres d’autrefois ne semblent plus que de simples bousculades un peu vives , la bataille d’autrefois  un geste d’héroïsme brutal…. "
    Habillés avec des lambeaux de peaux, armés de massues ou d’arcs, mangeant des rats ou les lapins des dunes, n’enlevant leurs masque à gaz qu’à de rares occasions, les troglodytes s’obstinent à survivre malgré tout. Ils ont tous été dupés par l’Allemagne, par son sentimentalisme, par ses " Gretchen ", alors qu’elle ne songeait qu’à utiliser la science en un but de mort, en s’aidant des microbes :
    " Quel travail !… Préparation des cultures infectieuses, étude des ferments et des virus, élevage et trituration en grand nombre de tous les microbes, de tous les bacilles susceptibles de transmettre les pires maladies et de faire éclater les épidémies, dosage des produits de nos bouillons de culture arrivés à point, pour les charger en torpilles miasmatiques, en bombes, boîtes, fioles, tubes, pastilles, etc."
    La vie dans les terriers est bien organisée. Alors que Jeanne et sa mère s’occupent de faire pousser de rares salades, les hommes partent, quand cela est possible, en expédition. Dans l’environnement en ruines, tous les monuments sont à terre, les bois dévastés, les dunes bouleversées. On y court à la chasse aux rats ou au ramassage des rares escargots. Et lorsque une rencontre s’établit avec d’autres survivants c’est pour s’échanger de pauvres médicaments, des tisanes ou des décoctions contre le typhus ou le choléra.
    Avec le temps, les terriers ont été arrangés du mieux possible et Jeanne possède même des fragments de miroirs pour ménager sa féminité. Tous regrettent le temps d’avant, celui de l’abondance et des chefs-d’œuvre.Aujourd’hui, de tous les chefs-d’œuvre détruits, seul un fragment de la toile de Franz Hals " Banquet de la garde civique " subsiste, restauré par M. Vandermolen, fièrement accrochée dans les ruines.
    La recherche de nourriture demeure leur  occupation principale. Quelquefois, des prises d’exception améliorent l’ordinaire, comme celle du jour où Bamoko revint avec un cheval errant capturé dans les dunes. En étant nourri il fournira dans quelques temps des réserves importantes de nourriture.Pour cela, il faut aller au fourrage. Un groupe, parti en ce but, tombe sur une horde à l’apparence préhistorique menée par un véritable géant. Pas de panique ! Ce sont de braves pêcheurs de Noorderick commandés par leur bourgmestre qui leur indique la direction de Leyde.
    Se faufilant entre les cratères de bombe et les marmites enterrées, ils se reposent un instant dans un village où ils feront la connaissance de Yamoto, aviateur japonais reconverti dans le tir à l’arc qui les accompagnera dans leur entreprise. Le soir tombant, ils devront chercher un abri pour y passer la nuit. Une monstrueuse forteresse roulante hors d’usage dans laquelle vit un Bulgare (allié des Allemands) dégoûté par la guerre, servira en ce but :
    " Dans le petit brouillard mouillé du matin, notre ruine de forteresse roulante se dessinait de façon impressionnante et dramatique, dominant un vaste et sinistre paysage de dévastation, où tout était ravage et ruine, le sol crevassé, éboulé, rempli d’aspérités, de trous et de cicatrices, avec des traces blanches ou rouges de fermes ou de villages évaporés, disparus à jamais, les eaux répandus par flaques, les ruisseaux au cours changé, stagnant ça et là dans des trous, les arbres décapités, invalides amputés et disloqués, qui s’obstinaient à vivre tout de même, poussaient de nouvelles branches et garnissaient de feuillage leurs misérables moignons déchiquetés. "
    Une bande de loups sentant la chair fraîche les traquera toute la nuit. Yamoto et ses compagnons en tueront un grand nombre mais au petit matin on ne trouve plus trace des cadavres : les loups tués auront été dévorés par leurs congénères.
    De retour avec le fourrage, ils découvrent que Blondeau – qui ne les avait pas suivis – avait réinventé le flirt à l’âge des terriers, poétisant auprès de Melle Vitalis qui, d’un naturel gai et optimiste  malgré la situation,  avait non seulement gagné son cœur mais aussi celui de Miraud, établissant entre eux deux une saine émulation à son sujet.
    Les nouvelles fraîches sont très difficiles à obtenir en ce temps de " guerre totale " , selon le concept de Luddendorf :
    " La Guerre scientifique à longue distance, à l’aveuglette, ne peut plus faire de distinction entre civils et belligérants, tout le monde vit en plein dans les mêmes dangers, partout et toujours, dans la fournaise infernale commune, et je distingue chez tous la soumission à l’inéluctable, le fatalisme résigné, cette forme nouvelle et si triste du courage. "
    Pourtant à la Haye, le Palais de la Paix  qui résistait encore semble être à bout de forces : les Boches brûlent leurs dernières cartouches ! Mystérieusement avertis par l’instinct, les survivants des terriers se regroupent, se préparent à l’assaut final avec leurs arcs et leurs flèches, leurs massues et leurs casse-tête.  Pour que la bataille suprême ne soit pas trop sanglante, il faudrait faire taire définitivement les canons. Pour cette dernière fois, le Dr. Christiansen consentira à utiliser la science par la mise au point d’une invention jalousement sauvegardée jusque là, les " Rayons Herziens " qui, en faisant exploser la poudre noire, délivreront définitivement les hommes de l’emprise de l’ingénieur von Satanas. Le roman se conclura avec Miraud, entonnant " la Marseillaise " légèrement modifiée :
    " Voici tous les obus toxiques
    les suffocants, les asphyxiants,
    Torpilles et bombes chimiques,
    L’Enfer lâché sur les vaillants !
    (bis)
    Et sentez-vous dans nos campagnes,
    Les nappes de gaz empoisonnés
    Venant jusque sous notre nez,
    Asphyxier nos fils et nos compagnes !
