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Bienvenue dans la Base de Données des livres !

Vous y trouverez des ouvrages post-apo que la communauté souhaite partager. Il vous est possible de rajouter des fiches de livres, alors partagez vos trouvailles avec la communauté FoGen ! Une grande partie des ouvrages que vous trouverez sont ici grâce au travail de Jacques Haesslé sur son site : http://destination-armageddon.fr/index.html. Un grand merci à lui pour son travail exceptionnel !

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Livres

  1. Type: livre Thème: menaces et guerres nucléaires Auteur: Jean-Paul KLEE Parution: 1979
    Un écrit bref et inclassable entre le pamphlet, le manifeste politique, la diatribe, le dazibao et la vision apocalyptique :
    « - La cathédrale de Strasbourg s’écroulera sur les toits de la ville et les enfants de nos écoles maternelles – la terre tremblera jusqu’aux montagnes, jusqu’aux entrailles de DIEU – TOUTE L’ALSACE BRULERA (…) Tout SAUTERA jusqu’aux nuages, jusqu’à la barbe bleue de Dieu. – nous laisserons tout flamboyer, les forêts les récoltes la potasse, le pétrole du Rhin et la vigne, et le tabac. TOUT BRULERA, nuit et jour, les rivières et les églises, Marmoutiers, Hasslach, Colmar et Murbach et le Dompeter, les tapisseries, les manuscrit-des-Saints, les gravures de Dürer, les bouquins d’Albert Schweitzer et les marbres de Hans Arp!… »
    Jean Paul Klee dénonce la militarisation de la plaine d’Alsace, la présence du camp d’Oberhoffen et la centrale nucléaire de Fessenheim prête à répandre ses milliers de rems alentour, anéantissant toute culture et toute vie dans une région où, accuse-t-il, les habitants aseptisés et larvaires se laissent mener par le bout du nez. Par la même occasion, il évoque l’inanité de toute littérature qui désormais, en face de l’ultime danger, devra se réduire à l’essentiel, soit se vouer à la défense de la vie.

  2. Type: livre Thème: après la Bombe… Auteur: Jean-Michel LIENHARDT Parution: 1988
    Daniel, jeune adolescent de treize ans, vivant dans les environs de Québec, est resté seul avec son ami le chien Filou, dans le chalet familial. Les nouvelles sont mauvaises et mentionnent une tension internationale croissante. Profitant de l’abri anti-atomique savamment agencé par ses parents, il a la douloureuse surprise de s’apercevoir que le monde est passé de la théorie à la pratique. Québec soufflé par la bombe, les Laurentides en feu, un couvercle de ténèbres sur la nature en deuil,  voilà ce que montrent les caméras de l’abri :
    « Daniel poussa un cri de surprise et d’effroi. Un énorme brasier avait envahi l’écran. La vallée tout entière flambait. Fébrilement, il commanda à la caméra un mouvement de balayage vers le haut. Un immense nuage en forme de champignon emplissait le ciel, assombrissant l’horizon, là où normalement on aurait découvert le château Frontenac, la Concorde, les gros immeubles du gouvernement et des édifices modernes. Des volutes gigantesques roulaient les unes sur les autres. Certaines semblaient naître des précédentes pour alimenter la fumée opaque qui obscurcissait le firmament à perte de vue. Elles formaient une chape mortuaire qui couvrait la région tout entière. Pas possible ! Québec, là-bas, et toutes les villes environnantes. Mon Dieu ! »
    Il sait qu’il doit attendre que le cataclysme s’apaise. Il sait aussi que ses parents sont morts. C’est ainsi que commence une veille tragique de quelques mois où, soutenu par Filou, Daniel reste la seule personne sur terre à se soumettre à des occupations quotidiennes car la nourriture ne manque pas dans l’abri, ni même les livres.Vint enfin le temps de la première sortie. Engoncé dans son habit de survie, Daniel sera confronté aux cendres, à la dévastation, à la mort, sous la forme de squelettes ou de cadavres en décomposition qui sont tout d’abord ceux de ses voisins et amis qu’il aimait tant :
    « Il frotta une vitre du salon. Comme frappé en plein visage, il se rejeta en arrière. Non, non ! Pas vrai. PAS VRAI ! Instinctivement, il serra les poings et ferma les yeux. (…) Assis dans un fauteuil, un homme au visage décharné le fixait de ses orbites vides ! Comme le fixait de ses orbites vides une femme assise dans le fauteuil voisin ! Monsieur et madame Villeneuve. »
    Le choc de la découverte lui fait aussitôt réintégrer son abri, le temps d’assimiler la nature de la catastrophe universelle, ce qui le plonge sans transition dans l’âge adulte. Arrive aussi la grande solitude : Filou, qui a gambadé sans précautions autour de l’abri, meurt, irradié. Daniel sait qu’il doit aller de l’avant. Avec son vélo qu’il prépare soigneusement, il projette d’explorer la région chaotique qui s’étend devant lui.
    Il rencontrera deux exemplaires de survivants, gentils ou méchants selon le cas, bien qu’ils portent tous sur eux les stigmates de la lèpre radioactive. Yves, un homme de vingt neuf ans (il en paraît quarante), malgré son aspect repoussant, s’apparente aux gentils. Le premier moment de méfiance envolé, Daniel l’adoptera comme son père putatif et apprendra de lui les règles de la survie :
    « Il enferma l’enfant dans ses bras, longuement, fortement, presque à lui en faire mal. Sur l’autoroute en ruines, encombrée de milliers de voitures désintégrées, dans un cimetière où des milliers et des milliers de morts attendaient d’être inhumés, éclatait une image merveilleuse : un homme embrassait un enfant. Prodigieuse promesse d’un monde qui refusait de mourir. La tendresse avait retrouvé son droit de cité. La tendresse, la solidarité. Un lien venait de nouveau de se créer entre deux êtres humains. Et maintenant seulement, ils venaient de briser leurs solitudes. »
    Il lui sera précieux surtout à l’égard d’un clan familial, dirigé par une femme doucereuse mais dangereuse, Madeleine, dont le seul but sera de découvrir la cache de Daniel afin de la piller. Poursuivis par Richard, l’un des fils de la famille, Yves sera tué dans l’action et Daniel renvoyé à sa solitude.
