Bienvenue dans la Base de Données des livres !
Vous y trouverez des ouvrages post-apo que la communauté souhaite partager. Il vous est possible de rajouter des fiches de livres, alors partagez vos trouvailles avec la communauté FoGen ! Une grande partie des ouvrages que vous trouverez sont ici grâce au travail de Jacques Haesslé sur son site : http://destination-armageddon.fr/index.html. Un grand merci à lui pour son travail exceptionnel !
Livres
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Le Fer Qui Meurt - Par BenF
Le lieutenant Jacques, dans sa tranchée, entrevoit, en tant que scientifique, une solution radicale pour mettre l’Allemagne à genoux. Il s’en ouvre aux seuls Président du Conseil et au Généralissime du commandement des forces françaises. Au jour dit, le plan préconisé fut appliqué : une mystérieuse épidémie d’origine électrique infecta le fer qui devint mou, puis tomba en poussière :
" Il s’arrêta devant un train chargé de munitions et contempla de gros obus qui gisaient pêle-mêle. Du bout de sa canne, il frappa l’un d’eux et s’arrêta stupide. " Voyons ! il rêvait, ce n’était pas possible ! ". Et il renouvela l’expérience : sa canne était entrée dans l’obus ; sous le faible choc, le magnifique acier des usines allemandes s’était éparpillé, laissant voir à nu l’explosif redoutable. Machinalement il recommença et chaque fois son bâton désagrégea un de ces obus dont il était si fier.
Comme sous l’effet d’une hallucination, il frappa alors à coups redoublés, espérant enfin entendre le son métallique que rendaient d’ordinaire ces gros bijoux de mort que seule l’Allemagne avait su préparer d’avance ; mais il ne rencontrait que des corps mous, que des enveloppes friables qui s’émiettaient et laissaient voir à nu leur hideuse âme jaune ! Alors, pris de vertige, il s’enfuit mais il n’alla pas bien loin ! "
A partir du front, l’épidémie emprunta les voies du chemin de fer en paralysant totalement la circulation des ennemis de la France. Puis, elle gagna l’arrière, où rien ni personne ne fut épargné. Les canalisations de gaz, les usines d’armements, le matériel maritime, l’industrie, tout subit la "pourriture du fer ", provoquant de gigantesques incendies dans toutes les villes allemandes. En quelques jours, l’Allemagne à genoux, implora grâce. Le lieutenant Jacques aurait pu être légitimement fier de son " virus électrique " si cela n’avait été un… rêve !
Une nouvelle à comparer avec " la Mort du fer " de Held. Elle rappellera également le traitement réservé par Franquin au fer par les bombes de " Métomol " dans " Z comme Zorglub ", de la série des " Spirou et Fantasio ".
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Le Dixieme Cercle - Par BenF
Arthur Taillandier, cybernéticien, habitant la périphérie de Paris en 2099, est le héros manipulé du récit.Avec ses amis, Seb, Marie, Thétys, il s’abandonne aux délices frelatés d’un futur urbain abominable. L’Europe unie et fasciste du président Linhardt dans laquelle le seuil de pollution impose le port constant d’un masque, la « Zone », qui recueille les «drop-out » avec leur langage codé et leur violence, l’ensemble d’une technologie high-tech et l’usage constant des drogues forment le cadre de l’univers d’Arthur :
« De son point de vue, il découvrait toute la vallée de la Seine entre Mantes-la-Jolie et les Mureaux, construite sans interruption. Les coumarous alternaient avec les Zones Industrielles et Commerciales, les Pôles d’Activité et les Cités, chaque ensemble retranché derrière ses barbelés, ses murs, ses miradors. Sur le fleuve brun sombre, les cargos, et les péniches, à la queue leue leu, remontaient vers le port autonome de Paris. A l’ouest, tout proche, se détachait le mirador du compound d’Aubergenville, avec son vigile devant la mitrailleuse lourde. Au loin, le soleil embrasait les tours de Mantes-la-Jolie, une des Cités les plus chaudes du Far West francilien. Des nuées de pigeons nichaient dans les étages supérieurs, à l’abandon, tournoyaient autour des gratte-ciel en un ballet permanent, comme des vautours au-dessus d’un charnier. Le grondement sourd qui montait des dix voies de l’autoroute servait de bande-son à ce paysage banlieusard. »
Professionnellement, il est attelé au projet « Cogito » avec son patron Nelson Westley et ses amis, projet qui doit, en s’articulant sur les souvenirs du cerveau humain, créer des univers de jeux (C-Univers) de plus en plus réalistes et évolutifs. Car la réalité virtuelle constitue la grande distraction de cette société hiérarchisée en huit cercles progressifs, suivant le degré de dangerosité ou de réalisme des jeux, qui permettent de s’extraire d’une réalité morne et misérable.
Arthur fréquente souvent le huitième cercle, celui de la pornographie. Mais il aspire à autre chose, surtout lorsque des indices inquiétants de paranoïa se révèlent à lui : son appartement qui se transforme, des portes qui aboutissent à des impasses, etc.D’autre part, l’existence de la RV, un organisme de « hackers », bras armé de « l’Apple », groupement révolutionnaire, le fascine. Enfin, il apprend l’existence d ‘un neuvième cercle, celui d’un C-Univers tellement perfectionné que l’illusion vécue apparaît comme réalité totale puisqu’on y perd son identité même. Seule une mort (virtuelle mais vécue dans la douleur) permet à Arthur de réintégrer son appartement d’Aubergenville.
La souffrance, la cruauté infligée et le goût du sang restent pour lui des expériences indépassables. Dans l’univers de Dunyah, une sorte de moyen orient virtuel, Arthur devient tour à tour Eno, puis Issar, bras armé du prophète qui appelle à la réalisation d’une autre vie, en un « jardin », au-delà du «sanctuaire » et des « Cinq portes », après que le monde ancien ait été dévasté par un déluge purificateur.
Eno/Arthur vit à Dunyah l’expérience de plusieurs vies se montrant le zélateur le plus proche du prophète, taillant son royaume à grands coups d’épée. Le retour à la vraie vie se fait de plus en plus difficilement et les rapports avec ses amis se dégradent. Dunyha est un C-Univers inconnu et donc illicite au sein de Cybéria, ensemble des réalités virtuelles. C’est pourquoi Arthur est traqué par le cyber-flic Borovitch aussi bien dans sa réalité quotidienne qu’à travers diverses phases du jeu.
La dépression psychologique d’Arthur s’accentue, surtout après la disparition de Nelson dans ses bureaux de la firme Virtual opposée à Macrosoft dans le cadre du projet Cogito. Arthur sera finalement contacté par RV qui le charge de l’assassinat de Linhardt lors de la réélection de celui-ci. Bien que se sachant manipulé, Arthur accepte, car le monde réel lui est odieux. Après l’attentat réussi, Arthur sera capturé par Borovitch et torturé jusqu’à la survenue d’une pluie diluvienne transformant la région parisienne en mer intérieure :
« Paris avait entièrement disparu, remplacé par une mer infinie, ridée de vaguelettes. Pareilles aux piles d’une plate-forme de forage en construction, les deux tours de la cathédrale engloutie émergeaient encore. A travers le rideau de pluie, Arthur distinguait aussi, plantés au milieu de l’océan, les restes de la tour Montparnasse, de la tour de la Sécu, à Bercy, et le cône au sommet renflé du troisième étage de la tour Eiffel, comme une énorme balise marine. Au nord, Belleville-Ménilmontant et la butte Montmartre évoquaient un double îlot volcanique surmonté d’un temple à stûpas – le Sacré-Cœur. »
Finalement, il se réveille dans un souterrain, engoncé dans une capsule cryogénique comme deux mille de ses compatriotes.Car tout ceci était faux. En réalité, en 2099, un conflit nucléaire a fait fondre les calottes glaciaires, provoquant une subduction mondiale et la ruine de l’espèce humaine. Dans les souterrains de Massy où travaillaient Macrosoft et Virtual, la décision avait été prise de survivre à la catastrophe en mettant tout le monde en hibernation durant un an. Or, aujourd’hui, la date qui apparaît est 2499. Voilà plus de quatre cents ans que Borovitch le cybernéticien et son complice Carter, utilisant le programme «Cogito» ont branché l’ensemble des endormis sur l’univers « Gaia 1099 » qui donne l’illusion parfaite de la réalité à travers une reconstitution du monde puisée dans l’inconscient même des dormeurs. Chaque année les compteurs étaient remis à zéro. Par certaines altérations (les « bugs »), Nelson a peu à peu pris conscience de cette illusion. Il a neutralisé le cycle fatal, Borovitch et ses jeux de pouvoir, en créant un contre-univers, Dunyah, pour que la réalité puisse, grâce à Arthur, émerger : c’était le Dixième cercle.