    Aux armes, citoyens,
    Assurez vos baîllons… "
    " L’Ingénieur von Satanas " paru en 1919 est le plus rare des ouvrages d’Albert Robida. Et le plus sinistre. Ses visions pessimistes du futur, développées dans " le Vingtième Siècle" mais surtout dans " la Guerre au Vingtième Siècle " et, avec Giffard, dans " la Guerre infernale ", intuitions géniales, trouveront ici leur réalisation. La science, source de progrès infini chez Jules Verne, toujours regardée avec méfiance par Robida, devient dans ce roman " cette gueuse de science ", le rêve d’une société mécanisée et d’une vie facile ayant été brisé par la mystérieuse adéquation (qui ne peut être que d’essence satanique) entre la science et la dévorante ambition des Prussiens (les Boches ) rendus seuls responsables du carnage :
    " Voyez tous à l’œuvre la hideuse Allemagne,
    Hideuse dans son âme, hideuse en ses forfaits,
    Son Kaiser qu’on dirait vomi par quelque bagne,
    Ses princes procrées par l’Enfer tout exprès (…)
    Appétits monstrueux de quelques brutes féroces, d’une caste de féodaux en fringale de richesses et d’avantages, de théoriciens du massacre productif, de hauts seigneurs de la grande industrie et de la finance affamés de milliards et de puissance… A table pour le festin ! à table ! "
    La description de la vie dans les " terriers " est calquée sur celle des tranchées. La lutte pour la survie des individus s’enracine dans un décor minutieusement reconstitué. Aucun détail de la vie quotidienne ne sera laissé de côté : agencement des lieux, difficulté de subsister, de s’habiller, les blessures du corps, les atteintes épidémiques, la crasse, la pauvreté, la misère, la mort, lot quotidien des défenseurs de Verdun. L’agressivité et le désespoir véhiculés dans le récit est à mettre en parallèle avec ceux de Méric dans " la Der des ders " et ceux d’autres romans – non conjecturaux- de Malaparte et de Dorgelès. " L’Ingénieur von Satanas " entonne le chant du cygne d’une Europe défunte et de sa future éclipse de la scène de l’histoire. Un livre prémonitoire composé par un utopiste d’une valeur inégalée.

  5. Type: livre Thème: menaces végétales Auteur: Harry Adam KNIGHT Parution: 1985
    A Londres, une série de contaminations par des Champignons terrifiants inquiètent les autorités. La responsable en est une biologiste, Jane Wilson, qui,  avec les meilleures intentions d’éradiquer la faim dans le monde, a provoqué une mutation du mycélium à l’aide d’un virus. Les résultats, par suite d’une dispersion accidentelle du catalyseur, dépassent toutes les espérances. Les spores, par milliards, s’infiltrent dans les corps animaux et humains, en les transformant en « choses » monstrueuses :
    « A première vue, la grosse femme noire semblait intacte. Puis Carter remarqua les profondes gerçures qui crevassaient ses membres et son torse. Il étudia son visage. Les yeux étaient ouverts mais la surface des globes oculaires étaient ternies par un voile gris. Le même duvet gris tapissait les fissures dans sa peau. Heureusement, elle ne respirait pas. »
    Carter lui-même, le médecin qui avait donné l’alerte, n’échappera pas à l’infection :
    « La tête de Carter disparaissait sous d’épaisses écailles brunes aussi rugueuses que l’écorce d’un arbre. Elles s’enfonçaient à l’intérieur du col de sa chemise trop ample pour en gonfler les épaules. Seul son œil gauche était encore visible au fond d’une fente dans les croûtes. Une crevasse s’ouvrit à l’endroit où aurait dû se trouver sa bouche. Sa voix était rauque et sifflante. »
    La contamination se répand à une vitesse foudroyante, transformant la ville de Londres et ses habitants. Une équipe d’intervention est mise en place pour récupérer la formule du Dr. Wilson qui seule permettra de sortir de la catastrophe. La Task force comprend le mari de Jane, Barry, enlevé de force à Belfast où il résidait, et qui seul sera capable de retrouver son épouse à Londres, Le Dr. Kimberly Fairchild, une jeune femme spécialiste des champignons et Gloocok, un baroudeur sans scrupules, exclu de l’armée pour meurtre.
    Dans un half-track puissamment armé, ils s‘ouvrent un chemin vers l’enfer, temporairement immunisés contre l’infection. Ils n’auront qu’une semaine devant eux pour éviter une dissémination  de l’horreur à l’échelle de la Grande-Bretagne.
    Les hostilités entre Barry et Gloocok, qui auraient pu mettre en péril la mission, seront gommées par la vision d’apocalypse qu’offre la ville noyée sous le mycélium :
    « A l’approche de Londres le paysage devint terriblement déprimant. Le tissu urbain était trop dense pour qu’ils puissent éviter systématiquement les agglomérations. Elles étaient méconnaissables sous leurs couvertures surréalistes. Aucun angle droit, les maisons disparaissaient sous des tumulus informes. Entre les bâtiments poussaient de monstrueux bolets, coulemelles ou clavaires. Des coprins chevelus étalaient leurs tignasses noires et gluantes sur les trottoirs. Les boules blanches des vesses-de-loup avaient la taille de stations radar. Les champignons sortaient à l’évidence vainqueurs de la guerre qu’ils livraient à l’humanité. »
    Autour d’eux des zombies, êtres vivants transformés, les traquent sans relâche. Ils subissent aussi des bombardements d’une variété géante de spores, les « sphaerobolus », attirées par la chaleur dégagée par le half-track. Lorsque les spores envahissent finalement l’habitacle, les membres de l’équipe présentent un début de contamination alarmant :
    « Wilson continuait à dormir. La moisissure remplissait tout l’habitacle mais elle n’était pas assez dense pour vraiment gêner sa respiration. Elle avait dévoré ses vêtements et sa couverture sans qu’il en prît conscience. Ses hyphes, en fait, n’avait rien laissé d’organique qui leur fût accessible ; Ils avaient dissous ses cheveux et digéré les particules de nourriture coincées entre ses dents. S’infiltrant dans tous ses orifices, ils avaient vidé ses intestins, curé ses oreilles, dégagé ses narines du mucus desséché. En même temps, ils s’attaquaient aux cellules mortes de son épiderme. Ce fut ce qui le réveilla : une insupportable démangeaison. »
    Obligés de laisser leur véhicule, ils poursuivent la quête à pieds ; s’ouvrant la voie aux lance-flammes qui grille d’innombrables formes semi-humaines et semi-végétales, ils progressent très lentement. Kimberly sera capturée, puis violée par un Gloocok répugnant, tout couvert de mycélium. Wilson, poursuivant bravement sa route vers le quartier d’Oxford découvre enfin le repaire de Jane, au sommet de la tour de la Grande Poste de Londres,  où elle réside, gardée par des fidèles végétaux. La rencontre avec Jane est explosive. Son ex-épouse semble encore normale et veut persuader son ex-époux de se « convertir au nouvel ordre », comme s’il devait entrer en religion. Mais  Barry ne s’en laisse pas conter : décapitant Jane à coups de barre de fer, il met à jour un être monstrueux, une forme de vie symbiotique intelligente, totalement étrangère à l’humanité :
    « Décapité, le corps de Jane chancela devant lui. Un filet de liquide vert suinta de la blessure et se perdit dans le col de la blouse. Battant des bras, le cadavre fonça vers Kimberly. Il frappa de sa barre de fer. La lance improvisée transperça la poitrine sans rencontrer de résistance. La chose fit encore quelques pas puis s’écroula. »
    Il n’en est pas sauvé pour autant ; traqué par les autres entités, il se réfugiera sur la terrasse du toit de l’immeuble pour y attendre un hypothétique secours.
