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Vous y trouverez des ouvrages post-apo que la communauté souhaite partager. Il vous est possible de rajouter des fiches de livres, alors partagez vos trouvailles avec la communauté FoGen ! Une grande partie des ouvrages que vous trouverez sont ici grâce au travail de Jacques Haesslé sur son site : http://destination-armageddon.fr/index.html. Un grand merci à lui pour son travail exceptionnel !
Livres
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Le professeur Anatol Markoff est un savant fou de la plus belle espèce. Travaillant de concert avec le jeune ingénieur Jean Dubreuil à Ernicourt, dans l’Oise, il séquestre son collaborateur lorsque celui-ci refuse de lui donner sa formule de la désagrégation de la matière. Car Markoff peut tout, y compris faire sauter la terre. Mais pour cela, il a besoin de cette formule :
« La fin du monde, proféra-t-il, les atomes, les électrons, les molécules m’appartiennent… Vous entendez ?
-Vous me faites peur… eut la force d’articuler Dubreuil.
-Il y a de quoi. Je tiens le sort de l’humanité entre mes mains. Je peux maintenant, à mon gré,, quand je le voudrai, à la minute que je choisirai, anéantir le globe !... (…) Et cet anéantissement commençait quand, sur mon ordre, vous l’avez arrêté… Sur mon ordre… Vous comprenez ? En quelques heures la terre sautait. Tout éclatait, disparaissait dans le néant, montagnes, villes, peuples…Plus rien ne subsistait, ni vivant, ni mort, plus rien, pas même la matière… »
Désirant par-dessus tout devenir le maître du monde avant de le faire disparaître dans le néant, il retient Dubreuil dans sa villa, l’abrutissant avec des anesthésiques et sous la garde de ses âmes damnées, Liptine et Popovitch. Hélène, La jeune épouse de Dubreuil étonnée de ne recevoir que des réponses convenues et optimistes de son mari disparu, confie ses inquiétudes au journaliste Xavier Bernard, puis à l’inspecteur Barral. Soudain, un appel au secours sous forme de message écrit, en provenance de New York, l’alarme davantage. Markoff avait en effet déménagé aux USA, prenant sa retraite au Plaza Hôtel ayant fait édifier son laboratoire dans le quartier de Welfare-Island :
« Dans l’immense salle où, sur les plans de Markoff, avait été installé le fameux laboratoire, Jean Dubreuil avait repris ses travaux. (…) De son côté, Markoff dans une salle attenante, blindée comme une casemate, manoeuvrait l’immense condensateur, commandant à coups de manettes d’énormes étincelles, dont l’éclatement, traversant les épais blindages, arrivait aux oreilles des deux hommes comme le grondement souterrain d’un tremblement de terre ou une canonnade lointaine.Markoff, le savant fou, produisait le fluide mortel… »
Araki, un diplomate nippon qui a eu vent de toute l’affaire, désire s’approprier l’invention de Markoff et Dubreuil au profit de son pays. N’y parvenant pas, il s’élèvera lui aussi contre le savant fou. Entre temps Hélène et Xavier, embarqués sur le Hindenburg, arrivent à leur tour à New York afin d’explorer les hôtels prestigieux de la cité, sans succès. C’est lors d’une soirée au Waldorf Astoria que Hélène fera la connaissance du libidineux Araki. Elle est persuadée qu’il connaît Markoff et ne se trompe pas.
De son côté, Popovitch, dont la mission était d’enlever Hélène pour faire pression sur Dubreuil, a échoué. C’est donc avec crainte qu’il se rend lui aussi au lieu de rendez-vous américain. Accueilli par Araki dès la descente du navire, il est sommé de collaborer avec le Japonais, ce qu’il fait sans complexe, contre une énorme somme d’argent.
Mais c’est l’inspecteur Barral qui défera le nœud gordien de toute cette histoire. Ayant discrètement filé Popovitch, il se retrouve lui aussi à New York. Il connaît la planque de Markoff grâce au courrier échangé par le savant avec ses différents complices. Ayant pris contact avec Bernard et Hélène et avec l’appui d’une équipe de « policemen », alors que les «cops» investissent le laboratoire du dément, celui-ci tend, en une ultime tentative, de déclencher l’apocalypse. Une hache plantée fort à propos dans son crâne par Barral l’en empêche définitivement. Tout est donc bien qui finit bien pour le jeune couple Dubreuil, heureux de rentrer en France, pour Barral qui arrive enfin à fumer son cigare en s’en délectant, pour Bernard qui va relater cet extraordinaire récit dans son journal… et pour le lecteur, heureux de sortir d’une intrigue passablement embrouillée.
Texte difficile à trouver, ce roman, écrit dans la veine du récit populaire policier paru dans la série « Police et Mystère» présente néanmoins un savant fou gratiné avec des relents de « péril jaune » en prime. Composé en 1938, ceci explique cela.
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Mara Et Dann - Par BenF
Une révolution de palais condamne un petit garçon et une petite fille à fuir vers le nord du continent de l’Ifrik, c’est-à-dire l’Afrique du futur. Une Afrique que la glaciation de l’Europp (avec deux p !) a fortement changé. Les Anciens ont disparu depuis longtemps ne laissant derrière eux que des vestiges incompréhensibles. Un glacier énorme recouvre Gibraltar, transformant la mer Méditerranée (la Moyenne-Mer) en désert salé qui, peu à peu, se remplit à nouveau.
Les descendants des Blancs disparus (les Albains) se sont fixés le long de la côte de l’ancien Maghreb, quant au reste de l’Afrique, une désertification épouvantable, une sécheresse atroce qui remonte jusqu’au niveau de l’ancien Congo, asphyxie le continent alors que le Sahara s’est transformé en un immense marécage. Les villes qui essaiment cet univers sombre sont soit des bourgades attardées comme Rustam en Ifrik du sud d’où sont originaires les deux enfants et où subsistent encore les ruines d’anciennes demeures, soit des centres titanesques et menaçants comme la mystérieuse Chélops où se dressent vides et gigantesques les tours du centre ville :
"Mais Rustam était plein de sable, disaient-ils. Des tempêtes de sable l’avaient balayé, envahissant les maisons et ensevelissant les jardins. Il n’y avait plus âme qui vive à Rustam : ni gens ni bêtes. Et entre Rustam et ici, alors que la situation était moins grave que dans le Sud, tout était aride. Dans des régions entières des arbres étaient en train de mourir "
Les deux orphelins qui ont perdu leur famille à cause d’une mystérieuse menace s’acharnant sur la maison des Mahondis, portent les noms de substitution de Mara et Dann. Mara, vive et intelligente, sait que pour survivre, il faudra faire preuve de discernement et de ténacité. Elle se servira de la méthode pédagogique utilisée par ses parents à son encontre :
" Tous les soirs, son père ou sa mère l’appelait pour une séance de " Qu’as-tu vu ? ". Elle adorait ça. (…) Mara avait cru que le jeu ne changerait jamais. Mais, un soir, elle était là quand son petit frère s’était vu demander pour la première fois " Qu’as-tu vu ? ", et elle comprit alors combien le jeu avait changé pour elle. En effet, maintenant ce n’était plus seulement : " Qu’as-tu vu ? " mais : Qu’as-tu pensé ? Qu’est-ce qui t’a amenée à penser ça ? Es-tu sûre que ta pensée est vraie ? "
Dann, traumatisé par l’événement, acquiert une personnalité double, celle du « méchant » ou du « gentil » Dann dont les deux lui serviront. Il ne manque même pas l’ennemi dédié, l’affreux Kulik rencontré dans le village de Daïma et qui les poursuivra tout au long de leur périple pour finir assassiné par les deux adolescents.