Un jeu troublant entre le virtuel et le réel sur fond de dégradation sociale et de catastrophe écologique. Un style maîtrisé, un suspense permanent font de cette première œuvre une réussite.
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Le Dilemme - Par BenF
Patrick, adolescent de quatorze ans, voit sa maman et son frère mourir, attaqués et achevés par les aiguillons de guêpes vengeresses, en voiture, à Paris, en un début d’après-midi de juillet. Ils ne seront pas les seuls : tous les automobilistes sont attaqués et achevés, d’abord par des hyménoptères, puis par des rats, enfin des oiseaux :
" Guidés par les cris, ils parviennent rapidement près d’une femme qui se roule sur la chaussée, près d’un trottoir. Le spectacle qui s’offre à eux les glace d’effroi. Cette femme qui a sans doute survécu aux piqûres de guêpes, est assaillie par des rats d’égouts. Ils sont une dizaine, gros comme des chats. La figure de leur victime constitue leur cible principale. L’un d’eux s’est saisi du nez et malgré les contorsions de sa victime ne lâche pas prise. Deux autres s’accrochent aux lèvres, tandis qu’un autre enfonce ses dents dans la nuque. La chevelure est agitée comme si un rat s’y débattait " (…)
"A vingt mètres de lui, une femme coincée entre deux voitures est entourée d’un essaim de grosses mouches bleues. De ses mains elle cherche à les chasser ou à les écraser. Mais des milliers de ces insectes l’assaillent. Ils courent le long de ses jambes, volent en émettant un bourdonnement aigu autour de sa tête, se posent sur les yeux, les lèvres pénètrent dans les oreilles, les narines, la bouche, s’infiltrent sous sa jupe. "
Lui seul, par sa présence d’esprit extraordinaire, échappe au carnage. Il parvient, à force d’astuces, à rejoindre Marlène, une jeune femme survivante dans une automobile tandis qu’autour d’eux les guêpes, les rats, les oiseaux guettent leur défaillance.
Pour une raison indéterminée, les animaux, qui en ont certainement assez d’être opprimés par les humains, se sont révoltés. Tous ensemble, sans pitié, ils traquent l’espèce humaine pour la rayer de la surface de la terre. C’est la fin du monde, sauf pour Patrick et Marlène qui mettent à profit ces moments pénibles pour faire l’amour, à l’abri dans leur véhicule:
" Prise au jeu, Martine (sic : l’auteur est tellement ému qu’il ne se rappelle plus le nom de son héroïne:Marlène !) promène sa main le long de la jambe de Patrick. Sa main remonte et redescend lentement, et elle jouit des tremblements et des soupirs que ses caresses provoquent. Quand elle sent que Patrick est au paroxysme de l’excitation, elle colle ses lèvres sur les siennes et tout en l’embrassant, elle pose sa main sur le sexe de son jeune compagnon qui halète et frémit de tout son corps. "
Protégés par des armes improvisées, ils passent sur le toit des véhicules pour atteindre l’appartement de la famille de Patrick. Mais papa est mort. Alors ils se calfeutrent dans l’appartement, sablent le champagne (pour fêter l’événement?) et… refont l’amour :
" Son petit homme apporte une bouteille de whisky, des glaçons et de l’eau gazeuse qu’il dépose sur la table basse du salon. A son tour il annonce " Madame est servie ". Elle va s’asseoir sur le canapé en entraînant Patrick avec elle. "
Le blocus devenant intenable à la longue, ils s’enfuient à nouveau, en voiture, en évitant les concentrations d’automobiles qui encombrent les voies routières avec à leur bord, les cadavres pourrissants de leurs conducteurs :
" L’est et le nord de Paris ne sont qu’un immense brasier. Les explosions sont si rapprochées qu’on dirait un roulement de tonnerre qui n’en finit plus. Les immeubles s’écroulent comme des châteaux de cartes. Tout l’horizon est voilé par un épais rideau de fumée. "
Leur itinéraire les mène dans le sud de la France où ils pourront profiter du bon air marin, du soleil qui requinque, associé au vin clairet de la Provence. Ils n’oublieront surtout pas de se constituer des réserves de…champagne et de whisky (contre la soif !) en empruntant la A6, le long du couloir rhodanien, jusqu’au Cap Camarat :
" - Et où irons-nous ? Est-ce que la Côte d’Azur n’est pas indiquée pour un voyage de noces ? Le whisky commence à faire son effet et à nouveau ils ne craignent pas de pousser la plaisanterie jusqu’au cynisme. Tout à fait indiqué. Mais as-tu retenu une chambre au moins ? Tu sais qu’à cette époque, en pleine période de vacances, tout est complet. "
Partout, c’est une vision d’apocalypse. Les cadavres pullulent. En guise d’êtres vivants, ils ne rencontrent que deux repris de justice qui veulent violer Marlène. Elle en profite pour les tuer à coups de carabine. Puis elle fait l’amour (activité récurrente) avec Patrick " son petit homme". Arrivés à destination, ils se choisissent une villa qu’ils isolent de la menace animale.
