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Bienvenue dans la Base de Données des livres !

Vous y trouverez des ouvrages post-apo que la communauté souhaite partager. Il vous est possible de rajouter des fiches de livres, alors partagez vos trouvailles avec la communauté FoGen ! Une grande partie des ouvrages que vous trouverez sont ici grâce au travail de Jacques Haesslé sur son site : http://destination-armageddon.fr/index.html. Un grand merci à lui pour son travail exceptionnel !

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Livres

  1. Type: livre Thème: guerres futures 2 Auteur: Ulric BARTHE Parution: 1913
    Dans une ferme, en aval de Québec, le journaliste Paul Belmont épouse Marie-Anne Meunier, dans la paix du soir. Même l’ombre de la menace que fait planer l’Allemand Biebenheim, qui convoite aussi la jeune fille, ne peut ternir cette belle soirée.Pourtant, au moment où le notaire énonce les règles du Droit, Belmont entend des coups tirés au lointain : la ville de Québec est attaquée par des Prussiens. Interrompant sa noce, il s’élance vers le siège de son journal, le notaire lui ayant relaté comment l’arrivée « d’honnêtes » citoyens allemands, immigrés au Québec, qui ont essaimé dans des propriétés et spoliés des fermiers, ont pu constituer un grand danger.  
    En ville, les rues sont encombrées et les visages fermés. Les arsenaux en cendres, la garnison écrasée, Québec se trouve à la merci des Prussiens. Déjà, ils paradent en ville, Biebenheim en tête, chantant le bel hymne national allemand: « Die Wacht am Rhein » :
    « Mais les contre-manifestants reculèrent aussitôt. Ils s’étaient trouvés face à face avec toute une horde de gens armés, avançant militairement en colonne serrée, huit par huit, cadençant leurs pas sur l’air de marche qu’ils continuaient à vociférer à pleine bouche. Quelques-uns portaient sur la tête une manière de casque de pompier surmonté d’une pointe dorée (…) Toute la bande paraissait très fière d’elle-même. »
    A la vue de Paul, son adversaire tire sur lui, le manque, blesse à mort une innocente passante. Au journal, Belmont retrouve son collègue et ami, l’Anglais Jimmy Smythe. Ensemble, ils décident de devenir les piliers de la résistance en informant la population des menées prussiennes par des tracts clandestinement imprimés et distribués. Alors que sur les murs fleurissent les proclamations allemandes et leurs cortèges  d’interdictions, que l’Etat de Siège est décrété, que les espions s’insinuent partout, Jimmy et Paul créent le «Comité des Vigilants ». La morgue prussienne est infinie. Au château de Frontenac devenu leur quartier général, le nouveau Gouverneur Von Goelinger s’entête à convaincre la municipalité de l’excellence allemande :
    « -Suffit. Moi je vous demanderai tout simplement de voir dans ce fait stupéfiant la démonstration de la force irrésistible, surhumaine de la Kultur allemande. Avec nous, vouloir c’est pouvoir. Notre génie d’organisation fait depuis longtemps l’admiration du monde entier. Chez nous, tout marche de front : les grandes affaires et la haute politique. La guerre est l’une de nos industries nationales. Tout tend vers un but unique ; l’exaltation de la race au-dessus de toutes les autres, et devant cette poussée d’ensemble de toutes les volontés, de toutes les intelligences d’une nation supérieure comme la nôtre, tout obstacle doit fatalement crouler ; en un mot, nous avons acquis et détenons le monopole de la toute-puissance sur la terre… »
    Se voulant sympathique, Von Goelinger les convainc que toute résistance serait inutile puisque l’Ile des Sorciers ainsi que le Canada en entier est sous contrôle prussien. Il ne faut attendre aucune aide des Etats-Unis, qui appliquent le principe de neutralité, ni de l’Europe, déjà sous le feu allemand :
    « - Ne riez pas, messieurs, rugit le martial diplomate. J’avais en effet oublié de vous informer que nous frappons le grand coup exactement en même temps, j’oserais dire à la même heure, en Europe, en Amérique, partout où nos ennemis sont vulnérables. Le Canada, leur plus belle colonie, était naturellement l’un des premiers points de mire de nos canons. Au moment où je vous parle, nos superdreadnoughts enfin supérieurs à ce que la marine anglaise avait de mieux, nos centaines de sous-marins géants, nos terribles zeppelins, attaquent les côtes anglaises; nos immenses armées de terre, jointes à celles de l’Autriche, foncent sur Peters-bourg et sur Paris. »
    Malgré ces preuves convaincantes, le maire refuse de se soumettre. Von Goelinger lui laissera un délai de réflexion avant de passer à des arguments plus frappants. Paul, ayant trouvé sur une ancienne carte un sentier détourné, abandonne le centre-ville et apprend que l’invasion, préparée de longue date, n’a pas été universelle. D’Ottawa notamment, le Gouverneur du Canada en repli a constitué une milice par une levée de conscription de masse. Ces nouvelles seront aussitôt diffusées par le Comité des Vigilants. Les Allemands, persuadés que les Québécois leur sont maintenant favorables, relâchent la discipline, procédant au désarmement de façon débonnaire. Cependant Biebenheim, toujours en quête de Belmont, terrorise Marie-Anne, puis découvre les tracts subversifs.  Lors d’un contrôle, un coup de main sanglant décide Von Goelinger d’exercer des représailles dans toute la région, permettant aux soldats de commettre les crimes les plus horribles :
    « Le paysan vint alors et demanda ce qu’on lui voulait. L’officier répondit qu’il n’était pas venu assez vite et qu’on allait le discipliner comme bien d’autres. On lui lia les mains derrière le dos, et on le fusilla sur le champ.Alors, une femme accourut portant un tout jeune enfant dans ses bras. A la vue de son mari mort, elle mit le petit sur le plancher et se jeta comme une lionne sur les Allemands, leur déchirant le visage avec ses ongles. L’un d’eux l’assomma d’un coup de crosse sur la tête. Un autre tira sa baïonnette, prit le temps de la fixer au bout de sa carabine et la plongea au travers du corps du bébé. Il porta alors son fusil à l’épaule avec la petite victime au bout ; le marmot ouvrit ses bras une ou deux fois, et ce fut tout. L’officier ordonna ensuite de mettre le feu à la maison, fit apporter de la paille sur laquelle furent jetés pêle-mêle les trois cadavres.»
    Partout gronde la révolte, attisée en sous-main par les curés. Avec Gontran de Saint-Denis à leur tête, honnête citoyen canadien de vieille souche française, les troupes, entraînées, réclament un châtiment à corps et à cris. Tous les grands centres urbains voisins les entendent, Montréal en tête.Lors d’une réunion de conjurés dans une cave, à laquelle participent Belmont et Smythe, la contre-offensive se déclenche, menée par un Canadien enrôlé de force dans l’armée prussienne, qui connaît parfaitement l’emplacement des caches d’armes. Avec François Boileau à leur tête, les Québécois investissent les arsenaux de la ville :
    « Derrière cette troupe martiale se pressait, dans le chemin creux bien connu, qui mène à l’entrée principale de la citadelle, tout un peuple armé de bâtons, de couteaux de boucherie, de vieux flingots, de révolvers, de haches, de massues, de barres de fer, de tout ce qui lui était tombé sous la main. La garde avait eu à peine le temps de donner l’alarme. La garnison était prise au piège. »
    C’est la victoire. Et Paul…se réveille d’un rêve où l’avait plongé un médicament puissant, le tétronal,  administré suite à son évanouissement nerveux lors du mariage, durant lequel il avait fantasmé toute cette aventure.
    Un récit intéressant bien que vieillot, reprenant le thème de la rivalité anglo-prussienne, basé sur la description des attitudes, des comportements, de l’esprit frondeur et pro-français des Canadiens.

