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Vous y trouverez des ouvrages post-apo que la communauté souhaite partager. Il vous est possible de rajouter des fiches de livres, alors partagez vos trouvailles avec la communauté FoGen ! Une grande partie des ouvrages que vous trouverez sont ici grâce au travail de Jacques Haesslé sur son site : http://destination-armageddon.fr/index.html. Un grand merci à lui pour son travail exceptionnel !
Livres
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La Peur Geante - Par BenF
Le monde en 2157. Bruno Daix et son ami Pol Nazaire vivent en Utopie, c’est-à-dire en Afrance, partie asséchée de la Méditerranée. Dans le village planétaire, la science et la technologie ont rendu les hommes heureux, qui boivent des "Phoenix" glacés. Glacés, mais sans glaçons, car d’étranges propriétés frappent l’eau qui ne gèle plus.
Chargé par son patron de résoudre le mystère, Bruno n’en a pas le temps. Une catastrophe mondiale s’annonce, la fonte instantanée des banquises arctiques et antarctiques qui, en un raz-de-marée gigantesque, engloutissent la quasi-totalité des villes. L’humanité est à genoux. Seuls subsistent quelques centres souterrains, tels que la ville d’In-Salah en Afrance. Bruno, averti à temps, a échappé au raz-de-marée, en faisant la connaissance d’une charmante chinoise, Kou-Sien:
" A cet instant, le ciel s’assombrit d’un seul coup. Détachant ses yeux du sol, Bruno vit tourbillonner les nuages au-dessus d’eux. Tous les appareils se mirent à tanguer. Le pilote se crispa sur les commandes. Un mur d’écume grisâtre boucha soudain l’horizon, une gigantesque falaise d’eaux furieuses avançait en bouillonnant dans la plaine. Bruno vit les piles colossales du pont Alger-Marseille renversées les unes après les autres. Un roulement de tonnerre s’amplifia, atteignit une intensité insupportable. (...)
Une gifle géante claquait lourdement sur la ville, culbutant les buildings les uns sur les autres. Le valeureux hélico disparut sous les embruns. Déjà, dans les terres, le brutal déluge bouillonnait, envahissait la Mitidja, courait à l’assaut des contreforts de l’Atlas. Au nord, une deuxième falaise d’écume arrivait, chevauchant la première, puis une troisième. On devinait à peine l’ébauche d’une quatrième lorsque tout se brouilla. Il fut impossible de savoir où était la limite du ciel et des eaux. "
Non seulement l’eau ne gèle plus, mais le cycle de l’évaporation s’arrête et, après l’inondation, la sécheresse menace la Terre. Tout ceci ne peut être le fruit du hasard. L’humanité est attaquée par les Torpèdes, des raies intelligentes qui veulent la destruction de l’homme, apparemment dérangées dans leurs occupations sous-marines.
La lutte s’installe des deux côtés. Des bases sous-marines spécialement aménagées permettent à des nageurs avertis (dont Bruno et Pol) d’aller contaminer la nourriture des Torpèdes, rendant ceux-ci semblables à de vulgaires poissons à bouillabaisse. Durant ce temps, Kou-Sien déchiffre le langage des Torpèdes qui communiquent entre eux à base d’impulsions magnétiques. Tout rentrera dans l’ordre mais le lecteur n’apprendra jamais comment l’eau, qui reprend ses anciennes propriétés, a pu les perdre un temps donné.
Un récit gentillet, bien écrit et fleuron de la collection "Anticipation" au Fleuve Noir des années 60. Nullement ennuyeux, le récit, à l’intrigue linéaire, n’approchera jamais du chef-d’oeuvre de Kapek "la guerre des Salamandres", brodant sur le même thème, ou du roman de Wyndham "le Péril vient de la mer ".
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Ce texte représente l’un des nombreuses suites de la «Bataille de Dorking ». Spiridion Gopcévic démontre, avec une rigueur amusante, le rôle joué par la marine française dans cette conquête qui rend enfin à raison la suprématie britannique en ce domaine. Tout commence par la prise de l’Egypte par l’Angleterre. C’en est trop pour la France qui ne peut admettre qu’on la dépouille de son protectorat (et incidemment du canal de Suez). S’appuyant sur l’Irlande, folle de joie à l’idée de regagner sa liberté, s’étant assuré de la neutralité des autres pays européens, elle arme ses deux flottes, l’une partant de Brest, l’autre de Toulon.
Les Anglais, mis au courant, veulent prévenir l’attaque en la personne de l’amiral Clark fort de ses cinquante-cinq cuirassés qui aussitôt firent route vers la Méditerranée pour bloquer l’escadre française dans son port de Toulon :
« Le Rodney et le Conqueror, qui avaient déjà canonné le Richelieu, lors de son passage à contre-bord, s’attaquèrent plus spécialement au Caïman, et, concentrant sur lui le feu de leur artillerie, pendant qu’il mettait à l’eau ses torpilleurs vedettes, réussirent à le couler ; les deux petits torpilleurs ne tardèrent pas à venger la perte de leur navire-mère. A la faveur de la fumée épaisse qui couvrait la plaine liquide, ils parvinrent à lancer en bonne direction, deux torpilles Whitehead, qui firent sauter à la fois le Rodney et le Conqueror. »
Averti à temps de la décision anglaise par l’aviso-torpilleur «la Dague» en embuscade avancée, l’amiral français Borny pris la mer à partir de Brest pour voler au secours de la flotte toulonnaise :
« Le soleil levant du 1 er août 1888 vint éclairer un imposant spectacle. Une flotte formidable appareillait de Brest : 280 vapeurs de tous les types remorquant des navires à voiles, 8 cuirassés, 20 torpilleurs et 22 croiseurs ; au total 330 bâtiments quittaient ce grand port au milieu des hourras enthousiastes de plus de 200 000 voix et prenaient leur course vers Land’s End. Les avisos et les torpilleurs ne tardèrent pas à se placer de tous côtés en éclaireurs, tandis que les bâtiments de ligne restaient plus près, autour du convoi, pour le protéger. Dix heures plus tard, le même soleil assistait à Cherbourg à un mouvement de navires aussi considérable. 8 cuirassés, 20 torpilleurs, 22 avisos et 270 transports ; -en tout 320 bâtiments quittaient les côtes de Normandie, et faisaient route à l’Ouest. »
La bataille de Corrobedo demeura incertaine quant à la victoire française, les forces en présence s’équilibrant, les deux armadas se coulant respectivement leurs cuirassés à l’aide de leurs petits navires rapides, les torpilleur, qui firent merveille. L’arrivée imprévue, pour les Anglais, des secours français de Borny inclina la décision finale en faveur de la France.