Peu de temps se passe qu’ils ne fassent la connaissance d’un autre groupe de survivants : Bruno, Serge, Emmanuelle, Raymond, Gisèle et Jacqueline. Très fraternellement, ceux-ci les convie à partager la vie de leur petite communauté appelée " Thélème " dont la devise, de " haulte graisse ", est : " Fays ce que vouldras " :
"-Vous n’avez peut-être pas remarqué les quatre inscriptions qui figurent sur les murs. Elles sont joliment tracées en lettres gothiques grâce au talent de notre amie Barbara. Sur celle qui est en face de nous, vous reconnaissez la fameuse devise de l’abbaye de Thélème : "Fay ce que vouldras ". Cette formule pour parfaits épicuriens (sic !) ne peut évidemment s’adresser qu’à des gens suffisamment évolués pour admettre qu’on peut faire ce qu’on veut en dehors de tout préjugé, de toute morale bien pensante et de toute contrainte imposée par les lois d’une société asservie par les préjugés. La seule condition, c’est de ne gêner personne. "
Ils l’appliquent au pied de la lettre, mangeant bien, buvant encore plus et se mélangeant en de joyeuses parties de jambes en l’air puisqu’à monde nouveau il faut des hommes nouveaux, dépouillés de l’aiguillon de la jalousie :
" Tu crois que tu t’adapteras facilement à nos mœurs ? Oui, je pense, puisque j’ai accepté les règles du groupe. Elle observe quelques instants de silence et brusquement lui pose la question : N’es-tu pas désemparé loin de Marlène ? Il hésite et convient : Oui, un peu. Je suis habitué à sa présence. Changeant de sujet, elle lui demande en le pressant contre lui : Quel effet cela te fait-il de danser avec des femmes pratiquement nues ? Il pense qu’elle le prend pour un puceau. Alors, avec un air de défi, il répond : Ca me ferait peut-être plus d’effet si je n’avais jamais fait l’amour… "
Raymond lui explique pourquoi la jalousie ne sera plus de mise maintenant :
" Ce qui dans notre ancienne société pouvait être considéré comme un délit grave n’a plus aucune raison d’être commis dans les circonstances présentes. Dans une société de super-abondance pour tous, il est bien évident qu’il faut déjà rayer les délits de vols et d’escroquerie. Considérons après ceux-là le délit le plus fréquent, c’est-à-dire le crime passionnel. Quand chacun se sera bien persuadé et se sera habitué à l’idée que la première de toutes les libertés est celle de son corps, il lui deviendra tout naturel de penser qu’il ne peut prétendre à la possession exclusive d’une autre personne sans son consentement. De ce fait, ce sentiment de jalousie s’estompera peu à peu et les crimes inspirés par elle ne se perpétreront plus. "
Leurs soirées s’épuisent en discussions pseudo- philosophiques sans fin, où l’analyse morale ne cède en rien à la mollesse du style :
" N’est ce pas cette faillite, cette non compréhension de ce qui devait être la vie qui ont déclenché cette épouvantable catastrophe dans laquelle l’espèce humaine est en train de sombrer. Elle se croyait pourtant la plus puissante, la plus intelligente, la mieux organisée. En fait, elle était surtout la plus dominatrice, jouant les apprentis sorciers sans prévoir qu’un jour, la Nature se révolterait contre des occupants (sic !) bornés et importuns. "
Raymond porte un faible à Marlène (une ancienne prostituée) qui ne consent à quitter " son petit homme " que si celui-là adopte Patrick comme fils. Aussitôt dit, aussitôt fait : tout le monde s’aime si fort… ! Les animaux ont magiquement disparu, ce qui leur laisse goûter des vacances bien méritées dans leur villa provençale, qu’ils fortifient néanmoins (On ne sait jamais) :
" Patrick a été chercher l’apéritif mis au frais – en l’occurrence un excellent Pouilly-Fuissé – qu’ils dégustent avec un plaisir non dissimulé. -Quel parfum et quel bouquet, apprécie Marlène -Il est vraiment excellent, confirme Patrick et depuis que tu m’as appris à reconnaître les bonnes choses, je n’exprime plus un avis de complaisance comme au début. " (…) " Quand je bois du champagne, j’ai envie de faire l’amour, et vous autres ? Je pense que c’est la réaction de tout être normalement constitué, répond Emmanuelle. (…)
De son côté Emmanuelle ne reste pas inactive. Elle prodigue des caresses de plus en plus osées à Isabelle dont les soupirs se mêlent à ceux de Patrick qui reste un partenaire passif (…) Isabelle, mise en condition par les caresses de son amie, ne se fait pas davantage prier pour se mettre à califourchon sur son partenaire, tandis qu’Emmanuelle, sous le regard de Patrick va se livrer à un plaisir solitaire. "
Un jour, Bruno conçoit une idée de génie : et si l’on allait se servir de l’hélicoptère de la base voisine pour survoler la région, vérifier qu’elle est bien vide d’animaux pour que tout le monde puisse en sécurité prendre un bain de mer ? N’est-ce pas une bonne idée ? Pendant que les uns nettoient la plage des cadavres pourris qui y traînent, Bruno revient avec l’hélicoptère. Ainsi s’écoulent les jours en cette nouvelle abbaye de Thélème, entre les parties fines, le champagne et le foie gras :
" Ca a été un désir instantané, suivi d’une jouissance énorme. Mais après, je n’ai absolument pas eu envie de refaire l’amour avec elle. C’est une fille qui doit être très passive, une fille à prendre entre deux portes pour se soulager. Je crois qu’il faut être très excité comme je l’étais pour la prendre. A froid elle doit être décevante . C’est le genre de fille dont on se demande si elles sont capables de parvenir à l’orgasme. -Ingrat ! Vous êtes tout de même un peu dégoûtants, les hommes. Les femmes ont assez de vertu pour souvent vous procurer du plaisir sans contre-partie et vous ne leur en êtes pas pour autant reconnaissants ! "
Chacun relate sa propre aventure, à savoir comment il a réussi à échapper aux méchantes guêpes, aux vilaines mouches, aux sales rats, ce qui rallonge toujours le récit de soixante-dix pages. Un jour, des signes apparaissent qui ne trompent pas : les animaux semblent revenus. Bruno a relevé les traces d’une horde hétéroclite de bêtes (chiens, bœufs, serpents, rats …) qui se dirigent vers leur maison.
Afin de vérifier les faits et contre l’avis de Raymond, il s’envole en compagnie de Jacqueline, atterrit dans une clairière… et c’est la catastrophe : Ils sont encerclés par des oiseaux qui les empêchent de redécoller, de taureaux furieux qui se jettent contre l’hélicoptère, de mouches qui obscurcissent le cockpit. Ils se savent perdus. Alors, avec joie et détermination, ils vont se suicider non sans avoir fait l’amour une ultime fois :
" Veux-tu faire l’amour ? Oui, répond-elle avec ferveur. Ce sera une manière intéressante de nous dire adieu. Et je vais en profiter pour te dicter ma dernière volonté. Dès que j’aurai joui et avant que je ne reprenne mes esprits, tu me tireras une balle sous le sein gauche et une autre dans la tempe. "
Les autres membres du groupe qui suivent par radio la tragédie jusqu’à l’orgasme final évacuent leur tristesse dans le champagne. Pour eux aussi, la situation empire : les animaux ont décidé de passer à l’attaque. Se réfugiant de pièces en pièces, ils se défendent avec acharnement, prêts à s’entre-suicider si jamais les animaux devaient sortir vainqueurs de la confrontation :
" Plusieurs centaines de rats serrés les uns contre les autres, râpent avec frénésie le plancher du grenier. Une cinquantaine de vipères rampent au milieu d’eux. Des milliers de guêpes attendant, plaquées sur les murs et sur les poutres où sont perchés hiboux, corbeaux, pies et autres volatiles. A l’extérieur, les quelques bovins qui ont échappé à la fusillade se terrent soit derrière les chars, soit sur les côtés de la maison dépourvus de fenêtres. A l’orée des bois, des castors, transformés en bûcherons, abattent et débitent des arbres, tandis que d’autres traînent et relient entre elles des bûches pour construire un rempart digne du meilleur architecte. "
A l’ultime moment, au moment où le pistolet dans la main droite et la coupe de champagne dans l’autre, ils s’apprêtent à mourir, les animaux, inexplicablement, arrêtent leur assaut. Non seulement ils sont devenus définitivement cordiaux entre eux (le chien ne pourchasse pas le rat), mais encore avec les hommes, éberlués par une telle attitude (les toutous se laissent caresser !)
L’explication finale de tout ce fatras comportemental nous est assénée par un cosmonaute, surgi deus ex machina, venu bien à propos : la disparition de l’humanité avait été programmée par des méchants extraterrestres très très forts qui, s’inquiétant de la brutalité de l’homme envers les animaux, leur ont insufflé intelligence et soif vengeresse. Maintenant que l’humanité se réduit à dix mille individus éparpillés de par le monde, une nouvelle chance de mieux se comporter lui est accordée. Puis il disparaît.
Alors, les " Thélémiens " fondent avec d’autres " la Cité Heureuse ", en Grèce évidemment, et réinventent… la Démocratie (C’était çà, le " Dilemme " : quel type de gouvernement faudrait-il réinventer ?)
Un ouvrage où tout sonne faux, l’intrigue, les personnages, le dialogue, le décor et dont les pages les plus inspirées sont celles qui décrivent la mise à mort des humains par les animaux. Quant au reste, c’est un fatras érotico-sentimental à la Delly, écrit en un style digne d’un lycéen. On comprend mieux pourquoi l’ouvrage a été auto-édité.