  2. Type: livre Thème: épidémies Auteur: Tom CLANCY Parution: 1998
    John Clarke, devenu général, a constitué une unité de combat anti-terroriste ultra-secrète qui s’entraîne en Angleterre sur la base de Hereford. Elle comprend les meilleurs éléments des diverses armes, se trouve nantie des gadgets électroniques les plus sophistiqués et est assistée par la force de frappe d’un hélicoptère de combat.  Avec son frère d’armes Chavez, qui depuis est devenu son gendre, Clarke assume un rôle de veille international dans la lutte contre le terrorisme. Il n’est donc pas étonnant qu’on leur demande leur aide lorsqu’un attentat est commis en Suisse. Le groupe 1 (il y en a deux) délivre les otages sans désemparer et les méchants passent à la trappe. La situation est identique, quoique plus complexe, lorsqu’un couple de terroristes allemands, émules de la Bande à Baader, s’emparent d’un richissime banquier autrichien, Herr Ostermann. Le succès de cette seconde opération leur rapporte une considération universelle.
    Ce que John ignore, c’est que ces opérations ne sont que broutilles téléguidées pour instaurer une crainte salutaire à l’Occident. En effet, le véritable danger provient d’une vaste organisation écologiste ayant à sa tête le multimilliardaire d’un groupe de recherche biomédicales, John Brightling, patron de " Horizont Enterprises " et son épouse, Carol Brightling, divorcée pour la bonne cause, femme politique proche de la présidence. Ils sont appuyés par Kilgore, un médecin-chercheur épidémiologiste, et Hendrikson, ancien membre du  FBI qui a viré sa cuti et fondé sa propre entreprise de protection, Global Surveyors. Tous, et bien d’autres encore, ont purement et simplement décidé l’élimination de l’espèce humaine, afin de redonner à la terre sa virginité :
    " L’unanimité ne régnait pas au sein du Projet. Certains parmi les plus radicaux allaient jusqu’à soutenir que garder les médecins était contraire à la nature de la mission – parce que la médecine ne laissait pas la nature suivre son cours.  Ben tiens, ricana Kilgore. Laissons ces crétins pondre leurs bébés en pleine nature après avoir passé la matinée à la cueillette ou à la chasse et tous ces idéologues auront vite fait de s’éteindre. Il avait l’intention d’étudier et d’apprécier le milieu naturel mais il comptait bien le faire avec des chaussures et un blouson pour se protéger du froid. Il tenait à rester un homme cultivé, pas à régresser au stade du singe nu. Son esprit vagabonda…  Il y aurait une division du travail, bien entendu. Des fermiers pour faire croître les récoltes et soigner le bétail qu’ils mangeraient… ou des chasseurs pour tirer le bison dont la viande était plus saine, moins riche en cholestérol. Les bisons devaient revenir assez vite. Le blé sauvage continuerait d’envahir les régions des Grandes Plaines,  et les  bovidés ne tarderaient pas à engraisser " (…) " Il se demanda ce que penseraient ceux qui auraient l’occasion de visiter les cités mortes…  Ce serait sans doute une bonne idée de les laisser y aller, qu’ils puissent se rendre compte du nombre d’erreurs commises par l’homme et apprennent à ne pas les rééditer (…)
    Il faudrait bien mille ans, sinon plus, pour que les gratte-ciel finissent par s’effondrer par manque d’entretien, leurs poutrelles rongées de rouille…Les fondations de pierre ne bougeraient pas, mais assez vite, dans dix ans peut-être, on verrait de nouveau des daims gambader à Central Park. "
    Leur stratégie se déploie à plusieurs niveaux. Un homme-clé en est Popov, ex-agent du KGB mis à la retraite, motivé par l’argent, redoutablement efficace bien qu’ignorant tout du projet.
    C’est lui qui, sur les instructions de Brightling, a fomenté les deux attentats terroristes afin de permettre à Global Surveyors l’exclusivité du service de protection pour les jeux olympiques de Sydney, puisque c’est là que devra se déclencher l’apocalypse.
    Un deuxième pivot  en est le docteur Kilgore qui a développé, construit et conçu une arme bactériologique diabolique : le virus Shiva. Virus Ebola modifié, indécelable dans l’organisme, à effet retardé, Shiva est extrêmement contagieux :
    " Le résultat le plus probable de la pandémie serait un rapide effondrement de la société. L’armée n’y échapperait pas non plus, mais le complexe du Kansas était à bonne distance de la base militaire la plus proche et les soldats de Fort Riley seraient d’abord dépêchés vers les villes pour assurer le maintien   jusqu’à ce qu’ils soient à leur tour atteints par les symptômes.  Ils seraient alors traités par des médecins militaires –ça leur ferait une belle jambe – et le temps que disparaisse la cohésion de leur unité, il serait alors bien trop tard pour que les survivants, même en uniforme, soient en mesure d’organiser une action quelconque. "
    Shiva devra être libéré dans le système de brumisation des jeux olympiques de Sydney, respiré par des centaines de milliers de personnes qui s’empresseront de le transmettre au reste de la planète à leur retour des jeux. Horizont Enterprises a développé deux anticorps à Shiva, le A et le B. Le A renforce l’action du virus mortel, le B le rend inopérant. Lors de la première phase d’infection mondiale, l’entreprise médicale de Brightling fournira au monde entier le faux antidote, soit le virus A,  gardant pour les rares élus le virus B. En cinq mois, le sort de l’espèce humaine devra être réglé :
    " Viendrait alors la phase deux. Horizon Corporation fabriquerait et mettrait sur le marché le vaccin A. Il serait aussitôt distribué par milliers de doses, livrées par avion dans le monde entier vers des pays où l’ensemble des personnels de santé publique se mobiliserait pour l’injecter au maximum de gens. (…)  Quatre à six semaines après l’injection du vaccin A, les receveurs commenceraient à tomber malades. Soit, calcula Gearing, trois semaines à partir de maintenant, plus six, plus deux, plus encore six, et enfin deux. En dix-neuf semaines en tout, cinq mois à peine, même pas une saison de base-ball, plus de quatre-vingt-dix-neuf pour cent de la population mondiale aura disparu. Et la planète serait sauvée. "
    Pour que tout se déroule sans anicroche, ils procèdent dans leur laboratoire à des tests in vivo sur des groupes de femmes et d’hommes enlevés qui serviront de cobayes à l’instar de la façon dont opéraient les nazis. Tous mourront et les preuves que représenterait leur existence seront détruites. Kirk Mc Lean, en enlevant le futur cobaye appelé F4, une certaine Marie Bannister, mettra la puce à l’oreille à des agents du FBI, sans toutefois les emmener très loin dans leur investigation.
    Le troisième pivot est constitué par deux bases ultra-secrètes édifiées en pleine nature, l’une au Kansas, l’autre, plus petite, au Brésil, près de Manaus. Sortes d’arches qui accueilleront les happy few écologistes survivants afin qu’ils puissent subsister plus tard avec délices sur une terre purifiée :
    " L’Olympe , tel était le nom qu’il allait donner au complexe, décida-t-il sur le champ. La demeure des dieux, car c’était précisément ce qu’il espérait en faire. D’ici, ils pourraient observer le monde, l’étudier, en jouir… l’apprécier dans toute sa plénitude. Il choisirait Olympe-1 comme indicatif pour sa radio portative. En partant d’ici, l pourrait d’un coup d’aile survoler la planète avec les compagnons de son choix, pour observer et comprendre comment l’écosystème était censé fonctionner. "
    Enfin Edward Gearing est la main qui devra, à la clôture des J.O., introduire Shiva dans le circuit des brumisateurs. Mais toute cette belle mécanique va se dérégler à cause  de Rainbow Six. Clara Brightning ayant appris l’existence du groupe, se rendant compte de la menace potentielle qu’il constitue, envisage à son encontre une nouvelle action terroriste, sur la base même de Hereford par l’entremise de Popov qui recrute des Irlandais menés par leur chef Sean Grady.
    Ceux-ci enlèveront les épouses de John et Chavez, un prétexte pour éliminer les membres du groupe d’intervention. Les terroristes faillirent réussir mais seront finalement détruits et Sean Grady sera capturé. Par lui,  Clarke remonte jusqu’à Popov qui se hâte de fuir vers le refuge du Kansas. D’un autre côté, l’enquête sur Marie Bannister fournira des présomptions fortes à l’encontre de Kirk Mc Lean. Mais c’est par Popov, horrifié de ce qu’il apprendra au Kansas, que John sera mis au courant du Projet.