    Poursuivants a quête, il fera peu après la rencontre de Raymond, un nouvel ami, qui est à la recherche de livres constituant, selon lui, la « mémoire des hommes ». Daniel, lui faisant confiance, lui indique la direction de son abri où Raymond pourra s’approvisionner. Durant ce temps, le jeune adolescent découvre un vieillard, le Père Martin, un gentil grand’ père qui vit en compagnie de Lise une charmante jeune fille de l’âge de Daniel, recueillie elle aussi. Protégés par un abri naturel, ils ont organisé leur survie, et l’arrivée de Daniel constitue pour eux une divine surprise. Le jeune garçon se sent bien avec eux (surtout en compagnie de Lise) et, pour améliorer leur sort, il leur propose de chercher des victuailles, dont il dispose en abondance dans son ancien abri.
    Le père Martin ne voulant bouger de chez lui, Daniel repart en leur promettant que son absence serait de courte durée. Lorsqu’il reviendra vers Lise, il aura la désagréable surprise de constater que la place est occupée par ceux qu’il nommera « les coucous », à savoir des parasites dirigés par un faux prêtre lequel a subjugué le père Martin. Mais Daniel a gagné en maturité et lorsque l’Abbé, mielleusement, le somme de se soumettre à la nouvelle discipline instaurée par lui pour le groupe, le jeune garçon le contre durement. Il sait pourtant qu’il n’aura pas le dessus éternellement :
    « - Martin est pourtant très content de me confier sa place. Je l’ai rendu heureux. Peux-tu me reprocher cela ? – Avant votre arrivée,  Martin était heureux aussi. – Mais il l’est davantage maintenant. – Hum… vous dites cela parce que ça fait votre affaire. Mais je suis persuadé que Martin fait semblant d’être heureux, parce qu’il respecte les prêtres. Ou parce qu’il a peur d’eux. – Tu te trompes. A travers moi, Martin respecte Dieu. – Vous n’êtes pas Dieu, monsieur. Vous êtes un homme comme tout le monde. Et vous n’avez pas le droit de vous servir de Dieu pour profiter de nous. – Mais…- Oui, c’est vrai, vous êtes un homme comme nous. La seule différence, c’est que vous portez une robe. Et je trouve ça plutôt ridicule. – Petit impertinent ! Comment oses-tu me parler de la sorte ?  Tes parents ne t’ont donc pas appris le respect ? Il va y avoir quelque chose à corriger chez toi dans les jours qui viennent. – Je vais vous déplaire encore, monsieur. Je n’aime pas que vous disiez du mal de mes parents. Ca aussi, c’est du respect ! – Petit polisson ! – Et par-dessus le marché, je n’aime pas les gens qui disent qu’ils honorent Dieu, alors qu’ils ne respectent même pas les hommes.
    Les doigts du prêtre se crispèrent, il serra les mâchoires. »
    La seule solution pour se débarrasser des parasites sera de prendre la fuite avec grand père et Lise abandonnant la place aux profiteurs. Le Père Martin ne fut pas trop long à convaincre et, une nuit, le trio partit vers la sécurité qu’offrait l’ancien abri de Daniel. Il sera rejoint plus tard par Raymond. Peu de temps après grand père Martin s’éteignit dans la sérénité car de doux liens s’étaient tissés entre Lise et Daniel.
    Un petit ouvrage à destination des adolescents. Les psychologies sommairement esquissées ne cachent pas trop les leçons de morale que tout jeune homme doit intégrer, selon l’auteur, pour passer au stade  adulte : courage, force et vigilance, ouverture au monde et optimisme,  quelle que soit la tragédie à venir. Le style parfois trop simple et le ton, parfois mièvre, ne déparent pas trop un roman adapté à cette tranche d’âge.

  3. Type: livre Thème: sociétés post-cataclysmiques 2, menaces animales Auteur: Jean-Michel DAGORY Parution: 1985
    Les A.E. (Anglais - Enculés) lâchent sur le continent une petite troupe de loubards habillés en costume de personnage historique (Dagobert, Musset, Cromagnon, Grand Charles, Vercingétorix, Murat, etc.).  En France, ceux-ci s’achemineront vers le sud  afin de comprendre ce qui s’est passé cinq ans auparavant. Car tout et tout le monde a disparu sur terre, et en France notamment, à l’exception de l’Angleterre qui reste la seule nation active. Comment cela a-t-il pu arriver ? Nul ne le sait encore :
    " Enfin on est arrivé. La ville n’avait pas trop souffert ; ce qu’on voyait d’abord, c’était l’énorme bunker, enterré jusqu’aux oreilles, que les Rosbeefs avaient construit dare-dare quand la CHOSE s’était produite, couic ! Paris s’était tu, et la France et, depuis, rien…  Pas de nouvelles du reste de l’Europe, un vrai rêve d’Anglais. Mais pas de nouvelles non plus de l’Amérique, ni de l’Afrique, ni de rien. Plus jamais… (…)
    On aurait pu croire que tous les habitants étaient partis la veille faire un pique-nique. Mais, à la réflexion, ça ne nous rassurait pas du tout, car on savait que les habitants n’étaient pas partis. Ils avaient disparu… Un coup des Russes ? Dans ce cas-là, les vainqueurs auraient donné signe de vie, et le Parti Communiste Britannique aurait enfin gagné des adhérents. Une erreur de manipulation d’un vague plombier atomique, déclenchant une réaction en chaîne ? Pourquoi l’atome fou n’avait-il pas traversé la Manche ? Il y avait des ferries pour ça. Sinon, quoi ? "
    Le narrateur et ses amis vont apprendre ce qu’il en coûte, de s’enfoncer au centre du continent avec leurs motos. Contrastant avec un paysage uniformément gris, leurs souvenirs, extraordinairement vivaces, concrets et colorés, les assaillent comme en une véritable reconstitution surréelle, absurde et mortelle.  Depuis des fermiers qui en décapitent certains avec leurs faux, dans un "vert paradis des amours enfantines ", jusqu’à la mort de la quasi-totalité des membres du groupe, tués par des jouets devenus énormes et menaçants, les morts jonchent le parcours :
    " Ce fut comme le signal de l’orage ; tous à la fois des centaines, des milliers de jouets se précipitèrent sur nous, crépitant sur les nappes blanches, faisant exploser les bouteilles, écorchant les crânes, aveuglant ceux qui se précipitaient vers la sortie. Il y eut une bousculade, les plus paniqués glissant sur les jouets amoncelés, les suivants leur passant dessus. Des cris, des types qui lançaient les jouets vers le plafond, un motard qui s’ouvrit la main en sautant par une fenêtre. "
    Un livre à moitié détruit détenu par Musset, le leader du groupe, évoquerait vaguement l’annihilation de l’espèce humaine (à l’exception des A.E.) par des Martiens, outrés par l’action polluante de Terriens trop remuants. Ils les auraient donc tous " gelés " en rendant meurtriers leurs souvenirs. C’est pour trouver une parade à ce génocide que Musset a besoin du souvenir du narrateur qui a survécu à  l’événement de l’incendie d’un cinéma, au temps de sa jeunesse, lequel a détruit la bibliothèque qui contenait le seul exemplaire complet de l’ouvrage. Mais l’évocation sera la plus forte et personne ne sortira vivant d’un enfer grotesque et fantasmatique.