Malgré de lourdes pertes, l’Angleterre put se dégager du piège. Les Anglais enragèrent et ne cédèrent pas. Peu de temps après, ils mirent en commun toutes leurs forces, constituant une nouvelle escadre dans la Manche dont ils confièrent la destinée à l’amiral Harlington pour une vigoureuse contre-attaque dans le but de dégager définitivement les côtes anglaises.
L’engagement eu lieu au large de la Corogne, au désavantage des Anglais dont les cuirassés sombraient les uns après les autres, attaqués de tous les côtés par les torpilleurs français. C’en était bientôt terminé de l’orgueilleuse flotte britannique. Les Irlandais jubilèrent. La France, confiante en sa toute nouvelle force, prépara son débarquement sur les côtes du pays ennemi, près de Portsmouth et de la Cornouaille. L’amiral Drach, appareillant le 1 er août avec sa formidable flotte, établissant plusieurs brèches dans la défenses désespérée des Anglais, établit la tête de pont, débarquant à terre une armée de plus de 100 000 hommes. La jonction de toutes ces forces devait s’établir à Exeter et, de là, prendre la direction de Londres.
« Le commandant en chef décida de la retraite le 17 août ; mais il était trop tard, un corps de l’armée française avait opéré son mouvement tournant et attaquait ses derrières. Il était enveloppé de toutes parts. Il tenta de faire une trouée à travers l’ennemi, mais cette attaque désespérée demeura sans succès, par suite du manque d’entrain de la milice et des volontaires.
Enfin, dans la matinée du 18 août 1888, l’armée anglaise fut réduite à capituler ; et le 23, les armées françaises faisaient leur entrée dans Londres. Pendant ce temps, les transports avaient fait retour en France et y avaient embarqué 100 000 nouveaux hommes. La moitié de ceux-ci furent mis à terre en Irlande où la population se souleva et les accueillit à bras ouverts ; l’autre vint renforcer l’armée d’occupation. »
Malgré une défense héroïque, les journées d’août 1888 furent désastreuses, qui virent la destruction complète de la flotte anglaise. La mer étant libre, maintenant, de partout dans le monde, dans l’océan Indien, en mer de Chine, au large de l’Australie, près de l’Amérique du Nord, au large de Sainte-Hélène (lieu ô combien symbolique !), des petites escadres françaises fortes de leurs avisos et de leurs torpilleurs coulent les navires de commerce britanniques, portant le coup de grâce à l’Empire.
Fin août, après la bataille définitive de Labuan, l’Angleterre était à genoux. Elle fut sommée de verser trente huit milliards de francs-or au titre des dettes de guerre. Le reste de sa marine fut démantelée. Elle perdit toutes ses possessions lointaines (à l’exception de l’Australie), qui se déclarèrent républiques indépendantes. Le reste de ses territoires fut partagé entre les vainqueurs français et les voisins européens. Finis Britanniae !
L’auteur, d’une manière qui se veut exemplaire, comptant et recomptant inlassablement les forces maritimes en présence comme les boutons de guêtre d’un uniforme de soldat, veut ainsi démontrer :
1.que les Français sont d’habiles tacticiens maritimes
2.que la souillure de la défaite de Trafalgar devait impérativement être lavée.
3.que la perte des cuirassés anglais était en grande partie due à l’usage novateur des torpilleurs, plus rapides, plus légers, plus maniables, et partant plus dangereux.
Dans la lignée des « Batailles Imaginaires » établie par Garçon Augustin et l’éditeur Lavauzelle , le récit de Gopcévic Spiridion a le mérite d’être court, enlevé, précis, démonstratif, traçant ainsi dans l’imaginaire ce que jamais la France ne put accomplir au réel.
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L’apparition dans le ciel d’une comète « à la queue phénoménale » censée heurter la terre, provoque des réactions incongrues dans la population, dont la moindre n’est pas de jeter les conventions par-dessus le moulin et de profiter de la vie durant le petit délai encore accordé par la providence. C’est ainsi que :
« Tout Paris endormi
A bondi de son lit
Et d’un seul coup la rue
Fut pleine de femmes nues ».
Chacune d’entre elles se révèle enfin dans sa vérité :
« la femme du chef de gare a sorti ses amants » et les «dames patronnesses foncent au lupanar ».
Hélas ! c’est une bien mauvaise idée puisque la comète, après avoir frôlé notre planète, disparaît dans la nuit, laissant le monde désemparé et honteux.
Une verve poétique mise au service de la drôlerie et du chamboulement.