    Chavez, délégué au J.O. avec son groupe, saura arrêter le bras d’Ed Gearson dans son acte meurtrier. La conclusion est à la hauteur du crime: alors que tous les responsables du Projet Shiva – une cinquantaine de personnes environ – cherchent refuge dans leur base brésilienne, John les poursuit dans leur retraite grâce à un réseau d’entraide militaire. La base des terroristes sera détruite et, puisque les écologistes aiment vivre en contact étroit avec la nature, il leur donnera satisfaction en les abandonnant nus et sans armes dans la jungle brésilienne.
    Un techno-thriller efficace comme tous les ouvrages de Clancy. Roman bien (trop ?) long – plus de 1200 page -, il développe l’intrigue à travers des actions en parallèle qui amèneront le coup de théâtre final.  Le dénouement heureux sera dû au retournement de Popov et l’on sent toute la tendresse de l’auteur envers ce personnage. Malgré cette mise en place redondante (entraînements interminables du groupe, actions terroristes préparatoires), le récit une fois entamé ne se quitte plus et l’horreur qu’il distille s’insinue peu à peu dans le réel

  3. Type: livre Thème: invasions d’insectes Auteur: Thomas PAGE Parution: 1973
    Un tremblement de terre provoque l’ouverture d’un trou, près d’une ferme dans le comté de Montgomery, au Sud des Etats-Unis. De singuliers insectes, à l’apparence blindée, noirs et maladroits, apparaissent. Ils ont la curieuse propriété de mettre le feu au bois, et incidemment au reste, afin de se nourrir des cendres. Des spécialistes sont appelés à la rescousse, Linden le biologiste, Willy King le biochimiste, et l’entomologiste le plus réputé, professeur au Bainboro Collège avec son assistant Metbaum.
    L’on entreprend l’étude de l’étrange insecte qui s’avère être une blatte, de l’espèce cafard, et, au vu de ses propriétés, Parmiter lui donnera son nom: Hephaestus Parmitera. La carapace est très difficile à écraser, l’insecte entretenant une relation symbiotique avec des bactéries. Parmitera se déplace lentement et stridule très fortement avant de frotter ses cerques l’une contre l’autre, produisant ainsi des étincelles. Il apparaît d’emblée comme un danger potentiel pour les habitats en bois. Les incendies se multiplient, sans que la police n’ait un seul soupçon des causes réelles : Parmitera avait essaimé dans le Comté:
    " La source de carbone la plus abondante de toute la terre, c’était le réseau d’autoroutes des Etats-Unis. Les cafards s’étaient sans doute glissés dans toutes les voitures, tous les camions, tous les tracteurs du pays. Ils y avaient proliféré et, silencieusement, sans être remarqués, ils s’étaient infiltrés dans d’autres véhicules.
    Pour ces animaux, une automobile, c’était un festin. Le pétrole, l’essence... quel régal! Ils n’avaient sans doute pas cessé d’éclore, et, cachés dans les voitures, ils n’avaient jamais été repérés. Ils avaient inhalé le carbone de l’air : l’atmosphère en était imprégnée. Ils n’avaient pas eu besoin de bouger : les autoroutes les transportaient partout, et bien au-delà du comté de Montgomery. Ils continuaient à éclore, changeaient sans cesse de voiture, se répandaient de plus en plus loin... "
    La lutte contre l’animal s’accentue. De nombreuses solutions sont envisagées : contamination par le DDT, contamination biologique par des champignons, recherche d’un prédateur propre. Même la tarentule Bruno sera de la partie:
    " La lutte fut silencieuse, mise à part la stridulation du Parmitera. Bruno chargea avec violence, et si rapidement que le cafard fut renversé sur le dos. Bruno mordit et griffa mais ses crocs et ses griffes glissèrent sur la carapace d’obsidienne de la blatte; et le venin de la tarentule fut épuisé après trois morsures inutiles. (...) puis Linden vit très nettement les six pattes de la Parmitera agripper fermement la tarentule épuisée et tirer contre son abdomen le corps velu de l’araignée. Les cerques se tenaient prêts pour l’hallali et bientôt une stridulation rauque retentit. Bruno, en proie à une folle agonie, essayait de se dégager des pattes étreignantes et des cerques perforants du cafard. Les pattes de la tarentule trépidaient de désespoir; une mince volute de fumée s’éleva, puis les mouvements de l’araignée se firent saccadés avant de cesser complètement. Linden ouvrit la cage et, avec tristesse, en retira les restes calcinés de Bruno. "
    Les insectes se multiplient avec les incendies. Une course contre la montre s’engage entre les savants et Parmitera. Les habitants des différentes villes infectées assistent impuissants à la destruction de leurs immeubles. Parmiter, fasciné par cette blatte extraordinaire n’abandonne plus son laboratoire. Il ne comprend pas pourquoi Parmitera ne peut se reproduire alors que les oothèques de toutes les femelles sont remplies d’oeufs.
    Grâce à Metbaum, une intuition fulgurante le traverse: la raison en est la pression atmosphérique trop faible, ces insectes ayant vécu des millions d’années sous terre sous une pression nettement plus forte. Incidemment, il découvre que le seul moyen pour venir à bout des blattes est l’action des ondes sonores émises à une certaine fréquence :
    " Parmiter transféra les cafards d’une cage dans une autre à l’exception d’un seul. Il emporta celle qui contenait cet isolé dans son bureau et prit la radio de Metbaum avec lui. Il mit le son: c’était le même sifflement de parasite avec le même bruit de fond ronflant. Il plaça la radio dans la cage avec le cafard et poussa le son au maximum. Le parmitera se jeta sur la transistor, grattant furieusement de ses pattes les haut-parleur, les cerques vrombissant frénétiquement. Au bout de quelques secondes, il tomba sur le dos. Ses pattes se replièrent puis il demeura immobile. Parmiter le ramassa : sa carapace était ratatinée et molle, fendue de milliers de craquements qui s’entrecroisaient. Il disséqua l’animal: tous les tissus étaient réduits en pulpe. On aurait dit que l’insecte n’était qu’un petit hamburger. "
    Ce moyen fut mis en action à grande échelle, des haut-parleurs installés sur les autoroutes, à l’entrée des villes, dans les divers quartiers. Le fléau sembla enrayé, les incendies cessèrent.
    De plus en plus isolé et repoussé par ses collègues à cause de son attitude hautaine, refusant de répondre au téléphone, Parmiter poursuit ses expériences sur un couple de blattes. Les ayant enfermé dans un lieu pressurisé, il constate, avec l’augmentation de la pression atmosphérique, l’augmentation de l’activité sexuelle de Clarence, ainsi avait-il surnommé son cafard expérimental.. La copulation semblant avoir réussi, quelques temps après se développent, à partir des oeufs fécondés, de petites blattes. Elles sont différentes de Clarence, au corps plus mou, mais garderont les propriétés pyrogènes de leurs parents. Quant à leur organisation intérieure, Parmiter constate que les bactéries se sont entièrement installées dans le cerveau de l’animal. L’entomologiste surveille ses créations jusqu’à ce que se présente l’inconcevable : elles entrent en communication avec lui, car elles sont devenues intelligentes:
    " Les cafards de Parmiter grimpaient lentement le long du mur. Ils se disposèrent dans un espace vide, à côté d’une marine suspendue à la paroi. Leurs corps s’agitèrent pendant un instant, puis s’immobilisèrent, dessinant deux mots très lisibles : JAMES PARMITER. "
    Le nouveau Dr. Frankenstein des blattes approfondit la relation avec eux, étant sûr que ces cafards de la deuxième génération n’échapperaient pas à son contrôle puisqu’il était l’équivalent d’un dieu pour eux. La suite lui prouva qu’il eut tort. Se multipliant de façon exponentielle, les blattes envahirent le voisinage mettant le feu aux divers pavillons jusqu’à ce que Parmiter comprenne qu’elles ne recherchaient qu’un seul but : réintégrer le trou d’où elles étaient sorties. La migration eut lieu et rien ne put arrêter les animaux, coulant en un long fleuve vers leur origine. Le savant leur facilita leur évasion en faisant sauter à la dynamite la plaque de béton obstruant le trou:
    " C’est moi! C’est moi! " La marée d’insectes se retira autour de lui. Les stridulations s’éteignirent partout à travers champs. Maintenant la dalle de béton était tout à fait nue. Les antennes, dressées et immobiles, semblaient attendre. Parmiter sentait le regard de millions d’yeux, derrière lesquels des millions de cerveaux le surveillaient, comme de fines aiguilles braquées vers lui dans les ténèbres".