    Un récit dur, saccadé, abrupt, aux trouvailles souvent inattendues et au style dynamique. Une atmosphère baroque avec des accents de fantastique flamand qui augmentent le malaise du lecteur jusqu’à l’angoisse. Une réussite colorée tranchant sur la grisaille habituelle de la série.

  4. Type: livre Thème: la cité foudroyée Auteur: Jean-Michel BARRAULT Parution: 1973
    "L'Inventive and Creation Group", une société chargée de découvrir de nouveaux slogans publicitaires, se réunit régulièrement pour trouver l'idée qui fera vendre une encyclopédie du sexe. Les participants typés symbolisent les tares que l'on peut trouver dans ce métier: Richard Ambrose, le directeur, bon citoyen mais mal marié; Susan, replète et toujours affamée, à la limite de l'obésité; Bill Branks, l'artiste non conformiste, qui met sa créativité au service de la vente ; Doukine, l'immigré, qui perdra sa carte verte et tous ses droits. Mais ils sont loin de s'attendre à ce qui les attend, comme l'ensemble des New Yorkais d'ailleurs. Une poignée de révolutionnaires d'origine indienne, parfaitement intégrés, surtout dans la gestion électronique de la mégapole, ont décidé de passer à l'action. Sachant que leurs ancêtres ont été spoliés de leur terre, ils ont fait le serment de chasser l'homme blanc de Manhattan, de récupérer leur sol natal et de vivre selon les lois de jadis. Pour cela, ils détraqueront de plus en plus fortement le système municipal dont les différents services sont interconnectés. L'action commence insidieusement lorsque la météo annonce des jours de grand froid alors qu'il fait un soleil radieux à l'intérieur des bâtiments. Malgré la climatisation, le travail est pénible pour L'Inventive Group. Plus tard, en rentrant chez lui, Richard a l'immense surprise d'apercevoir une noria de camions déchargeant devant son jardin et sa porte d'innombrables exemplaires du même magazine auquel il était abonné. Une erreur de programmation, sans doute, mais qui ne se règlera pas vite:
    "Richard Ambrose ouvrit la porte de la maison, une pile s'écroula et déversa dans l'entrée une avalanche de magazines mouillés. Impossible de refermer la porte. Dehors, l'humidité avait miné les fondations du blockhaus de papier. Pour gagner Exclusive Drive et atteindre sa voiture, Richard Ambrose dut partir à l'escalade d'une montagne gluante de magazines glissants."
    Quant à Doukine,  il connaîtra l'absurdité des bureaux qui l'obligent à prouver sa nationalité américaine à l'aide de documents électroniques depuis longtemps volatilisés:
    "Cette carte, il est vrai, était devenue en quelques mois l'outil de base de l'existence de tout citoyen. le code comprenait la date de naissance,, le sexe, la situation de famille, le bureau de vote, un indice numérique et un  indice bancaire. Ce code commun à tous les citoyens des Etats-Unis préparait l'adoption d'un gigantesque ordinateur central, gérant le fichier de tous les individus, connaissant tout sur chacun d'eux, capable de résoudre tous les problèmes, qu'il s'agisse de leurs revenus, du montant de leurs impôts, de l'âge de leur retraite ou de leur état de santé."
    Entre temps, les terroristes , aux noms pittoresque de Canoë d'Erable, d'Electron Sagace (leur chef), Hardware Invisible, travaillant tous dans l'informatique, augmentent leur pression sur la société urbaine, en détraquant les programmes, mêmes ceux de l'armée, et en remplaçant judicieusement les bandes magnétiques ou en chamboulant toutes les procédures. Il en résultera une pagaille monumentale. Ainsi, les ordinateurs de la National Airline , piratés, obligent les avions à atterrir à n'importe quelle heure ou provoquent un surbooking généralisé lors de la vente des billets, ce qui paralyse tout départ. Durant le sacro-saint match de base-ball, suivi par l'ensemble des citadins, le récepteur se bloquera, montrant une seule image, celle d'un Indien le dos tourné à l'écran et qui observe la cité, devant lui. Cris et colère de la part des téléspectateurs qui supposent une farce de mauvais goût!
    Les complications surviennent lorsque les supermarchés ne seront plus livrés correctement, les uns accusant un déficit en denrées alimentaires, les autres présentant le même article en milliers d'exemplaires. L'inquiétude s'étend et madame Tortolani, qui a connu la pénurie en temps de guerre, prend toutes dispositions pour constituer des stocks chez elle. Mais c'est avec la circulation routière, qui présente tous les signes de l'embolie, que la situation se gâte vraiment: des voitures bloquées, pare-chocs contre pare-chocs, des feux rouges devenus fous, un approvisionnement en essence chaotique, une pollution intense et l'impossibilité pour les services spécialisés d'accéder aux endroits névralgiques, annoncent le début de la fin:
    "Un drame de la circulation débutait. De proche en proche, la "révolte des feux rouges", comme devait l'appeler Robb Robbie Robinson, gagna tout Manhattan. les signaux de circulation régulés après comptage au radar, optimisés en fonction des heures et des trafics, les feux verts, rouges, oranges avaient pris leur indépendance. En quelques instants, toutes les voitures, les autobus, les taxis, les camions furent bloqués. L'enchevêtrement des carrefours était inextricable. la police était impuissante: même ses voitures ne passaient pas."
    En attendant, ordre est donné aux véhicules militaires de dégager les rues, ce qu'ils font en creusant de profondes travées, rejetant les véhicules devant les portes et sur les trottoirs, ce qui bloquera la  circulation des piétons.