Chez Daïma, une Mahondie de la « Famille » où Mara et Dann ont trouvé refuge, la vie est difficile. La sécheresse rend leur avenir incertain et Dann disparaîtra, entraîné par des inconnus. La petite fille aidera Daïma, en évitant Kulik, en se gardant des monstres que la sécheresse amène, les araignées géantes et les énormes scorpions:
" Ces insectes grossissaient à toute allure. Jusqu’ici, ils ne semblaient pas vouloir s’éloigner de leurs nids, mais Mara avait vu toute une colonne marcher en direction des collines des cités antiques – il y en avait tant qu’on ne pouvait songer à les compter, de gros insectes brunâtres, luisants, avec leurs têtes armées de pinces. "(…)
" Cette pièce était pleine d’araignées : pas les jaune et noir, mais d’énormes araignées brunes. Il y en avait partout sur les murs comme sur le sol. " Qu’est-ce qu’elles pouvaient manger ? " se demanda-t-elle, trouvant sur-le-champ la réponse à sa question : elles s’entredévoraient. En effet, sous ses yeux, une grosse araignée brune, de la taille d’un grand chien, sauta sur une plus petite et se mit à la broyer avec ses crochets, tandis que sa victime se tortillait en crissant, et que d’autres se précipitaient pour participer au festin " ?
Le manque d’eau, la terrible chaleur consume Mara qui observe les signes de la sécheresse en tous les lieux :
"Mara vit des défenses si grandes et si épaisses qu’on aurait dit des arbres. Elle vit des os blancs énormes. Elle vit des cages faites d’or, mais savait que c’étaient des côtes. Elle n’avait jamais rien imaginé d’aussi gros.
- Ce sont des animaux dont la race est éteinte, expliqua l’homme. Ils ont disparu il y a des centaines d’années.
- Et pourquoi ?
- C’est la dernière fois où il y a eu une terrible sécheresse. Elle a duré si longtemps que tous les animaux sont morts. (…)
" L’inondation avait disparu, laissant une pellicule sur toute chose, teintant de gris les ossements blancs entassés contre les arbres morts. Les trous d’eau étaient remplis et cernés de scorpions, de scarabées et d’araignées. (…) le banc de sable où elle s’était roulée la veille avait réapparu, reflet blanc sur une surface sombre d’humidité. Le long du cours d’eau, les branches blanchies des arbres morts semblaient hérissées de croûtes ou de bosses noires. Encore des insectes de toutes sortes. Avaient-ils bu leur content et s’étaient-ils réfugiés dans les arbres pour échapper aux scorpions ? "
A la mort de Daïma, Mara proche de sa fin elle aussi, sera sauvée par Dann revenu la chercher. Un Dann sauvage, transformé, dur, intransigeant et capable de se défendre. Munis des pièces d’or léguées par Daïma, ils prennent la route du nord. Conscients que ces pièces leur sauveront la vie, Mara les cache dans une ceinture étroitement enroulée autour de sa poitrine, Dann dans sa peau même qu’il ouvre en longues scarifications. L’arrivée à Chélops se fait en «aéroptère », sorte d’avion du passé que Félice, la jeune femme pilote, entretient inlassablement. Chélops apparaît enfin, dangereuse et ancienne :
" En bas, s’étalait la ville entière, dont le plan leur apparut. Première chose qui sautait aux yeux, les artères couraient toutes du nord, du sud, de l’est et de l’ouest vers le centre, qui paraissait monumental. Des édifices noirs, très élevés, qui écrasaient le reste, à des milles à la ronde. Les artères ne ressemblaient à rien de ce que Mara avait même pu imaginer. Elles étaient rectilignes, larges, construites dans une pierre sombre et lisse (…) Ces artères étaient vides de toute circulation. A leur point de jonction à la tour centrale, quatre secteurs, composés chacun d’immeubles plus petits mais quand même d’une certaine taille, tous exactement identiques : six par secteur, tous lugubres, menaçants, massifs, sombres, avec des fenêtres régulières, que le soleil faisait miroiter comme de couteaux. "
Mara est prise en charge par Juba, le chef d’une nouvelle communauté mahondie, une nouvelle « Maison », esclave des seigneurs dominants, les Hadrons, poussahs obèses et dont la seule préoccupation est de se droguer ou d’avoir des enfants des Mahondis puisque leur propre potentiel génétique est inexistant :
" le lieu d’où ils étaient originaires était évoqué avec un absolu mépris, qui masquait la crainte que ce qui était arrivé, ce qui arrivait " dans le Sud " ou " là-bas ", dans " les terres mortes ", " la mauvaise région ", " le pays de la poussière " ou " le pays sans eau " puisse arriver par ici aussi. Les fonctionnaires étaient les seuls à descendre à Majab dans le Sud, si nécessaire. Les Mahondis, en tant que race inférieure, avaient toujours été des serviteurs et des esclaves. Les Hadrons avaient bâti cette cité et bien d’autres de ce pays, le Hadron, qu’ils avaient peuplées et toujours administrées. "
Dann, qui connaît déjà la ville pour y avoir été entraîné, disparaît à nouveau. Mara trouve un mari en la personne de Méryx et essaie de comprendre le monde dans lequel elle survit :
" -Le peuple n’a donc pas voulu de ces choses qui durent éternellement ?
-Elles ont été inventées bien avant que le Peuple n’existe.
-Inventées ?
-Tu ne connais pas ce mot parce qu’on n’invente plus rien aujourd’hui. Jadis, il y a bien longtemps, il existait une civilisation –une certaine façon de vivre- qui a inventé toutes sortes de choses nouvelles. Elle possédait la science – c’est-à-dire des manières de penser qui cherchent à découvrir comment tout marche- et n’a cessé de fabriquer de nouvelles machines et des métaux…(…)
" -Les Mahondis ! Tu ne comprends pas. Ils ne sont rien, nous ne sommes rien. Autrefois, il y a eu des hommes… qui savaient tout. Ils connaissaient les étoiles. Ils savaient…. ils étaient capables de se parler à travers les airs, à des milles de distance. (…) Mais c’est vrai ! Et puis ils avaient des machines qui pouvaient transporter cent personnes à la fois… "
Chélops sera une étape avant la Ville des Rivières. Mara, après avoir quitté Méryx, sauvera Dann qui végétait dans les hautes tours centrales de Chélops avec des compagnons douteux. Ils paieront leur passage sur un bateau à fond plat propulsé par photopiles, technologie dont seule la vieille Han connaît encore le secret. En territoire Agre, Mara et Dann seront enlevés de force par le général Shabis l’un des quatre commandants Agre. Car la guerre contre les Henne, population curieuse qui semble agir sur le mode de la fourmilière, a besoin de tous les gens valides. Mara plaît à Shabis, et Dann, devenu soldat, gravira rapidement les échelons de la hiérarchie. Enlevée par une patrouille Henne, Mara restera longtemps prisonnière dans l’armée ennemie. Quand elle pourra se libérer, elle apprendra que Shabis lui-même a été chassé de l’armée, poursuivi par ses anciens compagnons.