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La jeune Alba sauve le petit Didac de la noyade. En ressortant de l’eau, les deux enfants constatent que toute vie s’est arrêtée sur terre. Ils reviennent en courant vers leur village en ruines, aux maisons fissurées, effondrées, laissant apparaître partout des cadavres :
« Et partout, à moitié ensevelis par les ruines, à l’intérieur des voitures arrêtées, dans les rues, il y avait des cadavres. Un nombre incroyable de cadavres qui avaient tous le visage contracté en un rictus étrange, et la peau d’un jaune rosé. Ils n’avaient pas été tués par des pierres ou des poutres, car certains gisaient au milieu d’espaces vides, intacts, sans blessures ni saignements apparents, comme s’ils étaient simplement tombés sous le coup d’une crise d’apoplexie. »
Alba, qui a 14 ans, s’occupera de Didac, qui a 9 ans. Tout en s’interrogeant sur l’origine du désastre et en pleurant leurs familles mortes, ils se rendent compte que l’ensemble du pays est dans le même état. Le premier choc passé, ils songent à fuir Benaura, le village martyr.
L’avisée Alba, ayant établi une liste des choses à emporter sur une charrette à bras, part avec Didac s’établir dans les bois qu’elle connaît bien, à cinq kilomètres de tout lieu fréquenté. Ce fut un effort terrible pour ces jeunes enfants qui durent s’y prendre à plusieurs reprises avant de pouvoir établir un campement de fortune au bord d’un ruisseau. Leur premier nettoyage dans l’eau appelle une série de questions de la part de Didac :
« Comment se fait-il que les filles soient différentes ? demanda-t-il au bout d’un moment.
Alba se rendit compte qu’il était gêné d’avoir posé cette question et lui sourit.
-Si nous étions tous pareils, il n’y aurait ni hommes ni femmes, dit-elle.
-Et tu es contente d’être une fille, toi ?
Cette fois Alba éclata de rire .
-Oui, Didac. Comme tu seras content plus tard d’être un homme. »
la question du racisme est aussi abordée dans la franchise, Didac étant noir :
« -Je préférerais être blanc, moi
-Pourquoi ? le noir est très joli.
-Mais au village les autres se moquaient de moi. Et quelques grandes personnes aussi.
-Maintenant cela n’arrivera plus, Didac, il n’y a plus que toi et moi. »
Jour après jour, ils organisent leur vie, jouant à Robinson, subsistant grâce aux aliments emportés, ainsi qu’aux champignons, pignons ou truffes trouvés dans le sous-bois. Alba est consciente de la précarité de leur condition, et inquiète de l’avenir. Elle pousse Didac à s’instruire en mécanique tandis qu’elle même s’intéresse fortement à la médecine. Ainsi le jour où elle se cassera le tibia, pourra-t-elle se soigner elle-même en pratiquant les gestes appropriés.
Une année s’écoule ; Alba a quinze ans. Explorant les environs, ils découvrent dans une ferme vide à quelques kilomètres de leur grotte, une poule redevenue sauvage, et des pommes de terre dans une réserve. Grâce à la poule, leur nourriture s’enrichit désormais d’œufs. Pour faire face à la dureté de leur vie quotidienne Alba insiste sur une propreté absolue :
« Et ainsi ils se lavaient chaque matin, au réveil, car Alba insistait sur la nécessité d’observer une hygiène rigoureuse ; à ses yeux, cela constituait la condition essentielle d’une bonne santé. La crainte de tomber malade continuait à la tourmenter, et elle ne passait pas un jour sans lire un passage du dictionnaire médical. »
Tout en éduquant Didac, Alba le pousse à se procurer des livres pour pouvoir parer à toute éventualité. Didac, devenu habile en mécanique, remet en marche le vieux tracteur de la ferme grâce auquel, prudemment, ils poussent jusqu’au village. Les cadavres, toujours présents, ont maintenant la peau parcheminée d’où percent les os, un spectacle qui n’émeut plus les deux adolescents. De retour avec des jerrycans d’essence, ils aperçoivent dans le ciel des appareils de forme étrange : ils ne seraient donc pas seuls sur cette terre ?
A présent Alba prend des précautions. Elle ne tient pas à être découverte, ne sachant si elle a affaire aux ennemis qui auraient éradiqué l’espèce humaine. Cela est d’autant plus compliqué que Didac tombe malade, présentant tous les symptômes d’une rougeole qui manque de le terrasser. Alba le soigne avec dévouement, sachant il leur faut changer d’alimentation et de lieu.
A peine ont-ils décidé de partir, qu’ils aperçoivent à nouveau l’un de ces étranges vaisseaux en perdition qui s’abîme dans les lointains. Se guidant sur la fumée dégagée par l’accident, Alba et Didac s’approchent, observant la scène à l’aide de puissantes jumelles. Ils aperçoivent une créature curieuse et inquiétante :
«De dos, ainsi qu’ils la voyaient, elle avait l’apparence d’un pygmée doté d’un cou très long avec, au bout, une protubérance en forme de poire renversée, à savoir que sa partie supérieure était beaucoup plus large que sa partie inférieure. Sa peau, rose comme celle d’un porcelet, ne semblait porter ni poils ni cheveux et donnait une désagréable impression de nudité. »
Alba a l’intime conviction que c’est son ennemi. Sans hésitation, avec son fusil, elle le tue et ramasse le curieux objet qu’il portait, qui s’avère être une arme calcinant tout à portée de rayon. Après avoir enterré l’extraterrestre, ils savent qu’ils ne sont plus en sûreté désormais dans leur grotte et conviennent de partir immédiatement. Juchés sur leur tracteur, ils quittent la région de Bénaura où la décomposition des choses s’accélère. Nulle part, le long de la route qui les conduit vers Barcelone, de signes de vie, mais partout la tristesse des tôles froissées, la solitude des villages, l’empilement des ruines qui les empêchent de progresser normalement :
« De temps en temps, presque toujours au ras des fossés, ils trouvaient des motos renversées, les occupants changés en squelettes gisaient à terre, une jambe coincée sous la machine, leur casque protecteur sur le crâne. »
Toute la campagne semble bouleversée comme si une main gigantesque avait broyé les terrains géologiques. Apercevant enfin une caravane abandonnée, ils l’utiliseront comme résidence en l’attachant à leur tracteur. L’exploration de Barcelone apporte de nombreuses déceptions. La ville est quasi impraticable, la nuit, l’absence de lumière les gêne. Que faire en ces lieux sinon récupérer ce qui peut leur être utile dans les bibliothèques, des livres dont ils font une ample moisson.
Plus tard, Ils prennent leurs quartiers dans une villa, sise au bord de la mer, entre Hospitalet et Llobregat, retournant parfois en ville avec une jeep remise en état. Même si leur exploration les amène parfois sur la piste d’un hypothétique survivant, ils n’en rencontreront jamais.Leur vie est douce au bord de la mer. Ils lisent et se cultivent. Alba a acquis de très bonnes connaissances en médecine. A la plage, ils pêchent des crabes, s’aventurent parfois en barque, se prennent en photos … et découvrent l’amour :
« Ils s’enlaçaient, s’embrassaient avec un sentiment de bien-être et d’affection qui, peut-être, à leur insu, commençait à se changer en amour. Didac, à onze ans, avait déjà l’apparence d’un bel adolescent et il semblait à Alba que, depuis ce jour où ils s’étaient baignés à la plage, il la considérait désormais comme une femme. »
Déconseillant à Didac d’apprendre à piloter un avion à cause du risque encouru, Alba et son compagnon mettent en place un vaste projet. Tout d’abord, retourner sur leurs pas, jusqu’à la grotte initiale, pour prendre une série de photos-témoins de la catastrophe. Puis, préparer un yacht et longer la côte espagnole jusqu’en Italie et en France. Didac s’y emploie avec ferveur et patience, ne laissant rien au hasard. Même leurs livres trouveront un abri dans la caravane –bibliothèque.
Au printemps d’après, Alba ayant dix sept ans et Didac onze, ils prennent la mer, cap au nord-est, s’abritant dans les calanques, musardant le long de la Costa Brava jusqu’au Golfe du Lion.