    Dans le bureau de l'Inventive Group, l'équipe est encore à la recherche d'idées, mais les rapports sociaux ont changé. La chaleur les a obligés à laisser tomber leurs habits. La faim les a amenés à se partager la dépouille de "président Mao", le petit chien, mascotte du groupe. Se succèdent délires et crises de nerfs. En ville, les annonces d'évacuation se multiplient tandis que le maire de New York appelle le pouvoir fédéral à son secours:
    "Ils étaient nombreux qui, par familles entières, chargés de sacs, de valises, de paquets, partaient, à pied, poussant les gosses vers la station de métro, vers la gare de chemin de fer. Les Juifs, les Noirs, les Porto-Ricains fuyaient les premiers. Beaucoup attendaient qu'il soit possible de circuler en voiture: mais ils préparaient les bagages. A Harlem, les bandes de Noirs s'armaient. Dans le reste de la ville, des groupes de Blancs se formaient, prêts à se défendre si les Black Panthers attaquaient. Un balayeur noir qui passait par là fut lynché. A tout hasard. Quelqu'un avait affirmé qu'il avait ri."
    Marc Mitchell, le maire, souriant encore de façon politique et imbécile, se refuse à croire que sa ville est condamnée, bien que cela s'effondre de tous les côtés. les Noirs, mettant à profit le désordre ambiant pour passer à la dissidence. La régulation interne des buildings est défaillante: climatisation, escaliers roulants, portes battantes, s'arrêtent. Les comptes bancaires faux ou erratiques se multiplient:
    "Partout, des comptables, des patrons, des secrétaires, des administratifs, des particuliers téléphonaient, réclamaient, protestaient. Partout, il leur était répondu qu'on ne savait pas, qu'on ne pouvait pas savoir. La facturation était automatisée, elle appartenait à un processus de gestion intégrée. Vous voulez parler à un responsable? Mais il n'y a pas de responsable. Tout est dans la machine. Certes, on allait vérifier, rétablir, créditer. Il faudrait un certain  temps. Les ordinateurs fonctionnaient vite, mais leur charge de travail était énorme. Ils étaient pleinement occupés à facturer, gérer, débiter, créditer. Pour les anomalies, les réclamations, les rectifications, il était préférable d'attendre une période moins chargée..."
    L'exode, en s'amplifiant, perturbe les mouvements de l'armée qui tentent de prendre position aux carrefours et qui se demandent contre qui se battre. Enfin, le métro de New York s'immobilise, donnant le coup de grâce à une ville condamnée. Le maire Mitchell, en accord avec le gouvernement,et sous la présidence de l'ONU, accepta une entrevue avec les terroristes qu'il ne s'attendait pas à voir en habits d'indiens. Persuadé de les tenir, il dut déchanter lorsque Electron Sagace lui annonça, qu'à ce moment même, plusieurs avions militaires porteurs d'une bombe atomique amorcée, volaient, à leur corps défendant, vers le centre de la ville, prêts à larguer leurs engins de mort à moins qu'on ne leur fournisse le code adéquat. Manhattan fut donc rendue aux Indiens, avec la promesse d'une remise en l'état d'origine:
    "Washington rappelait. C'est le vieux Stevenson qui était à l'appareil: -Stanley, tout est en ordre. Nous avons fait ce que disait cet électron. C'est O.K., ici. Et vous? -J'ai lâché Manhattan. -Vous avez eu raison, Stanley. Aux yeux de l'Histoire, vous serez le libérateur de Manhattan, le sauveur de New York. - Tous les buildings seront détruits, Stevenson. Même Saint-Patrick. L'île deviendra une terre vierge aux mains des Indiens, un pays indépendant placé sous la protection des nations Unis. -Mais de quoi vivront-ils? -Ils disent qu'ils chasseront, pêcheront, qu'ils vendront des peaux à nos trappeurs s'ils viennent sans armes et le coeur loyal. (...) -Mais alors, vieux camarade, vous avez cédé sur tout? -Pas tout à fait, Stevie, et le Président des Etats-Unis prit un air rusé, pas tout à fait: les Indiens nous rendront nos vingt-quatre dollars!"
    Un roman insolent, ironique, humoristique, irrévérencieux et critique compensant sur le mode imaginaire le tort immense fait aux premiers habitants de la nation indienne. Quoique de tels événements soient hautement improbables, il est toujours intéressant de montrer du doigt la fragilité excessive de nos sociétés hyper-complexifiées. L'usage du Web commun au "village planétaire" affectera, dans sa disparition éventuelle,  l'ensemble des sociétés développées. En ceci le roman de Jean-Michel Barrault est toujours d'actualité.

  5. Type: livre Thème: menaces climatiques, guerres futures 1, pollution généralisée Auteur: Jean-Marc LIGNY Parution: 1993
    L’eau est devenue un produit hautement convoité dans un monde pollué, inégalitaire où la lutte Nord-Sud se développe. Au Tibesti, le FroLiTi (Front de Libération du Tibesti) s’oppose au gouvernement tchadien dirigé par l’empereur Boukouni qui hait les Occidentaux. L’équilibre entre les deux camps, jusqu’ici parfaitement maîtrisé par les Européens, risque d’éclater. En effet, la CEGE (Compagnie générale des Eaux), vient de découvrir une immense nappe phréatique d’eau douce ne demandant qu’à être exploitée par les pays évolués. Une opération se met en place qui permettra à la CEGE de s’approprier l’eau, d’éradiquer le FroLiTi, aux Européens de se débarrasser de Boukouni et d’étendre la zone d’influence du Nord.
    Ce seront Victor Bensoussan, un mercenaire, et la propre fille de Helmuth-Gonzalès-Andersen, (Directeur de CEGE), son pseudo-otage, qui y joueront un rôle de premier plan. Sandra Federovna Ciccione, adolescente plutôt non-conformiste, vaccinée anti-sida, opiomane qui hait ses parents, tombera amoureuse de Victor lorsqu’elle apprendra qu’elle a été jouée par son propre père. Victor, qui honore toujours un contrat, s’engage pourtant à la livrer à Boukouni, comme prévu. Les Yakusais du Dragon Rouge (Chinois) rendent cette mission plus difficile. L’eau de la nappe phréatique qui leur servait à cultiver les champs de pavots d’opium, à destination de l’Europe, sous la bienveillance active du FroLiTi,  et le plan de la CEGE les dérangent fortement. D’autant plus que des morts subites de drogués laissent à penser que l’opium mis sur le marché est empoisonné. Il l’est effectivement à cause d’anciens fûts irakiens de gaz de combat au tabun qui pourrissaient dans le coin, à l’insu de tous, l’Irak ayant disparu depuis un certain temps déjà de la scène de l’histoire.  