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Attention, chef-d’œuvre ! Voici une chanson qui dénonce toutes les guerres, passées ou futures, toutes les invasions, présentes ou à venir, toutes les spoliations, celles de jadis et celles de l’avenir. La figure archétypale du loup avec son comportement en meute renvoie aussi bien à celui des nazis qu’à celui de toutes les troupes d’occupation. Ancrée dans la réalité historique de l’invasion de la France par les Allemands et de l’occupation de Paris, elle s’ouvre aussi sur un temps mythique, un Ailleurs barbare, un monde d’avant le désordre où « le rire d’Elvire » se fige en une grimace affreuse. Les causes de la catastrophe sont connues, telles que la lâcheté, l’irresponsabilité, l’abandon de tout valeur :
« Les hommes avaient perdu
le goût de vivre
Et se foutaient de tout
Leur mère, leur frangin, leur nana
Pour eux, c’était du cinéma
Le ciel redevenait sauvage
Le béton bouffait le paysage. »
Le vide moral, l’égoïsme et le développement technique ouvrent des opportunités à toutes les forces obscures de l’univers, les loups» qui, lentement, répondant à leur nature archaïque, se préparent pour la curée. Ayant regardé vers Paris, de la « Germanie », de la «Croatie», profitant de la neige et du froid, du vide des rues comme de celui des cœurs, ils s’infiltrent par « Issy » (ou « Ici ? ».) Peu féroces au début, ils montrent une face de plus en plus agressive, jusqu’à envahir totalement Paris :
« Attirés par l’odeur du sang
Il en vint des mille et des cents
Faire garousse, liesse et bombance
Dans ce foutu pays de France »
Le seul remède à la situation réside dans le sens du courage et de la responsabilité, dans « l’amour et la fraternité ».
Cette chanson résonne comme un avertissement, un devoir de mémoire, un glas funèbre. «Les Loups» suggère un univers de misère moral où, malgré tout, subsiste un fragile espoir. A comparer avec l’ouvrage de Calonne « Hurleville» qui apparaît de peu de consistance, malgré ses deux cents pages, en face de cette force d’évocation fantastique et sauvage
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Sur une terre arasée réduite à une affreuse plaine sillonnée par des mastodontes d’acier énormes comme des collines, l’homme est considéré comme un intrus. Les villes et les cités ont disparu, réduites à de fines pellicules, broyées :
« Rien ne résistait au passage du char. Le char aplatissait tout, enfonçant dans le sol les objets les plus solides. Les voitures, les camions se changeaient ainsi en de beaux crachats de métal luisant sans plus d’épaisseur qu’une plaque de tôle. Des villes entières s’allongeaient dans la poussière, telles les toiles peintes d’un décor brusquement abattu ».
Le ciel étant parcouru par des « mouettes », c’est-à-dire des avions-robots détectant et détruisant tout humain adulte de plus de quinze ans, une vie robotique prodigieuse prolonge avec obstination une guerre périmée d’où l’homme est absent. De jeunes enfants, sans arrêt traqués, constituent des clans. Nus et primitifs, ils parcourent inlassablement un territoire plat et dangereux, autant à cause de la radioactivité résiduelle qu’au fait d’être écrasés durant leur sommeil. Les adultes restants, pour échapper aux mouettes ont élu domicile dans des trous de bombe où ils survivent autant par le cannibalisme que par le vol d’aliments parachutés à heure fixe pour des soldats fantômes. Les boîtes de conserve cherchées par « les petits », seuls capables de se mouvoir sans risque, leur seront envoyés au hasard :
« Les choses se gâtaient aux niveaux inférieurs, là où s’accrochaient les plus âgé , les adultes ou les vieux aux capacités physiques déjà entamées. Ceux-là poussaient des couinements de souris terrifiée, ne sachant s’ils devaient se protéger des chocs ou tendre les mains. C’était une pitié de les voir se dandiner dans la pénombre, une expression d’avidité angoissée sur le visage. Leurs mains battaient l’air, suppliantes, grandes bêtes blanches couturées de cicatrices. Pour les conserves en folie, ils constituaient une cible d’élection. « Boum ! » scandaient les mioches chaque fois qu’une boîte de fer-blanc frappait un vieux au visage, le décrochant de son surplomb comme une maigre quille enveloppée de guenilles. »
Dan et Suzie des « grands » de douze ans, dirigent les enfants de leur clan, des « mioches » ou des « bébés », leur permettant d’éviter les pièges d’un paysage où toute hauteur, toute montagne, tout nuage peut recéler en son sein des artefacts meurtriers. Ils feront la rencontre de Fucker Boum-Boum, un adolescent singulier abrité dans un trou à bombe. Son charisme, sa connaissance des automatismes technologiques et des nouvelles données sociales, le feront accepter comme nouveau meneur du clan, même par Suzie, reléguant Dan au rôle d’observateur moral et témoin horrifié face du destin qui attend les « mioches ».
Pour Boum-Boum, la seule possibilité de survie à long terme se trouve sur l’un de ces chars immenses qui parcourt sans arrêt la plaine et s’arrête parfois sans raison. Ils vivront sur son énorme dos de métal comme des puces sur celui d’un chien. Profitant de l’arrêt momentané de l’un des mastodontes, le clan se rue à l’assaut non sans risques : «Dan hésita, puis empoigna les barreaux des échelons à son tour. C’était comme d’escalader un mur et il crut une seconde qu’il n’aurait pas assez de force dans les bras pour aller jusqu’au bout. L’acier du blindage derrière lequel vrombissaient les moteurs était brûlant et il devait prendre garde à ne pas le toucher. Suzie et Antonin l’aidèrent à prendre pied sur le capot. Un hélicoptère explosa au même moment et des fragments de pale tordue rebondirent sur la tourelle. Suzie hurla. Pris de panique, l’un des gosses sauta dans le vide sans réfléchir et s’écrasa sur le sol craquelé, dix mètres plus bas. »
Lorsque le monstre, le « Rinocérox » se remet en mouvement, ils contemplent ravis leur nouveau territoire, désormais invincibles, à l’abri des mouettes, protégés par le géant. Mais comment faire pour se procurer à manger ?