Il ne lui reste donc qu’à continuer son voyage vers Bilma. En cours de route, Dann, qui a déserté, la rejoint. La nouvelle cité n’est pas non plus exempte de dangers. Dann y jouera Mara au jeu et la perdra. Devenue esclave dans la maison de Mère Dalida, elle exercera une véritable fascination sur ses compagnes d’infortune, Kira ou Leta l’Albaine, par ses connaissances.
C’est par l’entremise de Daulis, membre du Conseil de Bilma, qui fréquente assidûment le bordel, que Mara et Léta s’enfuieront en prenant la route du Centre, vers la capitale du nord. Comme à son habitude, Dann les avait retrouvés, repentant et inquiet. La route, dont certains tronçons épousaient l’ancienne voie principale de l’Ifrik, s’avèrera longue et pénible jusqu’au Centre où les deux orphelins sont attendus, dans une immense forteresse aux mains des derniers Mahondis. Un couple de vieillards, Félix et Félisse les prennent en charge. Leur ayant dévoilé leur ascendance royale, ils espèrent que les adolescents restaureront la Maison des Mahondis jadis florissante dans toute l’Ifrik. Comme les pharaons d’Egypte, ils comptent sur le frère et la sœur pour assurer une descendance de sang royal. Alors que Dann semble être séduit par cette proposition, Mara explore les Musées où pourrissent les grandes inventions des millénaires passés. Toute l’histoire de l’Ifrik s’y lit, mais les ruines s’entassant sur les ruines, elle sait maintenant que jamais plus, les Mahondis ne régneront :
" Il était maintenant midi. Dann avait envie de visiter le bâtiment baptisé " l’Aventure spatiale ", mais Mara objecta qu’elle avait besoin de continuité, qu’elle était déjà suffisamment désorientée. Lui répliqua qu’il se moquait de la continuité. De la tristesse et de la colère perçaient dans sa voix, mais Mara aussi était en colère, à cause de la vanité de tout cela, de l’absurdité générale. Là où vivaient ces anciens peuples, la glace était épaisse comme deux fois la hauteur de la montagne où Daulis avait dit qu’ils trouveraient l’auberge de l’Oiseau Blanc. Des fenêtres de leur chambre, ils voyaient se découper celle-ci dans le ciel glacé. Au sommet brillait une calotte blanche, de neige et de glace. "
Elle suggère donc à Dann de pousser encore plus au nord, au bord de la Moyenne Mer où les attendent Daulis et Léta. Le départ dans le froid fut pénible mais grande leur surprise de retrouver Kira et Shabis dans la propriété de Daulis. Isolés, au bout du monde, en face de la Moyenne-Mer, Mara et Dann arrêtent enfin leur quête, décidés à vivre en harmonie au sein de leur nouvelle Famille, en face du glacier de l’Europp :
" Au-delà, le terrain s’affaissait brusquement en un vaste précipice qui s’étendait à perte de vue d’ouest en est. Jadis la Moyenne-Mer l’avait rempli : une mer bleue, tiède, vivante, qui avait enfanté une civilisation après l’autre – dont les artefacts et les peintures encombraient de nombreuses salles du centre- et où des vaisseaux avaient entrepris de longs et périlleux voyages. Sauf que tout ce qu’ils voyaient à présent, c’étaient des pentes rocheuses. Mais s’ils regardaient de l’autre côté de l’abîme, de cette énorme cavité dans la terre, au loin se profilait une ligne blanche qui n’était pas des nuages, ils le savaient, mais le bord de l’océan de glace qui avait englouti l’Europp. "
« Mara et Dann » se présente comme un livre exceptionnel autant par le décor cataclysmique dont, par touches successives, l’auteur trace un tableau entier, que par la psychologie fouillée des deux personnages principaux. Roman d’aventure, roman picaresque, roman de formation ou d’initiation, conte moral, tous ces qualificatifs conviennent pour caractériser une œuvre magistrale, exemple de ce que peut devenir la roman cataclysmique lorsqu’il se libère du carcan du genre.
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Maree Jaune - Par BenF
L’Inspecteur Yves Domino, qui s’exprime par monosyllabes, se révèle d’une grande efficacité. Personnalité importante de la police, sa sagacité est soumise à rude épreuve en cette Eurafrique future.
Le monde, divisé en trois blocs, Eurafrique, Panamérique et empire d’Asie, vit en paix jusqu’à ce jour, malgré les menées impérialistes asiatiques, surtout dans la capitale Tchéliabinsk. La science, le modernisme en tous les domaines, rend la vie aisée : il est facile de sillonner l’Europe avec les «gyros» (cela ne prend que quelques heures), de manger des repas sous forme de comprimés, d’extraire la vérité » du cerveau des condamnés par le «cazzamog », une sorte d’appareil à lire les pensées.Tout irait bien si l’on n’avait volé les plans de la «cellule» permettant la mise en action de la machine à ondes S.E.C., un bouclier électronique impénétrable, arme secrète de l’Eurafrique, contre toute tentative d’invasion du côté de l’Est.
Domino enquête, remontant la filière, débusquant les espions à la solde des Jaunes mais sans jamais arriver à saisir l’identité du «Quartier Central», le chef suprême qui tire les ficelles. Sommé par les triumvirs eurafricains de réussir au plus vite, Domino met la pression, allant jusqu’à enquêter à Tchéliabinsk alors que les suspects, tous et invariablement, soit disparaissent, soit sont éliminés avant qu’il ne puisse les interroger.
Le 14 mai, les hordes jaunes se lancent à l’assaut de l’empire occidental. Tout semble perdu. Pourtant, Domino débusque le traître fondamental en lui tendant un piège. Avec stupeur, il constate qu’il s’agit de son propre supérieur, Léonardi, chef de la sécurité de l’Eurafrique. Déjà les Asiatiques ont établi une tête de pont en Occident. Mais leur avance sera brutalement stoppée par la mise en route des rayons S.E.C. mettant le vaste territoire à l’abri de la menace ; grâce à l’inspecteur qui possédait par devers lui, un deuxième exemplaire de la cellule de commande, l’Empire put être sauvé. Léonardi, en fuite et non reconnu par les Jaunes, sera éparpillé aux quatre vents.
Didelot plutôt écrivain de roman policier, place son intrigue sur le terrain conjectural et sur fond de péril jaune, avec une écriture nerveuse et enlevée.
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Maree Descendante - Par BenF
Fershid Ben Ezir le palestinien est aussi le pilote présent dans Clim-Sat 2, le premier et le dernier satellite météo habité, dont le but est d’observer l’évolution du climat terrestre en cette année 2023. Avec ses compagnons, il assiste à la naissance de redoutables cyclones qui balaieront les côtes, puis l’intérieur des continents, provoquant une catastrophe mondiale, qui les laissera désemparés. Leur base, Kuru-2 ne répondant plus à leurs appels, ils décident de se mettre en phase végétative pour cent ans, histoire de laisser passer le temps et de retrouver un appui terrestre.