Un jour, à la Spezia, ils observent le long de la plage, une personne vivante. Tout à leur émotion, ils ne s’aperçoivent pas qu’ils sont tombés dans un piège. Les individus, au nombre de trois, envisagent de tuer Didac et de violer Alba. Celle-ci, toujours prudente, ayant en mains l’arme des extraterrestres, les tue sans remords. Pourtant cet épisode ternit quelque peu leur voyage.
Lorsque l’été s’étire dans l’automne, ayant participé dans une fête de tous les sens à la beauté de la nature, ils décident de revenir chez eux. Ils savaient maintenant qu’ils étaient vraiment seuls sur terre, eux, et le petit être que portait Alba, enceinte de Didac.
De retour à Barcelone, ils comprennent que toute leur vie doit être orientée vers le bébé à naître. Didac se plonge dans des ouvrages d’obstétrique, prenant très au sérieux son rôle de père. Il se soucie de tout ce dont a besoin l’enfant : des montagnes de boîtes de lait, des couches, des médicaments s’accumulent dans leur villa. Didac ne néglige ni le jardin, ni le poulailler, poussant de nombreuses fois jusqu’à Barcelone. Jusqu’à ce jour, le dernier, où il meurt écrasé par un mur branlant. Alba, qui le cherche toute la nuit, désespérée, le découvre enfin :
« Mais Didac ne répondit pas, et elle ne le trouva pas non plus dans l’entrepôt où elle pénétra alors. Elle ressortit et là, éperdue d’angoisse, regarda autour d’elle. La lumière du jour était plus intense, à présent, mais son désarroi était si grand qu’elle n’identifia pas tout de suite comme une jambe, la chose sombre sur laquelle elle posa les yeux, et qui émergeait d’un tas de pierres à quarante ou cinquante mètres de l’endroit où elle se tenait. »
Elle assurera seule le rituel funéraire du père de l’humanité :
« Vers le milieu de l’après-midi, elle s’assit par terre à côté du jeune garçon et prit une de ses mains entre les siennes. Pendant deux heures, elle demeura immobile, ne remuant que les lèvres tandis qu’elle se remémorait en silence, pour elle-même et pour lui, l’histoire de peine et d’amour qu’ils avaient partagée. Elle resta là jusqu’au soir. Puis elle s’agenouilla et, penchée sur lui, embrassa ses lèvres froides tout en le réchauffant de ses dernières larmes. »
Le texte s’achève par une postface ou d’érudits intervenants s’interrogent sur la vérité de ce récit qu’ils considèrent comme le manuscrit de la mère de l’humanité puisqu’aujourd’hui, l’on sait de quelle manière les habitants de Volria, à la recherche d’une planète où s’établir, ont utilisé le système Grac/D lequel, arrêtant les cœurs des humains et induisant des vibrations dans toutes les microstructures, a décimé l’humanité, à l’exception d’Alba et de Didac.
Un roman de formation destiné aux adolescents, remarquablement intelligent et sensible. En cinq cahiers successifs (cahier de la destruction et du salut, de la peur et de l’étrangeté, du départ et de la sauvegarde, du voyage et de l’amour, de la vie et de la mort), le récit montre un raccourci de la vie avec ses hauts et ses bas et donne les moyens de la survie. Cahier intime, leçon de vie, leçon de choses, conte moral, roman cataclysmique, le « Deuxième matin du monde» fait exploser les limites dans lesquelles ont voudrait le maintenir. Un chef-d’œuvre.
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Le Destructeur - Par BenF
Pierpoul et Gazly sont deux amis complices. Pigistes dans un journal, ils mènent une vie de vauriens débauchés et voleurs, se partageant leurs femmes et s’adonnant à l’homosexualité. Un tel comportement aboutira au crime le plus odieux : Pierpoul, avec l’assentiment de Gazly, assassinera la femme de ce dernier. Puis, ensemble, ils préparent le vol ultime censé les mettre hors du besoin, soit voler les diamants du muséum de Paris.
Gazly, devenu immensément riche, s’achète une nouvelle réputation. Se lançant dans la haute finance, il fructifie son avoir au décuple. Les deux amis, tout en croquant la vie à pleines dents, fondent des écoles littéraires, réinventent les jeux de la Rome antique. Mais tout ceci lasse Gazly. Après avoir égorgé Pierpoul qui le bridait encore dans ses instincts, alors qu’à Paris rien ne le retient plus, il décide de vivre une vie de mercenaire en se lançant à la conquête du monde. Il ira en Chine pour y prospérer. Avec son argent, il embauche un millier d’hommes et de femmes, aventuriers comme lui, sans foi ni loi comme l’étaient les conquistadores de Pizarre, dans le cadre de la « Société Française de Colonisation » :
« Plus de mille hommes, engagés par « la Société Française de Colonisation », au capital de 500 millions, embarquaient trois mois après sur le Général-Mangin, à Marseille, à destination de Canton. »
En cours de route, Gazly explique à ses complices comment ils se tailleront un empire, réaliseront leurs rêves de liberté absolue. Et cela commence dès maintenant :
« Gazly trancha que ceux qui voulaient porter des vêtements n’avaient qu’à en porter, que ceux qui voulaient se montrer nus étaient libres et que ceux qui ne voulaient pas les voir n’avaient qu’à descendre dans leur cabine. Là-dessus on discuta toute la nuit et l’on dormit le jour suivant. Et chacun ayant convenu «qu’on n’était pas des bourgeois», le Général-Mangin fut un joyeux bateau où le pont à certaines heures se remplissait de couples enlacés. »
Arrivés à destination, Gazly met ses forces au service du Kuan-Min-Tong et de son chef Wu-Tin-Fang, la Société Française de Colonisation transformant son nom en celui de « Bataillon Blanc ». L’objectif est la prise de Pékin. Parmi les acolytes de Gazly, une femme de tête, Berthe Germain, deviendra la maîtresse officielle du chef. Elle ne le restera pas longtemps. Capturée par les forces de Pi-Yun-Se, ennemi retors et puissant, Berthe sera vicieusement torturée à mort :
« Elle sentit ses entrailles en flammes. Son corps se tordit, sa bouche écuma, ses poignets et ses chevilles se coupèrent aux liens qui les tenaient à terre et que le corps tendait dans dans ses suprêmes crispations. Le vieillard infernal saisit un yatagan et d’un coup sec fit sauter un sein. Le lambeau sanglant alla tomber dans un groupe de brutes qui se le déchirèrent. Puis, de la pointe, il fendit en quatre l’autre sein, comme une orange. Un dernier sursaut, le râle qui s’affaiblit. La fin est proche. Avec de longues pinces les aides tirèrent d’un coup brusque le bronze infâme où des chairs calcinés restèrent collées. L’homme au sabre enfila sa lame dans la plaie béante et d’un coup sec décousit de bas en haut le ventre palpitant qui s’ouvrit comme un fruit, laissant s’échapper les entrailles dans un flot de sang noir. »
Gazly, fou de rage, fait bombarder le monument boudhiste du maître de Pékin, anéantit les tortionnaires et, écrasant l’infâme, devient le maître des Jaunes, puis le maître de toute la Chine sous le nom de T’ai-Tsu. Tout-puissant, il subventionne l’anarchisme mondial, puis, commençant par la Russie, déferle sur la France, en passant par l’Italie :
«C’est alors que le plus formidable ouragan d’hommes de l’histoire s’abattit de l’Asie, commandé par T’ai-Tsu, et, avec l’aide des révolutionnaires européens, entreprit de réduire le bastion de la Civilisation capitaliste.»