Fucker à l’idée d’envoyer par une trappe de ravitaillement le plus petit des bébés, le plus malingre de la bande, récolter au fond d’une réserve d’aliments, dans le corps même de Rinocérox, les rations qui doivent indubitablement s’y trouver. Le petit « rat » est terrifié à cette idée. Après plusieurs tentatives, il remplit sa mission sans pouvoir participer à l’euphorie générale, Fucker lui ayant interdit de se nourrir :
«Le garçonnet s’approcha de la calebasse du banquet et voulut plonger la main dans la nourriture chaude. Fucker le tira violemment en arrière, le faisant tomber sur les fesses. - A quoi tu joues ? intervint Dan en fixant le blondin dans les yeux. Il a droit à la première part… C’est lui qui a ramené la bouffe, non ? - Rigolo, va, siffla Fucker. Tu veux qu’il se bourre la panse et qu’il grossisse ? Comment il se glissera dans la soute ensuite, hein ? Tu y as pensé ? Ce gosse, il faut qu’il reste maigre comme une trique. Il en va de notre survie. – Quoi ? protesta Dan . Tu veux le condamner à mourir de faim ? - Le moyen de faire autrement ? ricana Fucker. Personne n’est aussi maigre que lui et pourtant c’est tout juste qu’il passe dans le conduit. C’est triste mais on n’a pas le choix. »
Mais, à chacune de ses descentes, la terreur du petit grandit. Dan soupçonne qu’un engin-robot dépeceur de viande doit être sur ses traces. Fucker ne veut rien savoir jusqu’au jour où le filin de retenue coupé net et ensanglanté prouve la véracité du fait: le « rat » a été transformé en steaks juteux pour tankistes morts !
« Du ventre du char monta soudain l’écho d’une cavalcade et les cris apeurés de l’enfant. Il ne hurlait pas, non, il poussait de petits gémissements de chiot malade, comme s’il essayait d’attendrir son implacable adversaire. Dan l’entendit murmurer une ou deux fois : « Bébé, le bébé recommencera plus… Pitié, monsieur, c’est rien qu’un bébé qui avait faim… », puis la supplique fut cisaillée par un couinement de souffrance qui s’éteignit brusquement. Sans attendre l’ordre de Fucker, Dan se mit à tirer sur la corde… mais il sentit tout de suite qu’elle était molle et qu’il n’y avait plus rien au bout. »
Lorsque le jeune tyran obligea un autre enfant à se glisser par l’étroite lumière du gigantesque canon afin de leur permettre à tous d’accéder à l’intérieur du Rinocérox en leur ouvrant une écoutille d’accès, Dan évoque la possible catastrophe d’un cadavre obstruant le fût :
« -Le canon, répéta-t-il d’une voix qui s’enrouait déjà, il va nous péter à la gueule au prochain obus ?. C’est comme ça que les soldats, dans le temps, piégeaient les pièces d’artillerie : en les bourrant avec des pierres, de la boue qu’ils tassaient pour former un bouchon… - Ta gueule, aboya Fucker , tu racontes n’importe quoi. L’obus éparpillera le cadavre de ce petit con. Il rentrera dedans comme une lame dans la glaise. – Non, s’obstina Dan. Il explosera et la tourelle sera mise en miettes. Les éclats nous éplucheront vifs, et pas un d’entre nous ne survivra. Il faut… il faut abandonner le char à la première occasion. Cette fois, Fucker le frappa au visage, lui expédiant son poing en pleine face, et Dan tomba sur le dos, sonné, du sang plein la bouche. »
Le soir venu, Boum-Boum jeta Dan ligoté du haut du char dans la terre meuble où par miracle il put survivre. Seul, proche de la mort, sa rencontre inopinée avec une équipe médicale robotisée infléchit le destin de Dan. Pris pour un soldat blessé, il fut transféré en un hôpital militaire , base suspendue et camouflée en nuage, où, avec pour uniques compagnons des squelettes, les automates prirent soin de lui:
« La litanie ne variait jamais, d’un lit à l’autre elle demeurait aussi stupidement optimiste, comme si ces squelettes desséchés depuis dix ans possédaient encore une bonne chance de voir leur « maladie » régresser. Un court-circuit s’était produit quelque part, à n’en pas douter, et l’ordinateur régissant l’antenne médicale n’était manifestement plus capable d’apprécier la gravité des cas qui lui étaient soumis. Jadis programmé pour sauver coûte que coûte les combattants les plus atteints, il continuait à appliquer cette règle de conduite, en dépit de toute logique, s’épuisant à soigner des morts dont la peau, dont les viscères étaient depuis longtemps retournés à la poussière. »
Jamais il n’eut une meilleure vie. Bichonné, engraissé, il connut un intense sentiment de bien-être qui disparut brutalement lorsque, dans la salle opérationnelle, il put suivre sur un écran son clan posé sur le dos de Rinocérox.
Fucker, tel l’ogre de la légende, y faisait régner la terreur tirant à la courte paille celui qui devait être mangé. Suzy sauvait de temps en temps quelques enfants, en les jetant du char, à l’insu du meurtrier. La rencontre de Rinocérox avec deux mouettes en recherche mit un point final à l’aventure. Comme prévu, le canon obstrué éclata, éventrant l’énorme engin, tuant le clan et déversant ses organes de métal dans la plaine environnante. Dan profita de l’expédition de secours pour être du voyage et disparaître dans le fouillis mécanique.