    « L’immonde invasion » se présente comme un roman gore, mais aussi comme une texte enlevé d’épouvante pure, aux descriptions soignées. Les scènes de frénésie, l’étrangeté d’une nature devenue folle, nous empêchent de quitter le récit, qui, pour une fois, s’achève dans le pessimisme le plus noir. Le roman se donne comme l’exercice de style d’un grand écrivain qui semble s’y être beaucoup amusé.

  6. Type: livre Thème: savants fous et maîtres du monde, épidémies Auteur: Valéry D'AMBOISE Parution: 1972
    Alpha Agent Supra Normal légèrement télépathe, Albin de Reynier, amateur de belles filles, de belles voitures, très fortuné, travaille dans l’organisation ultra-secrète – tellement secrète que les collaborateurs ne se rencontrent que masqués-, à savoir l’O.M.D.R.A.H. (Organisation de Défense de la race Humaine), dirigée par « Lui », le patron.
    Aujourd’hui, sa mission est d’apprendre pourquoi il naît tant d’enfants tératomorphes. Avec son ami, le médecin et play-boy José Mirnal, après une ultime réunion dans « la Maison du Bout du Monde » à Genève, siège de l’organisation, ils se mettent en chasse.
    Leur piste croise sporadiquement celle de Leïna, alias Gunnar, une autre agente secrète de l’O.M.D.R.A.H. Ils pratiquent un métier dangereux car les agents qui échouent sont « grillés », au propre comme au figuré. Leurs armes ? Des pistolets à ultra-sons inventés par le professeur François, le « premier Sage du Conseil des Agents Secrets ».
    Leur enquête les amène à soupçonner la dangerosité d’ une crème contre les vergetures, utilisée par une majorité de femmes enceintes, vendue par les laboratoires N.A.I., filiales des laboratoires Serfati à Münich, dépendants du trust Hans Büchnergeselschafft.
    Là, Albin –après moult démêlées amoureuses- visite les locaux de l’usine,  établissant la preuve de la culpabilité de la société allemande et aussi – ô surprise ! – que le véritable responsable de l’infection est « Lui », son chef bien aimé.En attendant, le fléau se répand mais dans le domaine viticole : en France, toutes les vignes dépérissent sous l’action d’un second produit nocif (ce qui est un crime majeur, convenons-en.)
    « Lui » est un ancien nazi, infiltré au poste le plus élevé de l’O.M.D.R.A.H., manipulant ses agents secrets, décidé à prendre sa revanche sur la race humaine qui n’a pas été gentille avec lui :
    « Un éclair fulgura dans le regard du vieil homme. Pourquoi ? parce que ces fléaux justement ont abâtardi la race ; parce que malgré une lutte de dix années, nous ne sommes pas parvenus à combattre valablement la pollution qui est devenue morale. L’humanité toute entière est arrivée au bout du monde (sic !), au point de non-retour. L’O.N.U., du vent. Les discussions des diplomates verbeux et verreux n’aboutiront jamais. Notre travail est transformé en fumée au fur et à mesure. L’homme est pourri. Il faut changer de politique. Tout recommencer à zéro, repartir sur des bases neuves. »
    Albin met les bouchées doubles pour démasquer « Lui », avec l’aide de sa petite amie noire de Munich, Linda. Pourtant, il ne pourra éviter la mort du professeur Schussman, une sinistre crapule, responsable de la fabrication du virus à tératomorphe, mélangé à la crème pour vergetures.
    « Lui », serré de près, se révèle à l’agent Alpha qu’il veut gagner à sa cause,  prétextant qu’il est trop tard pour arrêter l’expansion d’un gaz répandu à Munich, lequel, en quantité infinitésimale, provoquera la mort de milliers d’individus. Mais Albin ne veut pas collaborer avec « Lui ».  Subséquemment, l’assassin de haut vol le transfère à Genève pour une dernière confrontation avec les autres agents secrets au sein de l’O.M.D.R.A.H. Sont-ils des bons ou des mauvais? Le lecteur ne le saura jamais,  tandis que Gunnar, toujours sur sa piste parallèle, se fera définitivement griller le cerveau « prête à devenir enfin une bonne épouse » (Je cite.)
    Grâce à son ami José averti par ondes psy, Albin se sort du pétrin. A eux deux, ils démasquent le terrible « Lui » qui n’est autre que – ô stupeur et tremblement !- le bon professeur François.
    Un récit de bric et de broc, à la limite du pathologique dont notre résumé aura au moins l’heureux effet d’écarter le courageux lecteur qui tenterait de se frotter au texte. Quant aux autres… ils n’avaient qu’à se renseigner avant!