    Leroi-Szbigniew, le poussah répugnant, président de l’Europe-Unie, et la CEGE réussiront pourtant leur coup, éliminant Boukouni et le FroLiTi en ce combat géopolitique sans pour autant récupérer l’eau délétère qui empoisonnera les Tchadiens. Sandra, elle, dégoûtée par la société des nantis, suivra Victor en sa destinée de mercenaire :
    « Sandra fit une grimace de dégoût, se retourna sur son siège de cuir tabac et s’abîma dans la contemplation morose de la circulation derrière nous. C’était d’ailleurs la seule animation dans le paysage mortifère qu’on traversait : gazomètres rouillés, usines à l’abandon, immeubles sinistres, végétation moribonde, étouffée sous le smog éternel. Ca et là des favelas, des cités précaires, des terrains vagues jonchés d’ordures où couraient des mômes en haillons. Partout la crasse, la ruine, la décrépitude. (…) Tous les limes, frontières, contrôles et guerres n’arrivaient plus à contenir les hordes de gueux qui battaient maintenant aux portes blindées des effendias, exigeaient partage et justice. Déjà pillages et sabotages commençaient. Il était temps pour des gamins comme Sandra d’apprendre à vivre.»
    Un petit récit à l’emporte-pièce, cynique à souhait, qui évoque un futur proche et plausible, certainement en dessous de la vérité pour ce qui concerne les manipulations politiques.

  6. Type: livre Thème: fins du monde, fins de l'humanité Auteur: Jean-Jacques NGUYEN Parution: 1992
    La fin du monde a eu lieu, inexplicablement, laissant en présence un couple, Claire et Jacques. Lui, dernier représentant mâle sur terre, du moins le croit-il, convoite Claire, qui se refuse à lui, comme d’habitude dans ces cas-là. Elle espère encore revoir Bernard, un énarque, à qui elle était fiancée.La situation semble bloquée jusqu’à l’apparition d’un robot, dit « la Puce Thomson », dévoué à leurs personnes et dont la présence reste mystérieuse. Il faut dire que le couple, maintenant qu’il est seul sur terre, arrive à concrétiser ses fantasmes inconscients et crépusculaires. C’est  un de ces soirs qu’apparaîtra le fameux Bernard, vêtu en barbare et accompagné par trois jeunes filles niaises et à peine nubiles.
    Il dit s’appeler Beluga le Barbare et vient reprendre son bien, c’est-à-dire Claire. Très agressif à l’égard de Jacques, Beluga lui cherche querelle.  Les deux hommes se battent à coups de tisonnier et d’épée. Jacques sorti vainqueur du combat, Bernard s’effondre en pleurnichant, prêt à écouter son adversaire dans sa tentative d’expliquer leur vécu, ce que le lecteur attend aussi avec impatience. Pour Jacques, cette situation étrange est au fond banale ; il ne s’agirait que de la mise en scène du fameux triangle classique, le mari, la femme et l’amant, mais vu du côté d’extra-terrestres qui, siégeant dans des univers parallèles, se délecteraient du spectacle ! En projetant dans l’esprit de chaque être humain l’illusion qu’il est le dernier représentant de son espèce, ils analyseraient une sorte de pantomime grotesque pour leur édification personnelle. D’ailleurs le robot et les filles niaises ne seraient que des éléments non essentiels au déroulement du récit. (Le lecteur partage cet avis).
    Cette thèse aurait quelque  vraisemblance puisque, ailleurs, au fond de l’espace-temps, deux extraterrestres, l’un appelé « le Maître » et l’autre dit « Blorg » arrêtent leur surveillance pour rendre compte de leurs actes au « Conseil Impérial » dont ils relèvent.. Mais, peut-être, tout ceci n’est-il au fond qu’un rêve dont sortent nos trois protagonistes après une soirée exagérément arrosée.
    Une tentative (ratée) de présenter les situations de la dramaturgie classique sous les oripeaux de la science-fiction. En s’emparant du schéma éculé de « la fin du monde », par une intrigue des plus banales,  assaisonnée d’une distanciation qui se veut ironique, émaillée de «private jokes », l’auteur espère captiver son lecteur. Mais non!. Ledit lecteur se félicite finalement que ce texte très court ait eu une diffusion confidentielle.

  7. Type: livre Thème: menaces et guerres nucléaires Auteur: Jean-Gaston VANDEL Parution: 1955
    La situation sur terre est compromise. Le niveau de radioactivité, lié à l’utilisation du nucléaire civil ou militaire provoquera dans un futur proche la disparition de l’humanité:
    «L’usage sans frein de l’énergie nucléaire a pollué l’atmosphère. L’eau des océans est contaminée, le sol lui-même a été progressivement rendu radioactif par les pluies chargées de particules. Les rivières charrient des déchets de piles atomiques,  les poissons ont été les premières victimes de notre super-industrialisation. Puis ce sont les oiseaux qui ont succombé en masse, à tel point que les rares survivants sont considérés comme des reliques. Les cris d’alarme lancés par les biologistes n’ont pu enrayer le développement monstrueux des armes atomiques : quelques bombes thermonucléaires expérimentales ont empoisonné davantage la surface du globe qu’un siècle d’utilisation pacifique de cette énergie terrifiante. Et puis, on ne pouvait plus revenir en arrière, étant donné l’épuisement des autres ressources : pétrole et charbon. »
    Ce moment se trouve encore plus proche que ne le suppose Baird, Président des Etats Fédérés, puisque, dans un délai très court, une recrudescence du rayonnement photonique en provenance du Soleil provoquera l’émergence d’un taux létal de radiations. Déjà, avant ce terme fatal, Baird, avec son conseiller Gurnee, avait décidé la mise en place d’un plan qui consisterait à lancer dans l’espace une trentaine  d’enfants des deux sexes, germe ultime de l’humanité :
    "Depuis deux ans, des enfants des deux sexes sont élevés dans un laboratoire secret. Des précautions inimaginables ont été prises pour qu’ils ne soient jamais soumis à des radiations d’une intensité trop élevée. L’air qu’ils respirent, les aliments qu’ils ingèrent, leurs vêtements, leurs jouets, les infirmières qui les approchent, tout est systématiquement décontaminé. Ces petits êtres, qui sont tous des orphelins, ont été sélectionnés tant au point de vue physique qu’au point de vue mental. Ils portent en eux les caractères les plus précieux de la race humaine. C’est ce groupe d’enfants qui doit être transféré sur une autre planète, hors d’atteinte des hommes, pour qu’ils bâtissent une humanité nouvelle. » (cf. Naufragés des galaxies)          
    Le plan s’articule autour de plusieurs éléments, tous essentiels. D’abord avec la présence d’hommes intrépides comme Flint, le pilote de l’astronef censé emmener les enfants,  ou Boris, seul navigateur compétent pour les guider à travers le sub-espace. Flint et Boris étaient revenus d’un voyage d’exploration spatiale préliminaire dans la galaxie M33 où ils avaient découvert une planète semblable à la Terre, baptisée Génésia, apte à accueillir les petits rescapés. Ils y avaient laissé le professeur Breker qui devait y aménager une base préalable. Au retour, tous les passagers de la fusée, à l’exception des deux hommes, avaient été soumis à un lavage de cerveau afin de préserver le secret de cette découverte. Maintenant était venu le moment où Flint et Boris devaient à nouveau piloter le « Galax » vers l’unique asile de l’humanité future.