Il arrivera à réunir autour de lui les quelques « mioches » rescapés en leur proposant de rejoindre un abri sûr de sa connaissance où ils pourraient survivre.
Comme à son habitude, Brussolo signe un roman terrifiant où le mythe de l’ogre rejoint celui de la famille primitive, tout en disséquant le mécanisme absurde d’une guerre sans but. Ce récit charpenté et dense pourvu d’une intrigue simple mais puissante qui donne un relief psychologique fort aux personnages, constitue un bel exercice de style.
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Les Brigades Du Chaos - Par BenF
Vol.01 : Profession : cadavre, Fleuve Noir éd., 1995, coll. " Anticipation " N°1962, 1 vol. broché, in-12 ème , 185 pp. couverture illustrée par Kervevan. roman d’expression française.
1 ère parution : 1995
Koban Ullreider, psychopathe monstrueux en taille et en force, totalement dénué de sensations et d’émotions, a été élevé sur Mars par son père pasteur et mis en contact avec la poussière magnétique martienne qui contient toute la tristesse dépressive des autochtones aujourd’hui disparus. Ullreider, investi d’une mission apocalyptique par son père, rapporte sur terre des blocs agglomérés de cette poussière qu’il cache en un hangar, provoquant une asthénie sans équivalent dans le quartier :
« Koban suivait les progrès du mal avec détachement ; Il savait que le taux de suicide grimpait de manière disproportionnée. Il ne se passait pas une journée sans que quelqu’un se jette dans le vide du haut d’un immeuble, sans qu’une femme ne s’ouvre les veines dans sa baignoire. Beaucoup, gagnés par une écrasante impression d’inutilité, avaient cessé de se nourrir, de se laver, de s’habiller. Il n’était pas rare d’apercevoir, par les fenêtres ouvertes, des hommes et des femmes nus, couchés sur leur lit, fixant le plafond. C’était comme une irradiation maligne qu’aucun compteur Geiger n’aurait pu détecter. Elle ne gangrenait pas les corps, mais les âmes… uniquement les âmes. »
L’industrie martienne a fourni encore d’autres nouveautés aux Terriens. Comme celle de la nécro-vision qui permet par l’exploration intrusive des neurones du mort de visionner ses derniers instants. Mathias Faning s’est spécialisé dans cette technique, devenue une auxiliaire de la justice. Koban en a trouvé la parade :
« Il tira un sac poubelle de la poche de son treillis ainsi qu’un couteau de chasse muni d’une lame impressionnante. Un Bowie-knife volé à un voyou dans une ruelle de Venice. Il vaporisa la solution antihémorragique sur le cou des deux hommes et leur trancha la tête sans verser une goutte de sang.(…) Son image était toujours là, photographiée dans la cervelle des morts, mais il savait comment résoudre le problème. Au bout de la rue, une usine d’incinération d’ordures faisait ronfler ses fourneaux jour et nuit. Il était facile de s’y introduire et de jeter les têtes dans la fournaise.»
Enfin une sève martienne aux étonnantes propriétés a donné un anesthésique puissant et un cicatrisant exceptionnel. La chirurgie terrestre a donc fait des progrès surprenants avec ces produits. Mais le revers de la médaille est le développement des « pickpocket organiques » qui vous enlèvent un organe pour la revente illicite sans que vous puissiez vous en rendre compte. Cela a crée une société urbaine craintive et méfiante. Heureusement, les traumas de toute nature peuvent disparaître de la mémoire grâce au «Rub-Out » une drogue d’amnésie parfaite.
Sarah est une ancienne femme peintre en murailles accidentée. Elle est reclassée dans le service de Faning comme femme de ménage. Elle aussi est fascinée par la nécro-vision et plus encore, par cette nouvelle technique, le « morpho-clonage » qui permet, à l’aide de traces organiques, la reconstitution en 3-D d’une sorte d’enveloppe globale de l’individu.
Sa piste croise celle de Koban Ullreider chez son amie Laura. Le criminel s’essaye à des créations telles que décrites dans l’Apocalypse de Jean, en marquant ses futur(e)s adeptes au fer rouge. Laura sera l’une de ses victimes. Trafiquée par Ullreider, elle se transforme en un monstre brûlant, un « ange de l’apocalypse ». Sarah, qui a suivi de près tout le processus, n’est pas vraiment effrayée. Tout se passe comme si un étrange lien psychologique la reliait au psychopathe.
Vol. 02 : les Promenade du bistouri, Fleuve Noir éd., 1995, coll. " Anticipation " N°1970, 1 vol. broché, in-12 ème , 187 pp.couverture illustrée par Jean-Yves Kervevan. roman d’expression française.
1 ère parution : 1995
Deux autres « anges » seront fabriqués par Koban. L’un, Sharon Baker, illustrera le douzième verset du VIIème sceau de l’apocalypse, en pleurant des larmes noires. Ayant pris son envol au-dessus de la ville, par ses larmes, elle catalysera le brouillard stagnant au-dessus de Los Angeles, le transformant en une coupole de verre noir qui menace d’asphyxie la grande cité. En éclatant, le dôme vitrifié ciblera d’éclats les imprudents et fera plus de 32 000 morts.
Le deuxième ange, toujours une femme, pleurera des larmes de sang au-dessus de la mer, transformant l’eau de l’océan en sang. S’ensuit une effrayante marée rouge.