  7. Type: livre Thème: invasions d’insectes, menaces telluriques Auteur: FEVAL fils H.G. MAGOG Parution: 1924
    La petite troupe regroupée autour d’Oronius, le Maître, au sein de l’extraordinaire engin volant l’Alcyon-car, se retrouve au pôle sud où l’attend une monstrueuse race d’insectes géants et intelligents inconnus jusque là de l’humanité. Perçant le camouflage opaque mis en place par ces êtres mystérieux, l’Alcyon atterrit à la base d’une haute tour entièrement close sur elle-même. L’atmosphère respirable et le froid dompté par le rayonnement solaire redirigé par des miroirs ont crée autour des tours un curieux jardin :
    « C’était un parc-jardin, peuplé d’étranges arbres aux silhouettes caricaturales ou horribles. Ils n’appartenaient à aucun espèce connue et devaient avoir été obtenus par de fantastiques greffes, croisant le règne végétal et le règne minéral, même avec certains échantillons du règne animal. En contemplant les produits crées, les spectateurs ne pouvaient songer sans épouvante au jardinier dément qui avait conçu ces combinaisons diaboliques et créé ce décor de cauchemar. »
    En sortant de leur véhicule pour traverser cet espace, Laridon le méccano, Turlurette sa fiancée, ainsi que Cyprienne la propre fille d’Oronius, sont agressés par des êtres mi-plantes, mi-animaux, sortes de chimères fantastiques. Oronius lui-même est happé par les tentacules d’une femme-pieuvre végétale :
    « Projeté par la baie où se tenait la splendide créature, quelque chose se déroula en sifflant et s’abattit sur l’indiscret. Et successivement, comme autant de cordes souples et vivantes, neuf autres tentacules fendirent l’air pour venir l’envelopper comme autant de lassos. Il remarqua avec effroi que ces tentacules affectaient la forme du bras, d’une longueur démesuré. Faits de chair blanche, douce et tiède, ils se terminaient par de petites mains nerveuses, dont les paumes formaient ventouse. »
    Il devra son salut aux insectes géants qui le libèrent, non par bonté, mais parce qu’ils ont besoin de ses services. Car ces insectes sont des ennemis de l’humanité , sur le point de passer à l’attaque, aidés par les deux ennemis mortels d’Oronius, le (gros) savant fou Otto Hantzen et sa groupie, la redoutable Yogha, arrivés sur place avant nos amis. Oronius absent et introuvable, les autres membres de l’équipage, sous la conduite de l’ingénieur Jean Chapuis, et sur les ordres mêmes du Maître qui a pu communiquer avec eux en établissant une « voûte magnétique », reprennent tristement le chemin pour Paris. Lors de leur survol de la France ils purent constater à quel point le pays avait déjà souffert d’un cataclysme antérieur :
    « Des ravages causés par la vague de feu qui avait embrasé l’air et desséché les mers, puis par l’escamotage momentané de l’atmosphère respirable, Jean Chapuis ne pouvait se faire une idée. (…) La traversée du continent africain ne pouvait qu’aggraver ses inquiétudes. De tous, c’était celui qui avait le plus souffert. A la vérité, dans son étendue, l’œil des aviateurs ne rencontrait plus que mort et désolation.
    Heureusement, en survolant l’Espagne, puis la France, Jean Chapuis éprouva, malgré tout, une sorte de réconfort. Là, le malheur n’était ni aussi grand, ni aussi définitif qu’il l’avait craint. Des hommes avaient survécu ! Il en eut la preuve indéniable  en remarquant des centres habités. Si, dans son ensemble, l’humanité avait été décimée par les cataclysmes, on n’avait pu l’anéantir complètement.(…)
    La vie avait donc pu reprendre et déjà, sur les principaux points du continent européen, américain et asiatique, les survivants épargnés relevaient les ruines et s’efforçaient de faire disparaître les conséquences du fléau. »
    Dans la capitale même, l’ambiance est détestable. Tous les animaux de la «Fauverie », une immense réserve zoologique  aménagée au sein de la cité, ont disparu, semble-t-il sur l’instigation de singes apparemment doués de facultés cérébrales supérieures :
    « Les messages avaient dit vrai ; les réfugiés n’exagéraient point. Démontrant tout à coup une volonté intelligente de conquête, une armée d’animaux, parfaitement disciplinée, et opérant méthodiquement, selon les procédés humains, s’était mystérieusement concentrée et venait d’entrer en guerre contre l’humanité. »
    C’est le prélude d’une invasion partout en France et surtout à Paris, d’animaux devenus intelligents et se révoltant contre l’homme :
    « Ainsi, des singes humanisés commandaient cette étrange armée. Et les aptitudes particulières de chaque catégorie d’animaux y étaient utilisées avec une discipline et une intelligence tenant du miracle. (…) Le règne animal en révolte avait ses troupes de pied et ses troupes de selle, ses cohortes de jour, ses phalanges de nuit. Aux heures de ténèbres, les bêtes et oiseaux nocturnes  se ruaient sur les combattants harassés. Les yeux des hyènes, des lynx, ceux des hiboux, des chouettes et des chats-huants brillaient dans l’ombre et semaient la panique. Les hommes s’imaginaient être entourés d’un cercle diabolique.
    Plus terribles que les bêtes sauvages qu’elles avaient été et dont elles conservaient la force, les bêtes humanisées possédaient sur les hommes l’appréciable supériorité de la diversité des formes et des aptitudes. Elles avaient leur cavalerie, légère ou lourde, où servaient les animaux rapides, tels que les lévriers ou les chevaux de sang, ou les puissants taureaux dont la course ébranlait le sol et dont la charge était irrésistible. Elles avaient aussi leur aviation, constituée par toutes les variétés d’oiseaux. Enfin, pour la guerre de sous-bois et d’embuscade, elle avait ses grimpeurs, les singes et les chats, les félins, tout ce qui peut se couler entre les buissons, se tapir dans un fourré, se tenir aux aguets à l’extrémité d’une branche pour bondir sur l’ennemi et le déchirer de ses griffes. »
    Même Pipigg et Kukuss, les deux chiens-papillons, mascottes du groupe, enlevés, leur reviennent avec beaucoup d’intelligence et d’amour (ce qui ne les change guère) dans le regard.Dans le laboratoire d’Oronius à Belleville, leur base secrète, les voyageurs entendent à nouveau la voix du maître qui leur explique que la transformation cérébrale des animaux est l’œuvre des insectes géants afin de constituer le fer de lance d’une invasion de la Terre décidée par ces êtres prêts à quitter leur repaire polaire.