A son réveil, Fershid constate deux faits désagréables : 1. ses compagnons sont tous morts, victimes d’un défaut d’ordinateur et 2. le temps écoulé a été bien plus long que prévu puisque l’horloge de bord indique l’année 2345. Désespéré, après avoir mis en action la cellule de survie, il replongera sur une terre profondément transformée par la montée des océans. Il amerrira dans ce qui est devenu le Bassin de Picardie. Se servant de sa cellule comme d’une barcasse, il se dirige vers le site de Paris qui dort dans l’eau tiède d’un climat tropical. Là, près de la colline de Montmartre émergée, l’attendent les palétuviers et une quantité de bêtes sauvages qui ont reconquis leur ancien territoire :
« …Au-dessus d’un empilage de toits partagés par des canaux boueux, la butte Montmartre s’élève, couronnée par l’architecture bulbeuse du Sacré-Cœur qu’un rai de lumière huileuse, échappée du plafond bas, nimbe d’ocre et de rose. Plus loin, la tour Eiffel se dresse écornée de son dernier étage, qui pend contre la charpente métallique rouillée. Une tempête plus dévastatrice que les autres ? Un avion fou ? Qu’importe. La tour Montparnasse ressemble à un chicot ébréché mais, là-bas, dans l’atmosphère tremblotante de ce crépuscule où couve un orage en suspens, les gratte-ciel de la Défense semblent intacts. »
Authentique Robinson en cette immensité déserte, il ressent un soulagement intense d’entendre soudain le moteur asthmatique d’une grande barge sur laquelle évoluent des humains à l’allure inquiétante et aux costumes chamarrés. Pour son malheur ce sont des pirates, pour lesquels tout naufragé est un esclave en puissance. Pris à bord, il est immédiatement mis à la tâche, rendue d’autant plus nécessaire que toute technologie semble avoir disparue.. Grâce à Driss, une esclave noire à laquelle l’unissent bientôt de tendres sentiments, il put être sauvé par des intervenants extérieurs au visage plus avenant et sans aucun doute plus évolués. Les pirates anéantis, le commandant l’achemine vers la Nouvelle Scandinavie à bord de son « Dauphin Blanc», où siège le gouvernement de la fédération maritime de l’Europe du Nord. :
« La Nouvelle-Scandinavie, vue du large, se présente à Driss et à Fershid comme un maillage de petites constructions en dôme, couleur pastel, qui escaladent une colline verte. Le port lui-même est solidement pris en tenailles par une succession de hautes digues en quinconce –une solution simple et originale pour briser les vagues en cas de tempête. A l’intérieur du bassin ovale, des centaines de catamarans de toutes taille se balancent. Les deux rescapés sont admis le jour même auprès du régulateur, qui possède son logement personnel dans les bâtiments du Sénat, une sorte d’amphithéâtre couvert, à l’enceinte irrégulièrement ondulée. Tout est circulaire ici, note le pilote. Une manière efficace de lutter contre le vent. »
Ils seront accueillis par le sénateur Marchetti qui met les naufragés à l’aise. Il connaît Fershid. Il sait qu’il est pilote. Il a suivi sa descente sur terre car il reste encore trois satellites opérationnels. Quoique le monde ait été totalement transformé par une montée des eaux due à l’effet de serre, quoique l’on ait enregistré une perte de plus de cinq milliards d’êtres humains, l’espèce humaine n’a pas totalement été balayée. Les survivants se sont adaptés à cette nouvelle terre nettoyée de sa pollution, et se sont tournés vers la mer, se jurant de ne plus commettre les erreurs de leurs ancêtres. Fershid et Driss ont naturellement une place toute désignée dans ce monde nouveau.
Une fable et un hommage à Marion Zimmer Bradley qui, avec sa nouvelle « Marée montante » a joué le rôle de pionnière dans le domaine de la science-fiction écologique. Comme d’habitude chez Andrevon, le souci du détail et du mot juste, les personnages solidement campés, rendent cette lecture agréable aux adolescents à qui elle est destinée
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Singulier destin que celui du narrateur, inconnu, sans diplômes, sans argent, habitant de Castelnaudary, amené à devenir le nouvel Adam d’une humanité sinistrée. Son aventure, il la relate sur un manuscrit en peau d’agneau avec son propre sang. Elevé comme tout élément de la classe moyenne, avec les valeurs de la petite bourgeoisie, né d’un père propriétaire d’une mine de plomb à l’abandon, il grandit dans la société hypothétique de l’an 1982.
Après sa rencontre avec Lilith qui lui fait découvrir les frissons de l’extase et la manière de se pousser dans le monde, il s’inquiète, comme tout un chacun, de la situation politique internationale. Prévoyant, puisque cette dernière se dégrade, il s’isolera avec Lilith dans ces fameuses mines de plomb pour un séjour de longue durée, attendant que le ciel rouge sombre (au sens littéral du terme) redevienne bleu clair.
Lorsqu’il sort à l’air libre, Lilith, à la vue des décombres épars devant eux, subira un choc tel qu’elle en mourra. Le voici donc, sans aucun doute pour lui, le dernier homme sur terre. En face de lui, des ruines et quelques squelettes grimaçants :
« Je trouvais des bourgs et des villes, déserts, silencieux. J’y prenais des provisions –le riz conservé dans une cave n’est pas contaminé - et j’y changeai de camionnette. Je fis environ un millier de kilomètres. J’étais seul. Je me fixai dans un ancien entrepôt de comestibles, pas très loin de Montpellier, parce qu’il était bien approvisionné et situé pourtant presque en plein campagne. J’avais depuis longtemps pris avec moi une vieille radio à piles, mais elle ne livrait que des bruits d’ondes parasites, aucune émission humaine. »
Exit Homo Sapiens. Le dernier représentant de l’espèce humaine sera pourtant recueilli par un hélicoptère et mis en quarantaine en un lieu scientifique où se retrouve aussi une poignée de savants, de techniciens et de militaires (il y en a qui survivent même à la guerre totale), tous irradiés, hélas ! Tous, sauf notre héros. Une analyse rigoureuse de son corps prouvera qu’il est le seul encore apte à la reproduction. Mais à quoi bon relancer l’espèce humaine dans un monde en morceaux ?
Une invention nouvelle et fabuleuse faite peu de temps avant la catastrophe, une sorte de machine à voyager dans le temps, servira de vecteur. Les scientifiques pensent l’envoyer dans un passé lointain et imprécis en compagnie d’une femme, qu’il ne connaît pas encore et qui, tout comme lui, est isolée et préparée dans ce but. Le problème c’est que seuls les éléments organiques peuvent franchir la barrière temporelle. Ni armes, ni artefacts technologiques. Ainsi, nus tous deux, ils seraient livrés au futur sans mémoire et sans protection.
C’est pour éviter cela qu’il trace son récit avec son sang sur une peau d’agneau, un témoignage de la grandeur de l’homme, que ses descendants découvriront en leur temps, un « manuscrit enterré dans le jardin d’Eden » :
« Dans quatre minutes, je devrai tenir à la main ces feuillets, et, brusquement, je serai nu sur un sol primitif . De notre civilisation et de sa ruine tout sera encore lointainement à venir. De la guerre qui a tué la vie planétaire tout sera encore impensable. Du refuge de plomb où j’écris, il ne restera rien, pas plus que du dôme voisin où l’on a également formé la femme que l’on me destine. Je pense que, à cinquante mètres l’un de l’autre, nous ne manquerons pas de nous retrouver. Autour de nous, il n’y aura que des fougères géantes. »
Une nouvelle intéressante écrite dans un style simple et fluide avec un humour en demi-teinte. Albérès, qui s’est toujours intéressé à la SF, y touche parfois, sans s’y s’impliquer de trop, cependant.