    Ensuite, par les enfants eux-mêmes qui, en compagnie d’adultes responsables –mais non au courant du projet final- avaient été élevés  dans un milieu préservé de toute radioactivité. A Fort Drum, en plein désert, à six cents mètres sous terre, l’on avait aménagé une ville, une « Arche», avec jardins, bibliothèque, piscine, ainsi que tout le confort possible pour rendre la vie des enfants non seulement utile mais encore agréable.
    Tout pourrait donc se passer comme prévu, s’il n’y avait eu l’infime grain de sable capable de gripper la machine.Simon Lhermite, alias Kossuth, enlève Ron Harlow, l’administrateur de l’armement sidéral dont dépend le Galax, dans le but de soutirer à ce responsable tous les renseignements concernant la fusée et son prochain départ. Comment le bandit était-il arrivé à la conclusion que peu d’êtres humains échapperaient à l’embrasement final ? Tout simplement parce que lui-même avait fait partie de la première équipe d’astronavigateurs embarqués, et que chez lui l’anamnèse n’a pas bien fonctionnée : il se rappelait de chaque détail ! Par la suite, sa fonction de commissaire  général de la police en Amérique du Sud, à Chihuahua, lui avait permis, grâce aux diverses données collationnées, d’envisager l’avenir plus qu’incertain de notre planète. Il a donc décidé de partir lui aussi avec le Galax. Prêt à tout pour survivre, il avait réuni une bande de malfrats –qu’il abandonnerait en fin de parcours-, fomenté des troubles en de nombreux points du monde, révolutions ou émeutes
    « Une tache noire aux contours mouvants couvrait les pelouses de la Place de la Constitution et s’étirait dans les rues adjacentes. Vu de haut, ce grouillement humain ressemblait à une colonie de fourmis affolées. Au moins dix à quinze mille personnes se pressaient là sur une surface réduite. A  n’en pas douter cette vague allait déferler vers le building de la 12 ème Division et le saccager de fond en comble. E puis l’anarchie s’installerait, la ville deviendrait le théâtre de sombres atrocités jusqu’au moment où une paix éternelle s’appesantirait sur les décombres. »
    Enfin, enlevant Boris, cheville ouvrière du plan, il exercera le chantage de la dernière chance sur Baird, l’obligeant à céder,  malgré la vigoureuse réaction de ce dernier, qui, ayant interdit de vol tous les spationefs, et fait protéger le Galax par l’armée, avait également fait réprimer des émeutes de plus en plus fréquentes, de telle façon qu’il put, malgré tout, faire acheminer rapidement et secrètement les enfants à bord de l’engin.
    Avec l’arrivée de  Lhermite, traînant derrière lui Boris, le Galax décolle enfin.  Mais ce que ne savait pas le brigand c’est que, une fois arrivé à bon port et les enfants livrés à Breker, Flint avait pour mission ultime de faire sauter la fusée , avec à son bord tous les adultes, rien ne devant venir polluer la nouvelle humanité.
    Une aventure serrée autour d’une idée-force, écrite avec la «patte » et la conviction littéraire d'un Vargo Statten, soutien de la science-fiction populaire anglaise. Récit qui s’inscrit dans une série publiée au Fleuve Noir (« Naufragés des galaxies », « Départ pour l’avenir », « les Voix de l’univers») et dont seul le deuxième volume nous intéresse quant à sa thématique. L’auteur y prévoit l’extinction totale de l’espèce humaine due à l’usage immodérée des produits radioactifs, crainte encore partagée aujourd’hui par bon nombre de nos contemporains.


  8. Type: livre Thème: l’entropie progresse... Auteur: Jean-Charles HARVEY Parution: 1924
    «Depuis des siècles, le soleil presque éteint, ne lançait plus dans l’espace que de sinistres clartés. Le froid, frère du néant, avait envahi peu à peu son orbe immense ; il étreignait sa lumière blanche avec une ténacité que mettaient autrefois les médiocres à étouffer le génie. Et l’astre, trop vieux pour lutter plus longtemps, cédait lugubrement aux forces des ténèbres.»
    Pour une humanité très vieille, le monde se refroidit, comme le soleil. Les glaces migrent des pôles et enserrent un dernier noyau d’hommes établi sous les tropiques. Un tremblement de terre achève la déroute de l’humanité en ne laissant subsister que deux hommes et une femme :
    " Par une nuit polaire, une secousse sismique fit céder toute cette partie de la couche terrestre qui abritait encore des hommes. Ceux-ci furent ensevelis dans leurs cavernes. Quand le soleil violet se leva sur cette désolation, il ne restait plus que trois vivants dans le monde : deux hommes et une femme qui s’appelaient Démos, Julien et Léa. "
    Démos tuera Julien par jalousie et le dernier couple, à son tour, mourra enchâssé dans les glaces. Tout est-il donc perdu à jamais ? Non ! la vie reprendra lors du passage d’une nouvelle étoile qui réchauffera la terre permettant à une nouvelle vie de surgir.
    Un récit court aux accents aussi désespérés que ceux de Pouydebat.