    Ayant pratiqué des opérations cérébrales sur une série de singes, ils en ont fait les meneurs  du mouvement. Sommés par les singes de se révolter pour faire diversion, ils ne constituent que le tout début des événements, le véritable plan, initié par Hantzen et Yogha étant d’arrêter transitoirement la rotation de la Terre. Le froid et la nuit devraient désorganiser les villes européennes pour que les insectes puissent prendre partout le pouvoir sur les humains, se réservant d’intervenir en Amérique et en Asie plus tard :
    « Le gel s’aggravant, il avait fallu se calfeutrer dans les appartements et vivre chichement sur les maigres provisions existant ; on pouvait à peine se risquer  dans les rues glaciales enténébrées. La mort y guettait à chaque pas les infortunés mal entraînés à cette température polaire. Toute vie s’était arrêtée. On se mouvait à peine ; On grelottait en pleine obscurité, et cette ombre trop réelle qui environnait les Parisiens était en même temps l’image fidèle de celle où se débattait le gouvernement, racorni dans sa détresse. »
    C’est par une mystérieuse « poussière violette », extraite du sous-sol boréal en énormes quantités que Hantzen et Yogha déclenchent un processus d’apocalypse, le flux magnétique de cette poudre ayant le pouvoir de freiner la rotation terrestre dans un délai de vingt-quatre heures :
    « L’embrasement du sommet fut complet en un instant ; toute sa surface était devenue incandescente et dégageait les flammes qu’Oronius venait d’apercevoir. Violettes à la racine, elles devenaient pourpres à quelques centimètres du brasier : elles se courbaient alors et s’allongeaient en se décolorant. Ah ! quel fantastique spectacle ! Leurs langues continues dépassaient maintenant le rebord de la montagne; elles filaient toutes selon une direction horizontale, s’étirant en longues lignes blanches qui s’en allaient rejoindre l’horizon. Elles ressemblaient ainsi à une chevelure de comète, mais de comète fixe sur laquelle aurait soufflé un vent violent. Oronius put remarquer qu’elles suivaient une direction inverse à celle de la rotation terrestre. »
    Le plan fonctionne à merveille et la nuit s’installe sur l’Europe :
    « Dès lors, des nouvelles aussi stupéfiantes qu’alarmantes se succédèrent sans interruption : une vague de froid glacial qui croissait d’instant en instant s’abattait sur la capitale. On ne pouvait songer à remettre en action les phares du solarium, car toute l’énergie disponible devait être consacrée sans retard à sauver les Parisiens de la mort par congélation. Avant tout, il fallait parer au plus pressé ; ce premier danger conjuré, on verrait, avec les moyens réduits dont on disposait, à éclairer la situation. Paris demeura donc dans l’ombre. Car le fait invraisemblable fut confirmé: le jour n’avait pas paru ; le disque solaire, pour la première fois infidèle, ne s’était pas montré au-dessus de l’horizon. »
    Les humains, désorganisés ne résistent pas longtemps aux hordes d’insectes volants investissant les centres de commandement :
    « Lorsqu’une de leurs armées descendit sur la capitale des Etats-Unis d’Europe, terrorisée et transie, elle ne rencontra aucune résistance. Les Parisiens engourdis virent tout à coup leurs demeures envahies par des êtres si étranges qu’ils crurent à un cauchemar (…) L’Europe entière était au pouvoir des Polaires ; les armes avaient été détruites et les humains, dépossédés, erraient en troupeaux lamentables, apeurés, harcelés par des gardiens impitoyables. Partout, dans les palais, dans les usines, dans les ministères, les insectes géants s’étaient substitués à l’homme. » (…)
    Dans les champs, des paysans, accouplés par le front avec les liens du joug, tiraient la herse ou la charrue sous la menace de l’aiguillon ; d’autres cinglés de coups s’épuisaient à entraîner les lourds véhicules auxquels leurs bourreaux les avaient attelés. Il y avait l’homme-boeuf, l’homme-cheval et l’homme-chien. Partout des colliers, des laisses et des muselières, partout la schlague domptant les révoltes de l’orgueil. Et force était bien alors à ces malheureux de reconnaître que, sans la supériorité physique, aucune autre supériorité ne compte. L’intelligence ne domine qu’à condition de pouvoir s’imposer par la précision de ses armes ou la force de ses poings. »
    Mais au pôle se produit un phénomène inattendu. La partie excavée s’effondre, entraînant un large bloc de terre qui se met à dériver à l’instar d’une énorme île flottante qui entraîne Oronius enchaîné par ses ennemis tandis  qu’ eux s’installent confortablement à l’abri dans leur forteresse souterraine. Alors que tout semble perdu pour le Maître impuissant près de son rocher, il sera libéré par l’Alcyon-car, transformé en sous-marin pour la circonstance, conduit par Jean Chapuis le disciple, Laridon et tous ses amis. Depuis longtemps, ces derniers avaient repéré la trace électromagnétique laissée par l’île maudite sur la mer, dérivant en direction de Gibraltar.
    Hantzen et Yogha, attendus par le groupe, dès leur sortie à l’air libre, sont faits prisonniers, ramenés en leur repaire, enfermés à double-tour. Le Maître reprend avec plaisir les commandes de l’Alcyon et surtout de l’extraordinaire « main volante  d’Antinéa », un artefact bio-technologique rapporté de leur aventure précédente en Atlantide, qui constituera une arme décisive pour enlever l’un des insectes conquérants, à fins d’étude :
    « A présent qu’il pouvait les observer à loisir, force était à Oronius de constater quels points communs ils présentaient avec la race humaine. Les attaches et les extrémités des membres antérieurs et inférieurs offraient avec nos bras et nos jambes une frappante analogie. Ils se terminaient par des mains et des pieds absolument semblables à ceux des anthropomorphes. La solidité de leur corselet, plus semblable à du cuir durci qu’à un épiderme humain, marquait la seule différence notable entre les deux races –la forme humaine mise à part, bien entendu. Mais les poignets, doigts et phalanges se révélaient aussi parfaitement articulés que ceux des hommes. La gaine naturelle et protectrice qui les revêtait ne gênait en rien leurs mouvements ; elle constituait donc une supériorité sur la trop grande vulnérabilité de notre enveloppe charnelle. »
    Durant la traversée, Turlurette prise pour Cyprienne,  est enlevée par l’ennemi qui, croyant tenir la fille d’Oronius et qui espère s’en servir comme monnaie d’échange. Au grand dépit de Laridon, le Maître a pour l’immédiat d’autres préoccupations que de la libérer, comme celle de construire la machine infernale qui éradiquera les insectes, ou celle de prendre contact avec les Américains auxquels il demande d’intervenir :
    « Heureusement, la race américaine a toujours su réaliser des prodiges et multiplier la main-d’œuvre pour supprimer la question de temps. Elle est de celles qui brûlent les étapes et se plaisent à achever en quelques heures ce que d’autres eussent poursuivi, lentement, pendant des années. Le caractère ouvrier n’est point partout le même. En moins d’une semaine, sous l’impulsion d’Oronius, le résultat cherché était obtenu. »
    Son arme secrète sera basée sur l’extrême sensibilité des insectes à l’alcool découverte par le meccano. Oronius déclenchera des vents d’une violence extrême gorgés d’effluves alcooliques qui feront sombrer ses ennemis dans un profond sommeil d’une durée suffisante pour que les troupes américaines puissent les mettre hors d’état de nuire. Comme l’opération mise en place paraît trop longue à l’impatient Laridon, il vole l’Alcyon-car et la main d’Antinéa, dans le but de délivrer lui-même sa gentille Turlurette. Celle-ci sera libérée au cours de l’engagement mais l’extraordinaire engin avec toutes ses armes disparaîtra dans la tempête.