    Le fléau fut enrayé quand les blattes intelligentes retournèrent à leur destin souterrain.
    Un récit-catastrophe mené tambour battant où l’auteur a montré sa maîtrise de la chose littéraire, faisant croire au lecteur que ses bestioles pourraient être réelles, par une véritable enquête scientifique sur les cafards qu’il étudie avec un regard... d’entomologiste.
    Son personnage principal, le savant Parmiter, bourré de phobies et isolé dans sa recherche, à la fois savant fou, Faust et Frankenstein, est une réussite  Un film, " Bugs " en a été tiré qui a obtenu la Licorne d’Or et le prix du Public du Festival du film fantastique et de science-fiction à Paris, en 1975.

  4. Type: livre Thème: sociétés post-cataclysmiques 1 Auteur: Thomas GEHA Parution: 2005
    Pépé est un « Alone » :
    « -Ben, tu vois, je suis un Alone, un mec qui ne se joint à aucun groupe, jamais ; un mec qui pense pouvoir se défendre tout seul en cas de besoin. Les Rasses, les Fanars, et les groupes militaires en particulier, n’apprécient guère les Alones, et c’est réciproque. »
    Il se fera surprendre par des « Fanars » (Fanatiques Religieux) qui l’entraînent dans leur repaire où ils adorent la « Vierge évanescente », un gadget vidéo qui les fait croire au surnaturel. Leur chef décide de mettre Pépé à mort comme la jeune fille déjà précédemment capturée. Le héros tue « Dents pourries » (c’est le nom du chef) à l’aide de ses armes de jet, délivre la jeune fille, échappe aux Fanars pour prendre la direction  de l’Ouest.  Comme c’est déjà le début de la saison froide, ils se décident pour la région de Rennes où Pépé se rappelle d’un refuge acceptable qui leur permettrait de passer l’hiver dans le confort.
    Le voyage est animé car il leur faut éviter les « Rasses » cannibales et, arrivés en vue du refuge, ils auront la désagréable surprise de le voir occupé par un autre Alone. Celui-ci, blessé, n’offre aucune résistance. Prénommé Gaby, il se rendait en la ville de Rennes lorsqu’il fut attaqué par une meute de renards, ce qui l’a obligé à se mettre en sûreté. Les deux solitaires fraternisent. Pépé décide d’accompagner Gaby dans sa quête malgré le danger représenté par les «Nadrones », robots programmés de la dernière guerre, qui ont exterminé les humains :
    « Les villes, c’est franchement le coin à éviter, si l’on tient un minimum à sa vie. Plein de trucs pourris, en ville. Des tonnes de squelettes, bien sûr, animaux et (…) humains, sans compter ces fichus Nadrones, invisibles et dévastateurs. Les Nadrones, ce sont les restes de la civilisation, le truc peut-être responsable de la destruction du monde. »
    En route, ils en profitent pour arracher une autre jeune fille, Flo, des griffes d’autres Rasses, avant qu’il ne soit trop tard pour elle :
    « Aucune pitié n’habite ces hommes. Chacun à leur tour, ils dégainent un long couteau incurvé et tranchent la gorge des femmes (…) moi, ça me donne envie de dégobiller. Surtout quand je vois les types découper la chair meurtrie d’une brune, comme de la simple viande de boucherie. Pour eux, ça va être le festin. »
    En ville, La végétation envahissante domine les bâtiments :
    « Yep. On y était, en effet. Les premiers immeubles effondrés sont apparus, certains déjà enrobés de plantes grimpantes, et les toits crevés par le faîte d’arbres anormalement grands. Mutations. Ca commençait bien. Déjà, sur le chemin, on avait parfois rencontré des plantes bizarres, comme un bulbe plutôt balèze aux branches terminées par des sortes de clochettes rouge sang, graisseuses… »
    Nulle trace visible de Nadrones, mais des carcasses de voitures qui semblent animées d’une vie propre. Ces «Voitortues » les obligent à se réfugier dans les tunnels du métro où les attendent les rats et les chauve-souris. Chacun décide de partir de son côté, pour se diriger vers le centre ville, place Hoche. En émergeant sur la place, Pépé a la surprise de sa vie : au bord d’un grand échiquier se tient un être immense, noir et télépathe. Capturant ses victimes par «induction spirituelle », il domine leur temps subjectif, leur faisant se confondre fantasmes et réalités. Il propose une partie d’échecs à Pépé, jeu qui ne peut aboutir qu’à la mort. Le jeune homme doit vaincre les fantômes de sa mémoire. Case après case, il se souvient de sa rencontre avec Grise, une jeune femme qui lui avait tout appris, dont il était tombé amoureux jadis et qui est morte par sa faute ; mais est-elle vraiment morte ? Cette question, il la résoudra ultérieurement, l’urgence consistant à éliminer le mutant noir. Ce qui fut fait car Pépé est un très bon lanceur de couteaux.
    Sans désemparer, ils ressortent de la ville. Pépé, s’apercevant que Flo et Gaby forment à présent un couple, prend la décision de  retourner dans le sud, dans la région de la Creuse, où avait disparu Grise. La quête vers son passé l’entraîne à Sète, près d’un village fortifié, repaire du «Seigneur Argento ». Par Nicolas le Géant, le portier qui deviendra ultérieurement son ami, Pépé est amené devant Argento et, ô surprise, devant Grise, une Grise vieillie, aux yeux vides, manifestement sous l’emprise psychologique du tyran.
    Pépé décide de reprendre son bien et d’abattre Argento. Une entreprise périlleuse, l’arme secrète d’Argento, avec laquelle il lave le cerveau de ses sujets, étant un couple de mutants semi-humains, semi-végétaux, à la puissance psy irrésistible. L’adjoint d’Argento, un autre  Alone, redoutable lui aussi,  perce à jour ses intentions et le livre aux mutants.Mais notre héros est d’une trempe supérieure : simulant la sujétion, il attend le moment favorable pour passer à l’action avec l’aide de Nicolas le Géant.  Argento se réveillera, la gorge tranchée par Pépé :
    « Cette femme m’a élevée. Cette femme m’a tout appris, et elle compte bien plus pour moi que la prunelle de mes yeux. Mourir pour elle est un acte insignifiant. Et toi, Argento, tu y as touché, tu me l’as enlevée, tu as fait d’elle un morceau de viande sans cervelle. Domaine sacré, mon pote. Ta propre Mère sacrée n’avait pas prévu ce scénario, hein?(…)
    Qui plus est, une vermine comme toi, ça me dégoûte. Profiter de pauvres hères comme tu oses le faire ici est un acte inqualifiable.
    J’ai craché par terre, j’ai raffermi ma prise sur le manche de mon couteau.
    -Bonne nuit, Argento. Bonne nuit éternelle. Elle est bien méritée. »
    En compagnie de Grise, toujours passive et absente, Pépé disparaîtra dans la nature. Deux mois plus tard, dégagée enfin de sa camisole psychique, Grise retrouve la mémoire et reconnaît Pépé avec une joie sans mélange.  Alors le couple rejoindra Gaby et Flo.
    « A comme Alone » est un roman d’action se situant dans le décor d’une France ravagée par le cataclysme. C’est aussi et surtout un hommage à Julia Verlanger du cycle de «l’Autoroute sauvage », hommage tellement puissant qu’il se démarque à peine du plagiat. Qu’importe ! faute avouée est à moitié pardonnée, et la lecture du roman, aidée par un style fluide, fait passer un agréable moment. Que demander de plus ?