Sarah, à l’occasion de cet événement, rencontre le professeur Mikofski qui remarque qu’elle est déjà marquée par la poussière rouge de Mars dont est porteur Koban. A cette occasion, Il lui fait une stupéfiante révélation, encore inconnue du monde, impensable mais réelle, dont il connaît bien la nature puisqu’il a fait partie de l’équipe scientifique qui, jadis, étudia ledit phénomène.
A travers une simulation d’ordinateur, travaillant sur les clichés transmis par sonde spatiale, il lui est apparu que les planètes du système solaire, y compris la Terre, seraient les crânes et les os gigantesques fossilisés de géants datant d’avant sa formation, des êtres inimaginables aux fémurs longs de 40 000 km. Des êtres angoissants jadis vivants qui se battaient entre eux, et dont les humains ne seraient que les minuscules nécrophages se développant sur le crâne fossile d’un géant mort.
Bien pire : les Martiens, jadis plus développés que les Terriens, avertis du fait, avaient extrait et rassemblé les pensées fossiles de ces géants morts, à fin d’étude. Leur disparition totale laissa subsister le mur de poussière martienne rouge, un infernal mélange de pensées agressives, remplies d’une haine incompréhensible, qui trouvèrent un relais en la personne du mutant Koban Ullreider. Téléguidé par ces pensées sauvages, qu’il traduit en images de l’apocalypse du fait de sa culture religieuse, Koban est là pour rouvrir la porte à ces êtres que Mikofski appelle « la Brigade du chaos. »
Sarah, bouleversée par ces révélations, rentre chez elle pour apprendre que Koban, découvert et piégé, a été réduit en pièces par la police, sa mémoire et sa pensée mise sur des disquettes de nécro-vision par Faning qui s’est réservé une copie à son usage personnel en la mettant en lieu sûr.
D’autre part, à partir des cellules du mutant abattu, l’on fabriqua un clone mnémonique de celui-ci. De plus en plus sous l’emprise de la poussière martienne, Sarah vola le clone et la disquette de Faning. Chez elle, le nourrissant de son sang, elle lui réinjecte la mémoire originelle d’Ullreider. Quoiqu’affaibli, Koban ressuscite. Selon un plan prévu de longue date, il guide Sarah dans l’élaboration de centaines de clones-enfants à l’image du psychopathe.
Ceux-ci, des enveloppes animées remplies de poussière martienne, constitueront « l’armée du chaos », sillonnant la ville, contaminant les êtres humains avec leurs pensées malsaines, et déclenchant une vague de suicides sans précédent sur terre. L’apocalypse est en marche.
Vol. 03 : La cicatrice du chaos, Fleuve Noir éd., 1997, coll. " SF métal " N°5, 1 vol. broché , in-12 ème , 187 pp. couverture illustrée par Kervevan. roman d’expression française.
1 ère parution : 1997
La poussière martienne, répandue par les « petits » Koban envahit toutes choses, sujette à d’étranges métamorphoses : elle s’autoreproduit, recouvrant petits immeubles, objets et gens. Mathias Faning et Mikofski sont conscients du danger mortel qu’ils encourent. En compagnie de quelques militaires, protégés par un filtre anti-poussière, ils sillonnent la ville en engin blindé pour évaluer la situation. L’évolution s’accélère. La poussière devient jonctive, souple et, comme une peau plastique, entoure les cadavres d’une carapace rouge qu’elle réussit à faire mouvoir. Mikofski devine l’incroyable vérité : le géant, dont la tête représente la terre, est en passe de se reconstituer et de cicatriser ses plaies, qui sont notamment les océans ou les grandes fosses marines. La suturation des os se fait à grande vitesse, ce qui se traduit par un bouleversement généralisé du terrain, et, au-delà, de la géographie mondiale :
« C’est ça ! martela Faning. Le sol est en train de « pousser» sous nos pieds, il gagne en superficie. C’est comme une moquette qui deviendrait vivante et s’agrandirait d’un mètre carré toutes les heures. Voilà pourquoi nous faisons du surplace. La « pousse » n’est pas uniforme, elle se produit en certains endroits, là où le sol est plus mou. »
Les immeubles de Los Angeles glissent les uns vers les autres, les océans se couvrent d’une croûte lisse et blanchâtre, en réalité le cartilage cicatriciel du géant. La poussière devenue lisse représente sa peau. Tous les organismes vivants sur terre, considérés comme des parasites, sont en passe d’être éliminés par la « poussière martienne » qui anime les épaves de voiture ou d’avions d’une énergie intense mais brève :
« Les objets vivants se jetèrent sur les animaux fatigués et les mirent en pièces. Affaiblis par la longue traversée, rendus malades par la « peau » dont ils avaient essayé de se nourrir malgré tout, les bêtes se laissèrent submerger par ces lointains cousins d’apocalypse. Les tuyaux-serpents s’enroulèrent autour des éléphants et leur broyèrent la cage thoracique, les voitures-crocodiles happèrent les autres quadrupèdes avec tant de violence qu’elles coupèrent leurs victimes en deux. Les capots-mâchoires ne cessaient plus de s’abattre et de se relever, en une grotesque parodie de mastication. »
Entre temps, Sarah, toujours dévolue aux soins des clones sent que la puissance qui la protège s’amenuise, comme d’ailleurs Koban, réduit à l’état de poupée prête à s’envoler au vent. Il est temps pour elle de se sauver. Elle rencontrera par hasard et par la volonté de l’auteur, Faning et Mikofski qui la recueillent dans leur engin blindé. Le géant semble prêt à gagner la partie, à faire disparaître toute vie sur terre et, en se réveillant, à se venger de ses anciens ennemis, soit les autres planètes du système solaire qui constituent autant de crânes. Que faire pour arrêter le processus ?