    « L’Humanité enchaînée » est le quatrième épisode d’une série, qui en compte cinq, « les Mystères de demain », écrite en commun par Féval Fils et H.J. Magog, série de toute rareté dans le champ de la littérature populaire scientifique. Une imagination folle, un feu d’artifice d’invention plus étonnantes les unes que les autres, le rythme soutenu du texte, en font une œuvre unique de l’anticipation ancienne française, qui soutient la comparaison avec tous les pulps d’outre-Atlantique. Les thèmes les plus divers y sont traités. Evoquons dans le désordre la thématique des Grands Sages , celle des Savants fous , de la Cité souterraine, du Pôle habité, des Intraterrestres, de l’Atlantide, des Robots et de la Bionique, et, gardant le meilleur pour la fin, le thème cataclysmique, objet de notre présent répertoire. A quand une réédition grand public de l’ensemble de la série ?

  8. Type: livre Thème: invasions extraterrestres, la nouvelle glaciation Auteur: Robert CLAUZEL Parution: 1971
    Le journaliste Germain Laurent assiste, au lieu-dit «l’Arouette», au sud de Chartres, à l’arrivée d’une soucoupe volante qui libère des " choses noires " sur le sol. Il passe pour un fou lorsqu’il en parle à ses concitoyens, notamment à l’inspecteur Bouffard.  Obsédé par sa vision, Laurent se met à fouiller le terrain d’atterrissage et met à jour un " objet noir " qui semble vivant et dangereux puisqu’il annihile tout être vivant à sa portée. L’être qui sort de terre se présente comme une sorte de cellule gigantesque en croissance rapide, absolument invulnérable à toutes les attaques.
    Le Cosmozoaire – c’est son nom- représente le mal absolu car il parvient (on ne saura pas comment) à dévier la terre de son orbite, en l’éloignant du soleil, ce qui la plongera dans une nouvelle ère glaciaire avant de la faire disparaître définitivement dans le néant et ses habitants avec elle :
    " Le niveau des océans et des mers baisse partout puisque l’eau n’y retourne plus par les rivières gelées, continua le Dramalien. Par conséquent, le fond des mers supporte un poids moins important, et se fissure par contrecoup, sous l’effet de la pression interne. Il y a de véritables tremblements de terre, de vraies éruptions volcaniques sous-marins. Des laves d’une température de plusieurs milliers de degrés font irruption dans les abysses, provoquant  un réchauffement brutal de toutes ces énormes masses liquides, des torrents de vapeur d’eau surgissent à la surface…, l’évaporation s’accentue, s’aggrave…, le niveau des océans continue à baisser. La Terre va être entourée de nuages de plus en plus denses, le jour va s’obscurcir encore (…) Les hommes vont se réfugier dans des cavernes, toute vie s’arrêtera. "
    C’est du moins ce qu’affirment les compagnons d’Arièle, Claude Eridan, Gustave Moreau (eh oui !) et Arssette de Dramalia, originaire de la planète Anisotroppa, tous opportunément venus  au secours de la Terre de très, très loin (des " milliards de milliards d’année de lumière " ), appelés à l’aide par le Professeur Béranger dont Arièle est la fille, partie filer le parfait amour avec Claude sur la planète Gremska  et restée, malgré la distance,  en liaison constante avec son papa.
    Il était plus que temps : la planète Terre s’enfonce de plus en plus dans un néant ténébreux. Heureusement, l’idée de génie d’un savant du CNRS (Ah ! les savants français !) consiste à  alimenter l’entité avec une nourriture " dextrogyre ". Comme elle est constituée de substance " lévogyre ", comme vous et moi, cette nourriture la tue. Tout se remet en place et nos héros pourront reprendre une activité normale.
    Un tutti frutti de notions pseudo-scientifiques mal assimilées, un zeste de spiritualisme satanique, un comportement de franchouillard attardé, un style proche de la simplicité évangélique et voilà un roman-catastrophe qu’il vaut mieux éviter.

  9. Type: livre Thème: Adam et Eve revisités, la cité foudroyée Auteur: Jean SUBERVILLE Parution: 1927
    Le récit s’ouvre sur la domination du monde par le bolchevisme. Paris en est devenue la capitale mondiale :
    « Par-dessus la ville immense, sur la colline ensoleillée, le temple de l’humanité qui n’est autre que l’ancien Sacré-Cœur de Montmartre, érigeait dans le ciel gris-bleu ses coupoles byzantines gris-blanc dont le faîte arborait, à la place de la croix abolie, les signes jumelés de la faucille et du marteau. »
    Elle a été vaincue après une résistance molle contre l’alliance honnie:
    « Les Germano-Russes investissent la capitale et la soumettent à un bombardement apocalyptique. Les socialistes ont compris ; ils passent le bouclier à leurs collègues communistes. Drapeau blanc. Armistice. Entrée dans Paris. Drapeau rouge. Alors, l’Arc de Triomphe et les Invalides, le Louvre et Notre-Dame, mille ans de notre histoire servent de cadre à ce spectacle : Attila qui passe, tandis que des politiciens courbent leurs tête chenue et leurs lauriers civiques sous sa botte, que des éphèbes asexués zézayent des dithyrambes aux naseaux de son pur sang dégoûté ; que des folles aux noms historiques jettent des fleurs à ses hordes, et que la foule en délire, le fameux  prolétariat, acclame ses bourreaux qui viennent le libérer. »
    Maintenant y siège Savourine, Petit Père des peuples, leader mondial, « Président du Conseil Central de l’Union Internationale des Républiques Socialistes et Fédérative des Soviets», avec son bras droit Armenof, juif rusé et roublard, chef de la police. La capitale de la France est dans un état lamentable :
    « On n’apercevait qu’une grisaille uniforme, trouée de vides noirs où gisaient des ruines définitives, et marquées de taches rougeâtres que faisaient les constructions soviétiques. L’aspect intérieur n’était pas moins lamentable. Depuis longtemps les ravaleurs ne rajeunissaient plus les façades lépreuses, et à jamais s’était endormie la vigilance urbaine qui maintenait la beauté des perspectives. La vieille cité, vouée à la décrépitude, attendait, elle aussi, de mourir.»