  9. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Jean-Charles HARVEY Parution: 1924
    En royaume d’Utopie, au XXVème siècle, la Terre est réunie  en une fédération de républiques. Vivant en paix, elle a confié son sort  à Jacques Pavie, président de la "fédération républicaine du monde." A son rival indien déçu, Diwan Gengli, l’on avait confié "le tiers de la police du monde", soit deux millions d’hommes armés répartis sur toute l’Asie. Les deux hommes s’estimaient. L’un comme l’autre,  pourtant intelligent et cultivé,  se laisse subjuguer par une femme, Hélène de Tarse, qui préfère Pavie  "non seulement pour sa qualité de blanc, mais aussi pour son irrésistible regard de Don Juan et son front dominateur. "
    Gengli en conçut une amertume, une jalousie, une rage qui le firent employer la force pour ravir la pure beauté à son adversaire, dût-il pour cela bouter le feu à un monde en paix:
    " Trois jours après, cinq cents avions et cinquante dirigeables couvraient la face de la France. D’un ciel d’horreur, strié de feux tragiques, tombaient de longs et tumultueux éclairs qui électrisaient et calcinaient des bourgs entiers. La ville parlementaire en était toute criblée. On eût dit de longues épées de flamme perçant le cœur du monde. La tour de l’hôtel d’Etat croula avec un fracas de tonnerre. Plus loin, une explosion fit sauter l’unique fabrique de munitions du monde. Un cratère se creusa soudain à trois cents pieds sous terre, et toute l’Europe en trembla.(…) Cinq millions de cadavres encore chauds et de blessés couvraient l’Europe "
    Est-il besoin de dire que Gengli ne l’emporta pas au paradis, que Hélène préféra s’immoler plutôt que de lui céder, et qu’il mourut son forfait accompli ? Même en pays de cataclysme les mêmes causes produisent souvent les mêmes effets…

  10. Type: livre Thème: sociétés post-cataclysmiques 2 Auteur: Jean-Bernard POUY Parution: 1928
    Vol.01 : Spinoza encule Hegel, Gallimard éd., 2003, coll. « Folio policier », N°127, 1 vol. broché, in-12 ème , 141 pp. couverture avec photo par Stone Images. roman d’expression française
    1 ère  parution : 1996
    La décomposition urbaine a fait émerger des bandes adverses de situationnistes, d’anarchistes, de révolutionnaires ou de conservateurs. Se rapportant à leur idole philosophique particulière, elles portent toutes des noms pittoresques comme les Hégéliens, les Spinozistes, le groupe de Jdanov, celui de Carlo Ponti ou de Thorez, et sont en lutte incessante les unes contre les autres, luttes ponctuées par des flash-backs et relatées en écho par la «Radio Cinquième Internationale » :
    « Quelques groupes de femmes avaient fait leur apparition, mais ne se mêlaient pas à nos petits jeux phallocrates. Certains hommes s’étaient frottés à ces féminités responsables et avaient vite compris que le néo-féminisme était armé jusqu’aux dents. Ces groupes avaient des noms bien aussi ridicules que les nôtres : Lesbos Rouge, Utérus d’Acier, 28 , les Deux Moitiés du Ciel, Tampax Aeternam. »
    Le jeune héros Julius Puech, leader des Spinozistes, déteste les Hégéliens, leur vouant une haine mortelle. Avec ses amis Momo, Riton et Nanar, tous sur leurs puissantes motos lourdement armés, ils se dirigent vers le sud de la France pour anéantir définitivement le groupe adverse, selon un rituel gestuel et langagier précis, à travers un code de comportement apparenté à celui du théâtre Nô.Délaissant leur raffinerie de la région parisienne, ils roulent vers Salon de Provence, considérant la mort comme l’un des Beaux Arts :
    « Ce soir, nous roulons vers Salon, dans l’air tiédasse, vers notre campement provisoire installé dans un casse de voitures. Là, protégés par les entrelacs de ferraille, les carcasses démentes et imbriquées, nous sommes tranquilles: ce labyrinthe de fer engloutirait nos attaquants éventuels.»
    Au passage, ils déferont le groupe Thorez Rouge, des cypto-staliniens, dont le viol, l’achat des armes, l’assassinat, le sexe, la musique et la drogue forment des valeurs appréciées par Julius. Mais avant de partir, ils détruisent aussi les symboles de la société de consommation, se cachant d’abord dans des entrepôts du BHV, puis mettant le feu à la Chambre des Députés dans une capitale en perdition sillonnée par des groupes violents et dissidents. Près du jardin des Plantes, Julius gagnera son trophée, emprunté au dernier survivant du groupe « Fourier Rose », une paire de bottes en peau de lézard mauve. Elles deviendront son symbole personnel et ne le quitteront jamais plus :
    « La seule chose qui me fit rougir l’œil, cette nuit-là, ce furent les bottes en lézard mauve, extrêmement neuves, que portait un des membres de Fourier Rose, le poète du gang, Ginsberg attardé aux Folies irradiés. La vision de cette tranche de beauté pure me speeda toute la nuit, et le sommeil ne vint pas. L’obscurité était de croco. »
    Se livrant encore à quelques facéties comme arroser de rose le Sacré-Cœur, Julius apprend à l’assemblée générale des dissidents que Hegel les attend sur le pont du Gard.Durant l’attaque, Momo, éblouissant de vertu guerrière, est frappé à mort sur sa moto, comme Jaja, le petit ami de Julius, qui s’éteint dans une mare de sang :
    « Nous avons attaché Momo sur sa moto, pantin grisâtre, car sa vie le quittait, personnage puissamment évocateur, car il voyait la mort et vivait avec elle. Une fois sanglé, il devenait également érotique, dans une sorte d’attirail sado-maso, prêt à l’acte, dans son aura de pulsion de mort. Prêt pour le grand éclatement. Un peu de sang coulait sur la selle et, avec sa main, négligemment, Momo en tartinait son réservoir. Le sang caillait sous la chaleur, et les résidus poisseux d’essence se mélangeaient au plasma en fusion. Ballard revenait en force, et ce n’était au fond que justice. »
    Spinoza n’oubliera pas ses héros même si la fraction armée spinoziste est provisoirement défaite. Repartant à Marseille avec son amant/ami François, Julius y aperçoit le traître, « le Niais » qui a passé à l’ennemi, et était responsable de l’anéantissement des Spinozistes. Il lancera les miliciens fascistes de Marseille à sa trousse, assistera à la mise à mort de Carlo Ponti où le Niais avait trouvé refuge, et lui règlera son compte, définitivement.Julius sait que « les temps anciens ne sont plus ». Alors il prépare sa Guzzi pour l’ultime affrontement avec Hegel pendant que, tout autour de lui, la société se normalise, la politique et la police reprenant force et vigueur. Pour finir, Julius, en partance de ce monde cruel, tombe entre les mains des femmes féministes qui lui font subir un esclavage humiliant dans le but de triompher de sa mâle résistance :
    « Enfermé et sous bonne garde, je repris des forces, et redevins, en moi-même, disponible et dangereux. Je me permis de rigoler, mais seulement des yeux. Quand mon infirmière ou bien l’une de ses sœurs me pansait et inspectait ma blessure que j’avais en haut de la cuisse, elle regardait obligatoirement mon sexe, et le touchait évasivement, en me remettant les pansements.Un jour, je fus ému pendant leur visite. Inexplicablement. Leur présence n’était pas érotique. Contre mon gré. Mais ce fut irrépressible. Je me pris un seau d’eau glacé et plusieurs coups de fouet. Maintenant je ne rigole plus. Je travaille. »
    François ayant disparu dans la lutte, Julius patiente dans la déréliction, prêt à tout pour sillonner à nouveau, sur sa flamboyante moto, une France déliquescente.