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Mada Ou Le Dernier Homme - Par BenF
Après des siècles de progrès, les peuples ont instauré l’état d’utopie :
« Tous les trônes avaient successivement croulé et la fraternité avait gagné les nations ; plus de barrières entre elles. » La liberté règne en politique, dans les religions (où le pape s’est fait discret) et en sciences où les secrets seront arrachés progressivement à la nature :
« Se centuplant par elle, les forces de la nature soulageaient les bras dans leur labeur, et n’ayant plus de secrets, celle-ci lui abandonnait ses trésors. (…) Les éléments définitivement domptés, on voyagea dans les airs. On traversa les espaces avec une rapidité inouïe. On décomposa les métaux les plus durs. On fit de l’or. On put faire le diamant.»
Mais un état stable est de peu de durée et les sociétés finissent par se ruer les unes contre les autres: « l’Extrême Asie fut ravagée, inondée de flots d’hommes et de chevaux », l’Amérique croît puis décroît cédant sa place à l’Afrique qui occupera dorénavant une place prééminente dans le monde. Le raffinement du luxe ruine les mœurs et les croyances, faisant surgir les signes d’une anarchie morale. La religion se fragmente en sectes bizarres ; enfin des fléaux inconnus se propagent et frappent la nature entière :
« Partout où il (= le fléau) passait, les arbres jaunissaient, se dépouillaient, séchaient. En une heure, les champs voyaient leur verdure se flétrir. Il pénétrait jusqu’aux racines des plantes. L’effroi fut universel. Il parcourut les deux hémisphères semant la désolation et la mort. » L’apparition d’un prophète nouveau qui se dit l’incarnation de Jésus-Christ répand la croyance en la religion du libre-arbitre. Un seul peuple reste admirable dans sa défense de la foi et dans sa pugnacité envers les barbares ; c’est la France : « ses œuvres avaient inondé le monde. On obéissait à ses élans, à ses transports, à ses lois. Sa langue, partout adoptée, façonnée par le génie et les mœurs du peuple, était presque la seule en usag ,» qui hélas ! cède à son tour :
« Le plus épouvantable des fléaux a fondu sur elle, terni son immortelle auréole, détruit son armée, ravagé son sol, et, en quelques instants, l’a fait descendre au bord de l’abîme, où tout s’engloutit. »
les signes sinistres se multiplient : le soleil pâlit, les saisons inversent leurs cours, l’atmosphère se refroidit, la végétation languit, la disette et les famines se répandent, le monde se dépeuple : « Tout s’y étiolait. Les fleurs, les feuilles restaient chétives, languissantes. Les blés germaient sans mûrir. La vigne ouvrait à peine ses bourgeons. C’était l’existence ne se révélant plus que pour avorter. »
C’est le début de la fin du monde. L’augmentation du nombre des taches solaires fait craindre le pire : « Le soleil se montra presque dépouillé de ses rayons, défait, éclairant tout d’une lumière sinistre. D’énormes taches couvraient sa face livide ( …) On pouvait les fixer et mesurer ses stigmates sans être ébloui. »
En ces temps néfastes, où la majorité de l’humanité est déjà morte « quelques années suffirent pour réduire l’ espèce humaine à quelques familles dont l’une devait survivre aux autres et périr la dernière » sur les bords de « l’antique Helvétie et de la France » , dont celle de Mada.
Le chef de celle-la, puissante et reconnue, fit beaucoup pour soulager les maux de ses contemporains. Pourtant il ne put s’opposer à l’inéluctable. Alors que les survivants s’entretuaient, Mada, tout en essayant de les raisonner, ne parvint pas à éviter la destruction et le pillage de la petite ville, ce qui précipita la chute des sociétés. Mada prend la fuite avec ses deux enfants, Ivan un garçon de dix-sept ans et Ela, sa fille, âgée de quatorze ans. Leur mère étant morte, ils recherchent un nouvel asile sûr auprès d’Elisée, un ancien ami, habitant sur les hauteurs du lac.
Les signes de la dégradation s’accentuent : la lune éclaire moins, les brumes s’infiltrent en tous lieux, ainsi que la glace. Mada y voit les prémisses de l’apocalypse réalisée. C’est pourquoi il se réfugie dans sa foi en Dieu. D’ailleurs Elisée, vers lequel se dirigent leurs pas, est, lui aussi, un authentique croyant et, comme Mada, un consolateur de l’humanité. Arrivé à proximité de son manoir qui semble dégradé, Mada se demande si son ami est encore de ce monde. Il surgit juste à temps pour écouter les dernières paroles d’un vieillard vénérable sur son lit de mort, qui lui souffle les principes de sa mission : « Les temps sont proches (…) Mada, digne fils du plus sage des hommes, tu es peut-être destiné à clore l’immense chaîne où tout ce que le cœur pouvait produire a été produit. »
La famille l’enterre près de l’Oratoire qui deviendra un lieu hautement fréquenté par eux, et ils s’installeront à demeure, puisqu’en visitant les souterrains du manoir, ils y ont découvert tout ce qui était nécessaire à leur survie. Deux autres tombes, situées près de l’Oratoire aiguisent leur curiosité : quelles personnes sont inhumées-là ?
Puis, partis en reconnaissance au deuxième étage de la propriété, ils y découvrent une bibliothèque richement fournie avec en son centre, posé sur un lutrin, la bible ouverte, autour de laquelle ils se réuniront souvent pour confronter la parole sacrée aux philosophies du passé. Mada (anagramme de « Adam ») dispense donc un enseignement religieux continuel à ses deux enfants. La diminution du feu solaire qui fait craindre le pire, leur impose une série de réflexions sur l’essence mystérieuse de la lumière, comparée à celle de l’âme. Ainsi passent les jours.
Ivan a maintenant dix- neuf ans et Ela seize. C’est une jeune fille dans tout son éclat et les sentiments qui unissent les deux jeunes gens sont d’une grande intensité :« Ils s’aimaient comme frères, n’ayant pour ainsi dire connu qu’eux-mêmes, et enfin, faut-il le dire, sans le savoir, sans s’en douter, ils s’aimaient peut-être à un autre titre… »
Ils s’écarteront peu du manoir à cause de la dangerosité de la nature mais pousseront quand même leur audace à visiter une chapelle écartée, en dépit de la brume, qui deviendra leur lieu secret. Ivan remarque, lors d’une de leur sorties, un brin de myosotis près d’un petit filet d’eau, et l’offre à Ela qui le dispose dans son livre de prières, comme il sied à une « Fleur des Saints ». Mada est inquiet car il associe la dégradation de la nature au surgissement du mal dans le monde : « Le monde finit lentement (…) Il n’y a d’éternel que l’Eternel. Les Ecritures disent (…) que la fin sera précédée de calamités. Nous sommes arrivés à ces épouvantements. »
Ses réflexions sur Dieu, sur la distinction entre monothéisme et polythéisme, sur le mal engendré par les anciennes guerres de religion, seront interrompues par la découverte, dans un tiroir, d’un rouleau de papier relatant l’histoire d’Elisée et d’Elisa. Deux familles qui habitent côte à côte, y lit-il. Elisa, la brillante jeune voisine est d’évidence destinée à Elisée. A la mort du père d’Elisa, c’est tout naturellement qu’Elisée la demande en mariage. Contre toute attente, Elisa s’y refuse : seul l’habite un sentiment fraternel.