    Lorsque Savourine prend la parole c’est pour constater l’immense difficulté des Soviets d’éradiquer les pulsions naturelles de la vie, l’Ego de l’individu, toujours en embuscade. Bien que le Prolétariat ait partout étendu son empire, il semble être arrivé à une impasse, car il n’arrive pas à faire plier la Nature sous sa volonté. A cause de cela, dans son discours approuvé par tous les Bolcheviks orthodoxes, Savourine ordonne la mise en œuvre du « Grand Soir » qui aura lieu en septembre de l’an 2000 :
    « Ah ! s’il existe un dieu, qu’il soit maudit ! Qu’il soit maudit, ce méchant accoucheur d’un monde avorté !(…)
    Ah ! ce dieu pervers a bien enchaîné Prométhée, et son immortel vautour a dévoré notre cœur inépuisable ! mais Prométhée va mourir enfin ! Et, ramassant toutes les malédictions lancées depuis le commencement des siècles contre le tyran divin, nous lui cracherons à la face avec notre dernier souffle, en lui criant : « Vive ma mort ! Vive ma mort ». A ce mot, l’immense foule se leva et répondit en un écho formidable qui fit trembler le puissant édifice : «Vive ma mort ! »
    Il importera d’éradiquer la totalité de l’espèce humaine, de faire « sauter le monde » pour empêcher définitivement l’Ego individuel de saboter l’idéal communiste. Tout sera  mis en œuvre en ce but pour que, dans un délai d’un an, à l’heure prescrite, les cadres du Parti, après avoir piégé les différentes villes, bâillonné les opposants éventuels, détruits, brûlés, gazés tous les malheureux en désaccord avec leur grandiose projet, puissent provoquer la catastrophe finale.
    Ce discours fut suivi par une fête où apparut Nadia, la propre fille de Savourine, dans une danse païenne. La toute jeune fille subjuguera Claude Véron, un jeune ingénieur d’Occitanie, qui tombera éperdument amoureux de celle-ci, sentiment « bourgeois » par essence, et donc interdit.
    Son attitude attire l’attention d’un mystérieux personnage âgé, bibliothécaire de son état, prénommé Patrice,  qui promet de tout mettre en œuvre pour que Claude puisse rencontrer Nadia. Patrice, ancien   ami de Savourine,  est surtout le dernier prêtre en activité : il songe à faire fuir le couple hors de l’universel gâchis. Patrice fait admettre Claude au sein d’une sous-commission, présidée par Armenof, chargée de préparer la sape de la salle du Grand Conseil, lors de la destruction finale.
    A la  première rencontre entre les jeunes gens, Nadia, comme toute bolchevique sincère, s’offre à Claude, mais ce n’est pas ce que le jeune homme attend d’elle.  Partout dans le monde les opposants sont traqués et éliminés de toutes les façons possibles :
    « Quant aux récalcitrants qui tentaient de s’échapper dans cet effarant désert interdit, les équipes spéciales les tuaient comme des chiens, après les avoir soumis à des tortures variées, quand elles en avaient le temps. Chaque soir, du côté de Vincennes, le canon tonnait. La bombe éclatait, la mitrailleuse crépitait : c’étaient les condamnés qu’on expédiait par masses dans l’autre monde. On ne chômait pas non plus au Père-Lachaise. Dans une vaste cour rectangulaire, aux dalles humides, d’où montait une forte odeur de chlore, sous la surveillance des gardiens, la baïonnette au canon et le fusil chargé en bandoulière, opéraient des équipes de forçats incinérateurs, à demi-nus, hirsutes, ruisselants de sueur. Les lourds camions arrivaient à heure fixe, apportant leur cargaison funèbre. Deux hommes se hissaient dessus, piétinant les corps avec indifférence. Ils prenaient les cadavres, l’un par les pieds, l’autre par les épaules, et hop ! les balançaient par-dessus bord vers deux camarades qui les recevaient au hasard de la chute et les disposaient en tas.
    Souvent, le mort n’avait plus de tête, ou n’avait plus de jambes, ou se réduisait à un tronc affreusement mutilé. C’était alors, du camion à terre, une volée de tronçons humains ramassés et jetés à la fourche et à la pelle. Telle était la moisson bolchevique. (…)
    Au fond, occupant tout un côté de l’immense cour, étaient rangés les fours dont les gueules aux deux battants de fer, laissaient voir, quand elles s’ouvraient, des ventres de briques énormes et voûtés, où s’entrelaçaient et sifflaient les souples serpents des flammes.»
    Mais Armenof a peur : il ne veut pas mourir ! Il compte sur l’amour paternel de Savourine envers sa fille pour sauver sa propre peau. Pour cela, il importe de faire des avances à Nadia. Le dîner offert à Nadia par Armenof se passe mal : elle refuse les avances bestiales du juif renégat, se rendant enfin compte que son désir se porte sur Claude.
    A nouveau, Patrice arrange une deuxième rencontre entre les jeunes gens, lors d’une messe secrète qu’il célèbre en présence de rares fidèles anonymes par crainte des représailles. L’heure fatidique approche, durcit les attitudes. Armenof, qui a fait suivre Nadia, triomphe,  en s’emparant du couple et de Patrice.