Alors Mikofski dévoile son ultime parade : injecter, par la fissure non encore cicatrisée d’une ancienne plaie, la faille de San Fransisco, une bombe composée de Rub-Out concentré pour le rendre amnésique et impuissant. L’opération de la dernière chance se déroule comme prévu. Le Rub-Out se répand sous l’océan grâce à un missile porteur. Le géant restera à nouveau inerte, et la terre sera sauvée. Hélas ! Le Rub-Out, en diffusant petit à petit dans l’atmosphère, transformera tous les survivants en crétins ignares, oublieux de leur histoire et de leur humanité :
« Il passa sa dernière journée d’homme civilisé en préparatifs divers. Il avait couvert le ciment de sa «caverne» de dessins naïfs expliquant le mode d’emploi des objets étalés autour de lui. Il espérait que cette grossière bande dessinée répondrait aux besoins pédagogiques qu’il plaçait en elle. Ce jour-là, ils n’éprouvèrent ni les uns ni les autres, le besoin de se rencontrer. Faning n’avait jamais aimé les adieux prolongés. Le soir, il dut enlever son masque car le filtre saturé l’empêchait de respirer. Il s’allongea sur la paillasse dont il avait tapissé le fond de la niche et respira à petits coups. L’air n’avait aucun goût particulier.
« Tu vas t’endormir, pensa-t-il, et demain… »
Demain, qui se réveillerait ? Mathias Faning, l’ex-policier du LAPD ou Ghar… l’homme des cavernes ? »
Un récit terrifiant qui, pour osés et incroyables en soient les présupposés, accroche le lecteur jusqu’à la dernière ligne. Brussolo, par un méticuleux montage en plans alternés possède l’art de brouiller les pistes et de relancer l’intérêt. L’on se souviendra donc longtemps du géant psychopathe Koban Ullreider devenu Tom Pouce dans sa boîte d’allumettes, du Rub-Out et de la nécro-vision. Un récit incontestablement original.
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Le Voleur D'icebergs - Par BenF
Dan, le commercial navigant, a des ennuis avec sa cargaison durant la traversée de l’espace intersidéral. Des réparations l’obligent à relâcher sur l’astéroïde AMH-435, à l’écart de toute route commerciale. Une surface entièrement gelée, une transparence parfaite, des blizzards intenses lui font regretter la terre qu’il regagne quelques semaines plus tard remportant de son escale improvisée quelques copeaux d’une glace… qui ne fond pas. D’une dureté à toute épreuve, d’une eau parfaite, ces copeaux s’apparentent aux diamants. C’est en tout cas le prix exorbitant que d’autres négociants acceptent de payer pour les acquérir. Dan devient riche. Il s’installe comme diamantaire, gardant par devers lui certains de ces copeaux, sans se douter qu’ils vont être à l’origine de la fin du monde. Comme des entités vivantes, les pierres extraterrestres tentent de rétablir à leur profit un équilibre rompu. Agissant en catalyseurs, elles transforment l’environnement selon trois modes successifs.
Le premier est l’instauration d’un froid intense : tout acheteur qui porte l’une de ces pierres meurt gelé en plein été. Le deuxième est l’invisibilité : paysages, fleurs et arbres disparaissent de la vue parce que parfaitement transparents. Puis c’est le tour des rues, des maisons, des voitures, Telle une épidémie, le mal se répand contraignant les hommes à s’adapter à ce nouvel environnement. Guidées par des aveugles pour éviter les obstacles, incapables de monter dans des tours d’habitation, de procéder à des échanges commerciaux, les sociétés se défont. Le troisième mode provoquera la fin certaine de l’humanité. La nature, en proie à une dissolution universelle se transforme en eau : tout support solide disparaîtra. Dan est le seul à avoir compris le processus puisqu’il en est le responsable. Il sait que les éléments organiques ne sont pas affectés par les pierres extraterrestres. Il construira donc une arche en cousant des peaux d’animaux pour atteindre les banquises du nord, seuls éléments stables au sein d’une planète liquide.
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Le Mot De La Fin - Par BenF
Le journal intime de Franck Dumoncel rapporte ces événements tragiques : le gouvernement, pour remplir les caisses d’un Etat mises à mal, a décidé la privatisation des lettres « inutiles » de l’alphabet.
Sauf à en racheter les droits d’une manière temporaire ou définitive (beaucoup plus cher !), des phrases telles que : «un grizzly peroxydé zozote dans un blizzard moyenâgeux…» seront totalement interdites. Devant le succès remporté par l’initiative gouvernementale, toutes les lettres seront progressivement privatisées, jusqu’à la …***.
Une idée neuve et poétique, une nouvelle percutante dans sa brièveté.