  5. Type: livre Thème: menaces végétales Auteur: Thomas DISCH Parution: 1965
    La Terre est entièrement recouverte par la  "Plante" qui draine toute vie vers elle. Les animaux ont disparu, les autres végétaux également. Quant aux hommes, ils ne sont plus qu’une poignée, accrochés à des villages, qui tentent désespérément de subsister à travers la culture du maïs:
    "  La Plante exerçait une inlassable pression sur les champs de maïs. Chaque jour, les jeunes enfants du village devaient parcourir les allées du champ pour arracher les pousses jaunâtres qui en une semaine pouvaient atteindre la taille d’un baliveau, et en un mois la grosseur d’un érable adulte.
    Maudite soit-Elle! pensa Anderson. Puisse Dieu la maudire à jamais! Mais ce genre de malédiction perdait une bonne part de sa force du fait qu’il était obligé d’admettre qu’à l’origine c’était Dieu qui avait envoyé la Plante. Que les autres parlent des espaces extraterrestres tant qu’ils voulaient. Anderson, lui, savait que c’était ce même Dieu courroucé qui, une fois déversé le déluge du ciel sur une terre corrompue, avait créé et semé la Plante. Il ne commentait jamais cela. Là où Dieu savait se montrer si persuasif, pourquoi Anderson eût-il fait entendre sa voix ? Cela faisait sept ans ce printemps que la Plante avait fait son apparition.
    Au mois d’avril 1972, brusquement, un milliard de spores visibles seulement sous les plus puissants microscopes avaient recouvert la planète tout entière, dispersées par la main d’un semeur invisible (et quel microscope, télescope ou radar pourrait rendre Dieu visible ?), et, en quelques jours, chaque pouce de terrain, sols cultivés et déserts, jungles et toundras, avait été revêtu d’un tapis du plus beau vert.
    Chaque année qui s’était écoulée depuis, à mesure que la population diminuait, avait acquis plus d’adeptes à la théorie d’Anderson. Comme Noé, c’était lui qui riait le dernier. Ce qui ne l’empêchait pas de haïr, de la même manière que Noé avait dû haïr le déluge et la montée des eaux. Anderson n’avait pas toujours détesté la Plante avec autant d’intensité.
    Les premières années, alors que le Gouvernement venait de s’écrouler et que les fermes étaient florissantes, il avait pris l’habitude de sortir au clair de lune pour la regarder pousser. Elle le faisait penser alors à ces projections accélérées sur la croissance des végétaux qu’il avait vues à l’institut agronomique quand il était étudiant. Il avait cru, à cette époque-là, pouvoir tenir tête à la Plante. Mais il s’était trompé.
    L’infernal végétal lui avait arraché sa ferme des mains tout comme il avait arraché le village à son peuple. Mais, par Dieu tout-puissant, il récupérerait sa terre. Pouce par pouce. Même si pour cela il fallait  déraciner chaque Plante de ses mains nues. (...)
    Le sol était devenu si dur qu’aucune autre végétation n’y pouvait croître. Même les mousses languissaient ici, par manque de nourriture. Les quelques trembles qui tenaient encore debout étaient pourris jusqu’au coeur et n’attendaient plus qu’un coup de vent pour tomber. Les sapins et les pins avaient entièrement disparu, digérés par le sol même qui les avait nourris. , Jadis, des parasites de toutes sortes avaient prospéré sur les Plantes et Anderson avait longtemps espéré que lianes et plantes rampantes finiraient par en venir à bout. Mais c’était tout le contraire qui s’était produit et les parasites pour une raison inconnue, étaient morts.
    Les tiges géantes de la Plante s’élevaient à perte de vue, leur cime dissimulée par leur propre feuillage. Leur vert tendre, palpitant, vivant, était immaculé et la Plante, comme n’importe quelle créature dotée de vie, refusait de s’accommoder de toute autre existence que la sienne.
    Il régnait dans la forêt une étrange et malsaine impression de solitude. Une solitude plus profonde que celle de l’adolescent et plus implacable que celle du prisonnier. D’une certaine manière, malgré ce déploiement de verdure et de vitalité, la forêt semblait morte. Peut-être était-ce parce qu’on n’y entendait aucun bruit. Les énormes feuilles qui la dominaient étaient trop lourdes et trop rigides de structure pour être agitées par autre chose qu’un ouragan.
    La plupart des oiseaux étaient morts. L’équilibre de la nature avait été si totalement bouleversé que même les animaux qu’on n’aurait jamais cru pouvoir être menacés avaient rejoint le nombre sans cesse croissant des espèces éteintes.
    La Plante était désormais seule dans ces forêts, et on ne pouvait échapper au sentiment qu’elle représentait une forme de vie à part, qu’elle appartenait a un autre ordre des choses. Et cela rongeait le coeur du plus fort. "
    Inexorablement, le nombre d’humains diminue, aidé en cela par de mystérieuses "combustions" - en fait des assassinats -.  Anderson, le vieux,  est le chef d’un de ces villages comptant encore deux cents membres. Ils survivent,  bercés par une morale puritaine, agissant comme si rien ne s’était passé. La rencontre des Anderson et du maigre groupe d’Orville, des fuyards s’éloignant de Duluth incendié, est conflictuelle. La petite amie d’Orville est tuée dans la confrontation. Il ne subsiste plus qu’Orville et Alice.
    Orville en voudra à Anderson et fera tout pour  avancer le décès du vieillard. Lorsqu’un incendie ravage la colonie, le groupe de survivants se réfugie dans une grotte. Là, ils se rendent compte que toutes les racines de la Plante, unifiées, s’étendent jusqu’à quatre cents mètres sous terre.  Ils suivent la lumière des racines, se nourrissant de leur pulpe extrêmement nutritive comme des larves lovées dans du bois. Petit à petit, ils dégénèrent et leurs rapports mutuels se font  schizophréniques. Le vieil Anderson meurt ainsi qu’Alice, assassinée par Neil, fou furieux et vexé parce qu’Orville s’apprête à faire main basse sur la colonie. Greta, une autre femme, se gorge tellement de pulpe qu’elle en devient monstrueuse et incapable de bouger dans sa racine.
    La Plante  avait été semée sur Terre par de mystérieux Extraterrestres (nous ne connaîtrons jamais rien d’eux)  décidés à transformer la planète en un jardin à leur convenance , se souciant autant des humains que de la vermine. Finalement, est arrivé pour eux le temps de la récolte et ils aspirent la pulpe des racines dont ils se servent. En bons jardiniers, ils mettent la Terre en jachère pour de nouvelles semailles. Le dernier couple de terriens, Orville et Blossom, sera définitivement condamné sur une terre rendue totalement stérile.
    Excellent roman, très original avec une analyse fine de la psychologie des personnages, avec du suspense et un climat de désespoir sombre qui s’accentue jusqu’à l’horreur. L’accent est mis sur le côté tragique, implacable d’un avenir  effrayant où les êtres humains cèdent leur niche écologique à plus forts qu’eux. A rapprocher du  " Monde vert " de Brian Aldiss.

  6. Type: livre Thème: pollution généralisée Auteur: Thomas DISCH Parution: 1972
    Un couple de canards, Curtis et Daffy, le mâle plutôt optimiste et la femelle plutôt angoissée, s’interrogent sur leur avenir en un monde pollué. Déjà leur unique rejeton est mort-né. Ne trouvant plus rien à manger, leurs ailes lourdes comme du plomb, ils décident de partir vers le Sud, sous de meilleurs climats, en faisant très attention aux voitures qui pourraient les écraser et aux rats qui souhaiteraient les manger. Mais leurs ennemis naturels sont tous morts, ou presque, sauf le dernier rat qui, hélas ! égorgera Curtis :
    « Sur toute la longueur du fossé, il y avait des rats à divers stades de décomposition, ainsi que deux belettes mortes et un hibou à moitié dévoré. Daffy considéra cette légion d’ennemis hors d’état de nuire avec un mélange de peur et de triomphe. D’un côté le monde serait certainement meilleur sans animaux de proie, mais de l’autre… Elle ne savait pas exactement ce qu’il y avait sur l’autre plateau de la balance, mais il y avait à coup sûr quelque chose. »
    Daffy, restée seule, prend son envol au-dessus de la mer. Enfin libre ! Pour peu de temps, puisqu’elle terminera sa course morte dans l’eau, aplatie par le souffle du Concorde au-dessus d’elle.