    Il oblige Savourine, en réunion plénière, à condamner sa propre fille. Ce dernier cède à la contrainte mais promet de se venger. Quant à Claude et Patrice, ils seront emprisonnés. Le premier servira comme fossoyeur aux fours crématoires du Père-Lachaise, le second, pour qui Armenof a réinventé les « fillettes » de louis XI, dépérit, oscillant entre la vie et la mort, jusqu’à ce qu’un de ses fidèles le délivre.
    Le dernier jour de septembre s’annonce. A minuit, Savourine déclenchera l’apocalypse. Armenof fait enlever Nadia de son cachot pour s’envoler avec elle vers une retraite sûre, dans le sud de la France. Mais il avait oublié la haine de Savourine à son égard qui l’oblige, devant tous les cadres bolcheviks, à s’enfermer avec lui dans le poste de commandement – qui deviendra leur tombeau- sous la surveillance d’Oural, un prolétaire de base, mastodonte incorruptible et sans pitié, d’où ils devront présider à la mise à mort de l’espèce humaine.
    Nadia sera retrouvée par Claude, juste à temps délivré de sa géhenne par un Patrice moribond. Traversant Paris en feu, le jeune couple s’envolera à bord de l’avion d’Armenof au moment même où la capitale, comme de nombreuses autres villes, est foudroyée. Savourine et Armenof, ayant voulu reculer devant leurs responsabilités, se sont entretués et c’est Oural, le prolétaire, qui déclenchera l’apocalypse, en appuyant sur le bouton fatal :
    « Minuit. Le camarade Oural, au nom du prolétariat souverain, avait sans hésitation déclenché la fin du monde. Alors, ce fut inexprimable. Paris et la terre sautaient dans une cataracte ininterrompue de foudres et de tonnerres. Etouffant les longs ululement des foules épouvantées et le vacarme infernal des orchestres déchaînés jusqu’à la dernière minute de l’orgie ; bouleversant les ondes radiologiques qui continuaient à diffuser dans l’air, autour de la planète, le blasphème bolchevique ; éteignant toutes les lumières de son souffle monstrueux, la catastrophe éventrait la terre, balayait le sol, frappait le ciel.
    Les puissants édifices se soulevaient, se disloquaient et s’écroulaient comme de châteaux de cartes ; les hautes tours se rompaient comme des tiges d’avoine sèche ; les chaussées se fendaient et, béantes, vomissaient leurs égouts.
    Notre-Dame, le Trocadéro, le Panthéon, les Invalides, le Palais de Justice, le Temple de l’Humanité oscillaient sur leurs bases et s’éboulaient sur la ville avec un fracas effroyable. (…)
    Maintenant, la terre brûlait tout entière sous la torche des gigantesques volcans qui s’étaient ouverts à l’emplacement même des grandes cités. »
    Un pamphlet virulent du communisme totalitaire. Le récit, composé dans une vision chrétienne, expose, de manière quasi-prophétique, tous les crimes auxquels se livreront une dizaine d’années après la parution du roman, les dictatures européennes. L’aspect psychologique des personnages domine le rendu naturaliste de la catastrophe : un récit intéressant par ses outrances mêmes.

  10. Type: livre Thème: archéologie du futur, Adam et Eve revisités Auteur: Germaine PELLETAN Parution: 1950
    Jean, fatigué de la vie, est prêt à se soumettre à une expérience risquée qui a lieu à New York en 1967. Il s’agit de se faire momifier en quelque sorte, pour être projeté dans le futur, soit en 21950. Aussitôt dit, aussitôt fait.
    Joah est un membre à part dans la tribu primitive qui hante les abords sylvestres d’un très ancien lieu nommé New York. Il ne sait d’où il vient et son existence même lui semble floue. On l’a trouvé jadis dans une  pyramide. Amoureux d’Erica et ami de Land, il est craint par les autres qui le considèrent comme étrange.
    Une découverte fortuite faite par Land dans une crypte sise sous la pyramide réveille soudainement la mémoire de Joah / Jean. Il se rappelle  sa momification, sa vie antérieure, et reconnaît les objets réunis autour de lui à son intention.
    Ce qui lui inspire le sens de sa nouvelle mission : réinstaller  l’humanité dans une nouvelle gloire, loin de la sauvagerie. Il arrive à convaincre des jeunes gens pour qu’ils appareillent avec lui sur une caravelle, à se risquer au-delà des mers à fin de  vérifier si l’existence de Paris ne brille pas encore d’un haut niveau de civilisation.
    Après quelques péripéties, ils débarquent dans la baie de Saint-Cloud (proche de Paris à cause d’une submersion généralisée des continents) et visitent une ville en ruines :
    " Ils passèrent dans l’ancienne capitale française une semaine entière. (…) Les immenses gares se voyaient encore, à demi - écroulées ; des tronçons de rails rouillés, tordus, laissaient deviner que jadis, le trafic ferroviaire fut l’un des plus importants du monde. Ce n’était plus maintenant que le refuge des grandes chauves-souris et de porcs sauvages qui venaient y gîter. Des broussailles, des bouquets de ronces et de troènes poussaient à travers les éboulis, qu’ils enjambaient avec précaution. La Tour Eiffel, miracle ! comme si Paris ne devait jamais mourir, était encore debout, mais dans quel état ! Telle quelle était, elle signalait encore que là, la Ville Lumière fut. "
    Mais de trésors culturels, Paris en regorge. Joah/Jean en est émerveillé et retourne dans sa tribu new-yorkaise résolu à lui faire accomplir un pas de géant vers la science, ne doutant un seul instant que son ami et chef  Monrouti ne soit d’accord avec lui.
    Sa surprise est d’autant plus intense quand il apprend qu’il sera jugé, mis à mort comme ferment dangereux capable de déstabiliser grandement une société qui s’accommode fort bien de sa primitivité. Le destin de Jean sera finalement commué en bannissement et, une nouvelle fois, il s’embarquera en compagnie d’Erica, sa compagne,  à destination de Paris pour y fonder dans la solitude, la civilisation technologique dont il rêve.
    Une nouvelle qui émerge du  domaine de la littérature populaire de l’après-guerre. Une intrigue fortement argumentée et surtout une vision écologiste avant l’heure font de ce petit roman un petit objet littéraire  méconnu.