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Quelle Secousse! - Par BenF
Le « Big One » s’est déclaré. Toute la côte Ouest des Etats-Unis subit des bouleversements dramatiques avec, pour corollaire, une désagrégation sociale et morale de l’Etat et des individus. Le narrateur, logé au moment fatidique dans un hôtel de Santa Monica, devient le témoin sans concession du retour à la barbarie de ses semblables, analysant et répertoriant les crimes les plus vils, les bassesses les plus odieuses, les actes les plus dégradants. Lorsqu’il se remet du choc causé par l’effondrement du plafond de sa chambre, il constate chez ses concitoyens un déni généralisée de la catastrophe : l’on continue de vivre comme si rien ne s’était passé ! Les uns font l’amour à côté des cadavres, les autres seront obsédés par l’unique idée d’une voiture à faire démarrer ou d’un bus à rattraper.En déambulant dans la ville sinistrée, il se montre sensible aux divers changements :
« Des égouts éventrés montait une odeur de merde et de gaz qui rendait l’air irrespirable. Au bord de la chaussée lézardée, couverte d’éclats de verre et de gravats, une canalisation béante lâchait des flots d’eau savonneuse. Des fils électriques sectionnés se tordaient sur le trottoir comme de serpents furieux. Une Chevrolet rouge avec une plaque du Texas avait échouée dans la devanture du snack. Au-dessus du crâne écrabouillé du conducteur, aplati contre le pare-brise, un petit crucifix en plastique oscillait tristement. »
La recherche de nourriture constitue son premier objectif. Il se méfie des gens qui, autour de lui, ne présentent plus un comportement normal. Il se fera tout de même embaucher – par qui exactement ?- pour déblayer des gravats alors que les secousses telluriques se poursuivent en répliques rapprochées. Encadré de manière militaire et coercitive, il obéit à ces parfaits inconnus jusqu’à ce que des coups de feu le ramènent à la raison. D’autres individus, armés jusqu’aux dents, prêts à assassiner tous ceux qui résisteraient, le capturent pour le mener dans un camp de regroupement à quelques kilomètres de là :
« Nous marchions au milieu de la rue, suivis par les deux hommes qui portaient Helena. Les plaques de fibro-ciment et les poteaux arrachés ralentissaient notre progression. Puis nous arrivâmes près d’une station Texaco dont le toit venait de céder. Un homme armé d’un fusil et adossé à un break familial rouge, fit un signe de la main à Orville. Tout autour de la station on avait installé un camp provisoire, délimité par une corde de nylon jaune fixée à des piquets. Derrière, une maison en bois de style colonial achevait de brûler. Il n’y avait que trois prisonniers dans ce camp. Deux, les mains liées dans le dos, étaient allongés sur le ventre. Le troisième nous regarda approcher. »
D’où viennent ces individus ? Qui sont-ils ? De qui tiennent-ils leur légitimité ? Nul ne le sait, car la force brute a remplacé le droit, la guerre civile venant de se déclarer sans raison, avec ses injustices et ses meurtres arbitraires :
« Quatre hommes, torse nu, approchaient. Ils tiraient un tombereau rempli de cadavres. A chaque tour de roue, un corps basculait et venait s’écraser par terre. Ils ne s’arrêtaient pas pour autant. Ils vinrent se ranger près de notre enclos. (…) Ils déchargeaient les corps et les jetaient par-dessus la corde. Tous les morts avaient la nuque trouée.»
Ces « volontaires nationaux » l’obligeront à marcher pieds nus, puis arrivés au lieu de détention, à se mettre entièrement nu, comme tous les autres. Gare à ceux qui n’obéiraient pas :
« Un couple de vieillards sortit de la colonne en titubant. Un garde les frappa à coups de crosse. Ils tombèrent l’un sur l’autre. L’homme se redressa et prit sa femme dans ses bras. –C’est notre argent que vous voulez ? On n’a plus rien. Vous nous avez tout pris. On n’a jamais fait de mal à personne, nous. C’est la faute aux types qui logeaient chez nous. On savait pas ce qu’ils faisaient. Allez, tuez-nous. Tuez-nous. Le garde posa le canon de son fusil sur le front ridé du vieil homme et pressa la gâchette. L’homme culbuta, foudroyé. »
Tout au long du chemin, les occasions de mourir ne manquent pas. Des balles sifflent au-dessus de sa tête, tirées par des snipers isolés ; un hélicoptère survole la colonne, les menaçant tous. Sur le lieu même du rassemblement, dans une zone industrielle, une faille large et profonde entaille le terrain. Certains s’amuseront à la franchir en sautant. Quelques-uns y laissent leur peau. Le repas improvisé de grillades que se préparent les miliciens déclenche la convoitise des prisonniers démunis et affamés. S’en suit une rébellion généralisée au cours de laquelle le narrateur prend la fuite… pour tomber sur une barricade, elle-même tenue par d’autres assassins anonymes. Il sait maintenant que préserver sa vie est une entreprise désespérée. Lucide, il attend une mort qui ne tardera pas.
« Quelle Secousse ! » qui pourrait aussi s’intituler « Scènes de guerre civile » a été publié dans la collection du «Sagittaire », spécialisée dans les textes conjecturaux sulfureux. (Voir « Plein gaz » paru dans la même collection). Ici, plus que le sexe, la violence, l’absurdité des situations, l’arbitraire de la survie en temps de crise, forment l’objet du scandale. La vision cataclysmique permet la distanciation utile à l’auteur dont le but est de dévoiler la noirceur de l’animal humain, la haine qu’il voue inlassablement à son semblable et la part prédominante que prend en son esprit le cerveau archaïque. Un texte brut de décoffrage au style halluciné.
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Les Enfants D'hiroshima - Par BenF
Une chanson qui se veut un plaidoyer en faveur d’un monde libéré de la menace nucléaire. Rappelant l’horreur des guerres « qui bouleversent la terre et déchirent nos bras », Rosalie Dubois se sert du témoignage de l’histoire récente :
« Enfants d’Hiroshima
Il faut montrer vos plaies
Afin que plus jamais
On ne revoie cela… »
Voulant croire malgré tout à la fraternité et l’universalité de l’amour humain :
« Nous rêvons à l’amour
Chacun dans nos pays
Voyons les mêmes jours
Dormons les mêmes nuits ;
Est-ce dur à trouver
Par-delà les contraintes
La formidable étreinte
Qu’on appelle amitié ? »,
Elle rythme la mélodie par un refrain dont la répétition en abîme dénonce les errements d’un passé qu’elle souhaite définitivement enfoui.
Une chanson contestataire d’une grande puissance d’évocation.
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