    Une délicieuse nouvelle, tellement bucolique, qui adopte enfin le point de vue du pollué dans un monde que nous détruisons.

  7. Type: livre Thème: menaces et guerres nucléaires Auteur: Théodore STURGEON Parution: 1946
    Le savant et l’artiste. Le logicien et l’esthète. Grenfell et Jack Roway. Le savant est possédé par une vision et un objectif : rendre la guerre impossible. Pour cela il faudra infliger une telle terreur à l’humanité que jamais plus elle ne prendrait les armes. Il conçoit « l’Abîme », un mémorial tellement angoissant, et qui devra durer si longtemps, que l’être humain, en le voyant, oubliera son agressivité.
    Le physicien atomiste est capable de construire l’Abîme qui mettra en œuvre les conditions d’une explosion nucléaire des milliers de fois plus puissantes que celle d’Hiroshima, mais contrôlées et limitées en surface. La fusion qui en résulterait, en transformant toute la matière disponible en énergie, créera une zone interdite où subsistera un lac en fusion, de la chaleur et de la lumière.
    S’attelant à cette tâche, Grenfell sait qu’il sera maudit et activement recherché par les autorités. Il se fait donc discret dans son laboratoire personnel. Le seul qui l’approchera est Jack à qui il garde sa confiance. Lorsque le poète le retrouve, Grenfell achevait son œuvre.
    Cependant Jack a peur. Très peur. Des Soviétiques notamment. Seule l’invention du physicien mise entre les mains des militaires pourrait sauver la situation. Alors il trahit Grenfell, signalant sa retraite aux autorités.  En s’emparant des éléments constitutifs de l’Abîme, les policiers activèrent la masse critique et déclenchèrent l’apocalypse. La conflagration nucléaire fut telle qu’on l’attribua aux Soviétiques. Suivit une guerre nucléaire, puis une autre, qui balaya l’humanité de la scène de l’histoire. Jamais plus les hommes ne se feraient la guerre :
    « Quelques humains avaient survécu. Les rats en mangèrent la majorité – car les rats avaient accru leur population dans des proportions fantastiques. Et puis, il y eut des épidémies. Ensuite, il resta des êtres nus, se tenant à peine droits, dont l’hérédité déformée remontait sans doute jusqu’à l’homme. Mais ceux-là savaient, individuellement et collectivement, ce qu’était la peur, et il n’y eut pas d’évolution. Ce n’étaient certainement pas des hommes. »
    Seul l’Abîme, le Mémorial voulu par Grenfell continuerait à déverser son horrible lumière sur une terre dévastée.
    Une nouvelle en forme d’avertissement, toujours d’une «brûlante » actualité.

  8. Type: livre Thème: disette d'éléments Auteur: Théo VARLET Parution: 1930
    Aurore Lescure, première jeune Américaine à voler dans l’espace, prend son essor et, après un temps passé en orbite, atterrit en France, en Provence. Elle est découverte par Gaston Delvart, peintre,  et par son ami le docteur Alburtin , médecin, qui la ramènent dans leur propriété, afin de l’examiner, l’atterrissage ayant été quelque peu mouvementé. Le peintre, à sa vue, tombe éperdument amoureux d’Aurore, ce qui nous vaut la sempiternelle romance sentimentale de rigueur dans les récits du genre. La jeune femme a rapporté sur terre de la poussière météoritique contenant des germes  d’un lichen qui ne tardera pas à proliférer intensément dans l’atmosphère terrestre.
    Aurore est ramenée à Paris par son ami Gaston.  Le tendre sentiment de celui-ci est déjà contrarié par l’infect Américain Lendor J. Cheyne qui, sponsorisant l’aventure, a pris une option sur la jeune astronaute. Aurore s’évertuera sur plus d’une centaine de pages à fuir les journalistes qu’elle abomine. Arrivée à Paris avec Gaston elle soumet un échantillon de lichen au grand et désagréable savant Nathan pour analyse.
    Le lichen continue son développement en se nourrissant des flux magnétiques générés par les conducteurs électriques. Il se fixe sur tout ce qui produit de l’électricité, sur les ampoules, les fils, les compteurs, les moteurs. La dispersion des spores dans l’air produit aussi des démangeaisons insoutenables. Selon la vitesse de propagation du fléau, le lichen primitif se diversifie en variétés plus ou moins dangereuses.
    L’une de ces variétés est même comestible avec un goût de confiture de framboise et l’on verra apparaître aux coins des rues des marchands de «Xénobie», nom donné à  ce lichen. L’on  suivra la propagation du lichen à la trace,  du cabinet médical du  Dr Alburtin, en passant par l’oncle de Gaston, à l’hôtel où Aurore a élu domicile et le laboratoire de Nathan. La menace devient de plus en plus grande, et de simple désagrément, le lichen se met à désorganiser la structure de la société en empêchant la vie nocturne et les transports:
    " Dès le portillon d’entrée sur le quai, une odeur suffocante de fleurs en putréfaction remplaça le phénol des couloirs qui attestait un essai de désinfection. Sous la voûte de la station grondait une sourde rumeur, non humaine. On eut dit, mêlé à des crépitations, le bruit d’une forêt dont les branches craquent sous le givre, en hiver. Les lampes " malades " pour la plupart, enrobées d’un réseau de végétations, rougeoyaient. Tassés au bord du quai, les voyageurs ouvraient de grands yeux et se grattaient en silence.
    La Xénobie avait envahi les voies. Mais ce n’était plus comme le matin à " Villers ", une offensive timide; une véhémente poussée de la création extraterrestre développait sur les rails un lichen aux bataillons agressifs, un revêtement d’un rouge violacé, hérissé de pointes, comme une cristallisation géante. "
    Rien ne semble pouvoir l’arrêter, sauf à couper toute électricité partout pour le priver de nourriture. Entre temps, le père d’Aurore, en compagnie de l’homme d’affaires américain, arrive en France. Gaston, qui accueille les deux hommes,  présente son amie Luce, américanophile et fascinée par les dollars,  à son rival Cheyne. Coup de foudre réciproque. Cela laissera le champ libre au peintre pour déclarer sa flamme à Aurore. Le fléau s’étendant, la France prend des mesures radicales: coupure d’électricité et abandon des moteurs à explosion en faveur de la traction animale.
    " Avec la suppression de l’électricité, tout s’arrête dans Paris. Les moyens de transport: métro, tramways, chemins de fer électrifiés, sont déjà virtuellement abolis. Si les véhicules automobiles ont pu circuler jusqu’à ce matin, c’est parce que l’intensité de leurs sources d’électricité, batteries d’accumulateurs, magnétos, dynamos, est assez faible pour n’engendrer que des variétés de lichen peu exubérantes et relativement bénignes. Mais ces variétés, comme les autres , produisent des spores, dont la descendance risque d’être calamiteuse. "
    La régression sociale, le chômage et des grèves s’installent durablement. La France mise en quarantaine par les pays voisins et l’Amérique, Aurore ne pourra plus rentrer chez elle, ce qui arrange bien les affaires de Delvart. Les ouvriers communistes ne respectent pas le décret et remettent en marche la centrale de Saint Denis malgré l’interdiction gouvernementale. Alors l’impensable se produisit: la centrale,  desservant tout Paris , sera infectée par la Xénobie, et c’est " la Grande Panne ".  Une variété extrêmement dangereuse de lichen,  appelé le " lichen ardent " fait son apparition. Son effet est redoutable et provoque la terreur:
    " Un point lumineux au fond de l’avenue mal éclairée, s’avançait avec de petits bondissements souples... tiens, comme un ballon de football qui eût roulé tout seul sans personne pour le pousser. Il grossissait et se rapprochait, suivant l’axe de l’entrevoie des tramways, et, derrière ce premier ballon, il y en avait encore, un, deux, trois, dix... Toute une ribambelle à la queue leue leu... de grosses boules de lumière verte... comme des globes de pharmaciens... Mais ces boules avaient un mètre ou deux de diamètre.