    « Spinoza encule Hegel », au titre intensément provocateur, est un récit original aussi bien au plan de la forme qu’à celui du fond. A la frontière entre la violence et la dérision, c’est le récit fantasmé d’une jeunesse à la dérive, qui dénonce les postures de la consommation et de l’idéologie. Hors de «l’esthétisme douceâtre » évoqué par Léo Ferré, c’est une œuvre originale, qui s’enferme difficilement entre les limites d’un genre, une sorte d’immense délire relatif aux excès idéologiques de mai 68.
    Vol. 02 : A sec (Spinoza encule Hegel, le retour), Gallimard éd., 2002, coll. « Folio Policier » N°149, 1 vol. broché, in-12 ème , 149pp. couverture illustrée (photo William Lesch). roman d’expression française
    1 ère  parution :1998
    Julius Puech reprend du service. A Bombay, où il s’était réfugié, il voit venir à lui deux spinozistes, Léonard et Iris, qui espèrent faire renaître l’Ethique. En effet, Hegel est de retour en France, intervenant autour des stades de football, soutenant la cause des  «fouteux ». Quand Julius se voit offrir une Guzzi toute neuve, il n’hésite plus, et, avec ses deux compagnons, il ressuscite le groupe Spinoza.
    La situation en France s’est encore dégradée.La démocratie déliquescente a fait place libre aux forces anarchistes ou fascisantes qui s’en donnent à cœur joie dans les tribunes, réunies dans une franche et haineuse inimitié, réactivée à chaque match de foot :
    « Et tout à coup, parce qu’un pékin un peu chanceux vient sans doute de pousser du pied la baballe dans un filet, une immense clameur éclate derrière les grands murs de béton. Les Verts venaient d’en marquer un. Trente mille gosiers kro-formatés hurlent la joie imbécile du supporter qui viole la ville d’en face. (…) Dans la nuit on voit luire les longs couteaux et l’acier nickelé des fusils à pompe. En face, la rage resserre les rangs des petits-beurres d’Ultra-Lu, le kop nantais réputé pour sa grande sauvagerie et une victoire historique sur le Koppa corse en huitième de Koupe de France.Les flics n’ont aucune réaction. Seuls quelques sourires luisent sous les visières, tant que les empaffés se bousillent entre eux, les oies étaient bien gardées et pouvaient voir les matches tranquille, sans se faire aplatir ce qui leur restait de cortex. Quelques coups de feu. Des étincelles dans le noir profond. Un corps qui tombe, le raclement de l’acier sur l’asphalte. Des ombres qui courent dans tous les sens, cherchant protection ou trahison. »
    Julius concocte un  plan pour se débarrasser de Hegel II, tête bicéphale puisque composée par deux jumeaux. Remontant du sud de la France vers Paris, traversant la région lyonnaise dévastée, il recrute quelques partenaires de premier plan. Notamment Luna, une jeune et efficace femme pilote d’hélicoptère, en passe d’être violée par une bande de «supporters ». Tout en distillant sa haine incommensurable à l’égard des hommes, Luna met son hélicoptère, son armement et sa science du pilotage à la disposition de Spinoza, embrassant la cause de Julius. Direction l’île Saint-Louis, camp retranché de Hegel et des « fouteux » :
    « De là où j’étais, tout cela semblait imprenable. Les ponts, absents, écroulés, tranchés à la dynamite, blessures pierreuses. Saint-Louis faisait désormais du bateau à voile. Au bout de l’île, du côté de l’ancien pont de Sully, une passerelle branlante, genre pont de singe, reliait les restes éboulés d’une ancienne arche au repaire flottant d’Hegel. »
    Julius appâte leur sentinelle avec la fausse prédiction d’un soi-disant retour charismatique de Spinoza, information suffisante pour déclencher l’envie chez ses opposants de le liquider définitivement.Pour ce faire, GWFH2 , l’un des deux chefs de Hegel, prend immédiatement langue avec les « Hell’s Angels », qu’il méprise, mais auxquels il propose une alliance objective. Du côté de Spinoza, ils seront six dont Ray, un homosexuel improbable mais dangereux, nouvel ami de Julius, prêt à en découdre.
    L’hélicoptère s’apprête à l’assaut. Les hégéliens investissent l’immeuble qui servira de zone de combat, lieu d’une explication définitive, se réservant le toit pour les snipers , les Angels occupant les envions immédiats.Déjà, ignorants tout de l’hélicoptère et de la stratégie de Julius, les hégéliens se croient vainqueurs. Lorsque les Angels sautent dans l’explosion de la voiture garée près d’eux, et lorsque Luna en quelques passes rapides et meurtrières mitraille le toit en le débarrassant de tous les hégéliens,  dont notamment GWFH2, le deuxième jumeau éclate de rage :
    « Une vague chaude de napalm lécha le toit de la base et des hégéliens sautèrent en feu dans le bassin. Le carton total. Rouge. GWFH2, planqué derrière la rambarde de la casemate, regardait toujours Julius de l’autre côté, immobile comme un épouvantail. Il vit aussi, du coin de l’œil, son frangin Hégueldeux péter les plombs, courir à découvert, hurlant des imprécations dialectiques, une kalache à la main, et tirer en direction de l’hélico. A bord, Luna repéra les cheveux rouges, manoeuvra l’appareil, fit un signe discret à Iris qui mit une charge dans le bazooka. Elle appuya sur le bouton de commande, une traînée blanche, une flamme jaune et Hégueldeux s’éparpilla, plus bas, en dahlia rouge sombre. »
    Voyant devant lui la Guzzi de Julius, il se l’approprie, persuadé qu’avec la disparition de ce symbole le royaume de Julius cessera d’exister.  La moto explose, l’envoyant lui aussi au royaume des fouteux éthérés.Julius, définitivement trop vieux pour continuer à incarner l’idéal éthique poursuivra sa destinée, pacifié, avec Luna, devenue sa compagne.
    « A sec » représente le deuxième volet des aventures de Julius Puech. Par cet ouvrage de commande, lié au succès du précédent, l’auteur s’en tire honorablement, avec toujours autant de verve, fascinant le lecteur par la structure étrange du récit, même si la surprise provoquée par le premier épisode s’est quelque peu ternie, et que certains procédés stylistiques ont une allure de déjà-vu.