Alors que des grèves sauvages éclatent spontanément dans toute l’Europe, les forces prolétariennes de T’ai-Tsu réduisent les dernières poches de résistance capitaliste en Europe :
«Depuis longtemps les communications télégraphiques et téléphoniques étaient rompues. Les chemins de fer, après une période fantaisiste, avaient cessé tout trafic. Dans les villes où l’industrie qui n’était pas d’utilité immédiate était paralysée, la misère s’était installée. Les ouvriers organisaient des expéditions, dites «punitives», dans les campagnes, contre les paysans qui boycottaient les grands centres. »
De retour à Paris, alors qu’il pourrait accéder au range de leader mondial des forces de gauche, Gazly est soudain pris d’un délire mystique. Abandonnant son titre de Président pour son ancien nom, il s’installe dans les Pyrénées, près de Massabielle (la grotte de Lourdes) afin d’y finir sa vie en contemplatif mystique Dans la région règne le plus grand désordre, la ville de Bordeaux étant mise à sac par des ouvriers. Les Bordelais, connaissant son passé, le supplient d’intervenir. Gazly, se sentant fléchir, mènera à bien sa dernière mission, devenant le «protecteu » et le «légiste» de la « République du Béarn ».
C’est un dernier fait-divers qui provoquera sa chute. Sauvant une jeune paysanne prise dans une rixe, il sera accusé de viol sur sa personne, injustement condamné à mort. Lorsque les jurés entendant le récit de sa vie, ils seront frappés de terreur et n’oseront signer l’ordre d’exécution. Gazly, mortellement fatigué de la vie affichera tout son mépris à l’égard des hommes :
«J’ai commis bien des crimes et vous l’ignoriez, et le sachant vous êtes frappés de répulsion. Mais, j’ai aussi fait s’entretuer des millions d’hommes, j’ai peut-être anéanti toute la civilisation occidentale, et vous le saviez, et vous m’honoriez avec crainte et c’est moi, le Fauteur, que vous êtes encore venus chercher pour vous sauver. Si j’avais voulu je vous jetais, vous aussi, à la conquête du monde et je reconstruisais avec vous ce que j’avais détruit avec d’autres. Je n’ai pas voulu : cela ne m’intéresse plus. J’ai sans doute achevé ma tâche, puisque Dieu m’a retiré le désir. »
Il sera amené à se suicider au moment même où l’Amérique entrera dans la danse en pacifiant d’une façon sanglante le territoire européen.
«Le Destructeur» est un ouvrage original, oscillant constamment entre le genre pornographique et le roman politique ou conjectural. L’on ne peut être indifférent au destin extraordinaire de Gazly, personnage de la démesure qui explore toutes les facettes d’une vie dont il combat la médiocrité par l’excès, faisant sienne la proposition d’André Breton , «il y a lieu d’établir une hiérarchie dans la pourriture», qu’il pousse aux limites de cette dernière, dût-il en mourir.
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Le Dernier Terrien - Par BenF
" Un conflit éclata. Une guerre mondiale à laquelle nul n’aurait pensé, rendue plus terrible que les autres par l’emploi de l’énergie matérielle. Sa violence fut assez grande pour modifier définitivement les climats: les glaces polaires fondirent et les anciennes côtes des continents se trouvèrent à cent mètres au-dessous du niveau de la mer.
Mais, contrairement aux légendes de Dale, c’est à dire la planète antérieurement colonisée par les Terriens, la Terre survécut. Presque tous les êtres vivants se perpétuèrent. Seuls les hommes vinrent à manquer. Il n’en resta que quelques dizaines de milliers qui tentèrent un nouveau départ. Pourtant, c’en était fait de la vieille fécondité de la race: elle avait subi une mutation dont on ne comprit les effets que peu à peu, lorsque les femmes mirent au monde de trop rares enfants viables. "
Au moment où commence le récit, exit la race humaine. Il ne reste plus que Herndon, un vieillard, avec Cala, une jeune femme et Egon, un cosmonaute, anciennement terrien, revenu de Dale.
Herndon, le Gardien, avait été mis en hibernation pour "survivre à l’holocauste", durant dix siècles. Egon répara le mécanisme de conservation défaillant et tira le vieillard de son sommeil. Herdon, dernier Terrien en compagnie d’une femme stérile, meurt au moment où une nouvelle fusée en provenance de Dale atteint la Terre, à la suite d’avaries moteur. Egon, avec l’aide de Cala, ira à la rencontre d’un groupe mixte d’astronautes en se revendiquant comme " le dernier Terrien ":
" Vous êtes sur la Terre, répondit Egon. Et un sourire lui vint tout à coup, tandis que son regard se tournait vers la masse sombre de la forêt, en direction de l’océan, baigné de lune. La Terre. Quant à moi, je suis le dernier Terrien. Soyez les bienvenus sur votre mère - planète "
Une nouvelle disparate entremêlant divers thèmes classiques.
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Le Dernier Soleil - Par BenF
Le roman se partage entre trois parties dissemblables. La première est une évocation de l’évolution théorique et historique de la société politique des USA après l’engagement au Viêt-Nam. Démoralisés, les USA se retirent du conflit en y laissant leurs morts. Celui-ci aura été un champ d’expérience pour les noirs américains maintenant aguerris et capables de faire la différence selon la manière dont on les a traités au front (toujours en première ligne) et au sein des villes américaines (toujours dans les ghettos)
En peu de temps, l’agitation sociale se développe dans les quartiers noirs, encadrée par les vétérans noirs qui ont appris à se battre. En 1973, le fascisme américain triomphe avec l’arrivée au pouvoir du sénateur Chilson, évinçant le clan Kennedy, appuyé par l’empire militaro-économique représenté par la figure du général Klinger. Chilson utilise les gaz pour « dératifier » le quartier de Watts :
« Il faut que le monde sache ce que cela a été : la folie collective donnée délibérément par des hommes à des hommes. Peu importe qu’il se soit agi de Noirs, ou de criminels ou d’émeutiers. Personne au monde, même pas Dieu, n’a le droit de traiter des hommes de cette manière, de les rendre fous, ou malades, ou aveugles. J’ai vu des enfants qui s’étaient crevé les yeux à force de les frotter, des femmes qui hurlaient en se tenant à deux mains les parties génitales brûlées au troisième degré par les gaz, des hommes armés, ivres de L.S.D. tourner en rond sur eux-mêmes en mitraillant tout ce qui passait à leur portée, même des femmes et des enfants de leur race. »
Cela soulève peu d’émotion dans l’opinion américaine qui récompense Chilson pour cette action d’éclat, en le portant à la présidence, pour peu de temps, puisqu’il sera assassiné par un Noir à cause de ses hauts-faits. Le fauteuil reviendra alors à Klinger, dont le discours reflète les idées :
« Jamais les Etats-Unis d’Amérique n’ont été aussi méprisés et aussi combattus que depuis qu’ils se vouent corps et âme, au salut de l’humanité. Pire encore : les perversions, les vices, la pourriture morale et physique du reste du monde, et je pense surtout à l’Europe, se sont introduits chez nous et ont souillé une partie de notre jeunesse. La débauche sexuelle, l’athéisme, la subversion politique sont les cadeaux empoisonnés que nos faux amis nous ont faits en remerciement de notre aide. »
Aussitôt, le nouveau président donne ses troupes. A l’intérieur des USA, les premiers camps de concentration apparaissent, à l’extérieur, notamment en Europe, les corps d’armées américains s’opposent frontalement à la Russie soviétique et la Chine. Tous les prétextes sont bons et toutes les armes seront utilisées avant que n’éclate la catastrophe finale. La pollution bactériologique de l’eau de New York, supposée provoquée par les Chinois (en réalité liée à la pollution agricole de terrains autour des monts Catskills), les gaz utilisés pour réduire la poche de résistance grecque dans le défilé des Thermopyles, mettent le monde au bord du chaos :
« Leggitt donne l’ordre de charger les mortiers de têtes à gaz G.C. Le reste va très vite. Les « bérets verts » passent leur masque à gaz. Leggitt baisse les bras, les obus de mortier décrivent une trajectoire haute puis s’écrasent au fond du défilé. Dans leurs abris, les Andartès sentent s’élever autour d’eux une odeur vaguement fruitée. Ils n’ont pas le temps de s’en étonner. Leurs yeux brûlent, leur gorge se contracte, ils sont secoués de nausées, puis de vomissements, beaucoup sont saisis de diarrhée, d’autres hurlent en se tenant la tête à deux mains. Les uns après les autres ils s’écroulent sur les roches que recouvre une sorte de rosée incolore, agités de convulsions violentes, puis de plus en plus faibles et s’immobilisent enfin. Leggitt lâche ses jumelles, regarde sa montre.