    (...) Feu à volonté! Les lebels claquèrent, la mitrailleuse pétarada. De la première boule verte, des flammèches s’arrachèrent sous les balles; elle parut agitée de violentes palpitations, se déforma, comme si quelqu’un caché à l’intérieur se fût débattu, lançant coups de pieds et de poing qui faisaient saillir l’enveloppe du ballon....Mais elle avançait toujours droit sur l’auto blindée, qui finit par me la cacher. Je ne vis pas l’abordage, mais soudain une grande flamme sortit de l’auto, qui s’enveloppa de fumée. "
    Les pays voisins sont touchés à leur tour. Que faire contre la " Terreur électrique " ?  Dans le laboratoire du Dr Nathan, qui a engagé Aurore et son père, se prépare la découverte capitale: il suffit d’attendre l’hiver, la baisse de température fera périr le lichen récalcitrant. Or, quelle coïncidence !, le froid arrive sous la forme d’une bonne gelée. Il ne reste plus qu’à attendre et le monde sera sauvé.   
    Comme un bonheur n’arrive jamais seul, le papa d’Aurore se fait sauter dans son laboratoire après avoir découvert le secret de la scission atomique grâce au lichen,  secret dont il lègue la formule  à sa fille, devenue sa légatrice universelle. La voie est ouverte pour Gaston qui aura tout le prochain roman , sous le titre de " Aurore Lescure, pilote d’astronef ",  pour roucouler à son aise avec sa dulcinée.
    " La Grande panne ", malgré certaines naïvetés dans la description des situations, quelques faiblesses de style, des conventions répétées à satiété dans les intrigues, n’en demeure pas moins intéressant. Hors du guimauve des bons sentiments, il subsiste, ça et là, des descriptions de la catastrophe qui ne dépareraient pas un roman plus moderne. Le thème de la disette énergétique, variété du thème "disette d’éléments", sera largement exploité par la suite, à commencer par Barjavel dans "Ravage" jusqu’aux romanciers populaires comme Jimmy Guieu,  en passant par "la Mort du fer " de Held.

  9. Type: livre Thème: menaces végétales, l’apocalypse réalisée Auteur: Taylor CALDWELL Parution: 1956
    Une famille d’agriculteurs de la région d’Abouville dans le middle West constate la présence sur leur terrain de plantes sauvages, épineuses, aux lianes enchevêtrées, des mauvaises herbes poussant à une vitesse ahurissante. Parallèlement, la sécheresse s’étend sur tout le pays :
    " Selon les journaux agricoles, le manque  de neige et de pluie causait aux fermiers de tout le pays de sérieuses inquiétudes. Dans le Sud, il n’y avait pour ainsi dire pas de pluie du tout ; le Texas se desséchait ; les immenses plaines du Iowa, de l’Idaho et du Kansas s’alarmaient du manque total d’humidité depuis le début de novembre. "
    Après de vaines tentatives d’arrachage, les fermiers doivent se rendre à l’évidence : rien ne peut être tentée à l’encontre de l’invasion végétale. La situation devient d’autant plus préoccupante lorsqu’ils s’aperçoivent qu’ils ne sont pas seuls dans ce cas. L’ensemble des cultivateurs de la région est atteint par le fléau. Le père de famille, George, est un homme droit et vertueux, rigoureux et croyant,  qui aperçoit des signes curieux dans le ciel :
    " (La lune) ne reparut pas. Là où elle avait été, on voyait une petite tache ronde et noire dans un ciel d’un violet sombre, une tache à peine perceptible, et si la lune n’avait pas été là quelques minutes auparavant, mon père ne l’aurait même pas remarquée (…) Le silence portait maintenant en lui une impression de terreur, comme si la terre retenait son souffle et avait en même temps aspiré tout bruit. Mon père se trouvait sous les étoiles dans un vide absolu. Et cette impression était si intolérable qu’il frappa du pied le sol ; le faible bruit lui revint, mat et mort, pire que le silence.  Dans le ciel aucun nuage. Les étoiles jetèrent un plus grand éclat maintenant que la lumière de la lune s’était effacée ; Mon père attendit, guettant son retour."
    La famille, devant le danger, se replie sur elle-même, Edward et Lucy sa femme, ainsi que son frère Peter et son épouse, avec leurs enfants,   constatent la dégradation de la situation : les animaux maigrissent, les vaches ne donnent plus que du lait de  piètre qualité. Tout se passe comme si une punition d’origine divine s’était répandue sur la nature environnante. L’infestation se répand dans le monde entier. Les sous-entendus des hommes politiques en conférence à l’O.N.U. trahissent leurs préoccupations. Même la Russie, bien que réticente à reconnaître qu’elle-même était touchée par le fléau, est contrainte,  finalement,  de l’admettre :
    " Nous apprîmes par la suite que le grenier à blé de la Russie, l’Ukraine, n’avait pas produit un épi et que, dans les innombrables fermes collectives, le sol était aussi dur que chez nous et les arbres aussi stériles. Partout la terre refusait de porter du fruit. Mais, pour l’instant, une conspiration du silence recouvrait le monde. "
    Apparaissent ensuite, au milieu des herbes sauvages, des insectes nouveaux, inconnus, identiques à des scorpions, porteurs de mort. Ils se cachent dans la végétation luxuriante pour piquer les gens qui en meurent instantanément. Seul Edward, l’aveugle, en est mystérieusement épargné :
    " Mon père était un homme courageux ; il agit vite. Il saisit une fourche et poursuivit ce nouveau fléau. Mais ce n’était pas un scorpion. Paralysés d’horreur, nous suivîmes des yeux sa lutte pour échapper aux dents de la fourche. Jamais nous n’avions vu une créature semblable. Son corps, d’un rouge sombre, était muni d’une douzaine de pattes venimeuses dont elle fouettait l’air, et elle nous fixait de ses petits yeux noirs. De sa longue bouche coulaient du sang et du venin. Mon père la frappa à plusieurs reprises ; elle résista longtemps, tandis que se tordait son corps protégé d’une carapace dure. "
    La situation empire,  poussant le moral de la famille de George au plus bas. Elle se referme sur elle-même à l’instar des autres familles. Dans le monde, les famines, les insectes venimeux, le manque de viande, font mourir des millions de personnes sans que les scientifiques ne puissent établir l’ombre d’une indication quant à l’origine de la catastrophe. Un jour, le fils de la maison, Peter, n’en pouvant plus, tomba à deux genoux au milieu des herbes folles et refoulant toute fierté, se met à prier. O miracle !, l’endroit qu’il foule est aussitôt débarrassé de tout parasite végétal ou animal. L’on vint en nombre contempler l’incroyable réalité sans qu’il soit possible à Peter de rééditer son exploit : il ne se souvenait plus des mots qu’il avait prononcés !