Lors d’un voyage à l’étranger, Elisa, au grand désespoir d’Elisée, se marie à un jeune homme. Pour vaincre sa douleur, Elisée décide d’habiter en ville mais les dégradations de la nature, l’arrivée de la fin des temps, le convainc à se mettre au service des autres. Mada, suite à cette lecture, souhaite visiter avec ses enfants, cette ville (Lausanne ?, Genève ?) où son ami a vécu : « Ils s’arrêtèrent pour en contempler l’aspect désolé. Elle ressemblait à un sépulcre abandonné. Chaque jour s’en détachait une pierre sous l’action du temps dont rien ne pouvait plus conjurer la puissance. »
Les rues désertes leur font porter leurs pas vers une demeure princière dans laquelle un portait d’Elisa leur signale que c’est là que cette dernière a vécue avant d’être enterré avec son mari près de l’oratoire par les bons soins d’Elisée. Après avoir vu l’hôpital puis le cimetière, décidant d’arrêter leur pérégrination urbaine et de retourner dans leur manoir, ils sont pris dans un gigantesque tremblement de terre :
« Des flots de poussière brûlante tombaient autour d’eux. Ce fut une tourmente inouïe menaçant de les ensevelir vivants.(…) Les monts, les monts gigantesques, ces monts couronnés de glaciers, arrachés de leur fondement, avaient roulé dans les vallées. A la place du lac s’étendait maintenant une plaine presqu’uniforme. »
Le matin, la brume ayant disparu, ils observent stupéfaits le désordre géologique d’un paysage bouleversé. Ela, frappée de congestion, est mourante au grand désespoir d’Ivan qui n’aura bientôt plus pour se consoler que la petite « Fleur des saints » du livre de prières. Après l’inhumation de sa soeur, le jeune homme restera inconsolable malgré toute la patience de Mada qui tente de lui faire comprendre les voies du ciel. Il dépérit à son tour. Lorsque la chapelle, à laquelle il était très attaché, est dévastée, il meurt: « On eût dit que le feu du ciel l’avait ravagée. Un amas de terre bitumineuse s’élevait devant la porte comme un flot de lave refroidie. Elle était remplie de décombres. »
Mada reste le dernier homme sur une terre vide et cette pensée le terrifie : « La pensée qu ‘il n’y avait pas d’autre être vivant sous les cieux égarait sa raison. Il n’osait se sentir vivre, se remuer, se palper sans tomber dans une sorte de terreur superstitieuse.»D’autant plus que les conditions climatiques empirent :
« Un soir qu’il sortait du pavillon, il fut surpris du changement subit de l’atmosphère. De glacée, elle était devenue tiède. Depuis un instant, le soleil n’éclairait plus la terre. Les ombres régnaient partout. »
Enfin, Mada se sait perdu lorsque le manoir, son unique refuge, devient la proie des flammes:
« Un mugissement sourd se fait entendre et aussitôt une épouvantable explosion a lieu. Le sol tremble, le ciel se remplit d’une vapeur rougeâtre, et, en tombant, une pluie de feu embrase le vieil édifice. Renversé par une violente secousse de l’air, Mada eut à peine le temps de se relever et de rentrer au pavillon. Le météore disparu, il ne restait plus de la maison d’Elisée que des ruines fumantes. »
Avec la fièvre, s’impose à lui une dernière vision du jugement: « L’astre dominateur était devenu un corps opaque. Sur presque tout son extérieur régnaient les ténèbres. Seulement à ses extrémités, de rares points brillaient d’un reste de flamme vomie de ses dernières profondeurs. »
En mourant, il se demande si sa disparition signe vraiment la défaite absolue de l’espèce humaine ou si Dieu, dans sa sagesse, n’a pas prévu un remplaçant à l’homme disparu :
« Peut-être l’intelligence humaine y sera-t-elle servie par de plus purs, de plus sûrs organes. Les aptitudes y seront plus variées, les instincts plus larges, l’âme plus aspirante ! Pour dompter cette nature extraordinaire, pour être maître de cet espace, il faudra aux hommes qui l’habiteront des moyens inconnus aux autres sphères !. »
« Mada ou le dernier homme » fut, de l’aveu même de l’auteur, écrit dans une période troublée. Prenant parti ouvertement contre les Communards (« la France troublée par de vains essais de communisme ») et en faveur de la religion, d’Aiguy relate son pessimisme politique par une narration à thématique cataclysmique.
Le décalage curieux d’un texte post-romantique et réactionnaire en pleine période réaliste, voire naturaliste, explique en partie le désintérêt de la postérité pour un récit aujourd’hui quasi-introuvable. Pourtant ni le style, ni les réflexions, ni la peinture des mœurs ou du décor n’y sont ridicules, même s’ils mettent à mal la patience du lecteur moderne habitué à des brouets plus épicés.
La trajectoire spirituelle de Mada se renforce parallèlement à la nature qui meurt. L’apologétique chrétienne, les réflexions et dissertations sur la prééminence de la religion consolatrice ne font pas oublier les descriptions nourries par la rigueur d’une pensée scientifique, même si le cadre général de l’œuvre s’inscrit dans la schéma canonique de l’Apocalypse de St Jean : le soleil se refroidit, les taches solaires en sont à la fois la cause et la preuve, les bouleversements géologiques et climatiques s’en déduisant rationnellement. La thématique elle-même de « Mada » est déjà fortement référencée : poésie des ruines et pensées touchantes.
« Le Dernier homme » de Cousin de Grainville et surtout «Omégar » d’Elise Gagne ne sont pas loin. Enfin, le décor suisse semble être emprunté au « Dernier Homme » de Mary Shelley, région propice par ailleurs à la rêverie romantique de l’homme bon, non corrompu par la société selon les prêches de Rousseau. Le récit s’achève sur une suite poétique intitulée « Visions » dont l’auteur reste anonyme. S’agit-il de « Caro », l’ami à qui d’Aiguy dédicace l’ouvrage?. Cette suite, en trois parties, épouse les inflexions du roman dont elle reprend le tracé, en le dépouillant de tout le superflu, pour ne garder en l’amplifiant, que la vision cataclysmique des phénomènes de la nature, expressivement renforcée. « Mada ou le dernier homme » est encore l’un de ces romans du 19 ème siècle, traitant du thème de la finitude, jalon important - et méconnu - du genre cataclysmique.
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Metal De Mort - Par BenF
Scott Andrews et sa femme Nancy, en exploration sur Mercure en son terminateur, ramassent des diamants gros comme des œufs de pigeon et, pour faire bonne mesure, y adjoignent un morceau de mâchefer mercurien pour analyse.
De retour sur terre, ils se rafraîchissent chez eux avant d’aller faire leur rapport d’activité aux autorités. (Heureuse époque !)