-Sept minutes seulement, dit-il à l’officier « C. and B. ».
Un dernier sursaut de volonté des peuples qui ne veulent pas mourir, permettra -semble-t-il- de juguler la menace représentée par Klinger et ses séides qui seront amenés à reculer faisant place à un règlement pacifique des conflits par les Nations Unies qui retrouvent de ce fait un peu de crédibilité :
« Dans toute l’étendue de l’Europe, les insoumissions et les désertions se multiplient. En Italie, quatre régiments prêts à s’embarquer pour la Grèce se mutinent. Les unités que l’on envoie mettre les mutins à la raison se rebellent à leur tour et une véritable guérilla commence dans la région de Bari, entre les Senza Noï (« sans nous ») et les troupes régulières. Des incidents du même ordre éclatent en France, en Belgique, en Hollande, en Allemagne de l’Ouest. »
La deuxième partie du roman est en rupture totale avec la première. Un écrivain –nous ne connaîtrons pas son nom –, nous fait partager dans ses notes, qui ressemblent à un journal intime, l’existence d’une société post-nucléaire. Que s’est-il passé alors que tout semblait sur le point de s’arranger? Nous ne le saurons jamais. Quoiqu’il en soit, le conflit nucléaire a bel et bien eu lieu. Les bombes sont tombées en masse, en Russie, aux USA, en Chine, s’abîmant au passage sur la France et sur d’autres pays, en faisant exploser l’arsenal atomique du plateau d’Albion. Le choc électromagnétique lié à ces explosions a instauré le grand silence des ondes. La société a disparu, remplacée par une kyrielle de groupes de survivants non contaminés mais revenus à la barbarie, à un dénuement total, à une détresse maximale.
Le narrateur appartient à l’un de ces groupes d’une vingtaine de personnes vivotant à grand’peine dans la cave d’un village de l’arrière-pays provençal. Ils livrent une lutte continuelle aux rats qui les assiègent, au manque de médicaments, au manque de nourriture. Ils se connaissent à peine, rassemblés en ces lieux par des rencontres de hasard. Menacée par un autre groupe de survivants à qui la catastrophe n’a rien appris, menacée de l’intérieur même par certains d’entre eux qui ne veulent pas abandonner les jeux de pouvoir, la poignée de personnes regroupée autour du narrateur-philosophe tentent, vaille que vaille, un nouveau départ dans la vie. L’aurore sera de courte durée. Les rats par millions reviennent traquer ces débris humains, contaminés par les radiations, jusqu’à la disparition finale d’une espèce trop agressive pour que l’évolution ait pu la pérenniser :
«13 janvier. Le froid est devenu terrible et j’ai peur que la source ne gèle. Il ne peut être question de l’entourer d’un feu, la nuit, car de nouveaux groupes armés ont été aperçus sur la route de Sainte-Pétronille. D’après ce que les veilleurs en on dit, il pourrait s’agir de déserteurs italiens. Senza Noï ou simples pillards ?
Le mistral s’est levé ce matin, et nous avons couvert les feux. L’air des caves est devenu presque irrespirable, mais il ne faut pas que l’odeur de la fumée aille éveiller l’attention de ceux qui passent sur la route. D’en bas, ils ne peuvent voir que les ruines du château. Le chemin qui mène au village ne va pas plus loin. Rien donc ne peut les tenter chez nous, à condition qu’ils n’aperçoivent pas le moindre signe de vie. Il est vrai qu’il nous reste si peu de vie. Deux enfants irradiés sont morts.»
Un récit sans concession, bien documenté (dans sa première partie notamment qui touche à l’uchronie), manifestant la peur atomique, peur récurrente de l’Occident. Proche parent de « Malevil », mais avec l’optimisme en moins, le texte de Jourat est peu connu. C’est dommage.
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Le Dernier Soir Du Monde - Par BenF
Au milieu du mois de mai, et sans aucune cause apparente, l’atmosphère de la terre devint moins claire et la température chuta partout de façon drastique. La neige apparut et persista. Le vent augmenta en puissance pour atteindre la force d’une tempête, puis d’un ouragan.
Les humains, et tous les êtres vivants, se protégeant du froid comme ils le purent entrèrent, dans les semaines qui suivirent, dans une léthargie où seuls survivaient els plus forts.Puis, le phénomène disparut aussi vite qu’il était venu, cette glaciation exceptionnelle ayant provoqué plus de cinq cents millions de morts.Les scientifiques l’attribuèrent à la traversée, par la terre, d’un nuage de poussière cosmique.
Une novelette inattendue par son pessimisme publiée dans un fascicule populaire édité pour la joie des familles.
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Le Dernier Rivage - Par BenF
L’Australie reste la seule région du monde épargnée de façon transitoire par les retombées radioactives. Une guerre nucléaire a eu lieu, sans que l’on sache exactement pourquoi et pour qui. L’hémisphère boréal, entièrement contaminé, a vu mourir tous les êtres humains. Les grandes capitales d’Europe, d’Amérique, d’Asie ont cessé d’exister.
Peter Holmes, de la Royal Australian Navy, sa femme Mary et leur fille Jennifer, sont en sursis. Habitants le sud de l’Australie, près de Falmouth, ils savent, comme tous les autres autochtones, que leur temps de vie est compté car les nuages radioactifs, qui suivent les courants atmosphériques habituels, descendent graduellement vers l’hémisphère austral, recouvrant de leur manteau de mort les dernières régions encore épargnées.En attendant la résolution finale, la vie continue dans une ambiance feutrée, doucereuse, morbide où chaque protagoniste fait semblant d’ignorer l‘échéance fatale :
« Il y avait très peu de circulation sur la route. Il croisa un véhicule qui avait été un jour une automobile ; maintenant, moteur et pare-brise enlevés, un bœuf Angus le traînait. Il vit également deux hommes à cheval, se tenant avec précaution sur le bord sablé de la route et évitant l’asphalte.(…) » Les magasins étaient encore, pour la plupart, bien achalandés, mais il y en avait peu d’ouverts. Les restaurants et les cafés étaient tous pleins et faisaient des affaires d’or ; les bars étaient fermés, mais les rues fourmillaient d’ivrognes(…) Pas de circulation dans les rues, sauf les trams, et les chaussées regorgeaient de monde.»
En ce décor Peter Holmes est chargé, avec le scientifique John Osborne, de prendre ses quartiers sur l’USS Scorpion, le dernier sous-marin nucléaire de la flotte des Etats-Unis. Le submersible est commandé par Dwight Taylor sommé de vérifier, en longeant la côte Ouest des Etats-Unis, s’il subsiste encore une trace de vie en ces régions.
Avant l’appareillage, Peter se prend d’amitié pour Dwight et, comme il est privé de la compagnie de sa femme Sharon et de sa fille Helen (vraisemblablement déjà mortes, ce que Dwight affecte d’ignorer), Peter l’invite à passer le week-end chez lui, dans sa maison de campagne en compagnie de Mary. Pour qu’il ne se sente pas trop seul, il invite aussi une jeune femme délurée, Moira Dickinson. Moira ne fonctionne qu’au brandy mais, insensiblement, s’attache à Dwight qui restera un homme de principe jusqu’à l’instant fatal du dénouement.