    Les scientifiques, arrivés à leur tour se moquent de toutes les causes spirituelles et, en rationalistes étroits, analysent la terre pour y découvrir le processus qui aurait amené le sol à se régénérer.  Tout ceci en vain. Durant ces événements, la situation mondiale a encore empiré. Les hommes – et surtout les enfants- meurent d’une sorte de fièvre maligne, caractérisée par des hémorragies internes. Le propre enfant de Peter et de Jane  succombe, rendant ses parents fous de douleur. Partout, en Amérique, et dans d’autres régions du monde, les régimes politiques s’effondrent, les uns après les autres. La garde nationale est tenue d’intervenir, réquisitionnant les denrées que l’on suppose à tort disponibles chez les fermiers accusés de cumul et de marché noir. En Amérique, un fléau pis que tous les autres fait son apparition : le communisme !: Le père en explique le processus à l’un de ses voisins :
    "-Shelton, fit-il, tout ça ne fait qu’un : ces communistes, les guerres, la sécheresse, les plantes mauvaises, la mine, les scorpions, ce soleil et cette lune de malédiction, les tremblements de terre, les pluies de météores, les enfants morts, les adultes malades, tout… Tout cela fait partie de la même calamité et tous les hommes du monde en sont responsables. "
    Au milieu de la tourmente, la famille de George reste inébranlable et, sous l’impulsion du père, met toute sa confiance en Dieu. Repliés sur eux-mêmes, les membres du clan se sentent perdus, misérables, anéantis. Il ne leur reste plus que la prière collective, non celle conventionnelle proférée par le Pasteur, mais celle où l’on s’accuse d’être soi-même responsable de ces maux pires que les plaies d’Egypte :
    " Il leva la main vers le ciel noir dans lequel la lune était comme une blessure. -Il n’existe pas d’homme sans péché en ce monde, pas même ceux consacrés à ton service. Nous avons été de faux bergers. Nous n’avons rien à dire pour notre défense. Nous avons abandonné le Chemin de la Croix, nous avons conduit nos troupeaux, non auprès des verts pâturages et des eaux calmes, mais à la mort. Nous sommes coupables. En notre péché est le péché de toute l’humanité. "
    La responsabilité de chacun est considérée comme la responsabilité de tous. L’égoïsme, la culpabilité de chacun rejaillit sur tous les autres : " votre péché est le mien ". La reconnaissance explicite de cette culpabilité par tous les êtres humains semble seule capable de faire reculer le mal. Ainsi, la famille de Georges a l’immense surprise de constater que la pratique de la prière collective fait disparaître les herbes mauvaises comme neige fondant au soleil et réapparaître une herbe tendre, remplie d’abeilles , de fleurs, de petits animaux qui sont comme rassurés par la sincérité de l’homme. L’exemple de cette famille a porté ses fruits. Partout, l’on procède à la catharsis collective qui seule montre son efficacité envers l’envahisseur végétal, matérialisation de la haine et de l’égoïsme des hommes. :
    " Les crépitements se renforcèrent jusqu’à produire le bruit d’un feu de forêt et quelques-uns d’entre nous jetèrent autour d’eux des regards effrayés, s’attendant à voir des bouffées de fumée. Mais…oui, les lianes fumaient !… Une nuée de vapeur planait au-dessus d’elles, s’épaissit, s’étendit, les ensevelit enfin dans un brouillard blanchâtre qui posa un voile fuligineux devant la lumière jaune du soleil. Partout, des traînées de cette vapeur gagnèrent le ciel de safran, par vagues qui s’enflaient et se succédaient, cachant les plantes qui, je le comprenais maintenant, était la manifestation visible de notre haine universelle. "
    Y compris en Russie soviétique, longtemps après que les autres nations aient refondé leur foi en un dieu miséricordieux, et qui abandonne les longues années de pratique marxiste pour renouer avec l’orthodoxie chrétienne. Le monde est sauvé, Halleluya !
    Une allégorie de type prophétique empruntant les voies du roman cataclysmique. Redoutablement efficace dans la description des fléaux qui frappent la nature, elle apparaît d’une désarmante naïveté quand elle en stigmatise les causes, soit l’égoïsme des hommes et… le communisme. Comme pour Bessières (voir " l’Agonie de Cosmopolis ") , la thèse de Caldwell  est tout aussi réactionnaire : le malheur des hommes c’est l’établissement d’un socialisme communautaire qui est l’essence même de la haine, de l’athéisme et de l’immoralité sur notre terre.

  10. Type: livre Thème: invasions extraterrestres Auteur: Tanith LEE Parution: 1985
    Cent cinquante ans déjà depuis que les Envahisseurs ont balayé l’espèce humaine sur terre avec leurs «araignées» hautes de huit mètres. Esther, une adolescente, survit dans l’un des derniers complexes souterrains où un groupe d’êtres humains s’est habitué à l’obscurité. Standish, leur leader auréolé de mystère, ne sort plus de son appartement. Esther est une rebelle. Bravant les interdictions et les soldats, elle monte à l’air libre dans un tunnel désaffecté pour s’habituer aux ruines de la cité et à un environnement étrange :
    «Avec l’été, elle abandonna de plus en plus souvent les bâtiments à cause de la chaleur fétide qui y régnait. Elle se promenait sur l’asphalte bouillant où les fleurs et les mauvaises herbes ouvraient des lézardes. Tout un après-midi, elle demeura étendue sur le flanc de l’un des véhicules rouillés et renversés (…) Durant ces mois de canicule, elle se sentait entièrement en paix et chez elle dans la ville, malgré les squelettes et autres traces de violence qu’elle avait découverts . Ces choses-là ne la troublaient pas. La cité était son jouet ; elle n’éprouvait à son égard aucun sentiment de responsabilité personnelle. Ces murs semblaient exister depuis la nuit de temps ; ils avaient dû abriter une race qui n’avait aucun rapport avec la sienne. »
    Quelque temps après, sa peau brune la dénonce et elle sera conduite devant Standish, le leader. Le vieil homme détecte en Esther le futur chef qui pourrait prendre en mains les destinées du groupe. Il permet à Esther l’accès libre à son réduit pour qu’elle puisse se cultiver. Respectée par le sergent Steiner et ses hommes, Esther apprendra comment les êtres humains ont subi leur lourde défaite. Lors d’une ultime sortie vers les «Haut», elle fait la connaissance de Cury, un jeune homme bizarre qui lui dit s’être caché des Envahisseurs dans les ruines. A sa demande, elle l’introduit dans la taupinière au moment même où Standish meurt.
    Esther, par un véritable coup de force prendra le pouvoir décidé à lutter contre l’ennemi du dehors. Dans le même temps, Cury, esclave-collaborateur des Envahisseurs, ayant fait sauter le générateur et provoqué un incendie, obligera les humains à remonter à la surface  où ils seront capturés, acheminés vers la Cité des extraterrestres. Cury montre un faible pour Esther qu’il protège, tandis que la jeune fille le traite en «chien» au propre comme au figuré. Car, dévoyé dans son corps et son âme, Cury s’adonne à des pratiques masochistes (fouet, coups) qu’il adore par-dessus tout. Esther, bien qu’elle s’en défende, ne pourra s’y refuser. Les humains seront parqués, soignés, alimentés et libres de leur mouvement au sein de « l’Enceinte » mais impitoyablement éliminés en cas de révolte. Esther habitera dans un appartement humain de la Cité, selon le vœu d’un Envahisseur qui se livre à une expérimentation sur sa personne.
    Lorsqu’enfin celui-ci apparaît, elle s’aperçoit qu’il ressemble à un être humain ordinaire. Sa monstruosité, son «inquiétante étrangeté » est psychologique. Vieux de plus de deux cents ans, sans émotions, doté d’une logique sans défaut, d’une rigueur implacable, il est de plus télépathe, capable de lire en Esther ses moindres pensées, même encore informulées. Elle restera pourtant la rebelle, essayant mentalement et de toutes les manières possibles de fuir sa condition de rat de laboratoire. Peine perdue. Peu à peu, elle s’habituera à sa condition de cobaye psychique, comblée dans tous ses désirs par l’intermédiaire de Cury, jusqu’à ce fameux jour où elle sera amenée à faire l’amour avec l’Envahisseur. Puis, brutalement, de manière surprenante, l’Envahisseur lui apprend qu’il est le dernier représentant de son espèce sur terre. Les autres sont soit partis, soit ont été éliminés de sa propre main sans qu’Esther n’en apprenne la cause. Seul, désabusé, l’Envahisseur désire disparaître à son tour, définitivement, ce qui fera s’écrouler autour de lui toute la technologie qui le soutenait :
    « Avant tout, nous ignorons la pitié. Tu t’en rendras compte quand nous serons partis. Personne ne viendra te déranger. Aucune vengeance ne descendra des cieux. La Terre sera à toi. Je te rends ta planète. Prends-la. Et si l’espèce humaine te déplaît, fais en sorte de l’améliorer. Elle en aura besoin avec le  chaos qui s’annonce. »
    Il sera tué par Steiner à qui l’Envahisseur avait attribué cette mission. Steiner et Esther se trouvent en face d’une terre en ruines où la civilisation est à reconstruire.
    Un récit féministe dans lequel l’auteur explore les arcanes de l’âme humaine, articulant sa fiction autour des mythes grecs et égyptiens de Perséphone et d’Anubis : la Terre ne revient pas de plein droit à l’homme, elle se mérite ! Sur ce soubassement rhétorique, le personnage central d’Esther proclame le destin d’une femme exceptionnelle. Un beau livre humaniste - aux accents parfois désespérés - sur fond de cataclysme.