Le financier véreux, Calvin Munro, qui a eu vent des richesses rapportées, charge Webster, son homme de confiance, de les dérober. Deux aigrefins s‘emparent donc du coffre aux diamants et, par la même occasion, du mâchefer lequel révèle une propriété désagréable : il transforme tout élément humide en or pur comme dans le mythe de Midas !
Les statues en or de ce qui était des voleurs soulèvent une insatiable curiosité. Mais le plus grave reste à venir. Le morceau de mâchefer mercurien perdu durant la fuite, aboutit dans les égouts londoniens et transforme ipso facto toute l’eau en or, bouchant les déversoirs et provoquant une épidémie sévère au sein de la capitale anglaise :
« L’épidémie commença par une femme du quartier et s’étendit ensuite avec une telle rapidité que le service médical local put à peine y faire face. La maladie était comme une sorte de diphtérie, mais beaucoup plus virulente.»
Andrews, appelé d’urgence, ne peut que constater la transformation progressive des bâtiments de Londres en or :
« La catastrophe s’étendait avec une rapidité effroyable. Plus l’or se répandait dans le réseau d’égouts, plus les autres régions étaient exposées à l’attaque de la maladie. La mort suivait de près l’or massif. L’or était répandu dans les rues, à portée de tout le monde, et personne n’y touchait. De minces épées du précieux métal jaillissaient à travers les grillages des canalisations et des couvercles de puits de regard. Les immeubles revêtaient un éclat d’un jaune étincelant qui s’accentuait et brillait encore plus quand la pluie apportait de l’eau à cette invraisemblable création. »
Que se passera-t-il lorsque l’action du catalyseur extraterrestre se fera sentir jusqu’à la Manche ? Tout est donc mis en œuvre pour retrouver la pierre mercurienne… Partout dans le monde la cotation de l’or s’effondre :
« Les premières répercussions se firent sentir à la Bourse où les actions des mines d’or firent le plongeon à une vitesse qui mit le chaos dans les milieux financiers. Tout le crédit mondial était basé sur l’or, et l’apparition soudaine de ce métal en quantités que l’on pouvait ramasser à la pelle, détruisait sa valeur et ruinait son rôle d’étalon-monnaie ».
Cependant, Munro n’a pas désarmé. Il envisage de s’approprier les marchés vénusien et martien jusqu’ici épargnés. Il fait enlever le jeune couple afin qu’il le guide, lui et Webster, jusqu’à la source de richesse. Hélas ! rien ne se passe comme prévu : Webster et Munro mourront, Andrews et Nancy retourneront sur la terre ; mais comment éviter d’autres catastrophes ? Heureusement, le hasard leur révéla que l’eau des océans de Vénus, grâce à son acidité, avait la capacité de dissoudre l’or mercurien.
Néanmoins, la seule solution envisageable pour éviter que des tentations ne se fassent jour était, en toute simplicité, de réduire la planète Mercure en poussière, laquelle tombera sur le soleil. Grâce aux rayons désintégrateurs et avec toute la douceur requise pour ne pas perturber le délicat équilibre du système solaire, l’on procéda à l’opération avec un plein et total succès, délivrant la Terre de l’horrible sort d’être transformée en une planète en or pur.
Roman populaire des années cinquante, « Métal de mort » appartient à la veine cataclysmique anglaise de « la disette d’éléments »(quoique ici, il y en aurait plutôt pléthore). Récit pour adolescents mené avec fougue, le roman proclame haut et fort son appartenance au genre du «space-opéra »
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Le monde a cédé à la pollution due à l’emploi abusif du charbon. Toutes les basses terres d’Australie sont noyées dans un smog impénétrable. Il reste quelques survivants, les "Perms" qui vivent dans le Smog et qui sont dangereux, ainsi que quelques groupes humains basés dans des villages de hautes montagnes, au-dessus du smog. Farouchement fermés sur eux-mêmes, ces petits clans évitent – et au besoin tuent - tout ce qui est étranger. Ils subsistent sur les ruines d’une civilisation technologique brillante dont ils utilisent les miettes comme, par exemple, des voitures qui fonctionnent à la vapeur. Paradoxalement, l’énergie ne leur manque pas puisqu’ils ont réussi à remettre en activité l’une ou l’autre station hydroélectrique :
" Qu’est-ce qui avait mal tourné à ce moment-là pour l’espèce humaine ? Difficile à dire, car il ne restait que peu de données. Mais la cause première de l’effondrement n’avait-elle pas été cette tendance des minorités à s’attaquer aux structures sociales existantes, sans avoir, pour les remplacer, le moindre système viable ? Détruire était devenu trop facile. Il y avait eu d’abord ce sabotage hystérique de deux centrales nucléaires. Suivi de l’incendie des mines de charbon pour tenter d’inverser la tendance ! La plus grande partie du Smog marron qui recouvrait toujours le Dehors, à l’ouest et au sud, provenait de cet incendie des mines à ciel ouvert de Yallourn et de Morwell, feux immenses qui avaient fait rage bien avant la naissance de Roy "
Roy, un jeune homme, est peu à l’aise dans son milieu . Il recherche un contact avec l’extérieur. Chaque nuit il contemple dans le ciel un satellite artificiel qui doit, selon lui, abriter des hommes évolués, lancés à la conquête de l’espace quelques siècles plus tôt. Défense est faite à quiconque d’entrer en contact avec le satellite car il est présumé dangereux.
Avec l’aide d’Ev, la bibliothécaire, et Jill, sa petite amie, Roy transgresse l’interdit. Il communique avec le satellite par signaux lumineux. Vaya, une troublante jeune femme extraterrestre – quoique âgée de plus de cent vingt ans – répond à ses appels et lui propose un échange : les secrets de sa très grande longévité contre des artefacts d’ancêtres terrestres. Roy, ayant précédemment découvert une sorte de musée, s’y rend en compagnie de ses nouveaux amis. Repéré par les siens, immédiatement stigmatisé comme traître, il est recherché par Max Lang et Snowy pour être mis à mort.
Les extraterrestres, des colons terriens peuplant maintenant Merodak, une planète lointaine de type terrestre, se dévoilent alors à tous et offrent de nombreux cadeaux aux terriens survivants. Roy, réhabilité, se prépare à partir avec Jill, pour un voyage sans retour sur la planète Mérodak. Tout de suite après le départ, ils ont vent de la véritable nature de leurs nouveaux amis : Vaya ainsi que les autres, sont des robots actionnés à distance par d’anciens Terriens que des siècles de manipulation génétiques ont transformé en monstres bienveillants à quatre bras. La longévité est à ce prix…
Un space-opera plat qui se déroule sur fond de décor cataclysmique Rien ne ressort à la lecture sinon une seule question: quelle forme ont-ils vraiment, ces extraterrestres?… C’est beaucoup de mots pour pas grand-chose...
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Le savant et l’artiste. Le logicien et l’esthète. Grenfell et Jack Roway. Le savant est possédé par une vision et un objectif : rendre la guerre impossible. Pour cela il faudra infliger une telle terreur à l’humanité que jamais plus elle ne prendrait les armes. Il conçoit « l’Abîme », un mémorial tellement angoissant, et qui devra durer si longtemps, que l’être humain, en le voyant, oubliera son agressivité.