Lors d’une première sortie de l’USS Scorpion dans les eaux de l’Amérique du Sud, les marins survivants pourront contempler, le long des côtes, des cités mortes :
«Ils restèrent quelques heures devant San Francisco et prirent des photographies au périscope. Ils retournèrent ensuite au sud jusqu’à Half Moon Bay et s’approchèrent à un demi-mille de la côte, naviguant en surface pendant un certain temps et lançant des appels par le haut-parleur. Ici les maisons ne semblaient pas avoir été fortement endommagées, mais il n’y avait aucune trace de vie à terre. Ils demeurèrent dans les parages jusqu’à la tombée de la nuit, puis mirent le cap au nord. »
Une deuxième sortie, plus lointaine, a pour objectif de vérifier l’origine de signaux morse, de type aléatoire, réceptionné par les Australiens. Quelqu’un serait-il encore en vie ? Muni d’une combinaison anti-radiations, un marin spécialiste se rend sur les lieux. Il ne découvre que pur caprice du hasard dans l’origine du signal. Le retour d’expédition est morose. Les hommes sont fatigués et l’échéance mortelle de septembre est proche. Le sous-marin, désarmé relâche dans le port de Melbourne. Dwight, l’unique survivant militaire américain a été nommé amiral suprême de la flotte des Etats-Unis. Désoeuvré, sa « flotte » étant à quai, il se retrouve souvent en compagnie de Moira qui a décidé de redevenir sérieuse et à faire « comme si… » Elle s’est inscrite à un cours de comptabilité.
Peter et Mary poursuivent une vie heureuse dans leur ferme qu’ils s’efforcent d’enjoliver. John, dont le rêve est tourné vers la mécanique, a déniché une Ferrari qu’il bichonne consciencieusement. Ainsi se continue la vie, toute en douceur et en joie amère jusque vers la fin du mois d’août où les premières retombées se font sentir. Melbourne est laissé à l’abandon, les gens se repliant sur eux-mêmes comme des animaux à l’agonie :
« (…) Dwight regarda les rues et les maisons, dans la lumière grise de ce jour d’hiver. Bientôt, dans un mois peut-être, il n’y aurait plus personne ici, plus une créature vivante, sauf les chats et les chiens qui bénéficiaient d’un bref sursis. Bientôt eux aussi auraient disparu ; hivers et étés se succéderaient et, avec le temps, la radio-activité finirait par se dissiper. Dans une vingtaine d’années, et probablement beaucoup plus tôt, ces rues et ces maisons seront de nouveau habitables. Fallait-il que la race humaine fut exterminée et l’univers débarrassé de toutes ses souillures pour laisser sa place à des occupants plus sages?»
Les pharmacies distribuent gratuitement des pilules euthanasiques pour ceux qui souhaiteraient en finir, plutôt que de traîner entre diarrhées et vomissements :
« Le pharmacien en prit une de chaque et défit la plus petite; elle contenait une petite fiole en plastique renfermant deux comprimés blancs. Il l’ouvrit, en retira les comprimés, les rangea soigneusement dans un tiroir et mit à leur place deux comprimés d’aspirine. Il replaça la fiole dans la boîte rouge, qu’il referma et tendit à Peter. -Voici ce que nous distribuerons à tous ceux qui veulent en finir, dit-il. Prenez cette boîte, et montrez-la à Mrs Holmes. Un seul de ces comprimés provoque la mort, presque instantanément. L’autre est un comprimé de réserve. Quand le moment viendra , nous servirons tout le monde au comptoir. »
Lorsque la fin est imminente, Dwight reprendra la mer sur l’USS Scorpion qu’il coulera au large de l’Australie. John se suicidera dans sa Ferrari lors d’un grand prix d’Australie simulé. Peter et Mary décideront de mourir en couple après avoir euthanasié leur enfant :
« Il fit l’injection au bébé dans le bras. Puis se déshabilla, mit un pyjama propre, éteignit toutes les lumières sauf la lampe de chevet, posa l’écran devant la cheminée du salon et alluma une bougie qu’il plaça sur la table à côté de leur lit ; ensuite, il coupa le courant.
Peter se coucha auprès de Mary, prépara les boissons et sortit les comprimés des boîtes rouges.
« Ma vie avec toi a été un rêve, dit Mary à voix basse. Merci pour tout, Peter. »
Il la serra contre lui et l’embrassa tendrement .
« Oui, un rêve ; c’était trop beau. »
Ce furent leurs derniers mots. Ils mirent les comprimés dans leur bouche et burent. »
Moira, sera la dernière à suivre des yeux, le long de la plage, le sous-marin qui sombre. Puis, un dernier verre de brandy empoisonné lui permettra de rejoindre Dwight. Le rideau tombe définitivement sur l’espèce humaine.
«Le Dernier rivage » relate une fin du monde morne et triste, en demi-teinte, au désespoir total. L’effet des radiations, dont le processus d’action n’est pas encore bien connu à l’époque du livre, ressemble à ce que pourrait signifier aujourd’hui l’emploi de bombes à neutron : toute chair qui disparaît et l’architecture seule qui reste debout. Apocalypse douce, fin totale de l’homme due à sa sottise, rarement les accents de la tragédie n’auront été si vrais. Une belle œuvre qui n’a rien perdu de sa puissance.
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Le Dernier Pilote - Par BenF
La comète Fech1 aura été fatale à l’espèce humaine en balayant l’atmosphère terrestre de sa queue empoisonnée. Un agent inconnu a déclenché une maladie mortelle du sang dont se retrouvent exclus les seuls porteurs du groupe AB+. Peu nombreux, ils représentent environ deux mille survivants épars en France après les convulsions sociales inévitables qui marquèrent le destin des hommes (ou du moins des Français). Kevin est un AB+. Maltraité par le groupe auquel il s’accroche, il en est heureusement rejeté, recueilli par André , un autre survivant mais cardiaque qui, ayant prévu l’ère de violence succédant au passage de la comète, deviendra le mentor de Kevin. Il n’est pas facile pour notre héros de réussir sa mutation : avant de devenir un tireur froid et déterminé, que d’hésitations !
La mort d’André coupe l’ombilic avec l’ancienne façon de vivre. Kevin se lance à la conquête du vaste monde, mais pas n’importe comment : en avion. Sa passion ayant été le pilotage, il l’a mise à profit en s’envolant sur un Rallye 180 remis en état. Le problème de la maintenance ne se pose pas puisque des stocks de pièces détachées et des avions neufs l’attendent sur l’aérodrome de Tarbes. Il sillonne la France , le long de la côte atlantique, dans la vallée rhodanienne jusqu’à l’arrière-pays de Draguignan où il établira sa base en un village-forteresse. Accueilli par les uns en amis, en ennemis par quelques autres, il rassemblera finalement quelques personnes de bonne volonté. Jacqueline, Stéphanie, Claire, Bernard deviendront sa nouvelle famille. Le groupe assimilera quelques autres encore quoique avec méfiance, car l’hostilité des bandes errantes les font s’armer à outrance avec chenillettes blindées et grosses mitrailleuses.
Kevin a trouvé un nouveau but à sa vie : mettre en contact, grâce à son avion, les divers survivants qui aspirent à s’intégrer à une communauté, en fonction de leur spécialisation professionnelle : agriculteurs, mécanos, etc. Du côté de Quimper, il retrouve les sinistres imbéciles qui l’avaient maltraité au début de son périple. Toujours aussi odieux à son encontre, ils ne comprennent pas à quel point Kevin a changé. Un coup de fusil à pompe le débarrasse du plus agressif mais obligé d’abandonner son avion, il rejoindra son village du sud par voie de terre. Peu de temps après survient l’impensable : le village a été pilonné , Jacqueline et Stéphanie grièvement blessées. Kevin reconnaît son propre avion, piloté par l’un de ses adversaires. Animé d’une rage froide, il se débarrassera de l’ennemi en se lançant contre lui, en un acte d’une folle témérité, au péril de sa propre vie. La manœuvre réussit et Kevin restera le dernier pilote en exercice en un pays quasi-désert.
Un récit efficace dans la construction et sans surprise dans le thème centré sur la passion que l’auteur entretient avec le pilotage aérien.
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