Le physicien atomiste est capable de construire l’Abîme qui mettra en œuvre les conditions d’une explosion nucléaire des milliers de fois plus puissantes que celle d’Hiroshima, mais contrôlées et limitées en surface. La fusion qui en résulterait, en transformant toute la matière disponible en énergie, créera une zone interdite où subsistera un lac en fusion, de la chaleur et de la lumière.
S’attelant à cette tâche, Grenfell sait qu’il sera maudit et activement recherché par les autorités. Il se fait donc discret dans son laboratoire personnel. Le seul qui l’approchera est Jack à qui il garde sa confiance. Lorsque le poète le retrouve, Grenfell achevait son œuvre.
Cependant Jack a peur. Très peur. Des Soviétiques notamment. Seule l’invention du physicien mise entre les mains des militaires pourrait sauver la situation. Alors il trahit Grenfell, signalant sa retraite aux autorités. En s’emparant des éléments constitutifs de l’Abîme, les policiers activèrent la masse critique et déclenchèrent l’apocalypse. La conflagration nucléaire fut telle qu’on l’attribua aux Soviétiques. Suivit une guerre nucléaire, puis une autre, qui balaya l’humanité de la scène de l’histoire. Jamais plus les hommes ne se feraient la guerre :
« Quelques humains avaient survécu. Les rats en mangèrent la majorité – car les rats avaient accru leur population dans des proportions fantastiques. Et puis, il y eut des épidémies. Ensuite, il resta des êtres nus, se tenant à peine droits, dont l’hérédité déformée remontait sans doute jusqu’à l’homme. Mais ceux-là savaient, individuellement et collectivement, ce qu’était la peur, et il n’y eut pas d’évolution. Ce n’étaient certainement pas des hommes. »
Seul l’Abîme, le Mémorial voulu par Grenfell continuerait à déverser son horrible lumière sur une terre dévastée.
Une nouvelle en forme d’avertissement, toujours d’une «brûlante » actualité.
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Megalopolis - Par BenF
1.Prélude à Mégalopolis
2. Discours du président Directeur Général de l’Europe
3.Arche de Noé
4. Sérénade
5. Radio taxi
6.la Cuisine, le Ménage et l’Amour
7. les tapis roulants
8. Chez nous
9. le P.A.P.E.
10. confession d’un cadre supérieur
11. Mégapocalypse
12. le printemps d’après la fin du monde
«Mégalopolis» est une œuvre musicale ambitieuse s’articulant sur une chorégraphie soignée, qui décrit le passage d’un monde dystopique (le nôtre) à une société utopique à travers un cataclysme technologique lequel, comme dans « Ravage » de Barjavel, provoque la chute de la cité. Le fil conducteur y est assuré par un jeune et sympathique couple et leurs enfants vivants au sein de l’enfer technologique. Ils parviendront à survivre au cataclysme pour se fondre dans le noyau de la société future.
La société dystopique est analysée au plan politique et idéologique, débutant par la conférence du Président Directeur Général des Etats-Unis d’Europe, Maxime Vanderlove , qui promet, à qui veut le croire la « liberté d’entreprendre et l’édification de communications plus étroites » :
« Cette bataille de la circulation sera notre victoire. Le Rhin, le Danube, le Tibre, la Seine et la Tamise, ces merveilleuses voies de circulation naturelles seront recouvertes de béton pour nous permettre d’aller plus vite et plus loin. Nous avons les autoroutes, nous aurons les auto-fleuves ! »
Coupé par des flashs publicitaires, le discours trouvera un écho auprès des militaires engagés dans une guerre impérialiste sous le prétexte de défendre les valeurs occidentales (rappel transparent de l’engagement américain au VietNam), et à qui l’on promet l’impunité pour leurs crimes :
« Soldats !
Avant de quitter le pays
Rasez-moi les fermes et les villages !
Pour cette dernière sortie
Droit de vol, de viol et de pillage !
Groupés autour du drapeau
Vite de l’héroïne aux héros
We’re ready, let’s go ! »
La situation des citoyens connectés, conditionnés, répertoriés, particules de l’immense réseau planétaire leur donne l’illusion d’une liberté consistant à consommer les gadgets d’une société post-industrielle par un travail répétitif et abrutissant :
« Au premier click du Métronome des Métropoles
Les portes claquent
Et les gens quittent leurs alvéoles
Et en avant
Les tapis roulants ! (…)
Remplis ton sac au bric à brac électronique
A des prix choc.
La viande en stock c’est plus pratique
Et en avant
Sur tapis roulants. »
Bien que le jeune couple vive replié sur leurs amis et fasse de la résistance passive, autour d’eux la ronde infernale se poursuit jusqu’à ce qu’un accident mineur, mais analysé dans le détail, déclenche l’apocalypse avec son cortège de malheurs :
« Tout a commencé
le mardi 6 décembre
Il neigeait ce soir-là
des flocons couleur cendre
Sur la ville oxydée
Que traquait le destin… »
Un avion géant en perdition a percuté un noeud électrique privant Mégalopolis d’énergie au sein de l’hiver :
« Carcasses et tripes de ferraille
percutent au cours de leur descente
Un bras de la Centrale quarante
En superélectropagaille
Et l’Europe thermonucléaire
Reçoit partout ce choc sauvage
Et à la vitesse de la lumière
La panne se propage… »
Les conséquences en sont terribles : arrêt des activités, arrêt des transports, désorganisation sociale, famine, manque de chauffage. Le froid et la neige s’abattent sur les hautes tours de béton qui illuminent la nuit :
« 10 millions de passagers
se trouvent prisonniers du métro
Rayons X poumons d’acier
S’arrêtent dans tous les hôpitaux (…)
Et le lendemain
Sous un ciel de Norvège
On a vu la cité
qui flambait sous la neige ! »
La mort, l’agressivité dans le malheur, la peur des épidémies enclenchent les réactions égoïstes. Chacun se calfeutre dans son malheur, la société régresse vers la barbarie :
« La ville est retombée
dans un étrange moyen âge
et les supermarchés
sont les vedettes du pillage
les forces de police
ont employé les grands moyens
la faim systématique
multiplie les assassins (…)
Les morts qui s’amoncellent
Dans les places et dans les rues
Appellent des gourmands
Dont on ne se souvenait plus
Les rats, oui, par milliers,
Les rats remontent à la lumière
Avec la rage aux crocs
Avec la peste en bandoulière… »
A pieds, avec leurs enfants, le couple traverse la ville vers la campagne glacée où se manifeste la guerre de tous contre tous:
« Et voilà les révolvers
qui se gavent de munitions
Je te creuse une boutonnière
Pour deux tranches de jambon
Et voilà les tours d’hier
Qui se dressent en châteaux forts
Les vivants se font la guerre
On ne compte plus les morts,
La guerre a commencé. »
De loin, Mégalopolis, comme un monstre asphyxié, a cessé de vivre. Seules les carcasses tordues des voitures témoignent encore de sa grandeur passée. Ni l’argent, ni les appels politiques, ni les lamentations oiseuses du pape ne parviennent à enrayer le processus de décomposition :
« Je suis malade
je suis malade
je sens les forces m’abandonner
Maître céleste
Il ne me reste
Même plus le temps de me racheter…
Sur les plaies sanglantes de la terre
J’ai souvent pleuré, mais
Par prudence, oui, Mon Père
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